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04/05/2017 | FRANCE | N°15-22954

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 mai 2017, 15-22954


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 mars 2014), que par un acte du 29 septembre 2007, la Caisse de crédit agricole des Savoie (la Caisse) a consenti à la société Au fournil de Franck (la société) deux prêts pour financer l'acquisition d'un fonds de commerce ; que M. X...s'est rendu caution envers la Caisse des engagements de la société à concurrence de 40 000 euros ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires le 11 octobre 2010, l

a Caisse a assigné en exécution de son engagement de caution M. X..., lequel ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 mars 2014), que par un acte du 29 septembre 2007, la Caisse de crédit agricole des Savoie (la Caisse) a consenti à la société Au fournil de Franck (la société) deux prêts pour financer l'acquisition d'un fonds de commerce ; que M. X...s'est rendu caution envers la Caisse des engagements de la société à concurrence de 40 000 euros ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires le 11 octobre 2010, la Caisse a assigné en exécution de son engagement de caution M. X..., lequel a soutenu qu'elle devait être déchue du droit de se prévaloir du cautionnement en raison de la disproportion de ce dernier ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer en deniers ou quittances valables à la Caisse la somme de 40 000 euros montant principal, outre les intérêts au taux légal capitalisés, alors, selon le moyen, qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; que la proportionnalité du cautionnement ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie ; qu'en énonçant, pour débouter M. X... de sa demande, que la banque était en droit, pour apprécier sa solvabilité au moment de la souscription du cautionnement, de prendre en considération les revenus qu'il aurait pu tirer de l'activité du fonds de commerce dont la société Au fournil de Franck faisait l'acquisition, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation ;

Mais attendu qu'après avoir relevé qu'il résultait des conclusions de la Caisse que M. X... possédait 60 % du capital de la société « Au fournil de Franck » et qu'il n'apparaît pas que cette société avait d'autres dettes, de sorte que les parts de M. X... avaient une certaine valeur patrimoniale, l'arrêt retient que M. X... se contente d'affirmer que la part qu'il possède en indivision de la maison située à Ambérieu en Bugey n'aurait quasiment aucune valeur dès lors que l'immeuble serait grevé d'un usufruit au profit de sa mère, mais que ces explications sont insuffisantes, puisqu'il lui aurait été facile de faire établir une attestation par un agent immobilier pour corroborer ses dires ; qu'en l'état de ces seuls motifs, abstraction faite de ceux critiqués, erronés mais surabondants, la cour d'appel, qui a fait ressortir que la caution n'apportait pas la preuve, qui lui incombait, de la consistance et de la valeur de son patrimoine, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné M. X... à payer en denier ou quittances valables au Crédit Agricole la somme de 40. 000 € montant principal, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 décembre 2009 sur la somme de 17. 724, 22 € et à compter du 6 juillet 2010 sur la somme de 22. 275, 78 €, et d'avoir dit que ces intérêts seront capitalisés par année entière par application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

AUX MOTIFS PROPRES QUE

1- sur l'application de l'article L341-1 du code de la consommation

Attendu que pour apprécier la solvabilité de M. X..., la banque était en droit de prendre en considération les revenus que celui-ci aurait pu tirer de l'activité du fonds de commerce dont la société « Au fournil de Franck » faisait l'acquisition, puisqu'en effet, l'opération se présentait dans des conditions optimales, à savoir que le fonds de commerce cédé était prospère, que le précédent exploitant, qui se trouvait être l'oncle de M. X..., s'était engagé à l'assister dans un premier temps, que d'autre part, M. X... avait l'expérience professionnelle qui aurait dû lui permettre de réussir dans sa nouvelle activité ;

Attendu par ailleurs qu'il résulte des conclusions de la banque que M. X... possédait 60 % du capital de la société « Au fournil de Franck », qu'il n'apparaît pas que cette société avait d'autres dettes, de sorte que les parts de M. X... avaient donc une certaine valeur patrimoniale en rapport avec le prix d'acquisition du fonds de commerce, soit 170 000 euros ;

Attendu d'autre part que M. X... se contente d'affirmer que la part qu'il possède en indivision de la maison située à Ambérieu n'aurait quasiment aucune valeur dès lors que l'immeuble serait grevé d'un l'usufruit au profit de sa mère ;

Attendu que ces explications sont insuffisantes, puisqu'en effet, il lui aurait été facile de faire établir une attestation par un agent immobilier pour corroborer ses dires ;

Attendu en conséquence que le cautionnement n'était pas manifestement disproportionné par rapport aux biens et aux revenus de la caution ;

2- sur le grief tenant au manquement de la banque à son devoir de mise en garde, et sur le caractère alternatif des deux cautionnements ;

Attendu que selon M. X..., la banque n'aurait pas attiré son attention sur le fait que l'engagement de Mme Y...et le sien présentaient un caractère cumulatif et non alternatif, dès lors que cette caractéristique ne ressortait pas de façon évidente de la rédaction des actes ;

Attendu cependant que M. X... et Mme Y... ont signé des engagements distincts, que dans une telle hypothèse, il convient de présumer sans que la banque soit tenue d'un devoir particulier de mise en garde que ces engagements présentent un caractère cumulatif qu'ils ne peuvent être alternatifs que si l'acte comporte une mention exprès en ce sens ;

Attendu au surplus que l'acte de cautionnement contient une mention spécifiant bien que les deux cautionnements présentent un caractère cumulatif ;

3- sur la demande de délais de paiement

Attendu que M. X... ne fait aucune proposition de règlement, que la dette est ancienne, que la demande de délais de paiement présente un caractère exclusivement dilatoire, doit en conséquence être rejetée »,

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE

Attendu qu'au moment où il s'engageait envers le CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE en qualité de garant de la SARL AU FOURNIL DE FRANCK, Monsieur X... Jean-François était à la fois associé majoritaire et gérant de cette société ;

Attendu qu'il disposait à l'époque d'une expérience professionnelle significative dans le domaine d'activité de cette société ;

Attendu qu'il a présenté au CREDIT AGRICOLE DES SAVOIE en vue de l'obtention du financement sollicité un dossier démontrant qu'il avait pris soin avant de s'engager d'étudier les différents aspects de son entreprise ;

Attendu qu'il doit en conséquence être considéré comme « caution avertie » au sens de la jurisprudence en la matière ;

Attendu qu'il est de jurisprudence constante que pour accorder ou refuser son concours le banquier sollicité doit nécessairement prendre en considération l'importance des revenus que le garant espère retirer de la société qu'il garantit, plus particulièrement lorsque cette dernière constitue l'outil de travail dont il escompte, avec le concours de sa compagne, retirer les moyens de son existence ;

Attendu que les revenus de chacun de Monsieur X... Jean-François et de Melle Y... s'établissaient alors à la somme annuelle de 14. 400 € alors que leur engagement était de 40. 000 € chacun ;

Attendu que Monsieur X... Jean-François était en outre fondé à se dire propriétaire indivis d'un bien immobilier sis sur le territoire de la ville d'Ambérieux (Ain) ;

Attendu qu'il résulte qu'il n'existait pas au moment de son engagement de disproportion manifeste entre les revenus et le patrimoine de Monsieur X... Jean-François et le montant de son engagement ;

Attendu que la situation actuelle de M. et Mme X... paraît s'être améliorée puisqu'ils disposent, ensemble d'un revenu annuel de l'ordre de 34. 000 €, Monsieur X... Jean-François étant par ailleurs toujours titulaire de droits indivis sur le tènement immobilier d'Ambérieux en Bugey ;

Attendu qu'aujourd'hui non plus il n'apparaît pas de disproportion manifeste entre les revenus et le patrimoine de Monsieur X... Jean-François d'une part et le montant de son engagement d'autre part ;

Attendu qu'il convient donc de déclarer régulière, recevable et bien fondée la demande du CREDIT AGRICOLE DES SAVOIR et de condamner Monsieur X... Jean-François à lui payer la somme de 40. 000 € majorée des intérêts calculés au taux légal à compter du 08/ 12/ 2009 date de la présentation de la mise en demeure du 3/ 12/ 2009 sur la somme 17724, 22 euros et à compter du 06/ 07/ 2010 date de l'assignation sur le solde en prononçant l'anatocisme desdits intérêts,

ALORS QU'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; que la proportionnalité du cautionnement ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie ; qu'en énonçant, pour débouter M. X... de sa demande, que la banque était en droit, pour apprécier sa solvabilité au moment de la souscription du cautionnement, de prendre en considération les revenus qu'il aurait pu tirer de l'activité du fonds de commerce dont la société Au fournil de Franck faisait l'acquisition, la cour d'appel a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-22954
Date de la décision : 04/05/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 18 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 mai. 2017, pourvoi n°15-22954


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.22954
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