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20/04/2017 | FRANCE | N°16-12092

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 20 avril 2017, 16-12092


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 octobre 2015), que M. et Mme Y... ont confié à la société GBR, sous la maîtrise d'oeuvre de la société A... H...            (la société A...), des travaux de réfection d'une maison ; que la société GBR a adressé son mémoire définitif à la société A... qui ne l'a pas transmis aux maîtres de l'ouvrage ; que la société GBR a assigné M. et Mme Y... en paiement du solde du marché ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu

l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 févrie...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 octobre 2015), que M. et Mme Y... ont confié à la société GBR, sous la maîtrise d'oeuvre de la société A... H...            (la société A...), des travaux de réfection d'une maison ; que la société GBR a adressé son mémoire définitif à la société A... qui ne l'a pas transmis aux maîtres de l'ouvrage ; que la société GBR a assigné M. et Mme Y... en paiement du solde du marché ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que, pour condamner M. et Mme Y... à payer à la société GRB la seule somme de 67 076 euros au titre du solde du marché, l'arrêt retient que le délai de quarante-cinq jours prévu par l'article 19.6.2 de la norme NF P 03-001 n'a pas couru à l'encontre de M. et Mme Y..., faute par la société A... de leur avoir transmis le mémoire définitif de la société GRB comme le lui imposait l'article 19.6.1, et qu'à défaut de respect des règles fixées par cette norme, l'entrepreneur ne peut se prévaloir du silence du maître de l'ouvrage pour tenir pour accepté le mémoire définitif ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que l'entrepreneur avait notifié au maître d'oeuvre son mémoire définitif conformément aux prescriptions de la norme, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi principal, qui est recevable :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que, pour condamner la société GRB, in solidum avec M. et Mme Y..., à payer à M. A... et la société A... la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient que l'appel formé à l'encontre de ces derniers sans motif et sans demande suffit à démontrer le caractère abusif de la procédure ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société GRB n'avait pas formé appel à l'encontre de M. A... et de la société A... à l'égard desquels seuls M. et Mme Y... avaient exercé une action en garantie, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour condamner M. et Mme Y..., in solidum avec la société GRB, à payer à M. A... et à la société A... la somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient que l'appel formé à l'encontre de ces derniers sans motif et sans demande suffit à démontrer le caractère abusif de la procédure ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. et Mme Y... sollicitaient la garantie de la société A... et de M. A... et leur condamnation à des dommages-intérêts, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme Y... à payer à la société GRB la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société GRB.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir limité à la somme de 67 706 € le montant de la somme due à la société GRB par les époux Y..., au titre du solde du marché,

AUX MOTIFS QUE sur le décompte général définitif, la société GRB soutient que les époux Y... ne sont pas fondés à remettre en cause son mémoire définitif adressé au maître d'oeuvre, le 4 mai 2010, faute d'avoir notifié leur décompte général définitif dans le délai de 45 jours suivant la notification du mémoire ; que les époux Y... font valoir que le maître d'oeuvre n'ayant pas respecté la procédure prévue par la norme NFP 03 001, la société GRB ne peut considérer que son décompte a été accepté ; que la société GRB affirme avoir adressé son mémoire définitif à la société A... H...             le 4 mai 2010 dans les 60 jours suivant la réception des travaux, conformément aux dispositions de l'article 19.5.1 de la norme NFP 03 001, et versé aux débats un accusé de réception du 5 mai 2010, un courrier électronique du 18 mai 2010, émanant de la société A... H...             et accusant réception du décompte, lui-même produit sous le numéro de facture 59 25.04 ; que la société A... H...             n'a jamais adressé le mémoire aux maîtres d'ouvrage ; que la société GRB a adressé une mise en demeure à la SCI Losoa le 15 juillet 2010, et la société A... a adressé le décompte général définitif à la société GRB le 21 juillet 2010 ; que le 6 août 2010, une association se disant mandataire de la société GRB a adressé une mise en demeure aux époux Y... de notifier leur mémoire définitif ; que par lettre recommandée avec avis de réception du 14 septembre 2010, les époux Y... se sont référés au décompte général définitif adressé par la société A... le 21 juillet 2010 ; que le délai de 45 jours prévu par l'article 19.6.2 de la somme NFP 03 001 n'a pas couru à l'encontre des époux Y..., faute pour la société A... de leur avoir transmis le mémoire final de la société GRB, comme le lui imposait l'article 19.6.1 de la norme NFP 03 001 ; que le délai de 30 jours prévu par l'article 19.6.3 de la norme susvisée n'a pas couru à l'encontre de la société GRB faute pour la société A... d'avoir soumis le décompte général définitif aux maîtres d'ouvrage conformément aux dispositions de l'article 19.6. 2 de la norme ; qu'à défaut de respect des règles fixées par le norme NFP 03 001, ni la société GRB ni les maîtres d'ouvrage ne peuvent se prévaloir du silence de l'autre partie, pour tenir pour accepté le mémoire final ou le décompte général définitif ; que, sur les pénalités de retard, selon les termes du marché et de l'avenant conclu le 30 juillet 2009, la société GRB s'est engagée à réaliser les travaux pour le 31 octobre 2009 et des pénalités de retard ont été prévues à compter du 1er novembre 2009, à hauteur de 1/1000 du montant du marché avec une franchise de 100 € ; que la société GRB fait valoir que le retard est imputable aux retards des autres entreprises ; que pour démontrer les retards d'autres entreprises qu'elle invoque, elle se réfère à des comptes rendus de chantier qu'elle ne verse pas aux débats ; qu'à défaut de preuve d'une cause justifiant le retard dans l'avancement des travaux, terminés le 1er avril 2010 au lieu du 30 novembre 2009, les pénalités prévues par le contrat, à titre d'indemnisation de la défaillance de l'entreprise dans l'exécution de ses obligations, sont applicables ; que la somme de 39 689 € demandée à ce titre correspond à une juste évaluation des pénalités dues par la société GRB aux époux Y... ; que sur les comptes entre les parties, le prix du marché s'élevait à 342 000 € HT (366 455 € TTC) et les époux Y... ont réglé la somme de 259 690 € ; que la société GRB ne justifie pas l'augmentation des travaux qu'elle sollicite (396 778 €) ; que le solde restant dû atteint 106 765 € ; qu'il doit en être réduit le montant des pénalités de retard de 39 689 € de telle sorte que la créance de la société GRB s'élève à 67 076 € ;

1) ALORS QU'aux termes des articles 19.5.1 et 19.5.4 de la norme Afnor NF P 03 001, expressément applicable au marché formé entre la société GRB et les époux Y..., la société A... étant maître d'oeuvre, dans le délai de 60 jours à dater de la réception de l'ouvrage, l'entrepreneur remet au maître d'oeuvre le mémoire définitif des sommes qu'il estime lui être dues en application du marché, et si le mémoire définitif n'a pas été remis au maître d'oeuvre, dans le délai de 60 jours, le maître de l'ouvrage peut, après mise en demeure restée sans effet, le faire établir par le maître d'oeuvre aux frais de l'entrepreneur ; qu'il s'en déduit que le maître de l'ouvrage qui ne reçoit pas, dans le délai prescrit à compter de la réception de l'ouvrage, le mémoire définitif, conserve la faculté de s'adresser au maître d'oeuvre pour le faire établir ; qu'à défaut, l'entrepreneur qui établit avoir adressé au maître d'oeuvre son décompte général définitif dans le délai prescrit est fondé à se prévaloir de l'acceptation, par le maître de l'ouvrage, de ce décompte ; qu'en énonçant que, par l'effet de la carence du maître d'oeuvre dans l'envoi, au maître de l'ouvrage, du décompte général définitif établi par la société GRB, entrepreneur, celle-ci ne pouvait pas se prévaloir du silence des époux Y..., maîtres de l'ouvrage, pour alléguer leur acceptation de son mémoire, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées, ensemble l'article 1134 du code civil ;

2 ) ALORS QUE la liste des pièces communiquées par la société GRB, annexée à ses conclusions, mentionnait une pièce n°4, « courrier de la société GRB au cabinet A... etamp; H... en date du 4 mai 2009 », une pièce n°5, copie de la précédente adressée aux maîtres de l'ouvrage, et une pièce n°6 en date du 14 janvier 2010 récapitulant les comptes rendus de chantier ; qu'il en résultait que la société GRB avait produit aux débats et communiqué les pièces relatives aux retards des autres entreprises et spécialement les comptes rendus de chantier, établissant que les retards dans l'avancement des travaux ne lui étaient pas imputables ; qu'en énonçant cependant que la société GRB ne versait pas aux débats les comptes rendus de chantier et que dès lors, elle n'apportait pas la preuve d'une cause justifiant le retard dans l'avancement des travaux, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société GRB in solidum avec les époux Y... à payer à M. A... et la société A... H...             la somme de 2000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et celle de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

AUX MOTIFS QUE l'appel formé à l'encontre de M. A... et de la société A... H...             sans motif et sans que la moindre demande ne soit formée contre l'un ou l'autre suffit à démontrer le caractère abusif de la procédure et justifie la demande de dommages intérêts formée par eux ; qu'aucune demande n'est formée à l'encontre de la société A... H...             et M. A... dont la présence aux débats consécutive aux appels formés à leur encontre justifie qu'il leur soit alloué une somme, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

ALORS QUE la société GRB n'avait pas interjeté appel contre M. A... et la société A... H...             ; que seuls les maîtres d'ouvrage, dès la première instance, avaient exercé une action en garantie contre ces parties ; qu'à défaut de lien contractuel et de lien d'instance entre le maître d'oeuvre et la société GRB, la cour d'appel n'était pas fondée à condamner celle-ci, in solidum avec les époux Y..., au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive et des frais au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en le décidant néanmoins, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ensemble l'article 700 du code de procédure civile ;

Moyen produit au pourvoi incident par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y... et la société Losoa.

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. et Mme Y..., in solidum avec la société GRB, à payer à M. A... et à la société A... H...             la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE l'appel formé à l'encontre de M. A... et de la société A... H...             sans motif et sans que la moindre demande ne soit formée à l'encontre de l'un ou de l'autre suffit à démontrer le caractère abusif de la procédure et justifie la demande de dommages et intérêts formée ; qu'aucune demande n'est formée à l'encontre de la société A... H...             et de M. Stéphane A..., dont la présence aux débats consécutives aux appels formés à leur encontre justifie qu'il leur soit allouée une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en condamnant M. et Mme Y..., in solidum avec la société GRB, à payer à M. A... et à la société A... H...             la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au motif qu'aucune demande n'aurait été formée à l'encontre de ces derniers, ce qui suffirait à démontrer le caractère abusif de la procédure (arrêt attaqué, p. 6, alinéas 5 et 7), cependant que, dans leurs conclusions d'appel (p. 15, alinéas 3 et 4), M. et Mme Y... sollicitaient la condamnation de la société A... H...             et de M. Stéphane A... à les garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à leur encontre au profit de la société GRB et à leur payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de leurs obligations contractuelles, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-12092
Date de la décision : 20/04/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Coût des travaux - Montant - Décompte définitif - Norme AFNOR P 03-001 - Application - Effet

CONTRAT D'ENTREPRISE - Coût des travaux - Montant - Mémoire définitif - Notification au maître d'oeuvre - Effet CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Rapports avec le maître de l'ouvrage - Coût des travaux - Etablissement et notification du décompte définitif - Défaut - Effet

L'entrepreneur, qui a régulièrement notifié, conformément aux prescriptions de la norme NF P 03-001, son mémoire définitif au maître d'oeuvre, est fondé à se prévaloir de son acceptation, alors même que le maître d'oeuvre ne l'a pas transmis au maître de l'ouvrage comme le lui imposait l'article 19.6.1 de la norme


Références :

article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016

article 19.6.1 de la norme AFNOR P 03-001

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 20 avr. 2017, pourvoi n°16-12092, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : Me Balat, SCP Boulloche, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12092
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