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22/06/2017 | FRANCE | N°16-16381

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 juin 2017, 16-16381


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 4 mai 2000, M. Y..., président de l'association Asphodèle, a été mis en examen des chefs d'abus de confiance et de banqueroute, et placé sous contrôle judiciaire ; que, par arrêt du 10 mai 2012, la cour d'appel de Bordeaux a prononcé une relaxe partielle et retenu les faits de banqueroute ; que, le 17 août 2001, M. Y... a été cité à comparaître devant le tribunal correctionnel de Marmande du chef d'escroquerie, sans qu'aucune décision ne soit intervenue de

puis lors ; qu'invoquant le fonctionnement défectueux du service public ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 4 mai 2000, M. Y..., président de l'association Asphodèle, a été mis en examen des chefs d'abus de confiance et de banqueroute, et placé sous contrôle judiciaire ; que, par arrêt du 10 mai 2012, la cour d'appel de Bordeaux a prononcé une relaxe partielle et retenu les faits de banqueroute ; que, le 17 août 2001, M. Y... a été cité à comparaître devant le tribunal correctionnel de Marmande du chef d'escroquerie, sans qu'aucune décision ne soit intervenue depuis lors ; qu'invoquant le fonctionnement défectueux du service public de la justice, M. Y... et son épouse ont assigné l'Agent judiciaire de l'Etat en réparation de leurs préjudices, sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à voir juger excessive la durée de la procédure pénale engagée pour abus de confiance et banqueroute, alors, selon le moyen, que tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle est constitutif d'un déni de justice et toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi est constitutive d'une faute lourde ; que la violation du droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable caractérise un tel manquement ou, à tout le moins, une telle faute ; qu'en l'espèce, il s'est écoulé treize ans entre l'enquête de police et l'arrêt de la cour d'appel, l'instruction ayant duré quatre ans et la procédure à l'encontre de M. Y... ayant été retardée durant près de six ans en raison de la jonction de cette procédure avec celle de Mme C... ; que de tels délais caractérisent objectivement un déni de justice ou une faute lourde ; qu'en jugeant que M. et Mme Y... ne rapportaient pas la preuve d'un déni de justice non plus que d'une faute lourde, la cour d'appel a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'arrêt relève que l'affaire financière en cause était complexe, ayant nécessité d'examiner les mouvements de fonds entre plusieurs structures et donné lieu à une expertise comptable ; qu'il énumère l'ensemble des actes accomplis par le juge d'instruction, qui a procédé à diverses auditions et confrontations, désigné un expert et délivré une commission rogatoire afin d'entendre plusieurs personnes, dont Mme C..., mise en examen en 2003 ; qu'il ajoute que les deux mis en examen ont exercé de multiples recours, la Cour de cassation ayant rendu quatre décisions entre la fin de l'instruction et l'audience devant le tribunal correctionnel ; qu'il constate que ce tribunal a examiné l'affaire le 9 décembre 2010 et rendu son jugement le 3 février 2011 et que la chambre des appels correctionnels a prononcé son arrêt le 10 mai 2012 ; qu'enfin, il énonce qu'il était nécessaire de juger ensemble M. Y... et Mme C..., la demande du procureur général près la cour d'appel d'Agen aux fins de désignation d'une juridiction unique pour connaître des affaires les concernant ayant été accueillie dans un souci de bonne administration de la justice ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu décider que la procédure avait été traitée dans un délai raisonnable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les troisième, quatrième, cinquième et sixième branches du moyen, ci-après annexé :

Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la première branche du moyen :

Vu les articles L. 141-1 et L. 141-3, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire ;

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice et, sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice ; que, selon le second, il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou négligent de juger les affaires en état et en tour d'être jugées ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. et Mme Y... tendant à voir engager la responsabilité de l'Etat du fait de l'absence de décision rendue par le tribunal correctionnel de Marmande, l'arrêt énonce que, si cette absence de décision conduit à retenir l'existence d'un renvoi de l'affaire sans indication d'une nouvelle date d'audience, aucune disposition du code de procédure pénale n'impose au tribunal de fixer une telle date et que le procureur de la République retrouve, en cas de renvoi de l'affaire "sine die", le pouvoir d'apprécier l'opportunité des poursuites ; qu'il en déduit que la décision de ne pas délivrer une nouvelle citation, prise dans l'exercice de ce pouvoir propre au ministère public, ne s'analyse pas en un déni de justice, le tribunal n'étant pas saisi de prétentions émanant du prévenu, qui ne peut que s'opposer aux poursuites exercées à son encontre ;

Qu'en se prononçant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que M. Y... avait déposé à l'audience des conclusions en nullité de la citation, de sorte qu'il incombait à la juridiction pénale saisie de fixer le terme à l'issue duquel l'affaire serait à nouveau appelée pour qu'il soit statué sur ces conclusions, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. et Mme Y... tendant à voir engager la responsabilité de l'Etat du fait de l'absence de décision rendue par le tribunal correctionnel de Marmande, l'arrêt rendu le 12 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne l'Agent judiciaire de l'Etat aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les époux Y... de leur demande tendant à voir dire et juger que le service public de la justice avait commis des dénis de justice et des fautes lourdes et à ce que l'agent judiciaire soit condamner à payer à M. Y... la somme de 40 000 € et à Mme Z..., épouse Y..., la somme de 10 000 €, à titre de dommages-intérêts en réparation de leurs préjudices moraux, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en justice, ainsi que 10 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Sur les dénis de justice, s'agissant de la citation à comparaître devant le tribunal correctionnel de Marmande délivrée le 17 août 2001, les appelants déclarent qu'après avoir pris connaissance des conclusions du prévenu, le ministère public a sollicité le renvoi de l'affaire, ce que le tribunal a fait sine die et qu'aucune décision n'a jamais été rendue dans cette affaire ; que M. Y... fait valoir qu'il n'a pas été associé à ce renvoi, qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir demandé à comparaître de nouveau et que l'absence de décision l'a privé d 'une éventuelle relaxe ; qu'il soutient que le fait de négliger de juger une affaire constitue un déni de justice, privant le justiciable du droit de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable, sans que l'acquisition de la prescription puisse venir atténuer la responsabilité de l'Etat ; qu'il explique qu'il était titulaire d'une promesse d'embauché soumise à la condition suspensive qu'il obtienne sa relaxe dans ladite affaire et qu'il s'est trouvé privé du bénéfice de cet emploi, faute d'avoir pu justifier d'une telle décision ; que l'AJE répond que le renvoi de l'affaire résulte d'une décision du tribunal à laquelle le prévenu pouvait s'opposer et qu'il semble qu'en réalité le ministère public a renoncé aux poursuites après s'être accordé sur un renvoi sine die avec le prévenu et son conseil ; qu'il s'étonne par ailleurs que titulaire d'une promesse d'embauché sous condition suspensive, l'intéressé ait attendu 11 ans pour se plaindre de l'absence de décision ; que l'article L. 141-3 du code de l'organisation judiciaire dispose que : "les juges peuvent être pris à partie dans les cas suivants ... 2° s'il y a déni de justice. Il y a déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux enquêtes ou négligent de juger les affaires en état de l'être
" ; que le déni de justice s'entend non seulement comme le refus de répondre aux requêtes ou le fait de négliger les affaires en l'état d'être jugées mais aussi plus largement, comme tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle de l'individu qui comprend le droit pour le justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable ; que le déni de justice est caractérisé par tout manquement de l'Etat à son devoir de permettre à tout personne d'accéder à une juridiction pour faire valoir ses droits dans un délai raisonnable et s ' apprécie à la lumière des circonstances propres à chaque espèce en prenant en considération la nature de l'affaire, son degré de complexité, le comportement de la partie qui se plaint de la durée de la procédure et les mesures prises par les autorités compétentes ; que M. Y... verse aux débats la citation à comparaître du 17 août 2001 ainsi que des conclusions qu'il aurait déposées lors de l'audience du tribunal correctionnel s'étant tenue le 6 septembre suivant ; qu'il n'est produit aucun document matérialisant la décision prise par le tribunal à l'issue de l'audience mais il est constant que M. Y... n'a pas été jugé pour les faits objet de cette citation ; que cette absence de décision conduit à retenir l'existence d'un renvoi de l'affaire par le tribunal sans indication d'une nouvelle date d'audience (sine die) ; qu'il n'existe pas d'élément permettant de savoir si le prévenu a ou non accepté un tel renvoi ; que néanmoins aucune disposition du code de procédure pénale n'impose au tribunal correctionnel de fixer la date d'une prochaine audience lorsqu'il décide de renvoyer une affaire et il appartient alors au procureur de la République de procéder à une nouvelle citation s'il l'estime opportun ; que le procureur de la République retrouve ainsi, en cas de renvoi de l'affaire sine die, le pouvoir d'apprécier l'opportunité des poursuites et la décision de ne pas re-citer prise dans l'exercice de ce pouvoir propre au ministère public ne s'analyse pas en un déni de justice, le tribunal n'étant, par ailleurs, pas saisi de prétentions émanant du prévenu, qui ne peut que s'opposer aux poursuites exercées à son encontre ; qu'il convient au surplus de relever que M. Y... n'a pas pris attache auprès du procureur de la République avant le 10 octobre 2012 afin de connaître ses intentions à son égard et sa volonté ou non d'exercer des poursuites à son encontre alors qu'une réponse négative de ce dernier lui aurait permis de lever la condition suspensive qu'il évoque ; que s'agissant de la lenteur de la procédure pénale pour banqueroute, M. Y... invoque l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'obligation déjuger les affaires dans un délai raisonnable ; qu'il fait valoir qu'entre l'enquête de police et l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux il s'est écoulé 13 ans alors que l'affaire n'était pas spécialement complexe, que l'instruction a duré 4 ans, qu'il s'est écoulé un an avant qu'un expert ne soit désigné et encore un an entre le dépôt du rapport et sa convocation par le juge d'instruction et qu'il s'est enfin écoulé 6 ans entre la fin de l'instruction et l'audience devant le tribunal correctionnel de Bordeaux ; qu'il soutient qu'il n'avait pas à supporter le retard dû aux recours exercés par la co-mise en examen ; qu'il ajoute que le fait que la cour ait réduit les sanctions n'a pas d'incidence sur la durée excessive de la procédure et qu'il ne peut lui être reproché d'avoir exercé des voies de recours ; qu'à titre subsidiaire, si la longueur de la procédure ne constituait pas un déni de justice, M. Y... fait valoir qu'il s'agirait d'une faute lourde telle que prévue par l'article L141-1 du code de l'organisation judiciaire ; que l'AJE reprend les différentes étapes de la procédure pour conclure que l'appréciation in concreto de la procédure complexe qui a donné lieu à de multiples recours dont certains inutiles et dilatoires, permet d'écarter l'existence d'un délai anormal ; qu'il convient de rappeler les éléments suivants : une enquête a été confiée au service de police judiciaire à la suite de dénonciations opérées par des commissaires aux comptes en mai 1999 ; qu'une information a été ouverte au tribunal de grande instance de Marmande en 2000, au cours de cette information, le juge d'instruction a entendu M. Y... et a procédé à sa confrontation avec deux autres personnes, a désigné un expert chargé de réaliser une analyse financière d'ensemble des associations AEIH 1 et Asphodèle, il a entendu, à plusieurs reprises, l'expert-comptable commun aux 2 associations avant de procéder à une nouvelle audition de M. Y..., il a également fait délivrer une commission rogatoire afin d'entendre plusieurs personnes dont Mme C... qui sera également mise en examen en 2003 et il a rendu un avis de fin d'instruction le 23 mai 2003 puis une ordonnance de renvoi le 31 décembre 2004, à la suite d'un réquisitoire définitif du parquet du 14 décembre 2004 ; que les deux mis en examen ont saisi la chambre de l'instruction d'une requête en nullité le 11 juin 2003 sur laquelle la cour a statué par un arrêt du 19 novembre 2003, lequel a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, rejeté le 10 mars 2004 ; que M. Y... a, à nouveau, saisi la chambre de l'instruction le 11 janvier 2005 d'un recours contre l'ordonnance de renvoi sur lequel la cour d'appel a statué par un arrêt du 23 mars 2005 ; que Mme C... a également exercé un recours le 28 février 2005, le président de la chambre de l'instruction d'Agen a rendu le 19 septembre 2005 une décision de non admission, la Cour de cassation saisie a annulé cette décision le 14 février 2006 ; que la chambre de l'instruction a rendu le 21 mars 2007 un arrêt sur le recours de Mme C... qui a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, et la cour suprême a cassé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Bordeaux par une décision du 27 juin 2007 ; que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux a rendu un arrêt le 17 avril 2008 qui a renvoyé Mme C... devant le tribunal correctionnel de Bordeaux, le pourvoi contre cet arrêt a été rejeté le 6 mai 2009 ; que le procureur général près la cour d'appel d'Agen a adressé le 24 novembre 2009 une requête à la Cour de cassation qui par un arrêt du 9 décembre suivant a renvoyé l'affaire concernant M. Y... devant le tribunal de grande instance de Bordeaux ; que le tribunal a examiné l'affaire le 9 décembre 2010 et a rendu son jugement le 3 février 2011 ; que la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Bordeaux a rendu sa décision le 10 mai 2012 ; qu'il convient tout d'abord de relever que l'affaire financière en cause qui nécessitait d'examiner les mouvements de fonds entre plusieurs structures et qui a donné lieu à une expertise comptable était complexe ; qu'au regard de cette complexité, l'énumération des actes accomplis par le juge d'instruction et des décisions rendues par les chambres d'instruction des cours d'appels d'Agen et de Bordeaux ainsi que par la Cour de cassation qui a rendu 4 décisions entre la fin de l'instruction et l'audience du tribunal correctionnel, suffisent à établir que cette procédure a été traitée avec diligence ; que M. Y... qui a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Marmande par l'arrêt de la chambre de l'instruction du 23 mars 2005, n'a comparu devant le tribunal correctionnel de Bordeaux que le 9 décembre 2010 en raison des multiples recours exercés par la co-mise en examen ; que néanmoins la requête du procureur général près la cour d'appel d'Agen du 24 novembre 2009 relevait la nécessité de juger ensemble M. Y... et Mme C... qui avaient "commis des fautes indissociables comme co-auteurs alors qu'ils étaient associés dans les mêmes structures" et la Cour de cassation dans un souci de bonne administration de la justice, a fait droit à la demande de désignation d'une unique juridiction pour connaître des affaires les concernant ; qu'il ressort ainsi de ces éléments qu'il était nécessaire de juger ensemble M. Y... et Mme C... et que ce dernier ne peut imputer à un mauvais fonctionnement du service public de la justice le temps écoulé entre 2005 et 2010 ; que les époux Y... ne rapportent donc pas la preuve d'un déni de justice non plus que d'une faute lourde et le jugement du tribunal de grande instance de Paris doit donc être confirmé sur ce point ; Sur les fautes lourdes : les époux Y... exposent que par une ordonnance du 13 avril 2001, le président du tribunal de grande instance de Marmande a désigné un mandataire ad'hoc alors que l'article 37 de la loi du 1er mars 1984 dans sa version en vigueur à cette date, ne lui permettait pas de le faire d'office mais uniquement sur requête du représentant de l'entreprise ; qu'ils ajoutent que le président du tribunal de grande instance de Marmande a rendu une 2ème ordonnance le 29 juin 2001 en confiant à l'administrateur ad'hoc la mission d'administrer provisoirement l'AEIH en lieu et place du conseil d'administration et de procéder à l'examen du contrat de travail de M. Y...; que les époux Y... font valoir que la mission ainsi définie excédait les limites prévues par la loi, la nomination d'un administrateur ad'hoc ayant pour but de permettre une analyse de la situation de l'entreprise et de jeter les bases d'un accord en vue de permettre les négociations ; qu'ils considèrent donc que le président du tribunal a outrepassé ses pouvoirs, ce qui a conduit au licenciement de l'appelant ; qu'enfin il déclarent que par une 3eme ordonnance du 3 octobre 2001, le président a prorogé la mission de l'administrateur ad'hoc, sans qu'une requête ait été déposée en ce sens et sans que les représentants de l'association aient été convoqués ; que l'AJE fait valoir que la procédure critiquée a été initiée à la suite d'un rapport d'audit qu'un des administrateurs de l'AEIH mandaté par le conseil d'administration a transmis au procureur de la République le 22 mars 2001 en lui demandant de mettre en place une procédure d'alerte ; qu'il ajoute que le président du tribunal de grande instance de Marmande a rendu sa 1ère décision au visa de ce rapport d'audit en présence du procureur de la République et du président du conseil d'administration dont il a recueilli les observations ; que l'AJE déclare que la 2ème ordonnance a été rendue sur les conclusions du parquet et les observations de M. D... ayant reçu une délégation de pouvoir du président du conseil d'administration ; que s'agissant de la 3ème ordonnance, l'AJE ne relève pas d'élément permettant d'apprécier son caractère contradictoire mais il fait valoir qu'elle était nécessaire et ne constituait pas un excès de pouvoir ; que le président du tribunal de grande instance de Marmande a désigné un administrateur ad'hoc en application des articles L. 611-5 et L. 611-2 du code de commerce dans sa version en vigueur en 2001, ce dernier disposant que " lorsqu'il résulte de tout acte, tout document ou procédure qu'une société... connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, ses dirigeants peuvent être convoqués par le président du tribunal de commerce pour que soient envisagées les mesures propres à redresser sa situation" ; que contrairement aux dispositions de l'article L. 611-3 relatif à la procédure de règlement amiable avec désignation d'un conciliateur, celles relatives au mandataire ad'hoc ne prévoyaient pas que le président était saisi par une requête des dirigeants ; que ces dispositions en outre, ne définissaient pas précisément la mission qui pouvait être conférée ; que dans ce cadre législatif, le président du tribunal de grande instance de Marmande connaissance prise du rapport d'audit de M. E...             , a par son ordonnance du 13 avril 2001, désigné un mandataire ad'hoc chargé d'établir un bilan de la situation financière, économique et sociale de l'AEIH et de faire toute proposition en précisant notamment s'il convenait d'envisager une procédure de redressement judiciaire, après avoir recueilli les observations du président de son conseil d'administration ainsi que celles du ministère public ; que le président du tribunal a renouvelé par une ordonnance du 29 juin 2001, la désignation du mandataire ad'hoc en lui conférant la mission d'administrer provisoirement l'association, après avoir recueilli les observations du procureur de la République et de M. D... qui au vu des lettres communiquées par les appelants, était le 5 avril 2001 le vice-président de l'AEIH et le 2 novembre 2001 son président ; que par cette 2ème ordonnance, le mandataire ad'hoc a été spécialement chargé d'examiner le contrat de travail de M. Y... dans l'incapacité de remplir ses fonctions, en prenant toute mesure utile dans l'intérêt de l'association dans le cadre des pouvoirs définis à l'article 9 des statuts ; que ces décisions n'ont été contestées par les organes représentatifs de l'association ni quant à leur légalité ni quant à leur opportunité ; que par ailleurs il était nécessaire d'examiner la situation de M. Y... directeur général de l'association dès lors qu'il se trouvait dans l'incapacité d'exercer ses fonctions en raison des obligations du contrôle judiciaire dont il faisait l'objet ; qu'il appartenait à M. Y... s'il estimait que le licenciement décidé par le mandataire ad'hoc était injustifié de saisir le conseil des prud'homme en vue de le faire juger, ce qu'il n'a pas fait ; qu'enfin, par une ordonnance du 3 octobre 2001, le président du tribunal de grande instance de Marmande a prorogé la mission de l'administrateur jusqu'au 31 décembre de la même année ; qu'il ne ressort pas qu'il ait, préalablement à sa décision, consulté le représentant de l'association, néanmoins cette ordonnance ne modifiait pas les pouvoirs du mandataire ad 'hoc et n'a pas fait l'objet de contestation de la part de l'association ; que les conditions dans lesquelles ces décisions ont été prises ne peuvent donc constituer une faute lourde ; que les appelants reprochent également au juge d'instruction un manque d'impartialité car il avait siégé dans l'instance ayant prononcé la liquidation judiciaire de l'association Asphodèle ainsi que d'autres structures alors que les infractions objet de la procédure pénale qu'il a instruite, étaient intimement liées aux procédures collectives de redressement et liquidation judiciaire ; que la question de l'impartialité du juge d'instruction a déjà été soumise à la chambre criminelle de la Cour de cassation qui dans son arrêt du 10 mars 2004, a rejeté ce moyen de cassation en relevant que " les demandeurs (M. Y... et Mme C...) ne sauraient se faire grief de ce qu'en méconnaissance de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, le juge d'instruction avait antérieurement à sa désignation, participé au jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire puis à la décision étendant cette procédure et enfin au jugement de liquidation, dès lors que cette circonstance n'est pas en soi de nature à faire naître un doute objectivement justifié sur l'impartialité du magistrat en cause" ; qu'il y a lieu de reprendre ces motifs ainsi que ceux du tribunal selon lesquels les objets de la procédure commerciale et de la procédure pénale ouverte un an après sont différents et que par ailleurs, M. Y... n'a pas usé des voies de droit qui lui étaient offertes s'il entendait dénoncer la partialité du juge ; qu'en dernier lieu, M. Y... expose qu'il a été soumis à un contrôle judiciaire "drastique" pendant toute la durée de la procédure pénale avec interdiction de rencontrer tout salarié, dirigeant, sociétaire, expert-comptable et commissaire aux comptes de l'association AEIH et des diverses structures du groupe Asphodèle ; qu'il fait valoir que lors de son licenciement, il a sollicité du juge d'instruction l'autorisation de rencontrer des membres de l'association en vue de lui permettre d'assurer sa défense dans le cadre d'une action prud'homale et que celle-ci lui a été refusée, il soutient que les rejets systématiques de ses demandes de modification du contrôle judiciaire constituent des fautes lourdes car non justifiées par les nécessités de l'information pénale ; qu'il relève ainsi qu'à la clôture de l'instruction, toutes les structures incriminées avaient été liquidées, qu'aucun transfert de fond n'était plus possible et que lui-même ayant été licencié ne disposait plus d'aucun pouvoir, qu'ainsi aucune réitération des faits n'était possible ; que l'AJE réplique que les appelants ne peuvent remettre en cause des décisions définitives alors qu'ils n'ont pas exercé de voie de recours ; qu'il ajoute que M. Y... pouvait faire entendre les membres de l'association par le conseil des prud'hommes ou solliciter de cette juridiction un sursis à statuer ; que M. Y... a été placé sous contrôle judiciaire le 4 mai 2000 avec l'obligation de répondre aux convocation de l'autorité désignée, de s'abstenir d'entrer en contact avec des personnes de l'association AEIH 1 et diverses structures de l'ancien groupe Asphodèle et de ne pas se livrer à des activités de direction, de gérance ou salariées au sein de l'association AEIH 1 et diverses structures de l'ancien groupe Asphodèle ; que M. Y... verse aux débats l'ordonnance du juge d'instruction rendue le 14 décembre 2001 rejetant sa demande tendant à la modification de l'obligation de ne pas entrer en contact avec les membres de l'association, ses salariés, son expert-comptable et son commissaire-priseur ; que l'ordonnance est motivée par le fait que des investigations sont en cours, en particulier une expertise comptable complexe et que cette mesure est nécessaire dans l'attente des résultats ; que cette décision n'a pas été frappée d'appel et M. Y... qui ne précise pas quelles personnes il aurait souhaité contacter, ne démontre pas que le refus qui lui a été opposé, était injustifié au regard des nécessités de l'instruction ; que M. Y... qui qualifie de systématique le refus du juge d'instruction de modifier les obligations du contrôle judiciaire n'a produit que sa demande du 10 décembre 2001 et l'ordonnance du 14 décembre suivant ; que ces seuls éléments ne permettent pas de retenir une opposition "systématique" du magistrat instructeur ; que le 31 décembre 2004, le juge d'instruction a clôturé son instruction en maintenant l'intégralité des obligations du contrôle judiciaire imposées à M. Y... aux motifs que cette mesure était nécessaire pour éviter le renouvellement de l'infraction et garantir la représentation en justice de la personne mise en examen ; qu'il convient également de constater que M. Y... n'a exercé aucun recours contre cette décision et qu'il n'a pas ultérieurement saisi la cour d'appel d'une demande d'allégement de ses obligations ; que l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ne peut être retenue que dans la mesure où l'exercice des voies de recours n' a pas permis de réparer le mauvais fonctionnement allégué ; que M. Y... ne peut donc invoquer l'existence d'une faute lourde tenant à cette décision alors qu'il n'a pas fait usage des voies de droit qui lui étaient ouvertes ; que les appelants n'établissent donc pas l'existence d'une faute lourde imputable au service public de la justice » ;

ET AUX MOTIFS, REPUTES ADOPTES, QUE « Sur les dénis de justice : que M. et Mme Y... soutiennent que M. Y... a été victime d'un déni de justice dans chacune des deux procédures pénales dont il a fait l'objet, en raison de l'absence de décision intervenue dans l'instance introduite par une citation du 17 août 2001 devant le tribunal correctionnel de Marmande, et de la lenteur excessive de la procédure qui a abouti à l'arrêt rendu le 10 mai 2012 par la cour d'appel de Bordeaux ; Sur l'absence de décision de justice dans le cadre de l'instance devant le tribunal correctionnel de Marmande : que M. et Mme Y... arguent d'une "inertie de la juridiction" qui a privé M. Y... "d'une éventuelle décision de relaxe", au motif que le Ministère public, qui l'avait, par acte du 17 août 2001, fait citer à comparaître devant le tribunal correctionnel de Marmande, a, à l'audience, retiré sa citation après avoir pris connaissance des écritures de son conseil qui soulevait sa nullité, indiquant qu'il reciterait plus tard, et que l'affaire a été renvoyée sine die, sans qu'il ne reçoive une nouvelle citation, de sorte qu'aucune décision n'est jamais intervenue dans cette affaire ; que, cependant, M. et Mme Y... allèguent sans en justifier que le tribunal correctionnel de Marmande a décidé d'un renvoi sans date, après que le Ministère public avait, à l'audience, renoncé à se prévaloir de la citation ayant déclenché l'action publique ; qu'également, ayant renoncé à se prévaloir de cette citation, le Ministère public retrouvait le libre choix de l'opportunité des poursuites, aucun texte ne lui faisant obligation d'aviser l'auteur présumé des faits reprochés de sa décision d'abandonner les poursuites ; qu'il sera enfin relevé que l'inertie dont a fait montre M. Y... pendant les onze années qui ont suivi, en s'abstenant de toute démarche pour obtenir d'être régulièrement attrait et jugé, ainsi qu'il soutient l'avoir souhaité, contredit ses affirmations ; qu'il s'ensuit qu'aucun déni de justice n'est ici établi ; Sur le moyen pris de la lenteur excessive de la procédure pénale qui s'est achevée par l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux : que les époux Y... estiment excessif le délai qui s'est écoulé entre l'ordonnance de mise en examen de M. Y... et l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux ; qu'ils soutiennent à cet effet que le délai de l'instruction a été anormalement long, eu égard au fait que deux personnes seulement étaient mises en examen, que les faits reprochés ne présentaient pas une complexité particulière et qu'un seul juge d'instruction a instruit l'affaire, qui a procédé à peu d'investigations ; qu'ils excipent d'un délai de six années entre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel de Marmande et la convocation de M. Y... devant le tribunal correctionnel de Bordeaux ; qu'ils dément tout comportement dilatoire de M. Y... et excipent du droit qui était le sien d'exercer les voies de recours qui lui étaient ouvertes ; qu'il résulte de l'analyse des pièces versées aux débats qu'à la suite de diverses révélations, les 20 et 21 mai 1999, émanant de plusieurs commissaires aux comptes, le procureur de la République de Marmande a ordonné une enquête préliminaire, puis, au vu de ses résultats, requis le 4 mai 2000 l'ouverture d'une information et la mise en examen de M. Y... ; que d'importantes investigations ont alors été réalisées que justifiait la complexité de faits se déroulant sur plusieurs années et mettant en jeu de nombreuses structures économiques; que c'est ainsi que l'expert comptable désigné le 28 février 2001 n'a été en mesure de déposer son rapport qu'à la seule date du 29 mars 2002 ; que, malgré une réelle absence de collaboration de M. Y... et de sa co-mise en cause, Mme C..., celle-ci ayant refusé d'être entendue le 22 mai 2003, l'avis de fin d'information a été notifié aux parties le 23 mai 2003, soit après trois années d'instruction ; que ce délai ne peut être qualifié d'anormal dans une procédure portant sur de nombreux faits de nature économique et financière ; qu'ensuite, les requêtes en nullité formées le 11 juin 2003 ont été rejetées par la chambre de l'instruction ; que les pourvois contre cet arrêt de la chambre de l'instruction ont été rejetés par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 10 mars 2004 ; que l'ordonnance de renvoi a été rendue dans un délai particulièrement bref après les ultimes notifications de l'arrêt de la chambre criminelle ; que les contentieux soulevés ultérieurement par les prévenus, qui ont conduit à ce que la Cour de cassation a été saisie à quatre reprises, ont abouti au renvoi des prévenus, des chefs retenus par l'ordonnance critiquée, à la suite d'un dernier arrêt de la chambre criminelle prononcé le 6 mai 2009 ; qu'à l'issue de ces quatre années de procédure, il a été nécessaire de procéder à un regroupement des procédures, au tribunal de grande instance de Bordeaux, en exécution de l'arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 9 décembre 2009 ; que c'est ainsi finalement que, sur l'appel des prévenus contre le jugement du tribunal correctionnel de Bordeaux, la cour d'appel de Bordeaux a, par arrêt du 10 mai 2012, condamné M. Y... du seul chef de banqueroute ; que M. et Mme Y... sont parfaitement malvenus à arguer de la longueur d'une procédure que M. Y... a lui-même largement alimenté en usant amplement de toutes les voies de droit ouvertes à la défense, d'autant que la cour d'appel de Bordeaux a réduit substantiellement le quantum de la peine prononcée en première instance au motif, expressément énoncé, de l'ancienneté des faits ; Sur les fautes lourdes du service public de la justice : que constitue une faute lourde l'acte qui révèle une erreur manifeste et grossière d'appréciation des éléments de droit ou de fait soumis et qui procède d'un comportement anormalement déficient, erreur caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi et qui doit s'apprécier non au regard des événements postérieurement survenus et non prévisibles à la date de la décision, mais dans le contexte soumis au juge ; qu'en l'espèce, M. et Mme Y... excipent de fautes lourdes résultant, selon eux, de trois ordonnances entachées d'excès de pouvoir rendues par le président du tribunal de grande instance de Marmande, chargé du traitement des difficultés financières de l'AEIH, d'un jugement nécessairement préconçu du juge d'instruction, et de mesures de contrôle judiciaire drastiques imposées à M. Y... ; que s'agissant des ordonnances imputées à faute au président du tribunal de grande instance de Marmande, M. et Mme Y... soutiennent que ce magistrat s'est arrogé le pouvoir qu'il ne détenait pas, n'étant pas saisi à cette fin, de désigner d'office, le 13 avril 2001, un administrateur ad hoc de l'AEIH, puis de renouveler ce mandat à deux reprises ; mais que la désignation d'un administrateur ad hoc de l'AEIH est intervenue à la suite d'un rapport d'audit dressé par M. E...             , administrateur de l'association, mandaté à cet effet par le conseil d'administration, concluant à la mise en place d'une procédure d'alerte et transmis au procureur de la République ; que l'ordonnance a été rendue en présence du président du conseil d'administration, après que le président avait recueilli à l'audience les observations du Ministère public ; que la mission a été régulièrement prorogée une première fois; que s'il est vrai que la preuve n'est pas faite que la seconde prorogation est intervenue contradictoirement, cette circonstance ne saurait caractériser une faute lourde alors que les besoins de la procédure nécessitaient cette prorogation ; que s'agissant de l'absence d'impartialité imputée au juge d'instruction, que M. et Mme Y... prétendent déduire un jugement nécessairement préconçu du magistrat instructeur de ce que celui-ci avait précédemment siégé dans la composition du tribunal ayant prononcé le redressement puis la liquidation de l'association, et de ce que les infractions reprochées à M. Y... étaient "étroitement liées" au placement en redressement puis en liquidation judiciaire de l'association dont il était le président ; que cependant la demande de dessaisissement, la requête en récusation et celle tendant au renvoi pour cause de suspicion légitime sont les voies de droit dont dispose toute partie qui entend dénoncer un défaut d'impartialité du juge ; que force est de constater que M. Y... n'a pas jugé devoir user de l'une quelconque de ces voies de droit ; qu'également, s'il est vrai que le magistrat instructeur avait, précédemment, siégé dans la composition du tribunal ayant prononcé le redressement puis la liquidation de l'association, l'objet de cette procédure était différent en ce qu'il avait trait à une appréciation économique portée sur la situation financière de l'association, alors que l'information, ouverte près d'une année plus tard, visait l'existence d'infractions ayant pu être à l'origine des difficultés financières de l'association ; qu'au surplus, une telle circonstance n'a pu, en soi, être de nature à faire naître un doute objectivement justifié sur l'impartialité du magistrat en cause ; et que s'agissant des obligations du contrôle judiciaire qui ont été imposées à M. Y..., qualifiées de "drastiques", et dont il est soutenu que les demandes d'assouplissement ont été rejetées de manière systématique et injustifiée, que M. Y... disposait de la faculté de saisir la chambre de l'instruction d'un recours à l'encontre des refus de modification du contrôle judiciaire ; que M. et Mme Y... ne sauraient être admis à critiquer lesdites décisions judiciaires par d'autres voies que celles, de droit, qu'offre la procédure pénale ; qu'il découle de l'ensemble de ce qui précède que les prétentions de M. et Mme Y... sont injustifiées » ;

ALORS, DE PREMIERE PART, QUE tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle est constitutif d'un déni de justice ; que l'absence de décision née du renvoi de l'affaire sine die et de la décision du ministère public de ne pas citer M. Y... à comparaître durant plus de 10 ans, qui a privé M. Y... de toute décision, notamment de relaxe, caractérise un tel manquement ; que la cour d'appel, en jugeant que la décision de ne pas re-citer ne s'analyse pas en un déni de justice, a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE tout manquement de l'Etat à son devoir de protection juridictionnelle est constitutif d'un déni de justice et toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi est constitutive d'une faute lourde ; que la violation du droit pour tout justiciable de voir statuer sur ses prétentions dans un délai raisonnable caractérise un tel manquement ou à tout le moins, une telle faute ; qu'en l'espèce, il s'est écoulé 13 ans entre l'enquête de police et l'arrêt de la cour d'appel, l'instruction ayant duré 4 ans et la procédure à l'encontre de M. Y... ayant été retardé durant près de 6 ans en raison de la jonction de cette procédure avec celle de Mme C... ; que de tels délais caractérisent objectivement un déni de justice ou une faute lourde ; qu'en jugeant que les époux Y... ne rapportaient pas la preuve d'une déni de justice non plus que d'une faute lourde, la cour d'appel a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, DE TROISIEME PART, QUE constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, le président du tribunal de grande instance de Marmande a, par une ordonnance du 13 avril 2001, désigné d'office un mandataire ad'hoc, en méconnaissance des articles L. 611-2 à L. 611-5 du code de commerce, puis, par une ordonnance du 29 juin 2001, confié à ce mandataire la mission d'administrer provisoirement l'AEIH et de procéder à l'examen du contrat de travail de M. Y..., laquelle mission excédait les limites prévues par la loi et a conduit au licenciement de M. Y..., enfin, par une ordonnance du 3 octobre 2001, a prorogé d'office la mission du mandataire ; que de tels excès de pouvoirs constituent une faute lourde ; que la cour d'appel, qui a jugé le contraire, sur le fondement d'une interprétation erronée des articles L. 611-2 à L. 611-5 du code de commerce dans leur version en vigueur en 2001, a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ; que caractérise un manque d'impartialité le fait que le juge d'instruction qui a siégé seul en cette qualité au tribunal de grande instance de Marmande dans le cadre de la procédure pénale diligentée à l'encontre de M. Y..., et a procédé à sa mise en examen et à son placement sous contrôle judiciaire, avait d'abord eu à connaître des procédures collectives concernant l'association Asphodèle, dont M. Y... était président, dans le cadre de ses fonctions de juge du siège ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, DE CINQUIEME PART, QUE la faute lourde constituée par l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi peut découler d'une série de faits qui, pris isolément, n'auraient pas de caractère fautif ; que la cour d'appel, qui s'est prononcée sur chaque fait dénoncé par les époux Y... isolément, sans rechercher si cette accumulation de faits ne caractérisait pas une faute lourde, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;

ALORS, DE SIXIEME PART, QU'en énonçant d'une part, qu' « il appartenait à M. Y... s'il estimait que le licenciement décidé par le mandataire ad'hoc était injustifié de saisir le conseil des prud'hommes en vue de le faire juger, ce qu'il n'a pas fait », alors qu'elle constatait, d'autre part, que M. Y... faisait valoir que « lors de son licenciement, il a sollicité du juge d'instruction l'autorisation de rencontrer des membres de l'association en vue de lui permettre d'assurer sa défense dans le cadre d'une action prud'homale et que celle-ci lui a été refusée », ce qui démontrait que M. Y... avait été empêché d'exercer un recours effectif devant le conseil des prud'hommes, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-16381
Date de la décision : 22/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETAT - Responsabilité - Fonctionnement défectueux du service de la justice - Activité juridictionnelle - Conditions - Faute lourde ou déni de justice - Cas - Citation d'un prévenu - Conclusions en nullité de la citation - Décision de renvoi du tribunal correctionnel sans nouvelle date d'audience

JUGEMENTS ET ARRETS - Déni de justice - Applications diverses - Tribunal correctionnel - Renvoi d'un dossier sans fixation d'une date d'audience

Viole les articles L. 141-1 et L. 141-3, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire une cour d'appel qui, pour rejeter une demande tendant à voir engager la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice, du fait de l'absence de décision rendue par un tribunal correctionnel, énonce qu'aucune disposition du code de procédure pénale n'impose au tribunal, en cas de renvoi de l'affaire, de fixer une nouvelle date d'audience, alors qu'il résultait de ses propres constations que le prévenu avait déposé des conclusions en nullité de la citation, de sorte qu'il incombait à la juridiction pénale saisie de fixer le terme à l'issue duquel l'affaire serait à nouveau appelée pour qu'il soit statué sur ces conclusions


Références :

articles L. 141-1 et L. 141-3, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 avril 2016

Sur l'interdiction faite aux juridictions répressives de surseoir à statuer pour une durée indéterminée, à rapprocher :Crim., 20 mai 1987, pourvoi n° 86-96649, Bull. crim. 1987, n° 210 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 jui. 2017, pourvoi n°16-16381, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.16381
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