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29/03/2017 | FRANCE | N°16-12815

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 mars 2017, 16-12815


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 11 mars 2014, pourvoi n° 13-12.715), qu'après avoir reçu des transfusions sanguines en 1977 lors de son accouchement à l'hôpital Notre-Dame de Bon Secours, Mme Z... a présenté une contamination par le virus de l'hépatite C, décelée en 1991 ; qu'elle a assigné en responsabilité et indemnisation l'Etablissement français du sang (EFS), venant aux droits de la Fondation nationale de transfusion sang

uine, gestionnaire du centre de transfusion sanguine de l'hôpital Saint...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 11 mars 2014, pourvoi n° 13-12.715), qu'après avoir reçu des transfusions sanguines en 1977 lors de son accouchement à l'hôpital Notre-Dame de Bon Secours, Mme Z... a présenté une contamination par le virus de l'hépatite C, décelée en 1991 ; qu'elle a assigné en responsabilité et indemnisation l'Etablissement français du sang (EFS), venant aux droits de la Fondation nationale de transfusion sanguine, gestionnaire du centre de transfusion sanguine de l'hôpital Saint-Antoine, qui a appelé en garantie son assureur, la société Azur assurances IARD, aux droits de laquelle est venue la société Covéa Risks et se trouve désormais la société Mutuelles du Mans assurances IARD (l'assureur) ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde (la caisse) a demandé le remboursement de ses débours ; que les juges du fond ont retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de Mme Z... et mis l'indemnisation de ses préjudices à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM), substitué en cours de procédure à l'EFS ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes à l'égard de l'ONIAM ;

Attendu que le visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date n'est nécessaire que si le juge n'expose pas succinctement leurs prétentions respectives et leurs moyens ; que l'arrêt comportant la discussion et la réfutation des moyens et prétentions exposés par les parties dans leurs écritures, le moyen manque en fait ;

Sur les trois autres moyens réunis :

Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de statuer ainsi, alors selon le moyen :

1°/ qu'il appartient au centre de transfusion sanguine, ou à son assureur, de rapporter la preuve de ce que les produits sanguins, qu'il a fournis à l'établissement de soins où la victime a été contaminée, n'ont pas été à l'origine de la contamination ; qu'aussi bien, si un doute subsiste quant à l'origine du produit utilisé, l'assureur doit sa garantie à l'ONIAM, lequel doit indemniser la caisse de ses débours ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;

2°/ que l'organisme tiers payeur dispose par principe d'un recours ; que ce recours n'est exclu que dans trois hypothèses : tout d'abord si l'établissement de transfusion n'est pas assuré, ensuite si ses droits à l'égard de l'assureur sont épuisés, enfin si le délai de validité de la couverture est venu à expiration ; qu'en faisant abstraction de ces trois hypothèses pour considérer que le recours devait être exclu, en outre dans le cas où la preuve n'était pas rapportée que les conditions concrètes de mise en oeuvre de la garantie étaient remplies, les juges du fond, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, ensemble le principe suivant lequel les exceptions sont d'interprétation stricte ;

3°/ que la partie qui entend bénéficier d'une exception a la qualité de demandeur quant à cette exception ; qu'elle a, dès lors, la charge de la preuve ; que l'ONIAM avait à tout le moins la charge de prouver, pour pouvoir bénéficier de l'exception, qu'il était exclu que les conditions de garantie de l'assureur puissent être regardées comme remplies ; que, par suite, en présence d'une incertitude quant à l'origine des lots et quant à la possibilité d'une mise en oeuvre de la garantie de l'assureur, les juges du fond devaient considérer que l'ONIAM ne rapportait pas, à l'égard de la caisse, la preuve qui lui incombait pour pouvoir bénéficier de l'exception ; qu'en décidant le contraire, les juges ont violé les règles de la charge de la preuve de l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que si la présomption instituée par l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 est susceptible d'être invoquée par les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime de la contamination, et met, lorsque le demandeur a apporté des éléments permettant de présumer son origine transfusionnelle, à la charge du défendeur la preuve que la transfusion n'est pas à l'origine de la contamination, ce dernier ne peut être tenu d'apporter une telle preuve que lorsqu'il est établi qu'il a fourni des produits sanguins en vue de leur administration à la victime ;

Attendu, d'autre part, selon l'article 67, IV, de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, complété par l'article 72, II, de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, applicable aux actions juridictionnelles en cours à la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, que l'ONIAM est substitué à l'EFS dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ; que, lorsque l'ONIAM a indemnisé une victime et, le cas échéant, remboursé des tiers payeurs, il peut directement demander à être garanti des sommes qu'il a versées par les assureurs des structures reprises par l'EFS ; que les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'ONIAM si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou, encore, dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré ;

Attendu qu'il résulte de ces dispositions que les créances des tiers payeurs ne peuvent être mises à la charge de l'ONIAM qu'à la condition que les dommages liés à une contamination transfusionnelle de l'assuré par le virus de l'hépatite C puissent être imputés à un établissement de transfusion sanguine, au titre des produits sanguins qu'il a fournis, et qu'ils soient couverts par l'assurance qu'il a souscrite ;

Et attendu qu'ayant retenu qu'aucun élément ne permettait de déterminer l'origine des produits qui avaient été administrés à Mme Z... et que l'identité de leur fournisseur et celle de son assureur restaient incertaines, la cour d'appel n'a pu que rejeter la demande de la caisse contre l'ONIAM, en l'absence de possibilité pour celui-ci d'être lui-même garanti par une assurance couvrant les dommages subis par l'intéressée ; que le moyen, qui s'attaque pour partie à des motifs erronés mais surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a rejeté la demande de la CPAM de la GIRONDE à l'encontre de l'ONIAM ;

AUX MOTIFS QUE « Dans les rapports entre le CNTS et son assureur d'une part, l'ES et l'ONIAM d'autre part, il n'existe aucune présomption sur la fourniture des produits sanguins ; il n'en existe pas non plus au profit de la caisse d'assurance maladie. Il faut donc établir que le produit a été fourni par le CNTS concerné et assuré pour condamner celui-ci. Cette recherche ne concerne pas le droit à indemnité de Mme Laure Z..., droit qui est jugé par le précédent arrêt d'appel et qui n'est pas affecté par la cassation. L'ONIAM soutient que cette fourniture résulte d'un courrier du Dr B... mentionné dans le rapport d'expertise du Dr C..., selon lequel : « Le Professeur D... m'a transmis votre courrier du 1er juillet dernier demandant des informations sur la distribution des produits sanguins labiles pour Mme Laure Y... Z... qui aurait été transfusée avec deux unités le 22,08,1977 à l'hôpital Notre Dame de Bon Secours. La thérapeutique transfusionnelle était à l'époque prise en charge dans cet hôpital comme dans d'autre d'ailleurs par le Dr E.... Le docteur E..., décédé depuis, s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine et transfusait lui-même ses patients ; » Sur l'éventualité d'intervention d'un autre fournisseur, le CTS de l'hôpital Broussais, l'ONIAM fait valoir un autre passage de la même lettre : « Le docteur F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros, » L'ONIAM en conclut que le seul autre fournisseur de produits possible ne fournissait aucun produit durant la période concernée, le mois d'août 1977. Dans son rapport l'expert estimait : « Au total, il est impossible de faire la part entre une origine transfusionnelle ou une origine professionnelle de l'hépatite C dont souffre Mme Z... ». L'expert ayant maintenu son opinion sur cette impossibilité, n'a pas répondu explicitement et complètement au courrier du Dr F... et invoqué par le médecin conseil de la compagnie COVEARISKS, en date du 15 juillet 2005 selon lequel le Dr E... « avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et parfois au CTS de l'hôpital Saint Antoine » On comprend mal l'argument de l'ONIAM sur les appréciations du Dr F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours qui a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros. Puisque ce cahier concerne une autre période on ne sait pas quelle information il peut apporter sur la période considérée ; au surplus personne n'explique quels renseignements on a pu tirer de cette liste de numéros. Il reste que selon un des médecins, le Dr E... avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et que selon un autre médecin il s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine. Ils divergent donc sur l'origine habituelle des produits sanguins ce qui, en raison du temps passé, est tout à fait compréhensible. Il n'est pas prétendu que les deux fournisseurs aient eu le même assureur. Aucune archive n'a été retrouvée. Rien ne permet de départager ces avis divergents. Cette divergence révèle l'incertitude des souvenirs sur ce point. Rien ne permet de déterminer avec suffisamment de précision l'origine des produits administrés à Mme Z.... L'identité du fournisseur et celle de son assureur, restent incertaines. On sait seulement que Mme Z... a subi l'administration de produits contaminés. L'office national d'indemnisation est tenu de l'indemniser au titre de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique. Mais il ne peut pas demander la garantie de la compagnie Covea Risk, assureur de l'Etablissement français du sang. Intervenant au titre de la solidarité nationale et non en qualité de responsable, l'office d'indemnisation n'est pas tenu à indemniser la caisse d'assurance maladie de ses débours » ;

ALORS QUE le jugement doit, à peine de nullité, exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens ; que l'arrêt ne vise pas les conclusions des parties avec indication de leurs dates ; qu'il n'en restitue pas plus la teneur, fût-ce sommairement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a rejeté la demande de la CPAM de la GIRONDE à l'encontre de l'ONIAM ;

AUX MOTIFS QUE « Dans les rapports entre le CNTS et son assureur d'une part, l'ES et l'ONIAM d'autre part, il n'existe aucune présomption sur la fourniture des produits sanguins ; il n'en existe pas non plus au profit de la caisse d'assurance maladie. Il faut donc établir que le produit a été fourni par le CNTS concerné et assuré pour condamner celui-ci. Cette recherche ne concerne pas le droit à indemnité de Mme Laure Z..., droit qui est jugé par le précédent arrêt d'appel et qui n'est pas affecté par la cassation. L'ONIAM soutient que cette fourniture résulte d'un courrier du Dr B... mentionné dans le rapport d'expertise du Dr C..., selon lequel : « Le Professeur D... m'a transmis votre courrier du 1er juillet dernier demandant des informations sur la distribution des produits sanguins labiles pour Mme Laure Y... Z... qui aurait été transfusée avec deux unités le 22,08,1977 à l'hôpital Notre Dame du Bon Secours. La thérapeutique transfusionnelle était à l'époque prise en charge dans cet hôpital comme dans d'autre d'ailleurs par le Dr E.... Le docteur E..., décédé depuis, s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine et transfusait lui-même ses patients ; » Sur l'éventualité d'intervention d'un autre fournisseur, le CTS de l'hôpital Broussais, l'ONIAM fait valoir un autre passage de la même lettre : « Le docteur F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros, » L'ONIAM en conclut que le seul autre fournisseur de produits possible ne fournissait aucun produit durant la période concernée, le mois d'août 1977. Dans son rapport l'expert estimait : « Au total, il est impossible de faire la part entre une origine transfusionnelle ou une origine professionnelle de l'hépatite C dont souffre Mme Z... ». L'expert ayant maintenu son opinion sur cette impossibilité, n'a pas répondu explicitement et complètement au courrier du Dr F... et invoqué par le médecin conseil de la compagnie COVEARISKS, en date du 15 juillet 2005 selon lequel le Dr E... « avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et parfois au CTS de l'hôpital Saint Antoine » On comprend mal l'argument de l'ONIAM sur les appréciations du Dr F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           qui a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros. Puisque ce cahier concerne une autre période on ne sait pas quelle information il peut apporter sur la période considérée ; au surplus personne n'explique quels renseignements on a pu tirer de cette liste de numéros. Il reste que selon un des médecins, le Dr E... avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et que selon un autre médecin il s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine. Ils divergent donc sur l'origine habituelle des produits sanguins ce qui, en raison du temps passé, est tout à fait compréhensible. Il n'est pas prétendu que les deux fournisseurs aient eu le même assureur. Aucune archive n'a été retrouvée. Rien ne permet de départager ces avis divergents. Cette divergence révèle l'incertitude des souvenirs sur ce point. Rien ne permet de déterminer avec suffisamment de précision l'origine des produits administrés à Mme Z.... L'identité du fournisseur et celle de son assureur, restent incertaines. On sait seulement que Mme Z... a subi l'administration de produits contaminés. L'office national d'indemnisation est tenu de l'indemniser au titre de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique. Mais il ne peut pas demander la garantie de la compagnie Covea Risk, assureur de l'Etablissement français du sang. Intervenant au titre de la solidarité nationale et non en qualité de responsable, l'office d'indemnisation n'est pas tenu à indemniser la caisse d'assurance maladie de ses débours » ;

ALORS QU'il appartient au centre de transfusion sanguine, ou à son assureur, de rapporter la preuve de ce que les produits sanguins – qu'il a fournis à l'établissement de soins où la victime a été contaminée – n'ont pas été à l'origine de la contamination ; qu'aussi bien, si un doute subsiste quant à l'origine du produit utilisé, l'assureur doit sa garantie à l'ONIAM, lequel doit indemniser la CPAM de ses débours ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a rejeté la demande de la CPAM de la GIRONDE à l'encontre de l'ONIAM ;

AUX MOTIFS QUE « Dans les rapports entre le CNTS et son assureur d'une part, l'ES et l'ONIAM d'autre part, il n'existe aucune présomption sur la fourniture des produits sanguins ; il n'en existe pas non plus au profit de la caisse d'assurance maladie. Il faut donc établir que le produit a été fourni par le CNTS concerné et assuré pour condamner celui-ci. Cette recherche ne concerne pas le droit à indemnité de Mme Laure Z..., droit qui est jugé par le précédent arrêt d'appel et qui n'est pas affecté par la cassation. L'ONIAM soutient que cette fourniture résulte d'un courrier du Dr B... mentionné dans le rapport d'expertise du Dr C..., selon lequel : « Le Professeur D... m'a transmis votre courrier du 1er juillet dernier demandant des informations sur la distribution des produits sanguins labiles pour Mme Laure Y... Z... qui aurait été transfusée avec deux unités le 22,08,1977 à l'hôpital Notre Dame du Bon Secours. La thérapeutique transfusionnelle était à l'époque prise en charge dans cet hôpital comme dans d'autre d'ailleurs par le Dr E.... Le docteur E..., décédé depuis, s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine et transfusait lui-même ses patients ; » Sur l'éventualité d'intervention d'un autre fournisseur, le CTS de l'hôpital Broussais, l'ONIAM fait valoir un autre passage de la même lettre : « Le docteur F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours   a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E...  , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros, » L'ONIAM en conclut que le seul autre fournisseur de produits possible ne fournissait aucun produit durant la période concernée, le mois d'août 1977. Dans son rapport l'expert estimait : « Au total, il est impossible de faire la part entre une origine transfusionnelle ou une origine professionnelle de l'hépatite C dont souffre Mme Z... ». L'expert ayant maintenu son opinion sur cette impossibilité, n'a pas répondu explicitement et complètement au courrier du Dr F... et invoqué par le médecin conseil de la compagnie COVEARISKS, en date du 15 juillet 2005 selon lequel le Dr E... « avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et parfois au CTS de l'hôpital Saint Antoine » On comprend mal l'argument de l'ONIAM sur les appréciations du Dr F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           qui a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros. Puisque ce cahier concerne une autre période on ne sait pas quelle information il peut apporter sur la période considérée ; au surplus personne n'explique quels renseignements on a pu tirer de cette liste de numéros. Il reste que selon un des médecins, le Dr E... avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et que selon un autre médecin il s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine. Ils divergent donc sur l'origine habituelle des produits sanguins ce qui, en raison du temps passé, est tout à fait compréhensible. Il n'est pas prétendu que les deux fournisseurs aient eu le même assureur. Aucune archive n'a été retrouvée. Rien ne permet de départager ces avis divergents. Cette divergence révèle l'incertitude des souvenirs sur ce point. Rien ne permet de déterminer avec suffisamment de précision l'origine des produits administrés à Mme Z.... L'identité du fournisseur et celle de son assureur, restent incertaines. On sait seulement que Mme Z... a subi l'administration de produits contaminés. L'office national d'indemnisation est tenu de l'indemniser au titre de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique. Mais il ne peut pas demander la garantie de la compagnie Covea Risk, assureur de l'Etablissement français du sang. Intervenant au titre de la solidarité nationale et non en qualité de responsable, l'office d'indemnisation n'est pas tenu à indemniser la caisse d'assurance maladie de ses débours » ;

ALORS QUE l'organisme tiers payeur dispose par principe d'un recours ; que ce recours n'est exclu que dans trois hypothèses : tout d'abord si l'établissement de transfusion n'est pas assuré, ensuite si ses droits à l'égard de l'assureur sont épuisés, enfin si le délai de validité de la couverture est venu à expiration ; qu'en faisant abstraction de ces trois hypothèses pour considérer que le recours devait être exclu, en outre dans le cas où la preuve n'était pas rapportée que les conditions concrètes de mise en oeuvre de la garantie étaient remplies, les juges du fond, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, ensemble le principe suivant lequel les exceptions sont d'interprétation stricte.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(très subsidiaire)

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a rejeté la demande de la CPAM de la GIRONDE à l'encontre de l'ONIAM

AUX MOTIFS QUE « Dans les rapports entre le CNTS et son assureur d'une part, l'ES et l'ONIAM d'autre part, il n'existe aucune présomption sur la fourniture des produits sanguins ; il n'en existe pas non plus au profit de la caisse d'assurance maladie. Il faut donc établir que le produit a été fourni par le CNTS concerné et assuré pour condamner celui-ci. Cette recherche ne concerne pas le droit à indemnité de Mme Laure Z..., droit qui est jugé par le précédent arrêt d'appel et qui n'est pas affecté par la cassation. L'ONIAM soutient que cette fourniture résulte d'un courrier du Dr B... mentionné dans le rapport d'expertise du Dr C..., selon lequel : « Le Professeur D... m'a transmis votre courrier du 1er juillet dernier demandant des informations sur la distribution des produits sanguins labiles pour Mme Laure Y... Z... qui aurait été transfusée avec deux unités le 22,08,1977 à l'hôpital Notre Dame du Bon Secours. La thérapeutique transfusionnelle était à l'époque prise en charge dans cet hôpital comme dans d'autre d'ailleurs par le Dr E.... Le docteur E..., décédé depuis, s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine et transfusait lui-même ses patients ; » Sur l'éventualité d'intervention d'un autre fournisseur, le CTS de l'hôpital Broussais, l'ONIAM fait valoir un autre passage de la même lettre : « Le docteur F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros, » L'ONIAM en conclut que le seul autre fournisseur de produits possible ne fournissait aucun produit durant la période concernée, le mois d'août 1977. Dans son rapport l'expert estimait : « Au total, il est impossible de faire la part entre une origine transfusionnelle ou une origine professionnelle de l'hépatite C dont souffre Mme Z... ». L'expert ayant maintenu son opinion sur cette impossibilité, n'a pas répondu explicitement et complètement au courrier du Dr F... et invoqué par le médecin conseil de la compagnie COVEARISKS, en date du 15 juillet 2005 selon lequel le Dr E... « avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et parfois au CTS de l'hôpital Saint Antoine » On comprend mal l'argument de l'ONIAM sur les appréciations du Dr F..., hémovigilant à l'hôpital de Notre Dame du Bon Secours           qui a pu se procurer un cahier ayant appartenu au Dr E... , qui ne concerne pas cette période et sur lequel figure exclusivement une liste de numéros. Puisque ce cahier concerne une autre période on ne sait pas quelle information il peut apporter sur la période considérée ; au surplus personne n'explique quels renseignements on a pu tirer de cette liste de numéros. Il reste que selon un des médecins, le Dr E... avait pour habitude de s'approvisionner le plus souvent au CTS de l'hôpital Broussais et que selon un autre médecin il s'approvisionnait à l'hôpital Saint Antoine. Ils divergent donc sur l'origine habituelle des produits sanguins ce qui, en raison du temps passé, est tout à fait compréhensible. Il n'est pas prétendu que les deux fournisseurs aient eu le même assureur. Aucune archive n'a été retrouvée. Rien ne permet de départager ces avis divergents. Cette divergence révèle l'incertitude des souvenirs sur ce point. Rien ne permet de déterminer avec suffisamment de précision l'origine des produits administrés à Mme Z.... L'identité du fournisseur et celle de son assureur, restent incertaines. On sait seulement que Mme Z... a subi l'administration de produits contaminés. L'office national d'indemnisation est tenu de l'indemniser au titre de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique. Mais il ne peut pas demander la garantie de la compagnie Covea Risk, assureur de l'Etablissement français du sang. Intervenant au titre de la solidarité nationale et non en qualité de responsable, l'office d'indemnisation n'est pas tenu à indemniser la caisse d'assurance maladie de ses débours » ;

ALORS QUE la partie qui entend bénéficier d'une exception a la qualité de demandeur quant à cette exception ; qu'elle a dès lors la charge de la preuve ; que l'ONIAM avait à tout le moins la charge de prouver, pour pouvoir bénéficier de l'exception, qu'il était exclu que les conditions de garantie de l'assureur puissent être regardées comme remplies ; que par suite en présence d'une incertitude quant à l'origine des lots et quant à la possibilité d'une mise en oeuvre de la garantie de l'assureur, les juges du fond devaient considérer que l'ONIAM ne rapportait pas à l'égard de la CPAM de la GIRONDE, la preuve qui lui incombait, pour pouvoir bénéficier de l'exception ; qu'en décidant le contraire, les juges ont violé les règles de la charge de la preuve de l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-12815
Date de la décision : 29/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SANTE PUBLIQUE - Transfusion sanguine - Virus de l'hépatite C - Contamination - Indemnisation - Modalités - Substitution de l'ONIAM à l'Etablissement français du sang - Effets - Mise à la charge de l'ONIAM des créances des tiers payeurs - Conditions - Détermination

SANTE PUBLIQUE - Transfusion sanguine - Virus de l'hépatite C - Contamination - Indemnisation - Mise en jeu de la garantie des assureurs de l'établissement - Conditions - Identification du fournisseur des produits sanguins contaminés - Portée SANTE PUBLIQUE - Transfusion sanguine - Virus de l'hépatite C - Contamination - Indemnisation - Modalités - Substitution de l'ONIAM à l'Etablissement français du sang - Effets - Mise à la charge de l'ONIAM des créances des tiers payeurs - Exclusion - Cas ASSURANCE (règles générales) - Garantie - Exclusion - Cas - Etablissement français du sang - Contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C - Indemnisation - Substitution de l'ONIAM à l'Etablissement français du sang - Identification du fournisseur des produits sanguins contaminés - Défaut

L'absence d'éléments permettant d'identifier le centre de transfusion sanguine qui a fourni les produits sanguins administrés à la victime d'une contamination par le virus de l'hépatite C fait obstacle, d'une part, à l'invocation de la présomption instituée par l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 à l'encontre d'un tel établissement, d'autre part, et à ce que les créances des tiers payeurs soient mises à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), sur le fondement de l'article 67, IV, de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 complété par l'article 72, II, de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, en l'absence de possibilité que les dommages puissent être couverts par l'assurance souscrite par l'établissement de transfusion sanguine considéré comme responsable de la contamination


Références :

article 1315 du code civil

article 67, IV, de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 dans sa rédaction issue de la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012

article 72, II, de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012

article 102 de la loi du 4 mars 2002


article L. 1221-14 du code de la santé publique

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 septembre 2015

A rapprocher :1re Civ., 3 février 2016, pourvoi n° 14-22351, Bull. 2016, I, n° 29 (rejet) ;1re Civ., 16 novembre 2016, pourvoi n° 15-26932, Bull. 2016, I, n° ??? (cassation sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 mar. 2017, pourvoi n°16-12815, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Foussard et Froger, SCP Piwnica et Molinié, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12815
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