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26/07/2017 | FRANCE | N°17-81260

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 juillet 2017, 17-81260


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Ziad X...,

contre l'arrêt n° 68 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 20 janvier 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de complicité et recel d'abus de biens sociaux, organisation frauduleuse d'insolvabilité, fraude fiscale et blanchiment, a prononcé sur une demande de restitution de fonds saisis ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 28 avril 2017, prescrivant l'

examen immédiat du pourvoi ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les obse...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Ziad X...,

contre l'arrêt n° 68 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 20 janvier 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de complicité et recel d'abus de biens sociaux, organisation frauduleuse d'insolvabilité, fraude fiscale et blanchiment, a prononcé sur une demande de restitution de fonds saisis ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 28 avril 2017, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 324-7 12° du code pénal, article préliminaire, 591,593, 706-148 du code de procédure pénale, article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en mainlevée de la saisie pénale et a requalifié le fondement de la saisie pénale du 10 mai 2012 en ce que la somme saisie était susceptible de constituer le produit direct ou indirect des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux pour lesquels la personne mise en examen avait été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris par l'arrêt distinct de ce jour ;

"aux motifs que M. X..., à la date de la saisie pénale, était en examen du chef de complicité d'abus de biens sociaux, de recel d'abus de biens sociaux et de blanchiment aggravé ; que sa mise en examen du chef de fraude fiscale et de blanchiment de fraude fiscale était intervenue postérieurement à l'ordonnance querellée ; que si au titre du blanchiment aggravé ; que M. X... encourait au visa de l'article 324-7 12° du code pénal la confiscation de tout ou partie de ses biens; que sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi ; que dont il avait la libre disposition, qu'elle qu'en soit la nature ; que meubles ou immeubles ; que divis ou indivis ; que ce fondement de la saisie ne conservait plus aujourd'hui sa pertinence depuis que par l'arrêt distinct de la chambre de l'instruction de Lyon de ce jour ; qu'il avait été constaté la prescription de l'action publique des délits de blanchiment aggravé ; que la personne mise en examen étant cependant notamment renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris du chef de blanchiment de fraude fiscale ; qu'il encourait toutefois toujours la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de ses biens au titre du délit de blanchiment de fraude fiscale ; que cependant, la somme de 1 500 000 euros saisie dans les circonstances sus-décrites était d'origine manifestement indéterminée et paraissait susceptible de provenir du produit direct ou indirect des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux pour lesquels la personne mise en examen avait été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris par l'arrêt distinct de ce jour ; qu'il s'en suivait qu'il convenait de requalifier le fondement de la saisie en ce que la somme de 1 500 000 euros saisie par les douanes le 5 mars 2011 était susceptible de constituer le produit direct ou indirect des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux pour lesquels la personne mise en examen a été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris par l'arrêt distinct de ce jour ;

"1°) alors que l'avis conforme du ministère public doit toujours être recueilli préalablement à la mesure de saisie ; que même si elle porte sur une somme d'argent ; qu'à défaut d'avoir recueilli l'avis du parquet sur la requalification en infractions d'abus de biens sociaux et de recels d'abus de biens sociaux commis en 1995 ; que la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;

"2°) alors que le mis en examen doit avoir eu la possibilité de s'expliquer sur les éléments qui vont être retenus à son encontre ; qu'en ne donnant pas la possibilité à M. X... de s'expliquer sur la requalification de la saisie que le parquet n'avait pas sollicitée, que la chambre de l'instruction a violé le principe du contradictoire ;

"3°) alors que la saisie ne saurait être « redéployée » sur une infraction différente de celle sur le fondement de laquelle elle a été pratiquée ; qu'en maintenant la saisie pratiquée sur le fondement du délit de blanchiment pour des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux non prévues par elle et dont les éléments constitutifs sont bien différents, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;

"4°) alors que l'arrêt du 20 janvier 2017 avait renvoyé M. X... devant le tribunal correctionnel du chef de complicité d'abus de biens sociaux imputés à MM. Y... et à Douffiagues ; qu'en justifiant sa décision par la circonstance que M. X... avait été renvoyé en correctionnel du chef du délit d'abus de biens sociaux par arrêt du même jour ; que la chambre de l'instruction a dénaturé l'arrêt de renvoi ;

"5°) alors que tout jugement doit être motivé ; qu'à défaut d'avoir expliqué comment une somme de 1 500 000 euros saisie en 2011 aurait pu provenir de délits commis entre 1994 et 1996, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;

"6°) alors qu'en ayant énoncé que la somme de 1 500 000 euros « paraissait » susceptible de provenir du produit direct ou indirect des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux pour lesquels la personne mise en examen avait été renvoyée devant le tribunal correctionnel de Paris par l'arrêt distinct de ce jour et était « susceptible de constituer » de telles infractions, la chambre de l'instruction a statué par des motifs hypothétiques, entachant encore sa décision d'un défaut de motifs" ;

Vu les articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, et préliminaire du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ces textes, la chambre de l'instruction, statuant sur appel d'une ordonnance de saisie, ne peut modifier d'office le fondement de celle-ci sans avoir invité au préalable les parties à en débattre ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., en provenance de Libye, a été le 5 mars 2011, à l'aéroport du Bourget, trouvé par les agents des douanes en possession d'une somme de 1 500 000 euros en numéraire ;

Que cette somme, qui avait initialement fait l'objet d'une saisie douanière, a été saisie le 10 mai 2012 par le juge d'instruction dans le cadre d'une information judiciaire ouverte notamment du chef de blanchiment, pour lequel X... a été mis en examen en septembre 2010, dans le but de garantir l'éventuelle peine complémentaire de confiscation du patrimoine encourue par l'intéressé au vu de cette qualification ;

Attendu que le 27 mai 2016, les avocats de X... ont saisi la chambre de l'instruction d'une requête aux fins de mainlevée de cette saisie pénale et de restitution ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation de X... selon laquelle les faits de blanchiment aggravé d'abus de biens sociaux ayant fondé la saisie étant prescrits, cette prescription s'opposait à ce que la saisie puisse être maintenue sous prétexte que le délit fondant la saisie avait été requalifié en blanchiment de fraude fiscale, la chambre de l'instruction retient que la somme saisie paraît susceptible de provenir du produit direct ou indirect des infractions d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux pour lesquelles X... est également renvoyé devant le tribunal correctionnel ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction qui a, sans débat contradictoire préalable, modifié le fondement de la saisie effectuée, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 20 janvier 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Wyon, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-81260
Date de la décision : 26/07/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, 20 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 jui. 2017, pourvoi n°17-81260


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:17.81260
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