LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, après avis de la chambre commerciale, financière et économique en date du 18 janvier 2017 :
Vu l'article L. 625-6 du code de commerce ;
Attendu que le dirigeant d'une société, dont la responsabilité personnelle est recherchée à raison de l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de cette société, qui a intérêt à contester le principe et le montant du passif salarial, est une personne intéressée au sens de l'article L. 625-6 du code de commerce ; qu'il peut en conséquence former tierce opposition à l'arrêt d'une cour d'appel, statuant en matière prud'homale, ayant reconnu la qualité de salarié de la société à un tiers et fixé la créance salariale de ce dernier au passif de la liquidation judiciaire, dans le délai d'un mois courant à compter de la publication au BODACC de l'insertion indiquant que l'état des créances salariales a été déposé au greffe du tribunal de commerce par application des articles R. 624-8 et R. 625-7 du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la cour d'appel de Versailles, statuant dans un litige opposant M. Z... et les mandataires liquidateurs des sociétés Racer import export et Comptoir technique des professionnels (CTP), a, par arrêt du 29 novembre 2012, dit que M. Z... disposait de la qualité de salarié de ces sociétés et fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire ; que M. Y..., qui était gérant de droit des sociétés Racer import-export et CTP, a formé tierce opposition à l'encontre de cet arrêt ;
Attendu que pour déclarer irrecevable cette tierce opposition, l'arrêt retient que la demande de rétractation de l'arrêt attaqué ne porte pas sur la contestation d'un relevé de créances résultant d'un contrat de travail au sens de l'article L. 625-6 du code de commerce mais sur la contestation de l'existence même du contrat de travail de M. Z... et que le délai d'un mois prévu par l'article R. 625-7 n'est donc pas applicable ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la tierce opposition formée par M. Y... à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 29 novembre 2012 ;
AUX MOTIFS QUE M. Z... soutient en outre que l'action en tierce opposition est irrecevable pour non-respect des dispositions de l'article 583 du même code ; qu'il fait valoir à cet égard : - que M. Y... n'avait pas d'intérêt propre et personnel à agir et que le dispositif de l'arrêt ne compromet aucun de ses droits, - que M. Y... était représenté aux deux précédentes procédures devant le conseil de prud'hommes d'Argenteuil et devant la cour d'appel ; qu'il est poursuivi en comblement de passif en sa qualité de dirigeant de droit de la société CTP et non en qualité de personne physique et que dès lors, il présente une communauté d'intérêts avec la société CTP, comme avec la société Racer import export dont il était également le gérant ; qu'étant associé au sein de la société CTP, il a eu un défenseur dans le cadre de la première procédure et que le liquidateur de la société CTP a tenté de démontrer, au cours de cette dernière, que M. Z... était dirigeant de fait de la société, - que M. Y... ne justifie pas d'un préjudice personnel distinct de celui subi par la société CTP et par la société Racer import export ; que s'il est poursuivi en comblement de passif, ce n'est pas en raison du fait que la cour, dans son arrêt du 29 novembre 2012 a refusé de reconnaître à M. F. la qualité de gérant de fait mais en raison des potentielles fautes de gestion qu'il a commises ; qu'en outre, les juges fixeront souverainement la nature de ces fautes ainsi que le quantum de l'insuffisance d'actif qui devra lui être imputé ; qu'enfin, la créance salariale de M. Z..., née du dispositif de l'arrêt du 29 novembre 2012 , c'est à dire après le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, ne sera pas prise en compte dans le calcul du total de l'insuffisance d'actif, - que M. Y... ne justifie pas de moyens propres à son action distincts de ceux opposés par le mandataire liquidateur dans la précédente instance, ce qui s'explique par la communauté d'intérêts entre M. Y..., gérant de droit des sociétés CTP et Racer import export, et les mandataires liquidateurs de ces sociétés, - que M. Y... n'a pas respecté les règles de saisine de la juridiction, s'agissant d'une tierce opposition incidente dans la mesure où il a déclaré avoir été informé de la décision du 29 novembre 2012 dans le cadre de la procédure commerciale en comblement de passif devant le tribunal de commerce de Nanterre ayant saisi la cour par voie de simple requête valant conclusions en tierce opposition principale, - que l'action de M. Y... ne tend pas à faire rétracter le dispositif de l'arrêt du 29 novembre 2012, alors que la qualité de salarié de M. Z... au sein des sociétés CTP et Racer import export est indivisible et qu'il ne sollicite la rétractation du dispositif uniquement en ce qu'il a dit que M. Z... disposait de la qualité de salarié de la société CTP, - que M. Y... n'a pas mis en cause toutes les parties concernées, n'ayant pas formé tierce opposition à l'encontre du mandataire liquidateur de la société Racer import export, - que l'action de M. Y... présente un caractère frauduleux dès lors qu'elle est intentée dans un but purement dilatoire, afin d'obtenir un sursis à statuer devant le tribunal de commerce ; que M. Y... soutient au contraire que son action est recevable et qu'il fait valoir : - qu'il n'était ni présent ni représenté lors de la première procédure, l'instance prud'homale ayant opposé M. Z... au mandataire liquidateur de la société CTP, lequel représentait le débiteur et non le gérant de la société, - qu'il a un intérêt propre à agir, l'arrêt du 29 novembre 2012 lui causant un préjudice personnel dès lors que les sommes accordées à M. Z... s'ajoutent à celles qui pourront être mises à sa charge personnelle et que dans la procédure en comblement de passif, M. Z... fait valoir que la reconnaissance de son statut de salarié est revêtue de l'autorité de la chose jugée et qu'il ne peut plus être poursuivi en qualité de gérant de fait, - qu'il pouvait saisir la cour d'une requête en tierce position dans les conditions spécifiques aux instances prud'homales, - que l'arrêt comporte en réalité deux chefs de dispositif divisibles, puisqu'il pouvait être déclaré salarié de la société Racer import export et non de la société CTP ; qu'aux termes de l'article 583 du code de procédure civile est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque ; que le litige qui a donné lieu à la décision attaquée opposait M. Z... aux mandataires liquidateurs des sociétés CTP et Racer import export et qu'il portait sur la qualité de salarié de M. Z... au sein de ces sociétés ; que les intérêts de M. Y..., en sa qualité de gérant de droit de la société CTP, ont eu un défenseur à l'instance dès lors que le mandataire liquidateur de cette dernière a soutenu l'absence de contrat de travail de M. Z..., peu important que le mandataire liquidateur n'ait pas fait valoir l'intégralité des arguments présentés par M. Y... dans le cadre de la présente instance ; qu'au regard de l'objet du litige dans le cadre de la procédure prud'homale introduite par M. Z... - lequel est distinct de celui qui oppose le mandataire liquidateur de la société CTP à M. Y... dans le cadre de la procédure en comblement de passif pendant devant le tribunal de commerce de Nanterre - M. Y... était représenté lors de l'instance devant le conseil de prud'hommes puis devant la cour d'appel par le mandataire liquidateur de la société CTP en raison de leur communauté d'intérêts, à savoir qu'il soit jugé que M. Z... n'était pas salarié de cette dernière et qu'il soit débouté de l'ensemble de ses demandes ; qu'en conséquence, la tierce opposition formée par M. Y... est irrecevable ;
ALORS QU' est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque, la communauté d'intérêts ne suffisant pas à caractériser cette représentation ; qu'en énonçant, pour juger que M. Y... était irrecevable en sa tierce opposition comme ayant été représenté par le mandataire liquidateur de la société CTP, que ses intérêts, en sa qualité de gérant de droit de ladite société, avaient eu un défenseur à l'instance devant le conseil de prud'hommes puis la cour d'appel, dès lors que le mandataire liquidateur de cette société avait soutenu l'absence de contrat de travail de M. Z..., et qu'au regard de l'objet du litige dans le cadre de la procédure prud'homale introduite par ce dernier, il y avait bien communauté d'intérêts entre le tiers opposant et le mandataire liquidateur, à savoir qu'il soit jugé que M. Z... n'était pas salarié de cette dernière, la cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile.