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08/06/2017 | FRANCE | N°16-14947

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juin 2017, 16-14947


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que, sous le couvert des griefs non fondés de violation de la loi, de dénaturation et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond qui, usant des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 1235-1 du code du travail, ont décidé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jesta Fontainebleau

aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Jesta...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que, sous le couvert des griefs non fondés de violation de la loi, de dénaturation et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond qui, usant des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 1235-1 du code du travail, ont décidé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jesta Fontainebleau aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Jesta Fontainebleau à payer à Me Carbonnier la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Jesta Fontainebleau

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé le licenciement de Mme Y... sans cause réelle et sérieuse, d'avoir en conséquence condamné la société Jesta Fontainebleau à lui payer les sommes de 23. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 3. 480, 42 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 348, 04 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, et d'avoir condamné la société Jesta Fontainebleau à rembourser à Pôle-emploi, dans la limite de six mois de versement, les allocations chômage versées à Mme Y... ;

AUX MOTIFS QUE pour faire juger que son licenciement serait sans cause réelle et sérieuse, l'appelante soutient que son inaptitude trouverait sa cause dans la notification de l'avertissement injustifié, du 19 novembre 2010, à l'origine de sa dépression nerveuse et, partant, de son inaptitude ; que bien que l'appelante ne demande pas à la cour de prononcer l'annulation de cet avertissement, l'examen du moyen soulevé par l'appelante conduit, d'abord et nécessairement, la cour à analyser les faits sanctionnés par cet avertissement ; qu'en l'espèce, il est produit les pièces suivantes : la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, datée du 19 novembre 2010, par laquelle l'employeur lui avait notifié un avertissement pour avoir, le 7 octobre 2010, sur les lieux et au temps du travail, « tout à coup, sans raison apparente, violemment pris à partie sur des sujets personnels qui n'avaient aucun rapport avec le travail » sa collègue de travail, Mme Monique Z...; que la lettre d'avertissement ajoute que Mme Z...avait été « extrêmement choquée du comportement » de Mme Y... qui avait été insultante et menaçante à son égard et que « malheureusement, ce n'est pas la première fois que vous vous comportez de cette façon, l'année dernière à la même époque, vous aviez déjà été sanctionnée pour des faits similaires, il apparaît que vos collègues de travail subissent vos brimades et vos écarts de langage en permanence. Nous vous mettons en garde devant cette attitude, nous ne tolérons pas ces écarts de conduite qui nuisent à la bonne marche du service et à vos collègues de travail. Nous vous donnons par la présente un avertissement qui doit vous faire immédiatement changer d'attitude (…) A l'occasion de toute nouvelle faute, nous serions contraints d'envisager une sanction plus importante »- la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, datée du 6 novembre 2009, par laquelle l'employeur lui avait notifié un avertissement pour avoir, le 8 octobre 2009, sur les lieux et au temps du travail, eu une altercation avec une collègue de travail et quitté sans raison admissible son poste de travail – la lettre (non datée) que la salariée avait adressée à son employeur pour contester les faits dans les termes suivants « depuis le 23/ 11/ 2010 je suis en maladie et dépressive car, suite à une injustice totale, vous m'avez envoyé un courrier daté du mardi 12/ 10/ 2010 alors que l'enveloppe cacher de la poste faisant foi cette lettre a été postée le 11/ 10/ 2010, pour une convocation le vendredi 22/ 10/ 2010, jour de mon repos légal, pour des faits qui se seraient passés le jeudi 07/ 10/ 2010 avec Mme Z...Monique. Je me suis rendue à votre convocation avec M. Mohamed A.... Je vous avais clairement expliqué la situation à savoir que c'était la susnommée qui m'avait violemment prise à partie et non l'inverse. Mais je constate que dans l'avertissement du 19 novembre 2010, je suis en tort et que vous avez préféré l'autre partie. Comme vous avez pu le constater entre la date des faits et la lettre de convocation du mois d'octobre, il n'y a eu que trois jours dont le vendredi et le samedi, jours de mon repos. Il est très dommage que je n'ai jamais été entendue par ma supérieure hiérarchique ni par mon [son] assistante. En aucun cas je n'ai agressé Mme Z...vu que c'est moi qui suis intervenue auprès de la gouvernante générale pour la faire entrer en (contrat de travail à durée déterminée) sachant que cette personne était du métier. Malheureusement, le copinage, les sorties en aquagym sorties festives et culinaires m'ont desservies ne participant pas aux agapes avec mes supérieures. Vous relatez aussi les faits de l'année 2009 qui n'ont pas à rentrer en ligne de compte avec l'affaire qui nous occupe et je pense que vous avez dû mal lire le courrier qui m'a été envoyé par M. B..., DRH de l'époque, où il est écrit que c'était ma collègue Danielle C...qui m'avait insultée. J'ai donc utilisé mon droit de retrait. Vous devez certainement être au courant que dans le service dont vous connaissez tous les aboutissants je pense fortement qu'une fronde est dirigée vers moi pour qu'une certaine personne se voit attribuer un contrat en (contrat de travail à durée indéterminée). Je conteste donc tous les faits qui me sont reprochés, employée dans l'entreprise depuis environ 16 ans, aucun reproche ne m'a jamais été adressé et je déplore le manque de professionnalisme de certaines personnes … » ;- la lettre du médecin du travail adressée à un autre médecin ; que cette lettre est non datée mais elle était manifestement contemporaine à la visite effectuée par le médecin du travail, le 23 novembre 2010, à la demande de la salariée ; que le médecin du travail s'adressait à son confrère dans les termes suivants : « Mon cher confrère, je vous adresse Mme Y... Ghislaine pour dépression dans un milieu conflictuel dans son travail. Elle semble totalement déstabilisée et a besoin de prendre du recul. Je l'ai mise inapte temporaire. Pouvez-vous l'arrêter quelques jours »,- la fiche de visite effectuée à la demande de la salariée le 23 novembre 2010, déclarant la salariée « inapte temporaire à son poste doit voir son médecin traitant »,- les fiches de visite par le médecin du travail datées des 4 mai 2011 et 24 mai 2011 déclarant, lors de la seconde visite, la salariée « inapte définitif à la reprise à son poste actuel et à tous les postes de l'entreprise. Doit poursuivre son traitement » ; qu'en l'état de ces pièces, concordantes entre elles, il est établi que Mme Y..., immédiatement après avoir reçu la notification de l'avertissement du 19 novembre 2010, avait été victime d'un syndrome dépressif réactionnel conduisant, dans un premier temps, le médecin du travail à la déclarer inapte temporaire ainsi qu'à la diriger vers un médecin traitant aux fins d'arrêt de travail, dans un second temps, le médecin traitant à délivrer un arrêt de travail puis des prolongations successives sur une période ininterrompue du 23 novembre 2010 au 20 avril 2011 et, dans un dernier temps, à l'issue de cet arrêt de travail, le médecin du travail à la déclarer inapte définitivement à tous postes dans l'entreprise ; qu'ainsi, cette inaptitude avait bien pour origine le fait de l'employeur qui avait notifié à son salarié un avertissement ; qu'or, alors que la salariée avait contesté les faits, ce qui n'est nullement discuté par l'employeur, ce dernier ne produit strictement aucune pièce de nature à établir la réalité des faits sanctionnés par cet avertissement ; qu'à cet égard, la cour constate que le témoignage de Mme Monique Z...n'est même pas produit aux débats et que l'employeur ne justifie pas davantage des vérifications qu'il aurait menées pour s'assurer de la responsabilité de Mme Y... dans la commission des faits sanctionnés par l'avertissement ; que l'employeur ne justifie pas plus avoir répondu à la lettre susvisée de sa salariée ; qu'il s'en suit que le caractère fondé de cet avertissement n'étant pas démontré, Mme Y... avait pu légitimement, pour les motifs exposés dans sa lettre susvisée, vivre cette sanction comme étant une injustice criante qu'elle n'avait pas pu supporter au point de subir une dépression nerveuse réactionnelle ; que la salariée pouvait d'ailleurs être d'autant plus affectée que l'employeur avait pris soin de lui rappeler qu'en cas de récidive, il lui serait notifié une sanction plus sévère, donc de nature à nuire à sa carrière dans l'entreprise alors qu'elle avait déjà plusieurs années d'ancienneté ; que le licenciement ayant été notifié pour inaptitude définitive et celle-ci étant le fait de l'employeur, le licenciement s'avère être sans cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS QUE la seule concomitance temporelle entre un avertissement notifié à un salarié et des arrêts de travail de ce dernier pour dépression ne suffit pas à conférer à la maladie, ainsi qu'à l'inaptitude en découlant, un caractère professionnel ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1226-4 du code du travail ;
2°) ALORS QU'il appartient au salarié de rapporter la preuve que son inaptitude physique est la conséquence d'agissements fautifs de l'employeur ; que lorsqu'un salarié prétend que son inaptitude avait pour origine l'envoi d'un avertissement infondé, il lui appartient de démontrer que cette sanction était injustifiée ; qu'en jugeant pourtant que le licenciement de Mme Y... était sans cause réelle et sérieuse au motif que le caractère fondé de l'avertissement du 19 novembre 2010 n'était pas démontré par la société Jesta Fontainebleau, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant les articles 1315 du code civil, L. 1226-2, L. 1226-4 et L. 1333-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige et ne peut dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Jesta Fontainebleau faisait valoir que Mme Y... n'avait jamais contesté l'avertissement du 19 novembre 2010 (concl., p. 4 et p. 7) ; qu'en énonçant pourtant que « la salarié avait contesté les faits, ce qui n'est nullement discuté par l'employeur » (arrêt, p. 5), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Jesta Fontainebleau, violant l'article 4 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en tout état de cause, en se fondant sur une lettre de Mme Y..., non signée et dépourvue de preuve d'envoi et d'accusé de réception, pour juger que la salariée avait pu « légitimement, pour les motifs exposés dans sa lettre susvisée, vivre cette sanction comme une injustice criante qu'elle n'avait pas pu supporter au point de subir une dépression nerveuse réactionnelle » (arrêt, p. 5 § 5), sans répondre aux conclusions de la société Jesta Fontainebleau faisant valoir que Mme Y... n'avait pourtant jamais contesté l'avertissement litigieux (concl., p. 4 et p. 7), ce dont il ressortait que l'employeur n'avait pas eu connaissance de cette lettre, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'en toute hypothèse, le fait d'infliger une sanction disciplinaire, même injustifiée, à un salarié, relève du pouvoir disciplinaire de l'employeur et ne caractérise pas, à lui seul, une faute pouvant être à l'origine d'une inaptitude physique ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2, L. 1226-4, L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-14947
Date de la décision : 08/06/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 04 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2017, pourvoi n°16-14947


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.14947
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