LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 24 novembre 2015), que, le 20 novembre 2008, l'administration fiscale a notifié à Mme Y... une proposition de rectification de son impôt de solidarité sur la fortune (ISF), au titre de l'année 2007, en se prévalant des règles de plafonnement ; qu'après mise en recouvrement et rejet de sa réclamation, Mme Y... a saisi le tribunal de grande instance afin d'être déchargée de ce supplément d'imposition ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen, qu'il résulte des dispositions combinées des article R.* 256-1, L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales que l'avis de mise en recouvrement (AMR), prévu par (l'article) L. 256 du même livre, doit comporter toutes les indications nécessaires permettant, sans imprécision ni risque de confusion, au contribuable d'être pleinement informé de la cause et de l'objet du paiement qui lui a été réclamé ; qu'en l'espèce, le contribuable a fait l'objet d'un redressement de nature complexe et particulière, en ce qu'il relève d'un cas spécial de plafonnement de l'ISF, c'est-à-dire d'une situation portant, non pas sur des problématiques classiques d'assiette, mais sur les modalités de calcul de cet impôt, notamment résultant de l'article 885 V bis du code général des impôts, qui dispose, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, que la somme de l'ISF et de l'impôt sur le revenu ne saurait dépasser 85 % des revenus annuels du contribuable ; que l'application de cet article doit s'articuler avec les dispositions instituant un "bouclier fiscal" et fixées par les articles 1 et 1649-0 A du code général des impôts, limitant, à l'époque des faits de l'espèce, les impôts directs payés par un contribuable à 60 % de ses revenus ; qu'ainsi était en jeu un double système de plafonnement ; qu'il incombait, dès lors, à l'administration fiscale, en toute clarté et sans ambiguïté, d'informer la demanderesse de l'exclusion expresse de l'application du bouclier fiscal au bénéfice, de la mise en oeuvre exclusive de l'article 885 V bis du code général des impôts ; que l'AMR incriminé ne portait aucune mention d'un quelconque fondement législatif de l'imposition querellée, laissant le contribuable dans l'incertitude quant à la norme fiscale justifiant le redressement discuté ; qu'en écartant cette garantie substantielle du contribuable en se fondant exclusivement sur la proposition de rectification du 20 novembre 2008 et à la réponse faite aux observations du contribuable du 5 janvier 2009, lesquelles n'ont été motivées que par référence à l'article 885 V bis du code général des impôts et ne développaient pas l'exclusion, seulement implicite, qu'elles opéraient des dispositions des articles 1 et 1649-0 A du code général des impôts, pourtant potentiellement applicables, alors qu'il convenait, dès lors, que l'AMR, dernier stade informatif de la procédure de rectification et de recouvrement, confirmât à tout le moins, que seul l'article 885 V bis fondait les redressements en procès, la cour a violé les dispositions combinées des article R.* 256-1, L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que l'article 885 V bis du code général des impôts, qui régit le plafonnement de l'ISF, permet de réduire le montant de celui-ci au moment de sa déclaration, tandis que l'article 1649-0 A du même code, en vigueur à l'époque des faits, instaure un droit à restitution des impôts directs en raison de leur plafonnement lié aux revenus du contribuable ; que ces deux textes prévoient chacun des règles de mise en oeuvre spécifiques en sorte qu'ils n'ont pas vocation à se combiner entre eux ; qu'en l'espèce, par motifs propres et adoptés, l'arrêt constate que l'avis de mise en recouvrement mentionne expressément la nature de l'impôt, soit l'ISF de 2007, ainsi que son montant et les intérêts de retard calculés selon la règle de l'article 1727 du susdit code, qu'il cite ; que l'arrêt retient que cet avis se réfère à la proposition de rectification du 20 novembre 2008 et à la réponse aux observations de Mme Y... du 5 janvier 2009, lesquelles sont motivées par référence à l'article 885 V bis précité et concernent de façon non équivoque l'ISF de 2007 ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations et appréciations que Mme Y... avait été correctement informée de la cause et de l'objet du paiement réclamé et qu'elle n'avait pas été induite en erreur ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lesourd, avocat aux Conseils, pour Mme Danièle Y....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté l'exposante de ses demandes d'annulation de la décision de rejet du 8 juin 2012 et de décharge intégrale des impositions et pénalités mises à sa charge pour un montant total de 115 339 euros au titre de l'ISF de l'année 2007 ;
AUX MOTIFS QUE « L'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que l'administration doit adresser au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; que l'article L. 256 du Livre des procédures fiscales énonce : « un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tous redevables des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date exigibilité... » ; qu'aux termes de l'article R.* 256 du Livre des procédures fiscales « l'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications... » ; que force est de constater qu'aucun visa du ou des texte (s) fondant la rectification n'est légalement exigé pour assurer la validité de l'avis de mise en recouvrement des lors qu'il fait suite à une procédure de rectification et qu'il fait référence au document procédural qui est à l'origine de l'avis ; que c'est donc sans méconnaître les dispositions de l'article R 256-1 du Livre des procédures fiscales et les droits du contribuable que l'avis de mise en recouvrement du 7 septembre 2009 a été établi ; qu'il résulte en effet de l'examen de cet avis de mise en recouvrement qu'il portait expressément mention de la nature de l'impôt (impôt de solidarité sur la fortune 2007) ainsi que les droits correspondants et les intérêts de retard calculés selon la règle de l'article 1727 du code général des impôts ; qu'il visait la proposition de rectifications du 20 novembre 2008 et la réponse faite aux observations du contribuable du 5 janvier 2009, lesquelles ont été motivées par référence à l'article 885 V bis du code général des impôts et concerne de façon non équivoque l'impôt sur la fortune de 2007 ; qu'en l'absence de contradiction existant entre la motivation de l'avis de mise en recouvrement et celle de la proposition de rectification, Mme Y... a été correctement informée de la cause et de l'objet du paiement qui lui était réclamé et n'a pas été induite en erreur » ;
ALORS QU'il résulte des dispositions combinées des article R. 256-1, L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales que l'avis de mise en recouvrement (AMR), prévu par L. 256 du même livre, doit comporter toutes les indications nécessaires permettant, sans imprécision ni risque de confusion, au contribuable d'être pleinement informé de la cause et de l'objet du paiement qui lui a été réclamé ; qu'en l'espèce, le contribuable a fait l'objet d'un redressement de nature complexe et particulière, en ce qu'il relève d'un cas spécial de plafonnement de l'ISF, c'est-à-dire d'une situation portant, non pas sur des problématiques classiques d'assiette, mais sur les modalités de calcul de cet impôt, notamment résultant de l'article 885 V bis du CGI, qui dispose, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, que la somme de l'ISF et de l'impôt sur le revenu ne saurait dépasser 85 % des revenus annuels du contribuable ; que l'application de cet article doit s'articuler avec les dispositions instituant un « bouclier fiscal » et fixées par les articles 1 et 1649 OA du code général des impôt, limitant, à l'époque des faits de l'espèce, les impôts directs payés par un contribuable à 60 % de ses revenus ; qu'ainsi était en jeu un double système de plafonnement ; qu'il incombait, dès lors, à l'administration fiscale, en toute clarté et sans ambiguïté, d'informer l'exposante de l'exclusion expresse de l'application du bouclier fiscal au bénéfice, de la mise en oeuvre exclusive de l'article 885 V bis du CGI ; que l'AMR incriminé ne portait aucune mention d'un quelconque fondement législatif de l'imposition querellée, laissant le contribuable dans l'incertitude quant à la norme fiscale justifiant le redressement discuté ; qu'en écartant cette garantie substantielle du contribuable en se fondant exclusivement sur la proposition de rectifications du 20 novembre 2008 et à la réponse faite aux observations du contribuable du 5 janvier 2009, lesquelles n'ont été motivées que par référence à l'article 885 V bis du code général des impôts et ne développaient pas l'exclusion, seulement implicite, qu'elles opéraient des dispositions des articles 1 et 1649 OA du CGI, pourtant potentiellement applicables, alors qu'il convenait, dès lors, que l'AMR, dernier stade informatif de la procédure de rectification et de recouvrement, confirmât à tout le moins, que seul l'article 885 V bis fondait les redressements en procès, la cour a violé les dispositions combinées des article R. 256-1, L. 57 et L. 76 du livre des procédures fiscales.