LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 décembre 2014, rectifié le 24 août 2015), que la société Kohler Rehm, locataire de locaux commerciaux situés dans un immeuble collectif appartenant à la société Kohler, suivant un bail du 30 septembre 1985 renouvelé en 1994, l'a assignée, après expertise, en contestation des charges ; que, reconventionnellement, la société Kohler a demandé la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et des charges ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile, ensemble l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Attendu que, pour limiter à une certaine somme la condamnation de la société Kohler Rehm au titre des charges d'eau, l'arrêt retient que l'expert a constaté que la surconsommation d'eau ne pouvait trouver son origine dans un besoin exponentiel de la locataire qui établit avoir cessé de faire fonctionner la réfrigération et ne pas avoir de système de climatisation ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'expert avait constaté que la surconsommation ne pouvait trouver son origine dans un besoin exponentiel des logements de l'immeuble, et non pas de la locataire, et que celle-ci avait indiqué, dans ses conclusions, qu'elle avait réduit le nombre des groupes de réfrigération à trois et que la climatisation n'avait pas été mise en marche, la cour d'appel, qui a dénaturé le rapport d'expertise et modifié l'objet du litige, a violé le texte et le principe susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, la cassation de la disposition relative au rejet de la demande en résiliation du bail ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée ;
Condamne la société Kohler Rehm aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Kohler Rehm et la condamne à payer à la société Kohler la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société Kohler.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SA KOHLER REHM à payer à la SCI KOHLER seulement la somme de 36 487, 94 €, rectifiée par arrêt du 24 août 2015 à la somme de 53 154, 61 €, augmentée des intérêts légaux à compter des conclusions prises devant la cour (3 novembre 2014), en quittances et deniers après imputation des paiements faits en exécution du jugement et d'avoir débouté la SCI KOHLER de ses plus amples prétentions ;
AUX MOTIFS QUE sur les charges postérieures au redressement judiciaire (année 2007) ; les prétentions de la SCI KOHLER sont en revanche recevables pour les créances postérieures, qui peuvent donner lieu à condamnation, s'agissant de dettes qui sont liées à l'occupation régulière des locaux par KOHLER REHM en vertu du bail poursuivi ; que ces créances sont privilégiées dans les termes de l'article L. 622-17 du code de commerce, étant observé qu'il n'est pas discuté qu'elles ont été portées à la connaissance de l'administrateur judiciaire et du mandataire judiciaire ; qu'il est mis en compte des créances de charges postérieures au jugement d'ouverture pour un montant de 84 139, 08 €, résultant d'un tableau qui s'établit comme suit (après des corrections et des modifications dont il n'est pas justifié de manière précise) : mars à décembre 2007 : 61 898, 24 €- versements :-10 316, 37 € soit : 51 581, 87 € ; solde de charges 2008 : 608, 93 € ; solde de charges 2009 : 7 669, 27 € ; solde de charges 2010 : 5 911, 04 € ; solde de charges 2012 : 18 867, 95 € soit : 33 057, 19 € ; total :
84 639, 08 € ; qu'en ce qui concerne les charges de mars à décembre 2007, la créance de 61 898, 24 € résulte d'un décompte de charges de 2007 vérifié par l'expert pour un montant de 74 775, 48 € auquel la SCI KOHLER ajoute deux factures omises par l'expert pour 5 416, 64 € avant de déduire un versement de la locataire de 18 293, 88 € ; qu'il est constant que le bailleur a ainsi ajouté deux quotes-parts sur des factures non soumises à l'expert (et non omises par celui-ci) pour 5 416, 64 € qui n'ont pas été véritablement expliquées par la SCI KOHLER ; qu'il semble qu'elles concernent la fourniture de produits de traitement, mise sans explication à la charge de la locataire ; que celle-ci objecte à juste titre qu'elle ne peut devoir une participation faute de connaître le mode de calcul de la quote-part mise à sa charge, notamment pour l'adoucisseur, étant relevé qu'elle a mis elle-même en place un appareil analogue et en justifie par des factures postérieures des 23 décembre 2009, 26 juin et 22 juin 2011 ; que le montant théorique des charges s'établit ainsi pour 2007 :- charges vérifiées par l'expert : 74 775, 48 €- à déduire deux versements de KOHLER REHM selon les conclusions de l'intimée (p. 13) : 18 293, 88 € selon les conclusions de l'intimée (p. 30) : 10 316, 37 €- soit un solde théorique de : 46 165, 13 € ; qu'il est constant par ailleurs qu'en 2007 la consommation d'eau a accusé une augmentation significative passant d'un montant moyen de 20 000 € à un montant dépassant 70 000 € ; que l'expert judiciaire nommé n'a pas identifié de façon indiscutable la ou les causes de cette surconsommation temporaire ; que dans son rapport d'expertise du 21 décembre 2009 complété le 18 mai 2011, l'expert judiciaire M. X..., éclairé par un sapiteur, M.
Y...
a constaté, en résumé, les éléments suivants :- les compteurs étaient affectés uniquement au locataire KOHLER REHM ;- la surconsommation ne pouvait trouver son origine dans un besoin exponentiel de KOHLER REHM ; que la consommation de 2007 a atteint un niveau nettement plus élevé que la moyenne 71 000 (HT) au lieu de 20 000 € en moyenne ; que la situation des lieux, notamment des compteurs et des conduites, a été décrite par un huissier de justice selon plusieurs constats des 22 janvier, 7 avril et 21, août 2014, sans qu'il puisse en être déduit des anomalies imputables à l'exploitant du fonds de commerce ; que l'expert a ainsi constaté que la forte consommation d'eau affectait l'un des compteurs qui enregistraient les groupes de froid de la locataire, tout en admettant que l'origine n'était pas vérifiable et a envisagé plusieurs causes, comme la défaillance de certains groupes ou des besoins croissants liés à l'activité de la locataire ; que les relevés incombant au bailleur, il appartenait à celui-ci de constater cette augmentation anormale et d'en faire part à sa locataire ;
que la Cour retient, à cet égard les objections formulées par la locataire sur la négligence du bailleur vis-à-vis d'une situation mal maîtrisée ; que KOHLER REHM reproche au bailleur de ne pas avoir attiré son attention, alors qu'il lui était aussi loisible de vérifier sa propre consommation et ne justifie pas qu'elle était dans l'impossibilité totale de le faire, et ne démontre pas non plus qu'elle n'avait pas accès aux compteurs ; ceci étant, la SCI KOHLER, en n'individualisant pas les compteurs, a elle-même contribué à l'imprécision des décomptes périodiques de charges et ne démontre pas non plus que l'augmentation significative de la consommation de 2007 serait due à une activité brassicole de KOHLER REHM, alors que cette activité avait pris fin en 2006 selon un constat d'huissier du 14 septembre 2006 ; quant aux groupes de réfrigération et de climatisation évoqués par l'expert, il a été établi par KOHLER REHM qu'elle avait cessé de faire fonctionner la réfrigération et qu'elle n'avait pas de système de climatisation, selon plusieurs attestations de salariés en ce sens ; qu'enfin, l'expert a relevé le caractère imprécis et inexact de la clé de répartition mise en place par le bailleur, tandis qu'un salarié de KOHLER REHM a attesté de ce que le bailleur n'avait pas expliqué les modes de répartition qu'elle appliquait ; que KOHLER REHM justifie de plusieurs lettres recommandées réclamant au bailleur la possibilité de vérifier les décomptes, s'échelonnant entre 2004 et 2008, sans que le bailleur justifie d'explications pertinentes, sinon en indiquant que les documents étaient à la disposition de la locataire ; qu'il est sans intérêt pour la solution du litige de faire produire des décomptes plus détaillés par le bailleur ; que la Cour estime nécessaire à une bonne administration de la justice de retenir la consommation moyenne pour l'année 2007 en raison de l'absence de facteur de surconsommation imputable à la seule exploitation de la locataire plutôt qu'à un état défectueux des installations ou à une répartition imprécise des charges ; qu'au vu de ces éléments, il sera fait un partage du surcoût à raison de trois quarts à la charge de la locataire, normalement tenue des charges liées à sa consommation, et d'un quart à la charge du bailleur, qui s'est contenté de répercuter sur sa locataire ces charges sans veiller à l'entretien des installations ; que la surconsommation constatée en 2007 peut être évaluée à 71 166 € (montant facturé) moins 20 000 €, soit 51 266 € dont 10/ 12èmes sont imputables à la période postérieure au jugement d'ouverture, soit 42 721 € ; que ce montant sera supporté par KOHLER REHM à raison des trois quarts soit 32 040 € ; que compte tenu des règlements effectués (10 316, 37 € et 18 292, 88 €) selon les conclusions de la SCI KOHLER, il y a lieu de considérer que KOHLER REHM reste devoir un solde de 3 430, 75 € à ce titre […] qu'au fond, la demande de résiliation est fondée sur les seuls motifs alors invoqués ;
Et aux motifs de l'arrêt rectificatif : que le raisonnement suivi par la cour a consisté à retenir une consommation moyenne susceptible d'être mise à la charge de la société locataire et d'appliquer cette estimation aux 10 derniers mois de l'année 2007, après le jugement de redressement judiciaire, la consommation antérieure ne pouvant être réclamée par suite de l'arrêt des poursuites individuelles contre la société débitrice et enfin de partager la charge de la surconsommation entre la locataire et le bailleur ; que ce raisonnement a été appliqué aux montants en cause comme suit : « la surconsommation constatée en 2007 peut être évaluée à 71 166 € (montant facturé) moins 20 000 € soit 51 266 €, dont 10/ 12èmes sont imputables à la période postérieure au jugement d'ouverture soit 42 721 € ; ce montant sera supporté par KOHLER REHM à raison des Y soit 32 040 € ; compte tenu des règlements effectués (10 316, 37 € et 18 292, 88 €) selon les conclusions de la SCI KOHLER, il y a lieu de considérer que KOHLER REHM reste devoir un solde de 3 430, 75 € à ce titre » ; qu'il est exact que si la Cour a mis à la charge de KOHLER REHM Y de la surconsommation d'eau à raison de 10/ 12èmes du montant annuel, la société était naturellement tenue également du coût moyen de consommation d'eau pour la même période, dès lors qu'elle recouvrait les 10 derniers mois de l'année 2007 après le jugement de redressement judiciaire ; que sans dénaturer l'objet de la décision et le raisonnement suivi, il y a donc lieu de rectifier l'erreur selon ce que la raison commande dans le sens indiqué, mais en limitant la rectification au seul montant correspondant à la consommation moyenne omise et non à hauteur de la consommation moyenne annuelle pour 12 mois complets ; que les objections de la SCI KOHLER REHM seront donc accueillies et un montant supplémentaire de 16 666 € alloué à la SCI KOHLER REHM soit un montant de 36 587, 94 € + 16 666, 67 € = 53 154, 61 € ;
1./ ALORS QUE dans le cadre d'un bail commercial, le preneur est tenu de payer les charges d'eau aux termes convenus, sauf à démontrer que le calcul de ces charges est erroné au regard de sa consommation réelle ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que les charges relatives à la consommation d'eau pour l'année 2007 étaient justifiées en leur principe, que la forte consommation d'eau affectait l'un des compteurs qui enregistraient uniquement les groupes de froid de la SA KOHLER REHM était exclusivement affecté à cette locataire, la cour d'appel ne pouvait retenir qu'il convenait de réduire le montant des charges liées à la consommation d'eau que la bailleresse était en droit de réclamer à sa locataire et la débouter de sa demande de résiliation, aux prétextes, d'une part, que selon l'expert l'origine de la surconsommation n'était pas vérifiable et qu'elle ne pouvait résulter d'un besoin exponentiel de KOHLER REHM, d'autre part, qu'il n'était pas démontré que des anomalies imputables à l'exploitant du fonds de commerce étaient à l'origine de la surconsommation ou que celle-ci était due à l'activité brassicole interdite de la SA KOHLER REHM, laquelle avait cessé en 2006, et, enfin, qu'il y avait une absence de facteur de surconsommation imputable à la seule locataire plutôt qu'à un état défectueux des installations ou à une répartition imprécise des charges, car ces circonstances étaient inopérantes à établir que la surconsommation ne provenait pas de la SA KOHLER REHM, ni à décharger cette dernière de son obligation de s'acquitter de sa dette ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article 1728 du code civil ;
2./ ALORS, en outre, QU'il ne pèse sur le bailleur, dans le cadre d'un bail commercial, aucune obligation légale relativement aux modalités d'appel des charges et que sa responsabilité à cet égard ne peut être engagée que s'il est établi que son comportement caractérise une exécution de mauvaise foi du contrat ; que dès lors, pour réduire le montant des charges liées à la consommation d'eau et rejeter sa demande de résiliation, la cour d'appel qui a retenu que la bailleresse avait contribué à l'imprécision des décomptes périodiques de charges en n'individualisant pas les compteurs d'eau, après avoir pourtant elle-même constaté qu'il ressortait du rapport d'expertise judiciaire que les compteurs litigieux étaient affectés uniquement au locataire KOHLER REHM, qui avait la possibilité de vérifier sa propre consommation et ne démontrait pas ne pas avoir eu accès aux compteurs, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
3./ ALORS, en outre, QU'il ne pèse sur le bailleur aucune obligation de surveillance à l'égard des outils installés par son preneur pour les besoins de son exploitation ; que dès lors, en retenant, pour réduire le montant des charges liées à la consommation d'eau et exclure la résiliation du bail, qu'il n'était pas exclu que la surconsommation d'eau pour 2007 soit due à un état défectueux des installations de la locataire et que la bailleresse s'était contentée de répercuter les charges sur sa locataire sans veiller à l'entretien des installations, la cour d'appel, qui a subordonné le paiement des charges dues par le preneur, à une obligation préalable pesant sur le bailleur de surveiller des installations qui étaient pourtant propres au preneur, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;
4./ ALORS, en tout état de cause, QUE, dans son rapport, le sapiteur, M. Y..., concluait qu'« il est important de préciser – dans le but de lever toute ambiguïté – que la surconsommation enregistrée par l'immeuble au cours des 3 exercices en cause ne peut en aucun cas trouver son origine dans un besoin exponentiel ou dans une fuite localisée dans les logements de l'immeuble car cette hausse constatée dépasse allégrement chacun des besoins domestiques imaginables » (p. 4, § 4) ; que dès lors, en retenant, pour considérer que la SA KOHLER REHM ne pouvait être tenue de payer l'ensemble du surcoût relatif à sa consommation d'eau pour l'année 2007, que l'expert avait constaté que « la surconsommation ne pouvait trouver son origine dans un besoin exponentiel de KOHLER REHM », quand ce constat ne concernait que les locataires des logements de l'immeuble et non la SA KOHLER REHM, la locataire commerciale, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du rapport, a violé l'article 4 du code de procédure civile.
5./ ALORS QUE la SA KOHLER REHM versait aux débats cinq attestations de ses salariés énonçant toutes, dans des termes quasiment similaires, que la climatisation n'avait jamais fonctionné, sans faire aucune mention du système de réfrigération ; que dès lors, en retenant pour écarter l'explication de l'expert relative aux groupes de réfrigérations, « qu'il a été établi par KOHLER REHM qu'elle avait cessé de faire fonctionner la réfrigération et qu'elle n'avait pas de système de climatisation, selon plusieurs attestations de ses salariés en ce sens » (p. 9, § 10), la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis desdites attestations et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
6./ ALORS, en outre, QUE la SA KOHLER REHM énonçait, dans ses conclusions d'appel, que « s'agissant des groupes de réfrigération et de climatisation, aucune climatisation n'a jamais été mise en marche » (p. 17, § 12) et que les groupes de réfrigérations étaient passés de 6 en 2003 à 2 ou 3 en 2006 (p. 18, § 4-6) ; que dès lors, en retenant pour écarter l'explication de l'expert relative aux groupes de réfrigérations, « qu'il a été établi par KOHLER REHM qu'elle avait cessé de faire fonctionner la réfrigération et qu'elle n'avait pas de système de climatisation, selon plusieurs attestations de ses salariés en ce sens », la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, tels qu'ils résultaient de ses écritures, en méconnaissance des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
7./ ALORS, encore, QUE le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et ne peut, sans excéder ses pouvoirs, trancher un litige ni en équité, ni en se référant à une bonne administration de la justice ; que dès lors, en retenant, pour condamner le bailleur à prendre en charge une partie du coût relatif à la surconsommation d'eau de la SA KOHLER REHM dont la cause n'est pas établie par cette dernière, que ce partage était nécessaire à une bonne administration de la justice, la cour d'appel, qui n'a pas statué au regard des règles de droit applicables, a, par excès de pouvoir, violé l'article 12 du code de procédure civile ;
8./ ALORS, enfin, QUE la répartition des coûts relatifs au traitement de l'eau effectuée au sein d'un immeuble est proportionnelle à la consommation d'eau traitée par chaque occupant ; qu'en l'espèce, il résultait du rapport d'expertise que pour l'année 2007, la SA KOHLER REHM avait consommé 25 734 m3 sur les 26 138 m3 relevés pour l'ensemble de l'immeuble, soit 98, 45436 % ; qu'en jugeant que la SCI KOHLER ne pouvait demander le moindre paiement au titre des factures de traitement des eaux à sa locataire, la SA KOHLER REHM, la cour d'appel qui a retenu que celle-ci justifiait avoir sa propre installation de traitement de l'eau, qu'elle ne connaissait pas le mode de calcul de la quote-part mise à sa charge, et que les factures n'avaient pas été soumises à l'expert, circonstances pourtant inopérantes à établir que l'eau consommée par la locataire ne bénéficiait pas du traitement mis en place par le bailleur, seule circonstance de nature exonérer cette dernière de toute participation au titre des factures régulièrement produites en cause d'appel, la cour d'appel a violé l'article 1728 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI KOHLER de sa demande de résiliation du bail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les charges postérieures au redressement judiciaire (année 2007) ; les prétentions de la SCI KOHLER sont en revanche recevables pour les créances postérieures, qui peuvent donner lieu à condamnation, s'agissant de dettes qui sont liées à l'occupation régulière des locaux par KOHLER REHM en vertu du bail poursuivi ; que ces créances sont privilégiées dans les termes de l'article L. 622-17 du code de commerce, étant observé qu'il n'est pas discuté qu'elles ont été portées à la connaissance de l'administrateur judiciaire et du mandataire judiciaire ; qu'il est mis en compte des créances de charges postérieures au jugement d'ouverture pour un montant de 84 139, 08 €, résultant d'un tableau qui s'établit comme suit (après des corrections et des modifications dont il n'est pas justifié de manière précise) : mars à décembre 2007 : 61 898, 24 €- versements :-10 316, 37 € soit : 51 581, 87 € ; solde de charges 2008 : 608, 93 € ; solde de charges 2009 : 7 669, 27 € ; solde de charges 2010 : 5 911, 04 € ; solde de charges 2012 : 18 867, 95 € soit : 33 057, 19 € ; total : 84 639, 08 € ; qu'en ce qui concerne les charges de mars à décembre 2007, la créance de 61 898, 24 € résulte d'un décompte de charges de 2007 vérifié par l'expert pour un montant de 74 775, 48 € auquel la SCI KOHLER ajoute deux factures omises par l'expert pour 5 416, 64 € avant de déduire un versement de la locataire de 18 293, 88 € ; qu'il est constant que le bailleur a ainsi ajouté deux quotes-parts sur des factures non soumises à l'expert (et non omises par celui-ci) pour 5 416, 64 € qui n'ont pas été véritablement expliquées par la SCI KOHLER ; qu'il semble qu'elles concernent la fourniture de produits de traitement, mise sans explication à la charge de la locataire ; que celle-ci objecte à juste titre qu'elle ne peut devoir une participation faute de connaître le mode de calcul de la quote-part mise à sa charge, notamment pour l'adoucisseur, étant relevé qu'elle a mis elle-même en place un appareil analogue et en justifie par des factures postérieures des 23 décembre 2009, 26 juin et 22 juin 2011 ; que le montant théorique des charges s'établit ainsi pour 2007 :- charges vérifiées par l'expert : 74 775, 48 €- à déduire deux versements de KOHLER REHM selon les conclusions de l'intimée (p. 13) : 18 293, 88 € selon les conclusions de l'intimée (p. 30) : 10 316, 37 €- soit un solde théorique de : 46 165, 13 € ; qu'il est constant par ailleurs qu'en 2007 la consommation d'eau a accusé une augmentation significative passant d'un montant moyen de 20 000 € à un montant dépassant 70 000 € ; que l'expert judiciaire nommé n'a pas identifié de façon indiscutable la ou les causes de cette surconsommation temporaire ; que dans son rapport d'expertise du 21 décembre 2009 complété le 18 mai 2011, l'expert judiciaire M. X..., éclairé par un sapiteur, M. Y... a constaté, en résumé, les éléments suivants :- les compteurs étaient affectés uniquement au locataire KOHLER REHM ;- la surconsommation ne pouvait trouver son origine dans un besoin exponentiel de KOHLER REHM ; que la consommation de 2007 a atteint un niveau nettement plus élevé que la moyenne 71 000 (HT) au lieu de 20 000 € en moyenne ; que la situation des lieux, notamment des compteurs et des conduites, a été décrite par un huissier de justice selon plusieurs constats des 22 janvier, 7 avril et 21, août 2014, sans qu'il puisse en être déduit des anomalies imputables à l'exploitant du fonds de commerce ; que l'expert a ainsi constaté que la forte consommation d'eau affectait l'un des compteurs qui enregistraient les groupes de froid de la locataire, tout en admettant que l'origine n'était pas vérifiable et a envisagé plusieurs causes, comme la défaillance de certains groupes ou des besoins croissants liés à l'activité de la locataire ; que les relevés incombant au bailleur, il appartenait à celui-ci de constater cette augmentation anormale et d'en faire part à sa locataire ;
que la Cour retient, à cet égard les objections formulées par la locataire sur la négligence du bailleur vis-à-vis d'une situation mal maîtrisée ; que KOHLER REHM reproche au bailleur de ne pas avoir attiré son attention, alors qu'il lui était aussi loisible de vérifier sa propre consommation et ne justifie pas qu'elle était dans l'impossibilité totale de le faire, et ne démontre pas non plus qu'elle n'avait pas accès aux compteurs ; ceci étant, la SCI KOHLER, en n'individualisant pas les compteurs, a elle-même contribué à l'imprécision des décomptes périodiques de charges et ne démontre pas non plus que l'augmentation significative de la consommation de 2007 serait due à une activité brassicole de KOHLER REHM, alors que cette activité avait pris fin en 2006 selon un constat d'huissier du 14 septembre 2006 ; quant aux groupes de réfrigération et de climatisation évoqués par l'expert, il a été établi par KOHLER REHM qu'elle avait cessé de faire fonctionner la réfrigération et qu'elle n'avait pas de système de climatisation, selon plusieurs attestations de salariés en ce sens ; qu'enfin, l'expert a relevé le caractère imprécis et inexact de la clé de répartition mise en place par le bailleur, tandis qu'un salarié de KOHLER REHM a attesté de ce que le bailleur n'avait pas expliqué les modes de répartition qu'elle appliquait ; que KOHLER REHM justifie de plusieurs lettres recommandées réclamant au bailleur la possibilité de vérifier les décomptes, s'échelonnant entre 2004 et 2008, sans que le bailleur justifie d'explications pertinentes, sinon en indiquant que les documents étaient à la disposition de la locataire ; qu'il est sans intérêt pour la solution du litige de faire produire des décomptes plus détaillés par le bailleur ; que la Cour estime nécessaire à une bonne administration de la justice de retenir la consommation moyenne pour l'année 2007 en raison de l'absence de facteur de surconsommation imputable à la seule exploitation de la locataire plutôt qu'à un état défectueux des installations ou à une répartition imprécise des charges ; qu'au vu de ces éléments, il sera fait un partage du surcoût à raison de trois quarts à la charge de la locataire, normalement tenue des charges liées à sa consommation, et d'un quart à la charge du bailleur, qui s'est contenté de répercuter sur sa locataire ces charges sans veiller à l'entretien des installations ; que la surconsommation constatée en 2007 peut être évaluée à 71 166 € (montant facturé) moins 20 000 €, soit 51 266 € dont 10/ 12èmes sont imputables à la période postérieure au jugement d'ouverture, soit 42 721 € ; que ce montant sera supporté par KOHLER REHM à raison des trois quarts soit 32 040 € ; que compte tenu des règlements effectués (10 316, 37 € et 18 292, 88 €) selon les conclusions de la SCI KOHLER, il y a lieu de considérer que KOHLER REHM reste devoir un solde de 3 430, 75 € à ce titre […] qu'au fond, la demande de résiliation est fondée sur les seuls motifs alors invoqués ; que la demande de résiliation est fondée sur les seuls motifs alors invoqués ; le défaut de paiement régulier des charges depuis 2002 ainsi qu'un différentiel de loyer non acquitté ; que dans ses dernières conclusions, la SCI KOHLER invoque aussi d'autres faits :- le non-paiement des charges pour plus de 80 000 € portées aujourd'hui à plus de 120 000 € ;- des incidents de paiements anciens ayant conduit à un premier commandement de payer le 6 avril 2006 et qui demeurent fautifs malgré la procédure de redressement judiciaire ;- qu'un arriéré important antérieur au 27 février 2007 pour les loyers (132 316, 22 €) et pour les charges (70 30 085, 82 €) ;- la poursuite des incidents de paiement après le jugement de redressement judiciaire ;- l'existence d'une procédure de fixation du loyer pendante devant le juge des loyers commerciaux ; qu'enfin, le fait que la locataire ne règle plus l'indexation depuis le mois d'avril 2010, alors que la procédure pendante ne la dispensait pas de régler le prix revalorisé ; que les faits antérieurs au jugement de redressement judiciaire (impayés de charges et de loyers) ne peuvent donner lieu à une résiliation du bail par application de l'article L. 622 du code de commerce ; quant aux infractions au bail postérieures au jugement de redressement judiciaire ; qu'il est constant, après sa mise en redressement judiciaire, KOHLER REHM a été confrontée à des consommations particulièrement élevées pour lesquelles une expertise judiciaire a été nécessaire et s'est vue réclamer des charges justifiées en leur principe mais peu explicites dans la clé de répartition appliquée ; qu'il a également réglé le loyer sans sa revalorisation, mais le loyer fait l'objet d'une procédure de fixation devant le juge des loyers commerciaux ; qu'en outre, l'exécution du plan de redressement judiciaire qu'elle a obtenu et qui semble respecté peut justifier dans une certaine mesure les difficultés financières rencontrées ; qu'enfin, KOHLER REHM a présenté un décompte des règlements effectués de 2002 à 2013 faisant apparaître des paiements annuels de loyers et de charges (sauf les montants contestés) au titre de la période d'observation et du plan de redressement ; qu'au vu de ces éléments, l'attitude de KOHLER REHM ne caractérise pas une volonté délibérée et répétée de se soustraire à ses obligations suffisamment grave pour justifier la résiliation ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le bailleur peut obtenir la résiliation d'un bail commercial s'il établit à la charge de son locataire une ou des fautes suffisamment graves pour lui faire perdre son fonds de commerce et son droit au bail ; qu'il est admis que des sommes impayées, que ce soit pour des loyers ou pour des charges, peuvent constituer une faute suffisante ; qu'en l'espèce, l'historique contentieux entre les parties remonte à près d'une dizaine d'années, et peut ainsi constituer, du point de vue de la bailleresse, une faute objective ; mais elle n'apparaît pas au tribunal constituer une faute objective du fait que tous les impayés ont bénéficié d'un traitement judiciaire et que le plan d'apurement des dettes est en cours d'exécution ; qu'une seule exception doit être apportée à ce tableau général : les réticences pour le paiement des charges d'eau ; mais cette réticence trouve déjà sa sanction dans le présent jugement qui déboute la SA KOHLER REHM de sa demande en octroi de délai de paiement sur six huit mois ;
1./ ALORS, QU'en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la cassation qui interviendra sur le premier moyen entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt qui a débouté la SCI KOHLER de sa demande de résiliation ;
2./ ALORS, en tout état de cause, QUE pendant la durée de l'instance relative à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé, le locataire est tenu de continuer à payer les loyers échus au prix ancien, ajusté en fonction des variations indicielles prévues au contrat ; que dès lors, en se bornant à retenir que le loyer faisait l'objet d'une procédure de fixation devant le juge des loyers commerciaux, pour considérer que la société KOHLER REHM n'avait commis aucune faute de nature à justifier la résiliation du contrat à ses torts en ne s'acquittant, depuis 2010, que du montant du loyer sans sa revalorisation, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette revalorisation ne résultait pas de l'application d'une clause d'indexation insérée au contrat de sorte que le preneur était tenu de la payer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-57 du code de commerce.