La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2017 | FRANCE | N°15-10570

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 avril 2017, 15-10570


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 113-2, 2°, L. 112-3 et L. 113-8 du code des assurances ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ; qu'il résul

te des deux autres que l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de l...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 113-2, 2°, L. 112-3 et L. 113-8 du code des assurances ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ; qu'il résulte des deux autres que l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que si celles-ci procèdent des réponses qu'il a apportées auxdites questions ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. [Q] a fait appel le 30 juin 2010 à la société Avanssur, exerçant sous l'enseigne « Direct assurance », (l'assureur) afin de souscrire une police d'assurance automobile portant sur un véhicule dont il venait de faire l'acquisition ; que le 6 octobre 2010, ce véhicule est entré en collision avec un véhicule en stationnement ; que M. [Q] a effectué une déclaration de sinistre auprès de l'assureur qui lui a opposé la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle ;

Attendu que pour annuler le contrat d'assurance et débouter M. [Q] de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient que l'intéressé a établi une déclaration inexacte lorsqu'il a accepté la proposition d'assurance, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur les questions qui lui ont été préalablement posées, dans la mesure où la mention qui figurait sur le document qu'il a signé était dépourvue de la moindre ambiguïté : « usage : utilise le véhicule pour des déplacements privés et ne s'en sert en aucun cas pour des déplacements professionnels » ; qu'il ne subsiste aucun doute sur le caractère intentionnel de cette inexactitude ; que, ce faisant, M. [Q] a diminué l'opinion de l'assureur sur l'objet du risque, un véhicule utilisé dans le cadre professionnel n'étant pas exposé au même risque de sinistre qu'un véhicule de loisirs ;

Qu'en statuant ainsi, sans relever que l'inexactitude de ces déclarations procédait de réponses à des questions précises posées par l'assureur lors de la conclusion du contrat de nature à lui faire apprécier les risques pris en charge, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société Avanssur aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Avanssur à payer à la SCP Bénabent et Jéhannin la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. [Q].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le contrat d'assurance n° 1434168667 du véhicule BMW X5 conclu entre Monsieur [Q] et la société Avanssur et, en conséquence, d'avoir débouté Monsieur [Q] de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « L'article L. 113-2 du code des assurances impose à l'assuré de répondre exactement aux questions posées par l'assureur notamment dans le formulaire de déclaration du risque ;
QU'il résulte encore de l'article L. 113-8 du Code des assurances que le contrat est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ;
QU'aucune pièce n'est produite par l'intimée dont la défense a été déclarée irrecevable comme tardive ;
QUE cependant, les premiers juges ont relevé que la mention suivante figurait sur la proposition d'assurance signée par [M] [Q] le 9 juillet 2010 : « usage : utilise le véhicule pour des déplacements privés et n'en sert en aucun cas pour des déplacements professionnels » ;
QUE le tribunal s'est en outre fondé à juste titre sur la mise en demeure établie par le conseil de [M] [Q] le 15 décembre 2010, dans laquelle il se plaint de l'absence de véhicule pour « ses déplacements tant privés que professionnels » ;
QUE cette déclaration contredit les dires actuels de [M] [Q] selon lesquels il travaille pour l'essentiel à domicile, même s'il justifie, par la production du contrat de domiciliation conclu avec la société Domaisne à effet du 7 juillet 2009, de ce que si le siège social de sa société est effectivement situé à [Localité 1], il ne s'agit que d'une domiciliation ;
QUE cependant, [M] [Q] verse lui-même aux débats des factures de location de véhicule qui révèlent qu'il a loué :
un véhicule du 19 au 26 janvier 2011 pour 210 €,
un véhicule du 27 janvier au 3 février 2011 pour 220 €,
un véhicule du 3 au 10 février 2011 pour un coût de 220 €
un véhicule du 10 au 17 février 2011 pour un coût de 235 €
un véhicule du 18 au 25 février 2011 pour un coût de 230 € ;

sans précision du nombre de kilomètres parcourus,
et un véhicule du 24 mars 2011 au 2 avril 2011 avec lequel il a parcouru 2.383 km,

puis un véhicule du 2 au 18 avril 2011 avec lequel il a parcouru 4.165 km, pour un coût de 856 €,

ces deux dernières factures lui étant adressées au lieu de domiciliation de sa société.

QU'or, [M] [Q] ne fournit aucune explication sur ces utilisations de véhicule et ne prétend nullement qu'il a parcouru ces distances importantes (6.548 km en 25 jours) dans le cadre de déplacements privés ;
QU'or, les kilométrages qui apparaissent sur ces factures sont radicalement incompatibles avec les propres déclarations de l'appelant selon lesquelles il a pu lui arriver « à titre exceptionnel » d'utiliser sa voiture pour se rendre à la gare depuis son domicile, afin d'aller travailler ;
QU'il apparaît donc qu'il utilisait bel et bien son véhicule pour des trajets professionnels, bien au-delà du trajet domicile gare ;
QU'à cet égard, il sera en outre observé que le kilométrage du véhicule tel que l'expert l'a reconstitué était de 320.000 alors que dans sa déclaration de sinistre, [M] [Q] a indiqué qu'il n'affichait que 125.733 km lors de l'achat, trois mois plus tôt ;
QUE l'intéressé a donc établi une déclaration inexacte lorsqu'il a accepté la proposition d'assurance, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur les questions qui lui ont été préalablement posées, dans la mesure où la mention qui figurait sur le document qu'il a signé était dépourvue de la moindre ambiguïté : « usage : utilise le véhicule pour des déplacements privés et ne s'en sert en aucun cas (souligné par la cour) pour déplacements professionnels ». Il ne subsiste ainsi aucun doute sur le caractère intentionnel de cette inexactitude.
QUE ce faisant, il a diminué l'opinion de l'assureur sur l'objet du risque, un véhicule utilisé dans le cadre professionnel n'étant pas exposé au même risque de sinistre qu'un véhicule de loisirs, ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges ;
QU'il convient donc de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et de condamner [M] [Q] qui succombe en son appel aux dépens y afférents ; »

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « L'article L. 113-8 du code des assurances dispose que le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'intéressé était sans influence sur le sinistre ;
QU'en l'espèce il résulte de la proposition de contrat d'assurance auto signée par monsieur [Q] le 9 juillet 2010, document qui constitue le contrat d'assurance par la rencontre des volontés, que l'assuré déclare, entre autres mentions : Usage : utilise le véhicule pour des déplacements privés et ne s'en sert en aucun cas pour des déplacements professionnels (souligné par le tribunal) ;
QUE Monsieur [Q] ne peut de bonne foi venir soutenir aujourd'hui qu'il n'a pas effectué cette déclaration téléphoniquement à son assureur alors qu'il a signé la proposition d'assurance après avoir porté sur le lieu et la date de sa signature, acceptant ainsi toutes les mentions et déclarations que cette proposition contient, étant observé que la volonté de l'assureur de n'assurer le véhicule que pour un usage privé est clairement exprimée dans la déclaration ;
QU'or, il est constant que Monsieur [Q] utilisait le véhicule assuré tant pour ses déplacements privés que professionnels ; qu'il déclare en effet, dans la lettre de mise en demeure qu'il a fait adresser à la société AVANSSUR le 15 décembre 2010 par son conseil, subir un préjudice qui ne cesse de s'aggraver puisqu'il n'a plus de véhicule pour ses déplacements tant privés que professionnels ;
QU'et dans ses conclusions il déclare qu'il utilisait le véhicule pour se rendre à la gare avant de prendre le train pour se rendre à son travail, ce qui constitue un usage à des fins professionnelles, que le trajet domicile-gare étant un déplacement professionnel ;

QU'en outre, au soutien de sa demande de prise en charge par l'assureur des frais de location de véhicules de remplacement, il produit une facture établie au nom de la société Bouclier Sécurité dont il est le gérant (pièce 5-13) et deux autres factures qui sont adressées au siège social de sa société de [Localité 1], étant rappelé que Monsieur [Q] habite à [Adresse 1] ; qu'il considère ainsi ces dépenses de location comme des dépenses professionnelles ;
QU'il est donc établi qu'au moment de la conclusion du contrat d'assurance Monsieur [Q] a fait une fausse déclaration sur l'usage qu'il faisait du véhicule assuré, alors que cet usage était un élément déterminant de l'accord de l'assureur, ce que ne pouvait ignorer l'assuré dont la fausse déclaration, par suite, n'a pu être qu'intentionnelle ;

QU'en effet, il est évident qu'un assuré qui déclare n'utiliser son véhicule que pour des déplacements privés se voit imposer un montant de prime inférieur à celui qui déclarer utiliser son véhicule pour ses déplacements professionnels, le risque d'accidents étant plus élevé dans le second cas qui implique un usage plus fréquent ;
QUE la société AVANSSUR est par conséquent bien fondée à solliciter la nullité du contrat d'assurance par application du texte de loi précité ;
QU'en vertu du deuxième alinéa de ce texte, elle a droit au paiement de toutes les primes échues ;
QUE par suite, Monsieur [Q] doit être débouté de l'ensemble de ses demandes » ;

1/ ALORS QUE l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ; que l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que si cellesci procèdent des réponses qu'il a apportées aux dites questions ; que, pour débouter Monsieur [Q] de ses demandes indemnitaires, la Cour d'appel a retenu que « l'intéressé a donc établi une déclaration inexacte lorsqu'il a accepté la proposition d'assurance, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur les questions qui lui ont été posées » (arrêt, p. 4) ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les articles L. 113-2 et L. 113-8 du Code des assurances ;

2/ ALORS QUE SUBSIDIAIREMENT l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ; que faute de produire un questionnaire écrit, l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que s'il démontre que la précision des déclarations de l'assuré permettait de déduire qu'un questionnaire lui avait été préalablement remis ; que, pour débouter Monsieur [Q] de ses demandes indemnitaires, la Cour d'appel a retenu que « l'intéressé a donc établi une déclaration inexacte lorsqu'il a accepté la proposition d'assurance, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur les questions qui lui ont été posées » (arrêt, p. 4) ; qu'en statuant ainsi, au regard de la seule inexactitude de la déclaration, sans rechercher si celle-ci était suffisamment précise pour permettre de déduire l'existence d'une question posée par l'assureur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-2 et L. 113-8 du Code des assurances ;

3/ ALORS QUE SUBSIDIAIREMENT l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge ; qu'en l'absence de tout questionnaire, l'assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré que si celui-ci a spontanément délivré de fausses informations ; que, pour débouter Monsieur [Q] de ses demandes indemnitaires, la Cour d'appel a retenu que « l'intéressé a donc établi une déclaration inexacte lorsqu'il a accepté la proposition d'assurance, sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur les questions qui lui ont été posées » (arrêt, p. 4) ; qu'en statuant ainsi, au regard de la seule inexactitude de la déclaration, sans rechercher si celle-ci avait été effectuée spontanément et intentionnellement par Monsieur [Q] afin de changer l'objet du risque ou en diminuer l'opinion pour l'assureur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-2 et L. 113-8 du Code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-10570
Date de la décision : 27/04/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 avr. 2017, pourvoi n°15-10570


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.10570
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award