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17/05/2017 | FRANCE | N°16-11162

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 mai 2017, 16-11162


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société d'applications mécaniques de l'Ouest Jean Marton (la SAMO), dont le dirigeant était M. X..., a été mise en redressement puis liquidation judiciaires respectivement les 3 février 2010 et 20 octobre 2010 ; que la SELARL Y..., en sa qualité de liquidateur de la SAMO, a assigné M. X... pour le voir condamné à payer le montant de l'insuffisance d'actif de cette société ;
r>Attendu que pour constater que la cour d'appel n'est pas saisie de la demande tendant ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société d'applications mécaniques de l'Ouest Jean Marton (la SAMO), dont le dirigeant était M. X..., a été mise en redressement puis liquidation judiciaires respectivement les 3 février 2010 et 20 octobre 2010 ; que la SELARL Y..., en sa qualité de liquidateur de la SAMO, a assigné M. X... pour le voir condamné à payer le montant de l'insuffisance d'actif de cette société ;

Attendu que pour constater que la cour d'appel n'est pas saisie de la demande tendant à prononcer la nullité de l'assignation délivrée à M. X... sur la requête de la SELARL Y..., ès qualités, l'arrêt retient que les dernières conclusions de M. X... ne formulent, dans leur dispositif, aucune prétention tendant au prononcé de la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 4 septembre 2013 ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. X..., en page 66 du dispositif de ses dernières conclusions d'appel signifiées le 31 août 2015, avait demandé à la cour d'appel de « dire et juger nulle l'assignation du 4 septembre 2013 délivrée à la requête de la SELARL Romain Y..., ès qualités, pour vice de fond et vice de forme insusceptible de régularisation et ce, avec toutes conséquences de droit », la cour d'appel, qui a dénaturé ces conclusions, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;

Condamne la SELARL Romain Y..., en qualité de liquidateur de la Société d'applications mécaniques de l'Ouest Jean Marton, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que la Cour d'appel n'est pas saisie de la demande tendant à prononcer la nullité de l'assignation délivrée par la SELARL Y... à l'encontre de Monsieur X... devant le Tribunal de commerce de Niort ;

AUX MOTIFS QUE : « (…) Monsieur X... soutient en premier lieu que l'assignation qui lui a été délivrée est entachée d'un vice de forme en ce qu'elle ne mentionne pas le représentant légal de la SELARL Romain Y..., et qu'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif réclamant sa condamnation sous le bénéfice de l'exécution provisoire à payer une somme de 2. 111. 591, 98 € outre une mesure de faillite personnelle ou encore une interdiction de gérer, lui fait naturellement grief. En second lieu il soutient que l'assignation est entachée d'un vice de fond la SELARL Y... n'ayant pas qualité à agir. En application des dispositions de l'article 954 alinéas 2 et 3 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions déposées. Force est de constater que les dernières conclusions de Monsieur X... ne formulent dans leur dispositif aucune prétention tendant à prononcer la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 4 septembre 2013, les longs développements de l'appelant sur la nullité de l'assignation ne figurent que dans les motifs de ses conclusions, cette demande n'a pas été énoncée même laconiquement dans le dispositif de ses dernières conclusions. Il s'ensuit que la cour n'est pas saisie de cette demande et n'a donc pas, à y répondre ».

ALORS QUE les juges du fond ne peuvent méconnaître le sens clair et précis d'un écrit ; qu'il ressortait du dispositif des conclusions récapitulatives d'appel de Monsieur X... signifiées par RPVA, le 31 août 2015, qu'il demandait, en page 66, de voir « dire et juger nulle l'assignation du 4 septembre 2013 délivrée à la requête de la SELARL Romain Y... ès qualité pour vice de fond et vice de forme insusceptible de régularisation et ce, avec toutes conséquences de droit » ; qu'en considérant cependant que les dernières conclusions de Monsieur X... ne formulaient dans leur dispositif aucune prétention tendant à prononcer la nullité de l'assignation qui lui avait été délivrée le 4 septembre 2003 (arrêt attaqué p. 8, § 7), la Cour d'appel a dénaturé les termes de ces conclusions, et violé l'article 4 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à écarter des débats la pièce n° 3 communiquée par la SELARL Y... ni les pièces communiquées par le Ministère public qu'elles soient issues de l'enquête préliminaire ou de la procédure d'instruction ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « (…) L'appelant demande à ce que soit écartée des débats la pièce N° 3 produite par la SELARL Y..., à savoir le procès-verbal de synthèse de l'enquête préliminaire ordonnée par le parquet soutenant qu'elle a été obtenue de manière illicite. La SELARL Y... a demandé au procureur de la République de Niort, par courrier du 29 septembre 2011, la communication d'une copie des procès-verbaux de l'enquête préliminaire. Par soit-transmis en date du 3 octobre 2011, le procureur de la République de Niort conformément aux dispositions de l'article R. 155 du code de procédure pénale, lui a adressé le procès-verbal de synthèse de l'enquête. Cette pièce n'a donc pas été obtenue de manière illicite par la SELARL Y... qui l'a communiquée dans la présente procédure pour être soumise au débat contradictoire des parties conformément aux dispositions des articles 15 et 16 du Code de procédure civile. Il n'y a donc pas lieu à écarter des débats la pièce N° 3 produite par la SELARL Y.... L'appelant demande également à ce que soit écartées des débats des pièces produites par le parquet, au motif que cette production serait illicite car faite en violation du secret de l'instruction résultant des dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale, sans autorisation du magistrat instructeur et portant atteinte au principe de l'égalité des armes. L'article 11 du code de procédure pénale après avoir rappelé dans son premier alinéa le principe du secret de l'instruction précise en son alinéa 3 « Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le Procureur de la République peut, d'office, et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure, ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ». En l'espèce, le procureur de la République de Niort, en sa qualité de partie jointe à la procédure en responsabilité pour insuffisance d'actif, a le 21 mars 2014, soumis au débat contradictoire différentes pièces de la procédure d'instruction toujours en cours, usant en cela de la faculté qui lui est ouverte par l'article précité sans qu'il lui soit nécessaire d'obtenir l'autorisation du magistrat instructeur puisqu'il peut faire cette communication d'office. En outre il est établi qu'il a tenu informé le magistrat instructeur de cette communication par soit-transmis en date du 5 décembre 2013. Les pièces incriminées ont été à nouveau produites au débat contradictoire devant la cour par le ministère public le 14 août 2015. Contrairement à ce que soutient M. X... cette communication ne relève pas des dispositions de l'article L. 621-8 du Code de commerce, qui ne concerne que le déroulement des procédures collectives et non la procédure relative aux sanctions commerciales. En effet les règles relatives à la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d'actif sont régies par les articles L. 651-1 et suivants du code de commerce, qui ne prévoient pas la communication des pièces au juge commissaire. Enfin dès lors qu'aucune violation des règles relatives au débat contradictoire n'est établie et que tous les textes susvisés applicables en la matière ont été respectés, il n'y a pas davantage violation du principe d'égalité des armes. Il résulte donc de tout ce qui précède que la demande de M° Y...tendant à faire écarter des débats la pièce N° 3 communiquée par M° Y... et les pièces communiquées par le Ministère Public sera rejetée »

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « (…) Le Tribunal retient que Monsieur X... allègue que les pièces pénales produites dans le cadre de la présente procédure le seraient de façon déloyale par l'intermédiaire du Ministère Public. (…) II a été reconnu de longue date par la Cour de cassation que les instances pénales et les actions en responsabilité pour insuffisance d'actif n'ont pas le même objet, et qu'elles sont en conséquence indépendantes : « Mais attendu qu'après avoir énoncé qu'en cas de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif d'une personne morale en procédure collective, les dettes peuvent être mises à la charge du dirigeant en application de l'article 180 de la loi du 26 janvier 1985 et fait ressortir que cette action, destinée à obtenir la réparation du préjudice causé aux créanciers de l'entreprise, engagée par le liquidateur devant le tribunal de commerce, avait un objet différent de l'action civile en réparation du préjudice résultant des infractions d'abus de biens sociaux, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les détournements de fonds pour lesquels M. X... avait été condamné avaient aggravé le passif social ; Qu'ayant ainsi caractérisé la faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société, la cour d'appel, qui n'a pas encouru les griefs du moyen, a accueilli à bon droit la demande des mandataires de justice » (Cass. Com. 27 novembre 2001, n° 98-19. 871). A cet égard, il convient de rappeler que le fait qu'un dirigeant social ait été relaxé par le juge pénal du fait de la commission d'infraction dans le cadre de son activité de direction n'empêche pas sa condamnation au titre de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif (Cass 2ème Civ. 4 juin 2009, n° 08-11. 163). En conséquence, le Tribunal dira que l'instance pénale en cours n'est pas de nature à empêcher la condamnation de Monsieur X... à répondre du passif de la société Samo ; (…) Monsieur X... allègue du fait que les pièces pénales versées aux débats l'auraient été de façon illégale et singulièrement le rapport de police judiciaire constituant la pièce n° 3 produite par la Selarl Romain Y.... Or, par les critiques sévères qu'il adresse à ce document, Monsieur X... établit qu'il en a eu connaissance dans le cadre de la présente instance, et qu'il est parfaitement en mesure de le discuter contradictoirement. Ainsi, aucun motif ne justifie le retrait de cette pièce des débats que le Tribunal considérera au même titre que toutes les autres versées au dossier. Monsieur X... alléguant ensuite de l'impossibilité pour le ministère public de communiquer une pièce pénale à la SELARL Romain Y.... Or, le secret de l'instruction prévu à l'article 11 du Code de procédure pénale n'est pas opposable au ministère public (Cass, 1ère Civ. 10 Juin 1992, Bulletin 1992 I n° 176 p 120). De longue date, la Cour de cassation a d'ailleurs considéré que cela était notamment le cas en matière de procédure collective, auparavant qualifié de droit de la faillite ; « attendu que le secret de l'information n'est pas opposable au Procureur de la République qui peut puiser dans une instruction judiciaire tous les éléments d'information qui lui sont indispensables et en faire usage dans l'exercice des missions que la loi lui attribue ; que c'est le cas en matière de faillite » (Cass, Com. 15 novembre 1961, N° 145). Dans le même sens, Cass., com., 14 janvier 2014, n° de pourvoi 12-26433 ; « le secret de l'enquête et de l'instruction pénale n'empêche pas un liquidateur de produire à l'appui d'une demande d'extension de procédure collective, des pièces d'une enquête pénale en cours qui lui ont été transmises par le ministère public. Le Ministère public, tout à la fois garant de l'ordre public général et de l'ordre public économique, est donc parfaitement fondé à puiser dans l'instruction judiciaire menée à l'encontre de Monsieur X..., à qui il est reproché d'avoir commis des fautes de gestion, tous les éléments d'information qui sont indispensables et en faire usage afin d'assurer le respect de cet ordre public économique. Par ces motifs, le Tribunal rejettera la demande de retrait des débats de la pièce n° 3 produite par la SELARL Romain Y..., ainsi que sa demande d'astreinte à cet égard »

ALORS QUE 1°) dans toutes les instances mettant en jeu les règles spécifiques à la procédure collective, et notamment celles envisageant des mesures de sanction pécuniaire à l'égard des dirigeants, le Ministère public communique au seul juge-commissaire, sur la demande de celui-ci ou d'office, nonobstant toute disposition législative contraire, tous les renseignements qu'il détient et qui peuvent être utiles à la procédure ; que la Cour d'appel a cependant refusé d'écarter des débats les pièces issues de la procédure pénale au motif que : « Contrairement à ce que soutient M. X... cette communication ne relève pas des dispositions de l'article L. 621-8 du Code de commerce, qui ne concerne que le déroulement des procédures collectives et non la procédure relative aux sanctions pénales » (arrêt attaqué p. 9, § 7) ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 621-8, L. 631-9 et L. 641-11, ensemble celles des articles L. 651-1 et suivants du Code de commerce ;

ALORS QUE 2°) en tout état de cause le principe de l'égalité des armes requiert que chaque partie puisse se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'interrogé par le conseil de Monsieur X... sur la production du procès-verbal de synthèse de l'enquête préliminaire par la SELARL Romain Y... ès qualités, le Ministère public a refusé, le 29 décembre 2013, de lui en adresser une copie motif pris de l'ouverture d'une information judiciaire ; qu'il ressortait des propres conclusions de la SELARL Romain Y... ès qualités (p. 13, § pénultième), qu'elle reconnaissait elle-même ne pas avoir communiqué ladite pièce à Monsieur X..., en se bornant à considérer que les critiques portant, par ce dernier, sur celle-ci, « (…) implique (nt) donc qu'il a eu connaissance de cette pièce dans le cadre de la présente instance, et qu'il est parfaitement en mesure de la discuter contradictoirement » ; qu'en refusant dès lors d'écarter des débats cette pièce issue de la procédure pénale, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 621-8, L. 631-9 et L. 641-11, ensemble celles de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société Samo à concurrence de 600. 000 € ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Le principe de la responsabilité du dirigeant dans la création d'une insuffisance d'actif repose sur le fondement de l'article L. 651-2 du Code de Commerce, qui prévoit que si la liquidation fait apparaître une insuffisance d'actif et que des fautes de gestion sont établies à l'encontre du dirigeant, fautes ayant contribué, même partiellement à la création du passif, celui-ci sera condamné à supporter l'insuffisance d'actif en tout ou partie. Le Greffe du Tribunal de commerce de Niort a notifié à Monsieur X... un passif de la société Samo à hauteur de 2. 320. 980, 56 €. Il est constant qu'il y a une erreur dans le montant notifié par le greffe puisque c'est le montant des créances déclarées qui a été notifié, certaines créances déclarées n'ayant pas été admises, cependant ceci ne fait aucun grief à Monsieur X... puisque cette erreur matérielle a été rectifiée par la suite dans le calcul opéré pour chiffrer l'insuffisance d'actif. La comptabilité de la société Samo au 11 Juillet 2012 fait apparaître un actif social s'élevant à 66. 974, 66 € et un état du passif social non contesté à la même date chiffrant les dettes de la société à la somme de 2. 178. 566, 64 €. Ainsi, le montant de l'insuffisance d'actif de la S. A Samo s'élève à la somme de 2. 111. 591, 98 € (2. 178. 566, 64 €-66. 974, 66 €) (…) Les fautes reprochées à M. X... sont de trois ordres :- Avoir favorisé les autres sociétés du groupe (Bj2mv Finance-Sprm) au détriment de la société Samo-Avoir omis de prendre les mesures de nature à redresser la situation de la société Samo-Avoir fait prendre en charge par la SA Samo des dépenses personnelles. M. X... dénie tout agissement fautif, affirmant avoir au contraire tenté par tous moyens de sauver la société Samo, il estime être victime de la vindicte du mandataire judiciaire et de la partialité du tribunal. (…) Il est reproché à Monsieur X... d'avoir favorisé les sociétés du groupe au détriment de Samo dont la situation était obérée et avoir aggravé une situation irrémédiablement compromise dont il avait une parfaite connaissance, et ce notamment par la mise en place d'une convention de trésorerie qui a permis de remonter des liquidités vers notamment la holding Bj2mv Finance dont le compte-courant n'a cessé d'augmenter, sans aucun remboursement, ni versement des intérêts de 2, 5 % l'an contractuellement prévu, alors que la SA Samo n'était pas en mesure de consentir de telles avances, ses résultats étant très faibles ou déficitaires. Si le principe de la mise en place d'une convention de trésorerie entre des sociétés appartenant au même groupe n'est pas en soi critiquable et procède même de la logique du groupe, encore faut-il que les conditions en soient respectées notamment concernant le remboursement des avances consenties et que celles-ci ne soient pas faites dans des conditions qui mettent en difficulté une des sociétés du groupe au seul profit d'une autre ou de la holding elle même. L'avance de trésorerie peut être directe par des flux financiers ou indirecte par un l'intermédiaire d'un compte courant débiteur ou d'en-cours dont bénéficie une société au détriment d'une autre. Il ressort de l'examen du Grand Livre Général de la société Samo pour les exercices 2007, 2008 et 2009 que les avances de trésorerie par l'intermédiaire d'un compte courant par la Samo à la Holding Bj2mv Finance s'établissent comme suit : Exercice 2007 : la Holding Bj2mv Finance est titulaire d'un compte-courant débiteur envers la Samo de 397. 860, 94 € Exercice 2008 : la Holding Bj2mv Finance est titulaire d'un compte-courant débiteur envers la Samo de 522. 472, 12 € Exercice 2009 : la Holding Bj2mv Finance est titulaire d'un compte-courant débiteur envers la Samo de 607. 969 €. Il ressort de l'examen du Grand Livre Clients de la société Samo pour les exercices 2007, 2008 et 2009 que les avances de trésorerie par l'intermédiaire d'un compte client débiteur consenties par la Samo à la société Sprm s'établissent comme suit : Exercice 2007 : la société Sprm est titulaire d'un compte-client débiteur de 110. 200, 55 € au 31 décembre 2007 Exercice 2008 : la société Sprm est titulaire d'un compte-client débiteur de 56. 690, 28 € au 31 décembre 2008 Exercice 2009 : la société Sprm est titulaire d'un compte-client débiteur de 132. 535, 30 € au 31 décembre 2009. Sur chacun des documents susvisés, il apparaît clairement que les factures adressées aux autres clients de la société Samo sont recouvrées normalement, de sorte qu'en fin de chacun de ces exercices, leurs comptes clients sont soldés. Au cours de la même période les bilans annuels et compte de résultat de la société Samo traduisent une dégradation progressive de sa situation financière, en effet, si l'exercice 2007 fait apparaître un résultat après impôt, bénéficiaire de 34. 076 €, l'exercice 2008 fait apparaître un résultat après impôt déficitaire de 26. 692 € et celui de l'année 2009 un résultat après impôt déficitaire de 1. 083. 032 €. Il sera relevé que concernant l'exercice 2009, qui précède immédiatement la constatation de l'état de cessation des paiements de la société Samo en date du 25 janvier 2010, le compte-courant débiteur de la Holding Bj2mv Finance et le compte client débiteur de la société Sprm sont particulièrement élevés. Ainsi est-il démontré que les avantages consentis par la société Samo à la Holding Bj2mv Finance et à la société Sprm ont favorisé ces dernières au détriment de Samo dont la situation était à ce moment tellement obérée qu'elle a conduit à la déclaration de cessation des paiements 25 jours après la clôture de cet exercice 2009. Le fait que les deux autres sociétés aient été amenées ultérieurement à déclarer également leur état de cessation des paiements n'est pas de nature à décharger Monsieur X... de sa responsabilité puisque la Holding Bj2mv Finance n'a été placée en liquidation judiciaire que deux ans plus tard en février 2012, quant à la société Sprm elle a bénéficié d'un plan de redressement judiciaire arrêté par le tribunal de commerce de Poitiers le 19 février 2013. Monsieur X... directeur général de la société S. A Samo avait bien la qualité de dirigeant de droit de cette société, il ne pouvait ignorer cette situation, le maintien de ce mode de fonctionnement tant avec la Holding Bj2mv Finance qu'avec la société SPRM constitue dès lors une faute de gestion caractérisée de nature à engager sa responsabilité dans la création de l'insuffisance d'actif de la société Samo dont il était le dirigeant. (…). Il est reproché à Monsieur X... d'avoir omis de prendre les mesures de nature à redresser la situation de la société Samo, alors que depuis la première année d'exercice de cette société, 2004, le commissaire aux comptes avait émis des réserves à son approbation des comptes et a déclenché la procédure d'alerte prévue par les dispositions de l'article R. 234-1 alinéa 2 du Code de commerce, à compter de 2006 et renouvelée à chaque fin d'exercice. Il est établi que, le commissaire aux comptes de la SA Samo a mis en oeuvre la procédure d'alerte du dirigeant social prévue à l'article L. 234-1 du Code de Commerce par courrier du 30 Juin 2006 adressé à Monsieur X..., pour l'informer de la situation mettant en danger la poursuite de l'activité de la société. Si conformément aux dispositions de l'article R. 234-1 alinéa 2 du code de commerce, Monsieur X... a répondu pour chaque exercice, au commissaire aux comptes, respectivement, par lettres du 16 juillet 2006, puis par lettre du 20 juillet 2007 et par lettre du 28 juin 2008, il a indiqué à chaque fois pouvoir continuer l'exploitation de la SA Samo. Cependant, la cour relève que les seules mesures prises consistaient à accroître l'endettement de la société en négociant des concours bancaires supplémentaires ou des moratoires avec les créanciers et fournisseurs, ce qui n'a fait que retarder l'échéance de l'état de cessation des paiements de la société et augmenter son endettement. Ceci est totalement confirmé par l'examen des bilans de la SA Samo qui font apparaître pour l'année 2007 un endettement de 1. 380. 770 €, pour l'année 2008 un endettement de 1. 662. 270 € et pour l'année 2009 un endettement de 1. 902. 264 €. Il ne peut être reproché au commissaire aux comptes d'avoir constaté la continuité de l'exploitation au vu des réponses qui lui étaient faites par le dirigeant de Samo, ceci conformément au texte précité. Il a continué à mettre en garde Monsieur X... à chaque exercice en soulignant dans ses rapports l'accroissement de l'endettement de la société. Dans le même temps, comme il a été relevé dans le paragraphe précédent, Monsieur X... a continué à accorder des avances en compte courant très importantes à la Holding Bj2mv Finance et à augmenter le compte client débiteur de la société Sprm à l'égard de la société Samo. Pour assainir la situation de la SA Samo il aurait fallu que Monsieur X... diminue le montant des avances de trésorerie consenties à la holding Bj2mv Finance et à la société Sprm. Or comme détaillé ci-dessus le montant de ces avances n'a fait qu'augmenter jusqu'au dépôt de bilan de la Samo le 25 janvier 2010. Monsieur X... avait pourtant à sa disposition toutes les informations lui permettant de mettre en oeuvre les mesures appropriées ainsi que la maîtrise des moyens pour parvenir au rétablissement de la SA Samo. Contrairement à ce qu'il soutient devant la cour, ce n'est pas seulement la mauvaise conjoncture économique qui l'a conduit à déclarer la cessation des paiements, ce sont bien les fautes de gestion qu'il a commises en ne prenant que des mesures destinées à maintenir artificiellement la société Samo tout en avantageant la holding Bj2mv Finance et la société Sprm. Il résulte de ce qui précède que les fautes de gestion commises par Monsieur X... sont caractérisées et qu'elles ont participé à la création de l'insuffisance d'actif de la SA Samo ce qui engage sa responsabilité à ce titre. (…) Il est reproché à Monsieur X... d'avoir fait prendre en charge par la société Samo des dépenses personnelles relatives à l'entretien, la réparation, l'usinage de pièces destinées à ses voitures personnelles et en particulier les voitures anciennes avec lesquelles il faisait des courses, déplacements et exhibitions ainsi que la charge de l'acquisition et de l'aménagement de la semi-remorque de marque Trouillet qu'il utilisait pour se rendre sur les lieux des courses. A cet égard il ressort des auditions de plusieurs salariés de la société Samo, et en particulier de celles de Messieurs Z..., E...et F...recueillies dans le cadre de l'enquête préliminaire diligentée par le procureur de la République de Niort, pièces que la cour a retenues aux débats, que Monsieur X... demandait régulièrement aux salariés la SA Samo de réaliser les divers travaux mentionnés ci-dessus. Le coûts de ces opérations étaient facturées au titre « d'heures atelier », lesquelles se rapportent normalement à l'activité de nettoyage et d'entretien des machines de la Samo par les salariés. Ces heures naturellement payées aux salariés n'étaient donc pas facturées à des clients et ont constitué un manque à gagner pour la société au seul profit de son dirigeant. Il ressort de l'ensemble de ces auditions que les travaux ainsi réalisés représentaient en moyenne 400 heures par an pour la mécanique générale. Monsieur F..., employé à la réfection des moteurs, a indiqué avoir été employé à plein temps durant neuf mois par la société Samo, soit environ 1350 heures de travail pour la réfection de moteurs des véhicules personnels de Monsieur X... entre 2005 et 2006. Monsieur E..., employé également à la réfection des moteurs, a déclaré avoir réalisé entre 90 et 100 heures de travail par an sur les véhicules personnels de Monsieur X... en 2008 et 2009. (…) Si l'existence des interventions des salariés de la SA Samo au profit personnel de Monsieur X... est établie, les évaluations du nombre d'heures travaillées ne sont pas démontrées par des relevés horaires précis qui permettraient comme le demande le liquidateur de la SA Samo de chiffrer la perte financière pour la société à la somme 243. 900 € calculée sur un coût horaire d'ouvrier de 60 € en retenant 4. 065 heures pour les 6 années d'exercice de la SA Samo. Il n'est pas rapporté la preuve que la perte financière de l'entreprise puisse être évaluée par extrapolation comme le fait l'intimée. Il est néanmoins prouvé que M. X... a utilisé la main d'oeuvre de la société Samo pour la réparation ou la remise en état de ses véhicules personnels, et que ceci constitue une faute de gestion commise par le dirigeant. Le tribunal a retenu que les fautes de gestion commises par M. X... ont contribué à hauteur de 322. 000 € à l'insuffisance d'actif de la société Samo et l'a condamné à supporter cette somme. La SELARL Y... demande l'infirmation du jugement sur ce point, souhaitant la condamnation de Monsieur X... à supporter la somme correspondant à la totalité de l'insuffisance d'actif soit la somme de 2. 111. 591, 58 €. Compte tenu des fautes de gestion établies à l'encontre de Monsieur X..., fautes ayant contribué à la création de l'insuffisance d'actif de la SA Samo onstatée par le mandataire liquidateur et au vu des éléments relevés à cet égard et en tenant compte cependant de la conjoncture économique et de ses incidences sur les trois sociétés du Groupe, il y a lieu de faire supporter par Monsieur X... au titre de sa responsabilité la somme de 600. 000 € »

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « (…) L'article L. 651-2 alinéa 1er du Code de Commerce dispose que « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables, » A cet égard, l'article L. 651-3 du Code de Commerce précise que « Dans les cas prévus à l'article L 651-2, le tribunal est saisi par le liquidateur ou le ministère public ». Tel est bien le cas. (...) Selon la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation, l'insuffisance d'actif subie par une société placée en liquidation judiciaire correspond à la disproportion constatée entre le montant de l'actif social et celui du passif non contesté (Cass, Com, 30 Mars 1999, n° 96-17. 422). Le Greffe du Tribunal de commerce de Niort a bien notifié à M. Jean X... un passif de la société Samo Jean Marton à hauteur de 2. 320. 980, 56 € (deux millions trois cent vingt mille neuf cent quatre-vingt euros et cinquante-six cents) correspondant à la ventilation entre les créances privilégiées et chirographaires (pièce X...n° 24), Une malencontreuse erreur de report s'est produite, le total étant indiqué à tort pour 1. 230. 980, 56 € alors que l'addition du détail, établit à l'oeil nu que le total s'élève bien à 2. 230. 980, 56 €. En tout état de cause, l'insuffisance d'actif doit s'apprécier au jour où le Tribunal statue et non, lorsqu'il est saisi (Cass. com. 30 octobre 2007, n° 06-15. 247). L'état de comptabilité de la société Samo du 11 Juillet 2012 fait apparaître un actif social à hauteur de 66. 974, 66 euros. (Pièce n° 18). L'état du passif social non contesté dressé à la même date indique que les dettes accumulées par la société s'élèvent à 2. 178. 566, 64 euros (montant à jour selon l'état du passif en date du 11 juillet 2012). (Pièce n° 19 et pièce n° 19-1 page 6). Ainsi, le Tribunal dira que le montant de l'Insuffisance d'actif de la SA Samo s'élève à : 2. 178. 566, 64-66. 974, 66 = 2. 111. 591. 98 euros (deux millions cent onze mille cinq cent quatre-vingt-onze euros et quatre-vingt-dix-huit cents). (…) Monsieur X... était le directeur général de la société SA Samo et avait, de ce fait, la qualité de dirigeant de droit de cette société. (…) Monsieur X... aurait commis de multiples fautes de gestion qui auraient contribué à la cessation des paiements de la société Samo. (…) Les juges de Cassation ont jugé que le fait pour un dirigeant social de faire prendre en charge des dépenses personnelles par la société dont il est à la tête est une faute de gestion qui permet de lui faire supporter l'intégralité des dettes sociales sur son patrimoine personnel (Cass, Com, 26 Février 1991, 89-16. 637). (…) Le Tribunal retient que selon des témoignages multiples et concordants recueillis par la police judiciaire et versés aux débats, Monsieur X..., qui nourrissait un intérêt marqué pour les courses automobiles de véhicules anciens, auxquelles il participait, demandait aux salariés de réaliser des réparations sur ses véhicules de course personnels de type martini formule trois. Ces employés intervenaient à sa demande sur les véhicules de Monsieur X... dans les domaines de la mécanique générale, de la réfection moteurs, et de la carrosserie industrielle ainsi que sur une semi-remorque de marque Trouillet utilisée pour se rendre sur les lieux des courses. Les employés auraient imputé ces heures de réparation au titre « d'heures atelier » correspondant normalement à des heures payées aux ouvriers, telles que périodes de nettoyage et d'entretien des machines, mais pas facturées aux clients. L'ensemble des heures ainsi passées à la réparation des véhicules de course personnels de M. X... se serait élevé, en 6 ans, à 4. 065 heures et représenterait un montant, à 60 € de l'heure, de 243. 900 € qui auraient dû être refacturés à M. X.... De la même manière, les pièces mécaniques nécessaires à ces réparations auraient été portées sur des Ordres de Réparation (O. R) également non refacturés à M. X..., de sorte que le montant des pièces ainsi utilisées n'est pas déterminable, à l'exception de pièces mécaniques commandées par Monsieur X... en 2009 et non payées pour 3. 172, 69 € et d'avoirs injustifiés, établis à son bénéfice en 2007 pour 4. 342 €, soit un total de 7. 514. 69 € au titre des pièces. Il parait établi que M. X... a utilisé des pièces et de la main d'oeuvre de la société Samo pour faire réparer ou mettre en état, ses véhicules de course personnels, ce qui constitue une faute de gestion dans la mesure où il n'est pas soutenu sérieusement que cette activité ait eu des retombées commerciales positives pour la société Samo. Les estimations globales faites de mémoire par les ouvriers, correspondent à un temps passé en réparations sur les véhicules personnels de M. X... sur la période concernée à 1/ 3 d'équivalent temps plein annuel sur 6 ans, ce qui parait vraisemblable compte tenu des témoignages fournis, ou deux hommes/ an au total. Toutefois, aucun détail ne figure au dossier pour étayer très précisément les calculs ni aucune pièce précise telle que bons de main d'(oeuvre), heures d'atelier, ordres de réparations, factures ou mouvements de stock. Le Tribunal retiendra, pour les valoriser, le prix de revient et non le prix de vente car il n'est pas établi que ces heures non facturées auraient pu l'être à des clients, la société n'ayant pas recouru à des embauches ou à des heures supplémentaires du fait des besoins de M. X.... De sorte que les travaux effectués par Samo pour le compte personnel de M. X... seront évalués à 72. 000 € (36. 000 € par an charges incluses) et le Tribunal condamnera en conséquence M. X... à payer à la liquidation de la SA Samo, cette somme de 72. 000 € qui a contribué à l'insuffisance d'actif. (….) Selon les dispositions de l'article L. 234-1 alinéa 1er du Code de Commerce, « Lorsque le commissaire aux comptes d'une société anonyme relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation, il en informe le président du conseil d'administration ou du directoire dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ». La Cour de Cassation a jugé que le défaut de mise en oeuvre de mesures de nature à redresser la situation de la société après le déclenchement de l'alerte par le commissaire aux comptes constituait une faute de gestion de nature à permettre l'engagement de la responsabilité du dirigeant social du fait de l'insuffisance d'actif subi par la société (Cass, Com, 25 Juin 2002, n° 99-20. 048). Le Tribunal retient que dès l'exercice 2006, le Commissaire aux Comptes a émis une réserve quant à la possibilité pour la SA Samo de recouvrer les avances faites aux sociétés du groupe et notamment les avances en compte-courant faites à la maison-mère Bj2mv Finance. Que ce risque d'irrecevabilité, jointe à son déficit de trésorerie, compromettait la continuité d'exploitation de la société Samo Jean Marton, d'où le déclenchement, de sa part, de la procédure d'alerte du dirigeant social prévu à l'article L. 234-1 du Code de Commerce, alerte qui a été ensuite réitérée à chaque exercice jusqu'en 2009. Force est toutefois de constater que si les éléments requis par la loi de la part de la SA Samo (réponse au Commissaire aux comptes en recommandé avec AR pour faire part des mesures à prendre), ne figurent pas au dossier, le Commissaire aux Comptes en est toujours resté à la première phase de la procédure d'alerte et, tout en émettant des réserves chaque année, n'est jamais allé jusqu'à refuser la certification des comptes ni, a fortiori, à les établir en « base liquidative » en raison d'une impossibilité, qu'il aurait estimée, que l'exploitation se poursuive. Au demeurant, la direction de Samo n'est pas restée inerte et des mesures ont été prises : des activités nouvelles ont été développées comme la carrosserie industrielle et la vente de pièces automobiles ; des conditions de crédit ont été négociées avec la centrale d'achats Starexcel qui représentait 59 % des flux d'achat ; la masse salariale a été ajustée, les effectifs passant de 47 personnes en 2005 à 39 en 2006, 37 en 2007 puis 36 en 2008 et enfin 28 en 2009 ; les frais généraux ont été réduits. D'ailleurs, le résultat de 2007 était bénéficiaire, après deux années de perte. Mais une baisse sensible et brutale de chiffre d'affaires s'est produite en 2008, principalement dans les services de mécanique et de la carrosserie industrielle, comme le notait le rapport de l'administrateur judiciaire (pièce 5-1) pour les raisons suivantes : • En matière de carrosserie, une demande plus faible (-25 %) de la clientèle de transporteurs locaux, eux-mêmes touchés par le ralentissement de l'activité de leurs clients ; • Pour la mécanique générale, une baisse (-11 %), de la demande des entreprises locales évoluant dans l'agro-alimentaire, la cosmétique, l'ensachage et les bureaux d'études. M. Jean X... n'est pas resté inactif. Il a obtenu l'intervention du médiateur du crédit. La baisse d'activité se confirmant sur le premier semestre 2009 (-45 %), des mesures de réduction des coûts ont été prises : licenciement de 6 salariés, recours au chômage technique, allongement des délais de paiement à Starexcel avec étalement des arriérés, obtention d'un financement de 250. 000 € par le Crédit Agricole (gage sur stocks). Les difficultés de trésorerie s'accentuant, le Tribunal de commerce de Niort a été sollicité pour une procédure de conciliation, avec la désignation de Me D...en qualité de conciliatrice. Cette procédure ayant échoué en raison principalement du refus par le Crédit Agricole, des propositions avancées, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte avec présentation d'un plan prévoyant de nouvelles baisses de charges, qui n'a pu être mise en oeuvre. En fait, les activités pouvaient durer tant que la société Samo conservait la confiance de ses créanciers et trouvait à financer auprès des banques et de ses fournisseurs, voire des organismes sociaux, son manque de trésorerie. Le Tribunal considère que les difficultés de l'entreprise, rendue fragile par son déficit de trésorerie qui avait été remontée à la société-mère, ont été accélérées par une brusque et durable baisse d'activité due à des facteurs externes, l'ajustement des structures ne pouvant compenser en temps réel la baisse de résultats et de trésorerie corrélative. (…) Le Tribunal retient que Monsieur X... en qualité de dirigeant de la Holding Bj2mv Finance et associé à parts égales de celle-ci, contrôlait l'ensemble des sociétés du groupe dont l'ensemble des parts étaient détenues par la Holding Bj2mv Finance, ces sociétés étant fiscalement intégrées. Que du fait de la convention de trésorerie conclue dès le 1er Août 2003 entre la société Samo et la Holding Bj2mv Finance, la première confiait à Bj2mv Finance tout pouvoir pour gérer ses capacités de trésorerie et s'engageait à lui consentir des concours, prêts ou avances, moyennant une rémunération de 2, 5 % l'an sur les sommes dues depuis plus d'un mois. Ainsi, de facto, la société Bj2mv Finance gérait l'ensemble de la trésorerie de la société Samo, ce qui impliquait qu'elle mettait elle-même en oeuvre les prêts et d'avances stipulées dans la convention conclue le 1er Août 2003, cela à l'initiative de Monsieur X..., PDG de la SA Samo, gérant de Sprm et gérant de Bj2mv Finance. A fin 2005, le compte-courant de Bj2mv Finance dans les livres de Samo était d'environ 55. 000 €. Il n'a donc pas pu servir, en tout cas seul, à financer la recapitalisation de Sprm, à hauteur de 110. 000 €. Etant observé que l'utilisation de la trésorerie, fongible par nature, de Samo, conformément à la convention de gestion, n'appellerait pas en soi de remarque particulière si par la suite, la trésorerie de Samo n'avait plus été sollicitée alors que les résultats et le cash-flow de l'entreprise étaient insuffisants. Toutefois, les résultats de Samo accusaient fin 2005, hors plus-value de cession d'actif, un déficit de 188. 000 €, La cession de son immeuble d'exploitation à une société du groupe (la SCI Bj2mv), lui a permis de générer une plus-value exceptionnelle de 273. 000 € rendant ainsi l'exercice bénéficiaire de 80. 000 € environ. Mais le produit de la vente, soit 330. 000 € a été rapidement en 2006 remonté chez Bj2mv Finance dont le compte-courant est passé de 55. 000 € fin 2005 à 337. 000 € fin 2006. La cession de l'immeuble étant assortie d'une reprise en location (lease-back), l'exploitation de Samo s'est trouvée grevée,- à partir de l'exercice 2006, d'une charge nouvelle représentée par le loyer (31. 920 € par an), moins les amortissements antérieurement pratiqués sur l'immeuble. La somme ne peut toutefois être déterminée avec précision en l'absence des comptes détaillés de 2005. En outre, la SCI Bj2mv Immo a réalisé en 2008 une extension du bâtiment pour lequel elle n'a pas demandé de loyer supplémentaire. En fait, le montage financier retenu par les associés X...et G..., assez classique au demeurant, était fragile dès l'origine puisque la société holding Bj2mv Finance, dotée d'environ 300. 000 € de capital, avait acquis les sociétés Samo et Sprm pour environ 1. 000. 000 €. L'acquisition étant largement financée par emprunt et la holding n'ayant d'autre source de revenus que ceux provenant de ses filiales, leur remboursement dépendait des capacités de Samo et Sprm à dégager des résultats et de la trésorerie permettant de remonter ceux-ci sous forme de dividendes. Grâce à la convention de trésorerie du 1er août 2003, Samo a pu effectuer des avances en compte-courant à Bj2mv Finance. De même, le produit de la vente à la SCI Bj2mv Immo, de son immeuble d'exploitation (environ 330. 000 €) a pu être remonté en 2006 dès que la SCI a obtenu les concours bancaires nécessaires. Mais les résultats de Samo n'étaient pas au rendez-vous ou s'avéraient insuffisants pour poursuivre : • 2004 : perte de 56. 000 € en dépit d'un abandon (dans des circonstances controversées) du compte-courant de l'ancienne propriétaire, à hauteur de 49. 000 €. • 2005 : bénéfice net de 80. 000 € grâce à une plus-value de 273. 000 € sur la vente de l'immeuble, sinon l'exercice aurait été déficitaire de 193. 000 € • 2006 : perte de 13. 000 € • 2007 : bénéfice de 34. 000 € • 2008 : perte de 27. 000 € • 2009 : perte de 1, 083. 000 € compte tenu, notamment, du provisionnement du compte courant de Bj2mv pour 608. 000 €. Les résultats de Sprm étaient déficitaires. Complétant les travaux de l'Administrateur judiciaire de Samo (Pièce 5-1), le Tribunal constate que la trésorerie, exprimée comme la différence entre le fonds de roulement net et le montant du Besoin en Fonds de Roulement, a été constamment négative :-246. 390 € en 2005 ;-149. 143 € en 2006 ;-277. 000 € en 2007 ;-279. 399 € en 2008 ;-317. 747 € en 2009. Or, Samo a fait l'objet en 2007, 2008 et 2009, de remontées supplémentaires de trésorerie, le compte courant de Bj2mv Finance évoluant ainsi en fin d'année : 2005 : 54. 964 € 2006 : 337, 239 € 2007 : 397. 861 € 2008 : 522, 472 € 2009 : 607. 969 € avant provisionnement en totalité comme créance irrécouvrable. Dans le même temps, alors qu'elle bénéficiait d'un crédit de la part de Samo (12. 000 € fin 2006, 110. 000 € fin 2007, 60. 000 € fin 2008 et 133. 000 € fin 2009), Sprm avait un compte courant constamment débiteur dans les livres de la holding Bj2mv Finance, Il apparaît ainsi clairement que la trésorerie de Samo a été utilisée au bénéfice de Sprm qui, malgré ses résultats déficitaires, a maintenu ses activités plus longtemps que Samo (mise en liquidation judiciaire en février 2013 contre octobre 2010 pour Samo). Les remontées de trésorerie de Samo n'ont été rendues possible qu'en accroissant ou maintenant son endettement auprès des fournisseurs ou des banques. En effet, le principal fournisseur, Starexcel, dont Sprm et Samo étaient de gros clients, a consenti d'importants crédits à cette dernière, très au-delà des conditions normales, le solde de son compte dans les livres de Samo étant créditeur de : 214. 000 € fin 2006 ; 310. 476 € fin 2007 ; 520. 663 € fin 2008 et 608, 502 € fin 2009. Sans doute Starexcel se croyait-elle protégée, ayant vendu ses marchandises avec une clause de réserve de propriété. En juin 2009, alors que la baisse d'activité s'accentuait, rendant critique la situation de la SA Samo, M. X... obtenait à hauteur de 250. 000 € un financement du stock moyennant un gage au profit du Crédit Agricole. La SA Samo n'était manifestement pas en mesure à cette époque d'honorer le remboursement de cette avance, n'ayant plus d'activité soutenue, ayant épuisé le crédit de Staexcel et des organismes sociaux et ne pouvant compter sur des remboursements, même à cette hauteur, des débiteurs groupe (Sprm et surtout Bj2mv Finance), eux-mêmes en déficit et ou à court de trésorerie. Qui plus est, le gage remis au Crédit Agricole portait sur des marchandises sur lesquelles Starexcel avait une réserve de propriété. M. X..., qui avait négocié ces conditions et associé Starexcel aux procédures de conciliation, ne pouvait l'ignorer, De même qu'il ne pouvait méconnaître les mécanismes assez simples de la réserve de propriété alors qu'il négociait un financement de stock avec gage sans dépossession, autrement plus complexe. Dans son arrêt du 14 février 2012 (pièce 27), la Cour d'Appel de Poitiers a relevé que la SA Samo avait « déclaré faussement dans l'acte à titre onéreux de gage sur stock constitué envers le Crédit Agricole (...), que les biens dudit gage étaient sa propriété et ne faisaient l'objet d'aucune clause de réserve de propriété ». La Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a statué de longue date que lorsqu'un dirigeant social qui contrôlait un ensemble de sociétés avait favorisé certaines d'entre elles au détriment d'une autre qui voyait s'accumuler ses pertes, et qu'il avait, par ses agissements fautifs et ses dissimulations, perpétué et aggravé une situation obérée et irrémédiablement compromise dont il avait une parfaite connaissance, sa responsabilité pouvait être engagée et qu'il pouvait être condamné à supporter une partie des dettes de la société (Cass, Com, 27 Février 1990, n° 87-17. 475). Le-Tribunal dira que Mr Jean X..., PDG de la SA Samo, a non seulement maintenu les avances consenties par la société à d'autres sociétés du groupe (et principalement à son actionnaire) alors que celles-ci étaient incapables de rembourser mais encore, il a accru l'endettement de la SA Samo au-delà de ses capacités en gageant au profit de la banque pour 250. 000 €, un stock qui était déjà assorti d'une clause de réserve de propriété. Qu'il a ainsi commis une faute de gestion ayant contribué à hauteur de 250. 000 € à l'insuffisance d'actif de la société Samo »

ALORS QUE 1°) en vertu du principe de proportionnalité, si plusieurs fautes de gestion ont été retenues pour condamner un dirigeant à supporter l'insuffisance d'actif de la société, le caractère non fondé de l'une d'elles suffit à entraîner la censure de la décision ; qu'une condamnation pour insuffisance d'actif suppose établie l'existence d'un lien de causalité entre celle-ci et une faute de gestion ; qu'il convient de se référer aux chiffres retenus par la cour d'appel elle-même pour constater qu'aucune corrélation n'existait entre l'augmentation des déficits de la société Samo et l'accroissement des avances en compte courant au profit des sociétés Bj2mv Finance et Sprm ainsi que l'a fait valoir Monsieur X... dans ses conclusions récapitulatives d'appel (p. 57, § 1 à 3) ; que l'exercice de la société Samo aurait fait ainsi respectivement apparaître, en 2008 et 2009, un résultat après impôt déficitaire de 26. 692 €, et de 1. 083. 032 € alors que le compte courant débiteur de la société Bj2mv Finance envers la société Samo serait passé entre 2008 et 2009, de 522. 472, 12 € à 607. 969 €, et celui de la société Sprm de 56. 690, 28 € à 132. 535, 30 € (arrêt attaqué p. 1, § 2, 3 et 5) ; qu'en condamnant dès lors Monsieur X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société Samo cependant qu'il n'y avait aucune corrélation entre les prétendues avances de trésorerie accordées au profit des sociétés du groupe et celle-ci, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 651-2 et suivants du Code de commerce ;

ALORS QUE 2°) en vertu du principe de proportionnalité, si plusieurs fautes de gestion ont été retenues pour condamner un dirigeant à supporter l'insuffisance d'actif de la société, le caractère non fondé de l'une d'elles suffit à entraîner la censure de la décision ; qu'une condamnation pour insuffisance d'actif suppose établie l'existence d'un lien de causalité entre celle-ci et une faute de gestion ; qu'il ressortait des propres constatations de la cour d'appel que si le commissaire aux comptes avait déclenché des procédures d'alerte, il avait constaté la continuité de l'exploitation (arrêt attaqué p. 12, § 6), de sorte qu'il n'avait jamais jugé utile de convoquer le conseil d'administration ou d'informer le président du tribunal de commerce ; que Monsieur X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel (p. 47 et 48), l'ensemble des mesures qu'il avait mises en oeuvre pour tenter de redresser l'entreprise, constituées notamment par une réduction importante de la masse salariale et des frais généraux ; qu'en condamnant Monsieur X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société Samo au motif que les seules mesures prises consistaient, selon elle, à accroitre l'endettement de la société (arrêt attaqué p. 12, § 4), sans avoir nul égard à l'ensemble des autres mesures prises par Monsieur X..., la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 651-2 et suivants du Code de commerce ;

ALORS QUE 3°) en vertu du principe de proportionnalité, si plusieurs fautes de gestion ont été retenues pour condamner un dirigeant à supporter l'insuffisance d'actif de la société, le caractère non fondé de l'une d'elles suffit à entraîner la censure de la décision ; que l'action en condamnation pour insuffisance d'actif ne peut donner lieu à une condamnation supérieure au montant de l'insuffisance d'actif causée par les fautes de gestion relevées ; que les juges du fond doivent fonder leur décision sur l'importance réelle du dommage, en l'évaluant de façon précise, et non forfaitaire ; qu'il ressortait des propres constatations des juges du fond, s'agissant des prétendues dépenses personnelles mises à la charge de la société Samo par Monsieur X... qu'elles n'étaient nullement déterminées de façon précise dès lors que : « (…) les évaluations du nombre d'heures travaillées ne sont pas démontrées par des relevés horaires précis … » (arrêt attaqué p. 13, § pénultième) ; qu'en condamnant dès lors Monsieur X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société Samo à hauteur de la somme forfaitaire de 600. 000 €, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 651-2 et suivants du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-11162
Date de la décision : 17/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 27 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 mai. 2017, pourvoi n°16-11162


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.11162
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