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23/03/2017 | FRANCE | N°16-11027

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 mars 2017, 16-11027


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy,26 octobre 2015), que, par acte sous seing privé du 24 décembre 2012, M. et Mme [U] ont conclu avec la société civile construction vente [Adresse 4] (la SCCV) un contrat préliminaire de réservation d'un bien à construire ; que, la SCCV ayant refusé de régulariser l'acte de vente, M. et Mme [U] et leur fille [I] (les consorts [U]) l'ont assignée en réalisation de la vente et en dommages et intérêts ;

Attendu que la SCCV fait

grief à l'arrêt de la condamner à transmettre le projet d'acte de vente concernan...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy,26 octobre 2015), que, par acte sous seing privé du 24 décembre 2012, M. et Mme [U] ont conclu avec la société civile construction vente [Adresse 4] (la SCCV) un contrat préliminaire de réservation d'un bien à construire ; que, la SCCV ayant refusé de régulariser l'acte de vente, M. et Mme [U] et leur fille [I] (les consorts [U]) l'ont assignée en réalisation de la vente et en dommages et intérêts ;

Attendu que la SCCV fait grief à l'arrêt de la condamner à transmettre le projet d'acte de vente concernant les biens réservés et l'avenant au contrat, alors, selon le moyen :

1°/ que la validité du contrat de réservation doit être établie par écrit à peine de nullité ; qu'en conséquence, le contrat de réservation ne peut valablement être modifié que par la conclusion d'un nouvel accord écrit signé par les parties ; qu'en retenant que Mme [I] [U] était partie au contrat de réservation conclu par ses parents, au prétexte que la société [Adresse 1] aurait accepté cette intervention dans un courrier du 13 février 2013, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations qu'aucun avenant au contrat de réservation du 24 décembre 2012, prévoyant l'intervention de Mme [I] [U], n'avait été signé entre les parties, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article R 261-27 du code de la construction et de l'habitation ;

2°/ que le contrat de réservation oblige uniquement le réservant, en contrepartie d'un dépôt de garantie, à réserver un immeuble au réservataire ; qu'en conséquence, le réservant demeure libre de ne pas vendre le bien réservé au réservataire, peu important que l'immeuble projeté soit finalement construit postérieurement à la conclusion du contrat de réservation ; que dès lors en retenant que la société [Adresse 1] était tenue de proposer aux réservataires d'acquérir le bien réservé au prétexte qu'elle avait réalisé le programme immobilier envisagé, cependant que la société [Adresse 1] demeurait libre, même après la construction de l'immeuble projeté, de ne pas vendre le bien réservé aux époux [U], la cour d'appel a violé l'article L. 261-5 du code de la construction et de l'habitation ;

3°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'elles ne peuvent être modifiées que par leur consentement mutuel ; qu'en retenant que, si le contrat de réservation du 24 décembre 2012 ne comportait pas d'engagement de vendre, la SCCV [Adresse 1] s'était en revanche engagée, par courrier du 22 février 2013, à vendre le bien réservé aux époux [U], cependant que la modification du contrat de réservation du 24 décembre 2012 était subordonnée à l'intervention d'un nouvel accord entre les parties, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

4°/ que le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'en retenant que, par la lettre du 22 février 2013, la SCCV [Adresse 1] s'était expressément engagée à vendre les biens réservés aux époux [U], quand cette correspondance du 22 février 2013 avait pour seul objet d'informer les réservataires du calendrier prévisionnel des travaux et ne comportait aucun engagement de vendre de la société [Adresse 1], la cour d'appel a dénaturé le courrier du 22 février 2013 et violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

5°/ que le manquement du réservant à son obligation de proposer au réservataire de vendre le bien ne peut donner lieu qu'à l'octroi de dommages-intérêts au réservataire en réparation du préjudice subi ; qu'en estimant que le non-respect par la société [Adresse 1] de son obligation de proposer aux consorts [U] d'acquérir le bien réservé justifiait la condamnation du réservant à transmettre aux réservataires le projet d'acte authentique de vente portant sur les biens réservés aux prix et conditions prévus par le contrat de réservation du 24 décembre 2012 et l'avenant à ce contrat, ainsi qu'à préciser la date de signature dudit acte, cependant que le manquement du réservant à son obligation de vendre le bien au réservataire ne peut donner lieu qu'à l'allocation de dommages-intérêts au réservataire, la cour d'appel a violé l'article L 261-15 du code de la construction et de l'habitation ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu souverainement que la SCCV avait consenti à l'intervention de Mme [I] [U] en qualité de nue-propriétaire et qu'à compter du 22 février 2013, l'obligation de réservation de la SCCV s'était transformée en une obligation de vendre aux prix et conditions prévus par le contrat du 24 décembre 2012, la cour d'appel a pu déduire, de ces seuls motifs et sans dénaturation, que la SCCV était tenue de notifier un projet d'acte de vente aux consorts [U] ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile [Adresse 4] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société civile construction vente [Adresse 4] et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme [U] et à Mme [I] [U] ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société [Adresse 1].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR constaté que la SCCV [Adresse 1] avait donné son accord à l'avenant au contrat de réservation du 24 décembre 2012 établi par Me [M], notaire, D'AVOIR dit que par sa lettre du 22 février 2013, la SCCV [Adresse 1] s'était expressément engagée à transmettre aux époux [U] le projet d'acte de vente des biens réservés aux prix, conditions et descriptifs du contrat de réservation, D'AVOIR condamné la SCCV [Adresse 1], sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision, à transmettre aux consorts [U] le projet d'acte authentique de vente portant sur les biens réservés au prix et conditions prévus par le contrat de réservation du 24 décembre 2012 et l'avenant à ce contrat, ainsi qu'à préciser la date de signature dudit acte et D'AVOIR condamné la SCCV [Adresse 1] à payer aux consorts [U] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE par acte du 24 décembre 2012 M. et M[me] [U] ont réservé auprès de la société Le Saint Georges un appartement et un emplacement de garage ; que la validité de cet acte n'étant pas contestée et la société Le Saint Georges ayant réalisé le programme envisagé par le contrat de réservation, celle-ci est tenue de proposer aux réservataires d'acquérir le bien qu'ils avaient réservé et de leur adresser un projet d'acte de vente conformément aux dispositions de l'article R 261-30 du code de la construction et de l'habitation ; que, s'agissant de l'intervention à l'acte de vente de Mlle [I] [U] en qualité de nu-propriétaire, alors même qu'elle n'était pas partie au contrat de réservation, il résulte de la lettre du 13 février 2013 adressée au notaire des acquéreurs par le notaire de la société Le Saint Georges que celle-ci avait consenti à cette intervention, ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas ; que dans ces conditions, il convient de condamner la société Le Saint Georges à notifier à M. et Mme [U], en qualité d'usufruitiers, et à Mlle [I] [U], en qualité de nu-propriétaire, sous astreinte, un projet d'acte de vente portant sur les biens objets du contrat de réservation du 24 décembre 2012 ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE par une lettre en date du 22 janvier 2013, Me [C], notaire des époux [U], a indiqué à Me [M], notaire de la SCCV Le Saint Georges, que ses clients souhaitaient faire intervenir leur fille, [I] [U], à l'opération, comme cela avait été prévu dans le précédent contrat de réservation, précisant que les époux [U] devaient acquérir l'usufruit des biens vendus, et que leur fille [I] devait, quant à elle, en acquérir la nue-propriété ; qu'un projet d'avenant au contrat de réservation à en ce sens été établi par Me [M] et transmis par ce dernier à Me [C] le 8 février 2013 ; que ce projet rappelait expressément le prix prévu pour la vente, soit 232 000 euros TTC ; que par un mail du 12 février 2013, Me [C] a fait part à Me [M] de l'accord des consorts [U] sur ce projet d'avenant ; que par une lettre en date du 13 février 2013, Me [M] a indiqué à Me [C] que la SCCV [Adresse 1] venait, de la même manière que l'avaient fait les consorts [U], de lui transmettre son accord sur le projet d'avenant, et invitait dès lors Me [C] à faire régulariser cet avenant par ses clients ; que par une lettre du 18 février 2013, Me [C] a transmis aux époux [U] l'avenant, accompagné de documents annexes, pour signature ; que le 23 mai 2013 les consorts [U] ont renvoyé à Me [C] le projet d'avenant signé et complété par leurs soins, et que le même jour, Me [C] a retourné celui-ci à Me [M] aux fins de régularisation par la SCCV [Adresse 1] ; qu'il ressort de ces correspondances que la SCCV [Adresse 1] a, par l'intermédiaire de son notaire, transmis le 13 février 2013 son accord au projet d'avenant faisant intervenir [I] [U] à l'opération de vente ; qu'il y a lieu dès lors de déclarer la SCCV [Adresse 1] engagée dans les termes de l'avenant au contrat de réservation du 24/12/2012 bien que celle-ci ait refusé de le signer ; que par ailleurs, il convient de relever que postérieurement à son accord donné au projet d'avenant, la SCCV [Adresse 1] a, par une lettre du 22 février 2013, informé les époux [U] d'une modification de la gouvernance de l'opération de construction et a également indiqué : « Nous vous confirmons : - la délivrance prévue de la garantie financière d'achèvement par la Caisse d'Epargne Lorraine Champagne-Ardenne ; - la mise en place d'un état descriptif de division pour le bâtiment D par le cabinet Suaire géomètre expert ; - la notification d'un projet d'acte de vente des biens réservés aux prix, conditions et descriptifs de votre contrat de réservation avant le 31/03/2013 ; - un démarrage des travaux en mars 2013 avec une livraison prévisionnelle du bâtiment D pour le quatrième trimestre 2014 » ; que, par cette lettre, la SCCV [Adresse 1] s'est expressément engagée à notifier aux époux [U] le projet d'acte de vente des biens réservés avant le 31 mars 2013 ; qu'autrement dit, par cette lettre, la SCCV [Adresse 1] s'est expressément engagée à vendre les biens réservés aux époux [U], cet engagement ayant été rendu possible du fait de l'obtention par la SCCV [Adresse 1] de garantie financière d'achèvement ; qu'à compter du 22 février 2013, l'obligation de la SCCV [Adresse 1] qui n'était jusque-là qu'une obligation de réserver les lots mentionnés au contrat pour le cas où le projet de construction serait effectivement mené à son terme, s'est transformée en une véritable obligation de vendre les biens réservés aux prix et conditions prévus par le contrat de réservation du 24 décembre 2012 ; que conformément à l'accord transmis par l'intermédiaire de son notaire à l'avenant au contrat de réservation du 24/12/2012, il convient de préciser que cette obligation de vendre a été contractée par la SCCV [Adresse 1] à l'égard des époux [U] et de Mlle [I] [U] selon les modalités prévues par ledit avenant ; qu'il y a lieu dans ces conditions de faire droit à la demande des consorts [U] et de condamner en conséquence la SCCV [Adresse 1], sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, passé le délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, à transmettre au notaire de ces derniers le projet d'acte authentique portant sur les biens réservés au prix prévu par le contrat de réservation du 24/12/2012 et repris par l'avenant, ainsi que de préciser la date de signature dudit acte ;

ALORS QUE 1°), la validité du contrat de réservation doit être établie par écrit à peine de nullité ; qu'en conséquence, le contrat de réservation ne peut valablement être modifié que par la conclusion d'un nouvel accord écrit signé par les parties ; qu'en retenant que Mme [I] [U] était partie au contrat de réservation conclu par ses parents, au prétexte que la société [Adresse 1] aurait accepté cette intervention dans un courrier du 13 février 2013, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations qu'aucun avenant au contrat de réservation du 24 décembre 2012, prévoyant l'intervention de Mme [I] [U], n'avait été signé entre les parties, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article R 261-27 du code de la construction et de l'habitation ;

ALORS QUE 2°), le contrat de réservation oblige uniquement le réservant, en contrepartie d'un dépôt de garantie, à réserver un immeuble au réservataire ; qu'en conséquence, le réservant demeure libre de ne pas vendre le bien réservé au réservataire, peu important que l'immeuble projeté soit finalement construit postérieurement à la conclusion du contrat de réservation ; que dès lors en retenant que la société [Adresse 1] était tenue de proposer aux réservataires d'acquérir le bien réservé au prétexte qu'elle avait réalisé le programme immobilier envisagé, cependant que la société [Adresse 1] demeurait libre, même après la construction de l'immeuble projeté, de ne pas vendre le bien réservé aux époux [U], la cour d'appel a violé l'article L 261-15 du code de la construction et de l'habitation ;

ALORS, subsidiairement, à supposer adoptés les motifs des premiers juges, QUE 3°), les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'elles ne peuvent être modifiées que par leur consentement mutuel ; qu'en retenant que, si le contrat de réservation du 24 décembre 2012 ne comportait pas d'engagement de vendre, la SCCV [Adresse 1] s'était en revanche engagée, par courrier du 22 février 2013, à vendre le bien réservé aux époux [U], cependant que la modification du contrat de réservation du 24 décembre 2012 était subordonnée à l'intervention d'un nouvel accord entre les parties, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS, subsidiairement encore, à supposer adoptés les motifs des premiers juges, QUE 4°), le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'en retenant que, par la lettre du 22 février 2013, la SCCV [Adresse 1] s'était expressément engagée à vendre les biens réservés aux époux [U], quand cette correspondance du 22 février 2013 avait pour seul objet d'informer les réservataires du calendrier prévisionnel des travaux et ne comportait aucun engagement de vendre de la société [Adresse 1], la cour d'appel a dénaturé le courrier du 22 février 2013 et violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

ALORS, très subsidiairement, QUE 5°), le manquement du réservant à son obligation de proposer au réservataire de vendre le bien ne peut donner lieu qu'à l'octroi de dommages-intérêts au réservataire en réparation du préjudice subi ; qu'en estimant que le non-respect par la société [Adresse 1] de son obligation de proposer aux consorts [U] d'acquérir le bien réservé justifiait la condamnation du réservant à transmettre aux réservataires le projet d'acte authentique de vente portant sur les biens réservés aux prix et conditions prévus par le contrat de réservation du 24 décembre 2012 et l'avenant à ce contrat, ainsi qu'à préciser la date de signature dudit acte, cependant que le manquement du réservant à son obligation de vendre le bien au réservataire ne peut donner lieu qu'à l'allocation de dommages-intérêts au réservataire, la cour d'appel a violé l'article L 261-15 du code de la construction et de l'habitation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-11027
Date de la décision : 23/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 26 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 mar. 2017, pourvoi n°16-11027


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.11027
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