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11/05/2017 | FRANCE | N°15-23860

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 mai 2017, 15-23860


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 18 juin 2015), que Jacques X..., gérant et associé de la société Les Valériannes et de la SCI Villa Régina (la SCI), est entré en relation avec le groupe financier Nextfund Capital Partners, aux droits duquel est venue la société NTF Régina ; que par conventions des 26 mai et 19 octobre 2006, celui-ci s'est engagé personnellement, et en se portant fort de ses associés, à faire agréer la société NTF Régina, en qualité d'associée,

par les assemblées générales de ces sociétés et, à cette fin, à faire approuver u...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 18 juin 2015), que Jacques X..., gérant et associé de la société Les Valériannes et de la SCI Villa Régina (la SCI), est entré en relation avec le groupe financier Nextfund Capital Partners, aux droits duquel est venue la société NTF Régina ; que par conventions des 26 mai et 19 octobre 2006, celui-ci s'est engagé personnellement, et en se portant fort de ses associés, à faire agréer la société NTF Régina, en qualité d'associée, par les assemblées générales de ces sociétés et, à cette fin, à faire approuver une augmentation de leur capital ; qu'une assemblée générale de la SCI, tenue le 29 novembre 2006, a refusé l'agrément et l'augmentation de capital proposés ; qu'au cours du mois d'octobre 2007, la SCI et la société Les Valériannes ont cédé leur immeuble et leur fonds de commerce ; que celles-ci ont été mises en redressement puis liquidation judiciaires les 4 et 15 juillet et le 9 septembre 2008, MM. Z...et A...étant désignés liquidateurs ; qu'estimant que les sociétés Les Valériannes et Villa Régina ainsi que leur gérant et les associés de celles-ci avaient manqué à leurs engagements, la société NTF Régina les a assignés en remboursement de sommes avancées et paiement de dommages-intérêts ; qu'à la suite du décès de Jacques X..., MM. Raphael X..., Michael B..., Julien X... et Mme Virginie X... épouse C...ont été appelés à la cause en qualité d'héritiers ;

Attendu que la société NTF Régina fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande alors, selon le moyen :

1°/ que l'auteur d'un manquement contractuel doit réparation au cocontractant victime de ce manquement ; qu'après avoir retenu, d'une part, que la responsabilité de Jacques X..., aux droits duquel se trouvent ses héritiers, était engagée, tant en sa qualité d'associé de la société Villa Régina qu'en celle de porte-fort de ses co-associés, pour ne pas avoir approuvé l'augmentation de capital de cette société qui devait être souscrite par la société NTF Régina et, d'autre part, que le préjudice actuel de cette dernière tenait à ce qu'elle n'était pas propriétaire de parts de la société Villa Régina, ce dont il découlait qu'il existait un lien de causalité direct et certain entre la faute retenue et l'indemnisation sollicitée à raison de ce que la société NTF Régina avait été privée de la possibilité de participer à la répartition du prix du bien vendu par la société Villa Régina, la cour d'appel qui a néanmoins jugé que le préjudice invoqué était sans rapport avec les fautes commises a violé l'article 1147 du code civil ;
2°/ qu'en se bornant à relever, pour écarter l'indemnisation de la société NTF Régina, qu'à l'époque de la vente du bien détenu par la société Villa Régina elle n'aurait pas pu toucher sa part du prix à raison du contentieux opposant les candidats acquéreurs et que son préjudice actuel tenait à ce qu'elle n'était pas propriétaire de parts de la société Villa Régina, sans rechercher, comme elle y était invitée, si à la suite de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 3 juillet 2014 le prix de vente n'avait pas été définitivement acquis à la société Villa Régina, de sorte que si elle avait été associée, conformément aux engagements pris, la société NTF Régina aurait pu, à la suite de cette décision, prétendre percevoir sa part du prix de vente, ce qui caractérisait un préjudice en lien direct avec la faute retenue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

3°/ que le juge qui constate l'existence d'un dommage doit le réparer ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté l'existence d'un préjudice actuel de la société NTF Régina, tenant à ce qu'elle n'était pas, à raison de la faute retenue, propriétaire de parts de la société Villa Régina, a refusé d'évaluer le dommage subi, a violé les articles 4 et 1147 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que Jacques X... n'a pas respecté ses engagements tant à titre personnel, en ne votant pas l'augmentation de capital de la SCI, qu'en qualité de porte-fort dès lors qu'il en a été de même des autres associés ; qu'il relève que la cession de l'immeuble a été contestée et son prix séquestré en raison du litige l'opposant à des candidats acquéreurs, ce qui a conduit au redressement judiciaire de celle-ci ; qu'il en déduit que la société NTF Régina n'aurait, pas plus que les autres associés, pu percevoir sa part de prix à l'époque ; qu'en l'état de ces appréciations souveraines, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche invoquée à la seconde branche, a pu retenir, que le seul préjudice indemnisable de la société NTF Régina, en lien direct avec les manquements de Jacques X..., était constitué par la valeur résiduelle des parts sociales de la SCI au regard de son actif et de son passif, parts qu'elle n'avait pu acquérir ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant retenu que le préjudice dont la société NTF Régina poursuivait la réparation était sans lien avec les manquements de Jacques X... et que celle-ci ne formait aucune demande en lien direct avec ces fautes, notamment au titre de la valeur résiduelle des parts de la SCI, la cour d'appel, qui ne pouvait statuer sur une demande dont elle n'était pas saisie, n'a pas encouru le grief de la troisième branche ;

D ‘ où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société NTF Régina aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. D...et à la SARL Franjen Invest la somme globale de 3 000 euros, et à MM. Z...et A..., en qualité respectivement de mandataire liquidateur de la société civile immobilière Villa Régina et de mandataire liquidateur de la SARL Les Valériannes, la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour la société NTF Régina.

La société NTF Régina fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes indemnitaires au titre des manquements contractuels des sociétés Les Valériannes et Villa Régina et de leurs associés ;

AUX MOTIFS QU'abstraction faite de la lettre de simple intention du 19 mai 2006, elle produit divers documents :- le protocole d'investissement du 26 mai 2006, dans lequel " les associés de la SCI s'engagent à permettre aux investisseurs de souscrite à une augmentation de capital décidée par une assemblée générale devant se tenir impérativement avant le 30 juin 2006 ",- le protocole d'investissement du 18 octobre 2006, qui reprend cet engagement, sauf à fixer la date limite de l'assemblée au 30 novembre 2006,- le protocole d'accord du 19 octobre 2006, souscrit par Jacques X..., " agissant tant en son nom personnel en qualité d'associé majoritaire de la SARL Valériannes Investissement et indirectement de la société Les Valériannes et de la SCI Villa Regina, qu'au nom de ses associés dans ces deux sociétés, Monsieur Gérard D...né le 26 février 1948, Monsieur E...et la société Franjen Investissements RCS 404 539 413 Paris, dont il se porte fort de la ratification du présent acte ",- ce document indique qu'il s'y engage " en qualité d'associé majoritaire et se portant fort de ses associés dans la SARL Les Valériannes et la SCI Villa Regina, à voter en faveur des augmentations de capital " ; que ces documents sont tous revêtus de signatures attribuées à Jacques X... et qui n'ont pas fait l'objet de dénégation de sa part, lorsqu'il était en mesure de le faire (durant une période très brève, il est vrai) ni, à présent, de ses héritiers ; qu'or, selon le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de la SCI Villa Regina, du 29 novembre 2006, l'unanimité des associés présents, donc à l'exception de la société Franjen-Invest, a rejeté, tant l'augmentation de capital, que l'agrément de la société NTF Regina en tant qu'associée ; que dès le 13 février 2007, un projet de vente des murs était conclu entre la SCI Villa Regina et la société GDP Vendôme Promotion, pour un prix de 2 870 400 euros ; que le 8 mars 2007, Jacques X..., habilité a cette fin par délibération du 23 février 2007, concluait avec la société GDP Vendôme une promesse synallagmatique de vente du fonds de la SARL Les Valériannes ; que de tout cela, il ressort que Jacques X... n'a pas respecté ses obligations, tant personnelles, puisqu'il n'a pas voté l'augmentation de capital de la SCI, qu'a titre de porte-fort, puisqu'il en a été de même des autres associés, présents ou non ; qu'il n'est pas de motif démontré et suffisant du bien fondé de son abstention, notamment en raison de fautes de la société NTF Regina, de la société Nextfund ou plus généralement, des investisseurs avec lesquels il avait négocié durant de nombreux mois ; que sa responsabilité est engagée ; que la société NTF Regina détaille ainsi son préjudice :-300 000 euros en raison de la violation par la SCI Villa Regina et ses associés de leur engagement de faire entrer la société NTF Regina au capital,-100 000 euros à raison du manquement des défendeurs à leurs obligations relatives à la conclusion d'un pacte d'associés et à la transformation de la société Les Valériannes en SAS,-100 000 euros sur le fondement de l'article 4 du protocole d'accord du 19 novembre 2006,-100 000 euros en réparation du préjudice moral subi ; que s'agissant de la première rubrique, il est prétendu que le vote personnel contraire aux engagements pris par Jacques X... et le manquement à ses obligations de porte-fort ont privé la société NTF Regina de la part du prix de la vente ultérieure des biens de la SCI, à la répartition duquel elle avait vocation à participer, si l'assemblée générale du mois de novembre 2006 l'avait agréée en tant qu'associée ; que la demande, tout d'abord, est formée pour 300 000 euros, ce dont il se déduit que la société NTF Regina, qui expose que " son gain dans vente de l'immeuble aurait donc été de 463 576 euros ", admet qu'elle n'a perdu que la chance de le percevoir ; qu'elle produit par ailleurs un arrêt rendu le 3 juillet 2014, qui indique comment les choses ont ensuite tourné : l'opération a été bloquée par un litige opposant les candidats acquéreurs, la vente consentie par la SCI a été contestée, le prix, séquestré et la SCI mise en redressement ; qu'il résulte de tout cela que la société NTF Regina n'aurait, pas plus que les autres associés, touché sa part du prix a l'époque ; que son préjudice actuel tient à ce qu'elle n'est pas propriétaire de parts ; que dans ces conditions, le préjudice dont elle poursuit la réparation est sans rapport avec les fautes commises et, à défaut de toute demande portant sur la réalité d'un préjudice propre à être en lien avec ces fautes, notamment par évaluation de la valeur résiduelle des parts au regard de l'actif et du passif de la SCI, sa demandes est dépourvue de tout fondement ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris ;

1°) ALORS QUE l'auteur d'un manquement contractuel doit réparation au cocontractant victime de ce manquement ; qu'après avoir retenu, d'une part, que la responsabilité de Jacques X..., aux droits duquel se trouvent ses héritiers, était engagée, tant en sa qualité d'associé de la société Villa Régina qu'en celle de porte-fort de ses co-associés, pour ne pas avoir approuvé l'augmentation de capital de cette société qui devait être souscrite par la société NTF Régina et, d'autre part, que le préjudice actuel de cette dernière tenait à ce qu'elle n'était pas propriétaire de parts de la société Villa Régina, ce dont il découlait qu'il existait un lien de causalité direct et certain entre la faute retenue et l'indemnisation sollicitée à raison de ce que la société NTF Régina avait été privée de la possibilité de participer à la répartition du prix du bien vendu par la société Villa Régina, la cour d'appel qui a néanmoins jugé que le préjudice invoqué était sans rapport avec les fautes commises a violé l'article 1147 du code civil ;

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, en se bornant à relever, pour écarter l'indemnisation de la société NTF Régina, qu'à l'époque de la vente du bien détenu par la société Villa Régina elle n'aurait pas pu toucher sa part du prix à raison du contentieux opposant les candidats acquéreurs et que son préjudice actuel tenait à ce qu'elle n'était pas propriétaire de parts de la société Villa Régina, sans rechercher, comme elle y était invitée, si à la suite de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 3 juillet 2014 le prix de vente n'avait pas été définitivement acquis à la société Villa Régina, de sorte que si elle avait été associée, conformément aux engagements pris, la société NTF Régina aurait pu, à la suite de cette décision, prétendre percevoir sa part du prix de vente, ce qui caractérisait un préjudice en lien direct avec la faute retenue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

3°) ALORS QUE, plus subsidiairement, le juge qui constate l'existence d'un dommage doit le réparer ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté l'existence d'un préjudice actuel de la société NTF Régina, tenant à ce qu'elle n'était pas, à raison de la faute retenue, propriétaire de parts de la société Villa Régina, a refusé d'évaluer le dommage subi, a violé les articles 4 et 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-23860
Date de la décision : 11/05/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 mai. 2017, pourvoi n°15-23860


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.23860
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