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11/07/2017 | FRANCE | N°17-82630

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 juillet 2017, 17-82630


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hassan Naïm X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 7e section, en date du 7 avril 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinats, tentatives d'assassinats, destruction volontaire de biens appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive ou incendiaire en bande organisée, crimes en relation avec une entreprise terroriste, a ordonné son maintien en détention provisoire, après i

nfirmation de l'ordonnance du juge d'instruction l'ayant mis en liberté et as...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
M. Hassan Naïm X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 7e section, en date du 7 avril 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinats, tentatives d'assassinats, destruction volontaire de biens appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive ou incendiaire en bande organisée, crimes en relation avec une entreprise terroriste, a ordonné son maintien en détention provisoire, après infirmation de l'ordonnance du juge d'instruction l'ayant mis en liberté et assigné à résidence avec surveillance électronique ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 81, 137 et suivants, 142-5 et suivants, 144, 145-2 et suivants, 191 et suivants, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et de la présomption d'innocence ;

" en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur l'appel du parquet, a, d'une part, infirmé l'ordonnance des juges d'instruction du 3 avril 2017 portant mise en liberté de M. X...sous assignation à résidence sous surveillance électronique assortie d'un contrôle judiciaire, et, d'autre part, a ordonné le maintien en détention du requérant ;

" aux motifs que M. Hassan Naïm X...est mis en examen pour : assassinats, tentative d'assassinats, destruction volontaire de biens appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive où incendiaire en bande organisée, crimes en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ; que la peine encourue est de nature criminelle ; qu'il ressort suffisamment des éléments plus haut rappelés qu'il existe des indices graves ou concordants rendant plausible l'implication de M. X...dans les faits qui lui sont reprochés ; que la valeur probante de la plupart de ces indices, et en particulier des tampons figurant sur le passeport au nom de M. X...en possession de M. Ahmed Y..., des imprécisions entourant la perte de son passeport déclarée par M. X..., de la photographie de celui-ci, des déclarations de son père sur son départ du Liban, de son appartenance au FPLP selon les époux Z..., des expertises en écriture pratiquées sur la fiche de l'hôtel Celtic, et de l'audition de Mme Belinda A...selon laquelle M. X...lui aurait déclaré qu'il avait fait exploser une voiture, est contestée par la défense ; que le témoignage de Mme Nawal B...concernant l'alibi de M. X...n'est en l'état assorti d'aucun élément matériel de preuve touchant directement ce dernier ; que les investigations conduites au Liban ne s'accompagnent pas davantage d'élément de preuve matérielle indiscutable de sa présence au Liban le jour des faits ; que l'examen des charges pouvant motiver un renvoi devant la juridiction de jugement ainsi que la discussion des indices justifiant la mise en examen sont extérieurs à l'unique objet, relatif à la détention provisoire, du contentieux dont est ici saisie la chambre de l'instruction ; que l'information se poursuit relativement au rôle imputé au mis en examen dans l'organisation et la réalisation de l'attentat et pour identifier les membres du groupe ayant organisé celui-ci et facilité le cas échéant la fuite des auteurs et comparses, que les derniers, témoignages recueillis sur commission rogatoire internationale doivent faire l'objet de vérifications, et que le délai prévisible d'achèvement peut être évalué à huit mois ; que compte tenu de la nature du dossier relatif à des faits de nature terroriste, ayant nécessité des investigations à l'étranger, de la longueur de la procédure d'extradition, et du choix de l'intéressé de ne faire aucune déclaration durant l'instruction depuis sa mise en examen de novembre 2014 jusqu'à début 2016, la détention provisoire de M. X...n'excède pas en l'espèce un délai raisonnable au sens de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'il demeure en l'état du dossier que la détention provisoire reste l'unique moyen :
- de garantir la représentation de l'intéressé à tous les stades de la procédure ; qu'en effet, il y a lieu de craindre que M. X..., qui n'a pu être mis en examen qu'à l'issue d'une procédure d'extradition, qui n'a pas de domicile personnel en France et qui y est sans véritable occupation professionnelle, ne tente de fuir ses responsabilités au vu de la peine de réclusion criminelle à perpétuité encourue, l'assignation à résidence ne pouvant constituer un réel obstacle à cet égard ; que l'attestation d'hébergement chez M. C...et la promesse d'une occupation comme assistant de recherche durant cinq heures par semaine à titre bénévole au centre international de culture populaire ne peuvent être considérées, dans ces conditions, comme des garanties de représentation suffisantes ;
- de remédier au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public que pourrait réactiver la remise en liberté d'une personne mise en examen pour des crimes en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, s'agissant d'un attentat commis à l'explosif à l'encontre d'un lieu de culte ayant tué quatre personnes et en ayant blessé beaucoup d'autres, pour certaines très grièvement, et qui reste durablement inscrit dans les mémoires ; qu'en conséquence, nonobstant les observations développées dans le mémoire présenté au nom du mis en examen et les garanties invoquées au soutien de ces observation, que la détention provisoire reste justifiée comme étant, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, l'unique moyen de parvenir aux objectifs qui viennent d'être énoncés et qui ne pourraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique, de telles mesures ne comportant pas de contrainte suffisante pour prévenir efficacement les risques précités ;

" 1°) alors que la chambre de l'instruction doit rechercher, au moment où elle statue, si la durée de la détention est raisonnable, et spécialement motiver sa décision sur ce point ; que la gravité des faits ne peut être abstraitement opposée au requérant que l'instruction fait apparaître comme étranger à l'attentat pour lequel il a été mis en examen ; qu'en se bornant à exiger, avec le parquet, des « éléments matériels indiscutables » de la présence à Beyrouth du requérant au moment des faits situés à Paris 37 ans plus tôt, sans autrement s'expliquer, pour les stricts besoins du contentieux de la détention, sur la valeur des éléments relevés par les magistrats instructeurs pour ordonner la remise en liberté du requérant, la cour a privé son arrêt de motifs et a violé les exigences de la présomption d'innocence ;

" 2°) alors qu'un risque de fuite de nature à justifier la détention ne peut être abstraitement objecté sans établissement préalable de son caractère réel et sérieux au regard tant des circonstances du dossier et du comportement du mis en examen ayant toujours respecté les obligations du contrôle judiciaire auxquelles il a pu être soumis antérieurement, que de l'intérêt du mis en examen lui-même qui entend faire reconnaître son innocence et qui, de surcroît, justifie pouvoir être hébergé et travailler en France auprès de collègues prestigieux ;

" 3°) alors que le risque de trouble à l'ordre public ne doit pas être abordé abstraitement par référence à la nature du crime en cause et de son retentissement ; que 37 ans après les faits, il appartenait à la cour de préciser si et en quoi l'élargissement du requérant pourrait actuellement troubler l'ordre public, lors même que les décisions d'élargissement successivement rendues par les premiers juges depuis plus d'un an n'avaient provoqué aucune émotion publique ; qu'en se déterminant sur ce point également à la faveur d'une motivation stéréotypée, la cour a privé son arrêt de toute base légale " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 3 octobre 1980, l'explosion d'une charge de pentrite, dissimulée dans la sacoche d'une moto, à proximité de la synagogue située 24 rue Copernic à Paris, a atteint mortellement quatre passants et blessé plusieurs dizaines de personnes ; qu'à la suite de l'ouverture d'une information judiciaire, les investigations menées sur le territoire national et à l'étranger ont conduit à recueillir des éléments selon lesquels M. X..., demeurant, depuis lors, au Canada, aurait confectionné et activé l'engin explosif ; qu'après qu'un mandat d'arrêt international, assorti d'une demande d'arrestation provisoire, a été délivré contre lui le 5 novembre 2008 et qu'un ultime recours a été rejeté, le 13 novembre 2014, par la Cour suprême du Canada, M. X...a été extradé vers la France, mis en examen des chefs sus-énoncés le 15 novembre 2014 et placé, le même jour, en détention provisoire ; que le juge d'instruction, estimant qu'au regard des investigations, il existait des raisons permettant de douter que M. X...se fût déplacé en France entre le 20 septembre et le 7 octobre 1980 et que X...fût l'auteur des faits qui lui sont reprochés, a ordonné, le 3 avril 2017, la mise en liberté de l'intéressé et son assignation à résidence avec surveillance électronique ; que le ministère public a interjeté appel de cette décision ;

Attendu que, pour infirmer cette décision, après avoir retenu que, d'une part, selon une appréciation inverse de celle du premier juge, il existe à l'encontre de M. X..., au regard d'éléments circonstanciés résultant de la procédure, des indices graves ou concordants d'avoir participé aux faits qui lui sont reprochés, d'autre part les investigations se poursuivent, en particulier par des vérifications après les derniers témoignages recueillis sur commission rogatoire internationale, le délai prévisible d'achèvement de la procédure pouvant être fixé à huit mois, l'arrêt énonce que la détention provisoire est l'unique moyen de garantir le maintien de l'appelant, qui n'a pu être mis en examen qu'à l'issue d'une procédure d'extradition, n'a pas de domicile personnel en France ni de véritable occupation professionnelle, à la disposition de la justice ; que les juges relèvent que le trouble porté par les faits à l'ordre public, en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, s'agissant d'un attentat commis à l'explosif à l'encontre d'un lieu de culte ayant tué quatre personnes et en ayant blessé beaucoup d'autres, dans un pays récemment frappé par des attentats, reste exceptionnel et persistant ; qu'ils ajoutent qu'à ces deux égards, une assignation à résidence avec surveillance électronique ou un placement sous contrôle judiciaire seraient des mesures insuffisantes ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction, qui a pris en compte l'ensemble des éléments de l'information dans leurs derniers développements, l'argumentation et la situation personnelle de la personne mise en examen et a retenu les nécessités actuelles de l'ordre public ainsi que celles de la représentation en justice de M. X..., s'est déterminée par des considérations de droit et de fait, notamment, au regard de l'insuffisance des obligations du contrôle judiciaire et de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, répondant aux exigences des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-82630
Date de la décision : 11/07/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 07 avril 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 jui. 2017, pourvoi n°17-82630


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:17.82630
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