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13/07/2017 | FRANCE | N°16-15772

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 juillet 2017, 16-15772


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 février 2016), que M. X... a été engagé le 1er septembre 2008 en qualité d'attaché commercial par la société Assurances 2000, la relation de travail étant soumise à la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances du 18 janvier 2002 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 19 juin 2012 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement san

s cause réelle et sérieuse, de la condamner au paiement de diverses sommes au titre de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 février 2016), que M. X... a été engagé le 1er septembre 2008 en qualité d'attaché commercial par la société Assurances 2000, la relation de travail étant soumise à la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances du 18 janvier 2002 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 19 juin 2012 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la condamner au paiement de diverses sommes au titre de la rupture, d'ordonner la remise sous astreinte de documents et d'ordonner le remboursement à pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié alors, selon le moyen :

1°/ que la convention collective qui prévoit la possibilité de réunir pour avis un conseil de discipline en cas de projet de licenciement pour faute n'oblige pas l'employeur à le rappeler au salarié dont il envisage le licenciement pour ce type de motif, dès lors que la lettre de convocation à l'entretien préalable, portant mise à pied conservatoire, informe suffisamment le salarié de la nature disciplinaire du licenciement envisagé et par conséquent de la possibilité de saisir pour avis le conseil de discipline ; qu'en jugeant que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, à défaut de rappel dans la lettre de convocation à l'entretien préalable avec mise à pied conservatoire de la possibilité pour le salarié de saisir le conseil de discipline, la cour d'appel a violé l'article 16 de la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances, ainsi que les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail ;

2°/ subsidiairement que l'absence de rappel dans la lettre de convocation à un entretien préalable à un licenciement pour faute de la possibilité de réunion du conseil de discipline pour avis est une irrégularité de procédure ; qu'en jugeant dans ce cas le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 1134 dans sa rédaction alors applicable du code civil, L. 1232- 6, L. 1235-1 et L. 1235-2 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de l'article 16 de la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances, qu'un conseil de discipline doté d'un rôle consultatif est constitué dans chaque entreprise dont l'effectif est au moins égal à cinquante salariés, que ce conseil peut être réuni à la demande soit de l'employeur, soit du salarié concerné, préalablement à la mise en oeuvre de tout projet de licenciement pour faute, et que la saisine du conseil peut intervenir à compter de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement et, au plus tard, jusqu'au jour franc ouvré succédant à la date d'entretien préalable ;

Attendu, ensuite, que la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle, de donner son avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond et que le licenciement, prononcé sans que le salarié ait été avisé qu'il pouvait saisir cet organisme, ne peut avoir de cause réelle et sérieuse ;

Et attendu qu'ayant relevé, d'une part, que le salarié avait été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement avec mise à pied à titre conservatoire, la procédure étant ainsi initiée pour un motif disciplinaire, d'autre part, que l'intéressé n'avait été informé ni dans la lettre de convocation à l'entretien préalable ni dans aucune autre lettre de ce qu'il avait la possibilité de saisir le conseil de discipline pour qu'il donne son avis sur le licenciement pour faute envisagé par l'employeur, et que la mise à disposition de la convention collective sur le site intranet de l'entreprise ne pouvait caractériser le fait que l'employeur avait satisfait à son obligation d'information, la cour d'appel en a exactement déduit que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Assurances 2000 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Assurances 2000 à payer à M. X... la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Assurances 2000.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Assurances 2000, employeur, au paiement à M. X..., salarié, des sommes de 21 500 € pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; 1 566,89 € à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire, outre 156,69 € de congés payés afférents ; 5 530,28 € d'indemnité compensatrice de préavis, outre 553,02 € de congés payés afférents ; et 3 428,77 € à titre d'indemnité de licenciement ; d'avoir ordonné à la société Assurances 2000 de remettre à M. X..., sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 15e jour suivant la date de notification de la décision, pour une durée de 30 jours, les documents de rupture rectifiés, le bulletin de salaire du mois de mai 2011, un bulletin de salaire conforme ; d'avoir, en application de l'article L 1235-4 du code du travail, ordonné le remboursement par la société Assurances 2000 à Pôle emploi du total des indemnités de chômage versées à M. X... du jour de son licenciement au jour de la création de son entreprise, la durée d'indemnisation étant inférieure à la limite des six mois fixée par ledit article ; et d'avoir dit que les condamnations pécuniaires à caractère salarial porteront intérêt au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes, soit du 14 décembre 2012, les condamnations pécuniaires autres portant intérêt au taux légal à compter de la date du prononcé du jugement et les intérêts étant capitalisés ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article 16 de la convention collective des cabinets de courtage d'assurances et/ou de réassurances en date du 18 janvier 2002 dispose que dans chaque entreprise dont l'effectif est au moins égal à 50 salariés il est constitué un conseil de discipline doté d'un rôle consultatif ; que selon le titre 3 de ladite convention, le conseil de discipline peut être réuni à la demande, soit de l'employeur, soit du salarié concerné, préalablement à la mise en œuvre de tout projet de licenciement pour faute ; que la saisine du conseil de discipline peut intervenir à compter de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement et au plus tard jusqu'au jour franc ouvré succédant la date de l'entretien préalable ; que ces dispositions conventionnelles prévoient donc pour l'employeur une obligation d'information de la faculté de saisir le conseil de discipline dans le cas de licenciement pour motifs disciplinaires ; que la consultation de cet organe chargé de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond ; que M. X... a été convoqué à un entretien préalable par courrier remis en main propre en date du 2 juin 2012 libellé comme suit « nous sommes amenés à envisager à votre égard des mesures qui pourraient aboutir à un licenciement. En application des dispositions légales et notamment de l'article L 1232-2 du code du travail, nous vous prions donc de bien vouloir vous présenter pour un entretien préalable le lundi 11 juin 2012 à 15 heures. Comme la législation vous le permet, vous avez la possibilité au cours de cet entretien de vous faire assister par un membre du personnel de l'entreprise de votre choix ou par un conseiller inscrit sur la liste dressée par Monsieur le préfet que vous pourrez consulter à la mairie située Bourg, Pomport ou à l'inspection du travail 2 rue cité 24000 Périgueux. Toutefois compte tenu des faits constatés nous vous enjoignons une mise à pied conservatoire à effet immédiat, jusqu'à la décision à intervenir » ; que si la lettre de convocation à l'entretien préalable ne comporte pas explicitement le motif disciplinaire du licenciement, la notification de la mise à pied conservatoire à effet immédiat place incontestablement la procédure engagée par l'employeur à l'encontre de M. X... sous l'angle disciplinaire ; que la convocation à l'entretien préalable ne contient pas l'information au salarié de sa possibilité de saisir le conseil de discipline ; qu'aucun autre courrier de l'employeur n'a été adressé au salarié pour l'informer de cette possibilité ; que la mise à disposition de la convention collective sur le site intranet de l'entreprise à l'égard des salariés relève d'un accès à la réglementation générale applicable au sein de l'entreprise et ne peut en aucun cas caractériser le fait que l'employeur a satisfait à son obligation d'information en avisant M. X... de sa possibilité de saisir le conseil de discipline ; que faute d'avoir satisfait à son obligation, le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans qu'il y ait besoin d'aborder les motifs de celui-ci ; que c'est par une très juste appréciation du droit applicable aux éléments de l'espèce que les premiers juges ont dit que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le jugement du conseil de prud'hommes de Bergerac en date du 15 juillet 2013 sera donc confirmé sur ce point ; ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS que la convention collective applicable est: « Cabinets de courtage d'assurances et/ou de réassurances » du 18 janvier 2002, étendue par arrêté du 14 octobre2002 (J.O. du 25 octobre2002) ; que l'article16, intitulé « Conseil de discipline », titre 1, est ainsi rédigé : « Dans chaque entreprise dont l'effectif est au moins égal à 50 salariés, au sens des règles légales de mise en place des institutions représentatives du personnel, il est constitué un conseil de discipline, doté d'un rôle consultatif » ; que le titre 3 (compétence et fonctionnement) est ainsi rédigé : « Le conseil de discipline peut être réuni à la demande, soit de l'employeur, soit du salarié concerné, préalablement à la mise en œuvre de tout projet de licenciement pour faute. Cependant, le salarié concerné est en droit de refuser la réunion du conseil de discipline lorsque celui-ci a été convoqué à la demande de l'employeur. La saisine du conseil peut intervenir à compter de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement et au plus tard jusqu'au jour franc ouvré succédant à la date d'entretien préalable » ; que la lettre de convocation à l'entretien préalable, en date du 2 juin 2012, est rédigée en termes généraux : « Nous sommes amenés à envisager à votre égard des mesures qui pourraient aboutir à un licenciement. En application de l'article L 1232-2 du Code du Travail, nous vous prions donc de bien vouloir vous présenter pour un entretien préalable à la date, heure et adresse suivantes » ; que la lettre de licenciement est ainsi motivée : « violation délibérée du règlement intérieur et abus de votre liberté d'expression » ; qu'il n'est pas discuté que la S.A.S. ASSU 2000, emploie plus de 50 salariés, la convention collective applicable prévoit dans ce cas, en son article16, la réunion éventuelle d'un conseil de discipline doté d'un rôle consultatif, pour tout projet de licenciement pour faute, à la demande soit de l'employeur, soit du salarié ; qu'en l'espèce, le licenciement est disciplinaire, il n'a pas été demandé, ni par l'employeur, ni par le salarié, la réunion du conseil de discipline, dont il est justifié de l'existence dans l'entreprise ; que M. X... invoque le fait que l'employeur ne précise pas dans la lettre de convocation à l'entretien préalable de licenciement, quelle est la nature exacte du licenciement envisagé et qu'en procédant de la sorte, l'employeur l'a privé d'une véritable garantie de fond ; que la S.A.S. ASSU 2000, réplique que la saisine du conseil de discipline n'est que facultative et que le salarié, informé de la mesure de licenciement, n'a pas non plus saisi le conseil de discipline ; que la convocation à l'entretien préalable vise l'article L 1232-2 du code du travail et « le projet de licenciement dont vous faites l'objet » ; qu'il s'ensuit que le caractère disciplinaire du licenciement notifié ensuite n'apparaît pas dans cette convocation et que M. X... n'est donc pas en mesure de saisir le conseil de discipline ; que la consultation du conseil de discipline prévu par la convention collective et chargé de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur, constitue une garantie de fond que l'employeur ne peut éluder, sans tenir compte des faits constitutifs, de faute, mentionnés dans la lettre de licenciement ; que le licenciement prononcé sans que le salarié, dans l'ignorance du caractère disciplinaire de la procédure, ait eu la possibilité de saisir le conseil de discipline, même si cette saisine est facultative, est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

1°) ALORS QUE la convention collective qui prévoit la possibilité de réunir pour avis un conseil de discipline en cas de projet de licenciement pour faute n'oblige pas l'employeur à le rappeler au salarié dont il envisage le licenciement pour ce type de motif, dès lors que la lettre de convocation à l'entretien préalable, portant mise à pied conservatoire, informe suffisamment le salarié de la nature disciplinaire du licenciement envisagé et par conséquent de la possibilité de saisir pour avis le conseil de discipline ; qu'en jugeant que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, à défaut de rappel dans la lettre de convocation à l'entretien préalable avec mise à pied conservatoire de la possibilité pour le salarié de saisir le conseil de discipline, la cour d'appel a violé l'article16 de la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances, ainsi que les articles L 1232-1 et L 1232-6 du code du travail ;

2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE l'absence de rappel dans la lettre de convocation à un entretien préalable à un licenciement pour faute de la possibilité de réunion du conseil de discipline pour avis est une irrégularité de procédure ; qu'en jugeant dans ce cas le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil, L 1232-6, L 1235-1 et L 1235-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-15772
Date de la décision : 13/07/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 17 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jui. 2017, pourvoi n°16-15772


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15772
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