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20/04/2017 | FRANCE | N°16-16554

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 avril 2017, 16-16554


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de Mme [O] et de M. [F] ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la première branche du moyen :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que la prestation compensatoire est destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité que la rupture du mariage crée dans

les conditions de vie respectives des époux et que le juge la fixe en tenant compte de leur situat...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de Mme [O] et de M. [F] ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la première branche du moyen :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que la prestation compensatoire est destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux et que le juge la fixe en tenant compte de leur situation au moment du divorce ;

Attendu que, pour rejeter la demande tendant à l'allocation d'une prestation compensatoire, l'arrêt retient que la rupture du mariage ne crée pas de disparité dans les conditions de vie respectives des époux, Mme [O] disposant, selon son revenu fiscal de référence pour l'année 2014, d'un montant de 14 779 euros, soit un revenu moyen mensuel de 1 231 euros ;

Qu'en prenant en considération, au titre des ressources de l'épouse, la pension alimentaire qu'elle percevait, alors que le devoir de secours prend fin avec le divorce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de Mme [O] en paiement d'une prestation compensatoire, l'arrêt rendu le 22 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme [O] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme [O]

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme [O] de sa demande de prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 270 du code civil, le divorce met fin au devoir de secours, mais que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ; que, selon les dispositions de l'article 271 du code civil, cette prestation est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que dans la détermination des besoins et des ressources le juge prend en considération notamment : - l'âge et l'état de santé des époux, - la durée du mariage, - les conséquences des choix professionnels fait par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps déjà consacré ou qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, - leur qualification et leur situation professionnelles, - leur situation respective en matière de pension de retraite, - leur patrimoine estimé ou prévisible tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, - leurs droits existants et prévisibles ; que selon l'article 274 du code civil, la prestation compensatoire prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; que selon l'article 275 du code civil lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital dans les conditions de l'article 274, le juge peut fixer les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous forme de versements périodiques indexes selon les règles applicables aux pensions alimentaires ; que le droit à la prestation compensatoire et son montant doivent être évalués à la date où le divorce est devenu définitif, et donc en l'espèce au jour du prononce de l'arrêt ; que M. [Q] [F] était âgé au moment du mariage de 49 ans tandis que son épouse était alors âgée de 52 ans ; que le mariage a duré 16 ans ; qu' aucun enfant n'est issu de cette union ; que lors du divorce, l'époux est âgé de 66 ans et l'épouse de 68 ans ; que les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens ; que Mr. [Q] [F] justifie par deux certificats médicaux de janvier 2014, qu'il est suivi depuis 2005 pour une maladie de Ménière, responsable de crises vertigineuses invalidantes et récurrentes à l'origine d'une incapacité passagère totale et associées à une surdité et des acouphènes, ainsi que de problèmes d'arthrose ; que Mme [Y] [O] établit souffrir d' arthrose, suite à une tendinopathie calcifiante, et avoir subi en 2011 une intervention chirurgicale pour une sigmoïdite diverticulaire ; que son médecin généraliste certifie en 2013 la suivre pour un syndrome anxio-dépressif ; qu'il ressort du dossier que M. [Q] [F] justifie avoir déclaré pour l'année 2013, un revenu de 17.989 euros, et pour l'année 2014, de 18.055 euros, soit un revenu mensuel moyen en 2014 de 1.504 euros ; qu'il fait état d'avoirs bancaires à la date du 5 mars 2015, au crédit agricole de 25.998, 61 euros, suite à la succession de sa mère, et de 45.723,97 euros au crédit mutuel pour ses participations à Auchan ; qu'il est propriétaire d'un appartement à [Localité 1] provenant de la succession de sa mère pour un montant évalue à 160.000 euros ; qu'au titre de ses charges justifiées et actualisées, il doit s'acquitter, outre les dépenses incompressibles de la vie quotidienne, d'une assurance automobile annuelle de 668 euros, d'une assurance annuelle habitation de 96,08 euros, d'une cotisation assurance Vivinter de 169,94 euros par mois, qu'il justifie de charges pour l'appartement hérité de sa mère de 295,23 euros en janvier 2015 ; qu'il partage ses charges avec sa compagne ; que de son côté, Mme [Y] [O] indique ne percevoir qu'une retraite mensuelle de 679 euros, qu'elle produit cependant son revenu fiscal de référence pour l'année 2014, d'un montant de 14.779 euros, soit un revenu moyen mensuel de 1.231 euros ; qu'au 30 janvier 2015, elle disposait d'une somme de 23.477 euros sur un livret bleu, et de 6.023,69 euros sur un compte Tonic Croissance ; qu'au titre de ses charges justifiées et actualisées, elle doit s'acquitter d'une taxe foncière annuelle de 817 euros, d'une taxe d'habitation mensualisée à hauteur de 64 euros par mois pour chaque échéance, d'un premier acompte d'impôt sur le revenu de 196 euros, d'une assurance habitation véhicule et prévoyance de 279,59 euros sur une période de 6 mois, de frais de gaz de 108,15 euros par mois, d'électricité de 86,05 euros par mois, et d'eau de 120 euros sur 6 mois ; que le couple est propriétaire indivis d'un appartement à Talloires qui a été vendu pour une somme de 240.000 euros en 2013, avec des frais de plus-value de 23.000 euros, les fonds étant séquestrés chez le notaire, et d'une maison d'habitation à [Localité 2] évaluée aujourd'hui à la somme de 295.000 euros, dont il est établi que l'épouse a financé la totalité du prix d'achat et pour laquelle l'époux revendique une créance pour des travaux qu'il soutient avoir effectués ; qu'il ressort de ces éléments, qu'il n'est pas établi que Mme [Y] [O] ait sacrifié sa carrière pour favoriser celle de son conjoint, que les époux se sont en effet mariés, alors que chacun des conjoints avait déjà construit sa situation personnelle et professionnelle ; que la disparité entre les revenus existait avant le mariage et a été maintenue par l'adoption du régime de séparation des biens, que la disparité entre les patrimoines n'est pas établie à ce jour, compte tenu des droits prévisibles de chacun des époux dans la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux ; qu'il convient dans ces conditions de débouter Mme [Y] [O] de sa demande de prestation compensatoire, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point ;

1°) ALORS QUE la pension alimentaire versée par l'un des époux pendant l'instance en divorce, au titre du devoir de secours, ne peut pas être prise en compte au titre des ressources du demandeur à la prestation compensatoire ; qu'en déterminant les revenus de Mme [O], en considération de son revenu fiscal de référence pour l'année 2014, qui incluait la perception de la somme allouée par le juge aux affaires familiales de 570 euros mensuel, à compter du 1er mars 2013, au titre du devoir de secours, la Cour d'appel a violé l'article 270 du Code civil ;

2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent tenir compte de circonstances antérieures au prononcé du divorce pour apprécier la disparité entre les conditions de vie respectives des époux ; qu'en jugeant que la disparité entre les conditions de vie respectives des époux n'était pas établie aux motifs que « la disparité entre les revenus existait avant le mariage et a été maintenue par l'adoption du régime de séparation des biens », la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a, en conséquence, violé l'article 270 du Code civil ;

3°) ALORS QUE le patrimoine des époux après la liquidation du régime matrimonial peut être pris en compte pour statuer sur une demande de prestation compensatoire à la condition qu'il soit déterminé ; qu'en justifiant le rejet de la demande de prestation compensatoire de Mme [O] par les « droits prévisibles de chacun des époux dans la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux » après avoir relevé que ceux-ci étaient propriétaires indivis d'une maison d'habitation « dont il est établi que l'épouse a financé la totalité du prix d'achat et pour laquelle l'époux revendique une créance pour des travaux qu'il soutient avoir effectués », ce dont il résultait que les droits de chacun des époux sur le prix de vente étaient indéterminés et ne pouvaient dès lors être pris en compte pour statuer sur la demande de prestation compensatoire, la Cour d'appel a violé l'article 271 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-16554
Date de la décision : 20/04/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 22 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 avr. 2017, pourvoi n°16-16554


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.16554
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