LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 1er mars 2016), que les propriétaires des lots de copropriété au sein d'un ensemble immobilier dénommé « Résidence du Château d'Aiffres » les ont donnés à bail commercial à la société Résidence du Château d'Aiffres, aux droits de laquelle est venue la société Santé actions devenue Actions Care puis Santé actions seniors, pour une durée de neuf années à compter du 11 février 2002 ; que, courant 2011, la société Santé actions seniors a donné aux bailleurs congé à effet du 30 juin 2013 ; que, le 26 novembre 2012, ces derniers l'ont assignée en nullité des congés et paiement d'une indemnité d'occupation jusqu'à libération des lieux ;
Attendu que la société Santé actions seniors fait grief à l'arrêt de la condamner à payer, à compter du 1er juillet 2013 jusqu'à la libération effective de chacun des lots, une indemnité d'occupation pour tous les biens donnés à bail et de fixer cette indemnité au montant des loyers contractuels ;
Mais attendu qu'ayant souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, qu'en concluant des baux commerciaux dont les conditions et la date d'expiration étaient identiques, les parties avaient conçu un ensemble contractuel formant un tout indivisible pour les besoins d'une exploitation unique et que, si chaque bail était autonome, les parties n'ayant prévu aucune clause d'indivisibilité, l'exploitation des lieux en EPHAD impliquait pour l'exploitant de pouvoir disposer de chacun des logements loués à cette fin, la cour d'appel a pu, sans se contredire, en déduire que tous les baux étaient indivisibles ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Santé actions seniors aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Santé actions seniors et la condamne à payer aux défendeurs, M. X... et soixante-six autres, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour la société Santé actions seniors.
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné le preneur à verser, à compter du 1er juillet 2013 jusqu'à la libération effective de chacun des lots, une indemnité d'occupation pour l'ensemble des biens donnés à bail et d'avoir fixé cette indemnité au montant du loyer contractuel telle qu'exigible au terme du bail renouvelé par tacite reconduction ;
aux motifs propres que la partie appelante se borne à reprendre les moyens déjà développés devant le premier juge qui y a pertinemment répondu par des motifs très complets, exacts en fait et pertinents en droit que la cour adopte ; qu'il sera observé en outre, d'une part, que le seul fait que la société Santé Actions Seniors (anciennement Sénior Care) ne libère pas effectivement les lieux en ne restituant pas les clés suffit à établir leur occupation vis-à-vis des bailleurs et, d'autre part, que, s'il est constant que chaque contrat de bail est autonome sans qu'aucune indivisibilité contractuelle ait été prévue entre eux, il n'en reste pas moins que l'exploitation des lieux en Ephad, entraîne, de facto, l'impératif pour l'exploitant de pouvoir disposer de chaque logement loué à cette fin ; que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions étant précisé que la société Seniors Care est devenue la SAS Santé Actions Séniors ; que la société Santé Actions Séniors, qui succombe, supportera la charge des dépens d'appel et sera condamné à payer, respectivement à chacune des parties intimées, la somme de 100 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (arrêt p. 9 et 10) ; et aux motifs adoptés des premiers juges que la société Seniors Care n'offre pas de libérer les lieux, mais seulement de verser une indemnité d'occupation pour les lots qu'elle occupe effectivement; et pour le temps où elle les occupe ; qu'elle n'offre au demeurant aucune justification de l'occupation effective des lieux, s'arrogeant ainsi la faculté discrétionnaire de définir sa propre obligation ; que faute de libérer effectivement les lieux, par une remise des clés qu'elle n'offre pas, la SAS Seniors Care est redevable d'une indemnité d'occupation pour le temps de son occupation ; que les baux, souscrits à des conditions identiques et venant à échéance à même date, ont été conçus comme formant un tout indivisible, pour les besoins d'une exploitation unique, l'indemnité d'occupation sera due pour l'ensemble des lots, jusqu'à la libération effective de chacun des lots […] ; que l'indemnité d'occupation sera donc fixée en considération de la valeur locative ; que si dans un courrier du 23 juillet 2013, M. Y...
Z..., PDG du Groupe Santé Actions, affirme que la valeur locative du bien « est largement inférieure » au loyer conventionnel, il n'en offre pas moins de fixer au montant de celui-ci celle de l'indemnité d'occupation ; qu'aucune des parties ne conclut à une valeur différente de l'indemnité d'occupation, ni ne propose d'éléments permettant de l'évaluer ; qu'il sera en conséquence apprécié que la valeur locative correspond au montant du loyer dont les parties ont librement convenu ; que l'indemnité d'occupation sera fixée au montant des loyers tels qu'exigibles au terme du bail renouvelé par tacite reconduction (TGI p. 16 et 17) ;
1°) alors que, d'une part, aux termes de l'article 455 du code de procédure civile, la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en déclarant confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris qui avait affirmé l'existence d'une indivisibilité des baux (jugement p. 14 à 17), la cour retient cependant qu'aucune indivisibilité contractuelle n'avait été prévue entre eux (arrêt p. 16) ; qu'en se déterminant ainsi, la cour a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs en violation du texte susvisé ;
2)° alors en tout état de cause qu'il résulte des articles L 145-9 , L 145-32 al.2 du code de commerce et 1134 du code civil que l'indivisibilité de baux indépendants comportant des obligations distinctes ne peut procéder que de la volonté des parties ou d'une opération économique globale dans le cadre de laquelle les contrats n'ont aucun sens indépendamment les uns des autres ; qu'après avoir relevé qu'aucune indivisibilité n'avait été stipulée dans les contrats litigieux, la seule circonstance, suivant laquelle l'exploitant d'un EPHAD doit pouvoir disposer de chaque lieu loué relève d'une considération économique de fait impropre à caractériser une quelconque indivisibilité ; qu'en se déterminant de la sorte, les juges du fond ont privé leur décision de toute base légale au regard des textes susvisés.