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08/03/2017 | FRANCE | N°15-13699

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 mars 2017, 15-13699


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 décembre 2014), que M. [L], créancier de M. [K], qui est domicilié dans le Bas-Rhin, a engagé contre ce dernier une procédure de saisie immobilière qui n'a pas pu aboutir, en raison de l'état de pollution du terrain et du refus des parties de prendre en charge les frais d'audit permettant de fixer le coût de la dépollution ; que n'ayant pu se faire régler du montant de sa créance, M. [L] a assigné son débiteur en ouverture d'une pr

océdure de redressement ou de liquidation judiciaires, en application des d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 décembre 2014), que M. [L], créancier de M. [K], qui est domicilié dans le Bas-Rhin, a engagé contre ce dernier une procédure de saisie immobilière qui n'a pas pu aboutir, en raison de l'état de pollution du terrain et du refus des parties de prendre en charge les frais d'audit permettant de fixer le coût de la dépollution ; que n'ayant pu se faire régler du montant de sa créance, M. [L] a assigné son débiteur en ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires, en application des dispositions de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

Attendu que M. [K] fait grief à l'arrêt de prononcer sa liquidation judiciaire alors, selon le moyen :

1°/ que l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; que l'insolvabilité notoire ne peut en conséquence être appréciée qu'au regard du passif exigible ; qu'en jugeant qu'il convenait de prendre en compte, pour apprécier l'insolvabilité notoire de M. [K], le passif dans son ensemble, la cour d'appel a violé l'article L. 670-1 du code de commerce ;

2°/ que M. [K] reconnaissait, non pas une dette de 250 000 euros, mais seulement une dette de 200 000 euros à l'égard de M. [L] , somme qui correspondait au montant relevé par le tribunal en première instance ; qu'en considérant que le débiteur reconnaissait devoir 250 000 euros à M. [L], la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ que M. [K] soutenait explicitement dans ses écritures que son « seul passif réel [était] celui relevant de Maître [L] » ; qu'en estimant que M. [K] ne contestait pas les autres créances déclarées au liquidateur, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; que l'évaluation de la capacité de remboursement du débiteur implique une évaluation précise de son actif ; qu'en se fondant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, sur le fait que son patrimoine « serait » de 600 000 euros, sans rechercher qu'elle était la valeur réelle de l'actif de l'intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

5°/ que la charge de la preuve de l'insolvabilité notoire d'une personne physique incombe à celui qui entend obtenir sa liquidation judiciaire ; qu'en relevant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que celui-ci ne fournissait aucune description ni estimation fiable de son patrimoine et qu'il ne donnait aucune indication sur l'évaluation de ses biens situés à [Localité 1] et [Localité 2], la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

6°/ que l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; qu'en relevant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que celui-ci n'avait rien réglé de sa dette et n'avait pas consenti à faire l'avance des frais de l'audit, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

7°/ que la cour d'appel a relevé que M. [L] n'avait pas entendu avancer les frais nécessaires pour procéder à l'évaluation du coût de la dépollution du terrain de M. [K] ; qu'il résultait de ces constatations que le créancier était lui-même à l'origine du blocage de la procédure permettant le recouvrement de sa créance ; qu'en se bornant à relever, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que la procédure d'exécution forcée immobilière était bloquée en raison de l'état de pollution des biens immobiliers dont M. [K] était propriétaire et que le créancier n'avait aucune raison, au vu de sa profession, de devenir adjudicataire de sites industriels à dépolluer, la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'impossibilité, pour M. [L], de recouvrer sa créance, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève, d'un côté, par motifs adoptés, que M. [K] ne bénéficie d'aucun revenu, puis, par motifs propres, qu'il n'est propriétaire d'aucun bien mobilier saisissable, que, titulaire de droits indivis sur des biens, il n'en donne aucune indication ni évaluation, et que s'il est propriétaire d'un terrain d'une valeur de 600 000 euros, ce dernier n'a pu faire l'objet d'une vente forcée en raison de la pollution affectant le site ; qu'il relève, d'un autre côté, que le passif déclaré à la procédure s'élève à la somme de 833 083,93 euros, sur lequel le débiteur reconnaît devoir 250 000 euros ; que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, sans dénaturer les termes du litige ni inverser la charge de la preuve, a caractérisé la situation durablement compromise de M. [K] et la notoriété de celle-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. [K].

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré ouverte la procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [E] [K], d'avoir fixé provioirement la date d'insolvabilité au 10 décembre 2013, d'avoir désigné M. [B] en qualité de juge-commissaire et la SELAS [U] et associés, prise en la personne de [W] [U], en qualité de liquidateur ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. [K] conteste être en état d'insolvabilité notoire au sens de l'article L. 670-1 du code de commerce, mais se borne à proposer une enquête à réaliser par un organisme agréé tel que le permet cette disposition ; qu'il ne fournit aucune description ni estimation fiable de son patrimoine ; que, selon le liquidateur, M. [K] est titulaire de droits indivis sur des biens situés dans deux communes distinctes, [Localité 1] et [Localité 2], pour lesquels l'appelant ne donne aucune indication ni évaluation ; qu'il atteste par ailleurs qu'il n'est pas propriétaire de biens mobiliers saisissables ; qu'il est propriétaire en outre d'un terrain, mais celui-ci n'a pu faire l'objet d'une vente forcée en raison de la pollution affectant le site et ni le débiteur ni son créancier n'ont entendu avancer les frais d'études nécessaires pour évaluer le coût de la dépollution, de sorte que sa valeur de réalisation apparaît notoirement insuffisante pour lui permettre de faire face à ses dettes ; que la valeur du bien serait de l'ordre de 600.000 euros, selon la mise à prix qui en avait été fixée ; qu'en face de ces éléments d'actifs particulièrement imprécis, le passif déclaré entre les mains du liquidateur s'élève à un montant de 833 083,93 euros, sur lequel le débiteur reconnaît devoir 250 000 euros en faveur de M. [L] ; que contrairement à un entrepreneur dont le seul passif exigible peut être pris en considération, un débiteur relevant des dispositions de l'article L. 670-1 du code de commerce s'il est en état d'insolvabilité notoire, c'est le passif dans son ensemble qui est pris en compte, au regard de ses revenus et de son patrimoine ; que la cour doit donc examiner le passif déclaré, en l'absence de toute contestation sur l'une ou l'autre des créances ; qu'en face de ce passif, le patrimoine du débiteur serait de l'ordre de 600 000 euros comme l'admet le créancier poursuivant, mais l'appelant ne fournit aucun élément d'appréciation à ce sujet et se contente d'affirmer que son patrimoine pourrait sérieusement être évalué à hauteur d'un million d'euros, sans fournir d'indication sur la superficie des biens ni sur leur valorisation ; qu'il n'a rien réglé de sa dette envers M. [L] ni consenti à faire l'avance des frais de l'audit ni indiqué ses ressources ; que si la charge de la preuve de l'insolvabilité incombe d'abord au demandeur, en l'espèce l'intimé, ce dernier a fourni au tribunal et à la cour des éléments d'appréciation précis et concordants sur la valeur du patrimoine du débiteur à partir des éléments en sa possession ; qu'au vu du passif déclaré et de l'actif évalué du débiteur, M. [K] se trouve dans une situation durablement compromise, compte tenu d'un actif mobilier inexistant et d'un actif immobilier dont la valeur retenue initialement pour la mise à prix est en tout état de cause insuffisante pour faire face aux dettes ; qu'il a été par ailleurs l'objet d'une procédure d'exécution forcée sur ses biens immobiliers démontrant la notoriété de son insolvabilité ; que la liquidation judiciaire s'impose, sans qu'il soit nécessaire de faire déterminer au préalable la situation patrimoniale du débiteur ;

ET AUX MOTIFS, EVENTUELLEMENT ADOPTES, QU'il ressort des pièces déposées par Me [J] [L] que M. [E] [K] est effectivement en état d'insolvabilité notoire ; qu'en effet, celui-ci est titulaire d'une créance de 199 830,20 euros résultant de divers titres exécutoires définitifs et relatifs à des honoraires demeurés impayés ; que la procédure d'exécution forcée immobilière est bloquée en raison de l'état de pollution des biens immobiliers dont M. [E] [K] est propriétaire ; que le créancier n'a aucune raison, au vu de sa profession, de devenir adjudicataire de sites industriels à dépolluer ; que par ailleurs, il est justifié de ce que M. [E] [K] n'a actuellement pas de revenus personnels, tandis que tous les biens immobiliers de son lieu d'habitation sont propriété de son épouse ; qu'en conséquence, l'insolvabilité notoire est suffisamment établie ;

1°) ALORS QUE l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; que l'insolvabilité notoire ne peut en conséquence être appréciée qu'au regard du passif exigible ; qu'en jugeant qu'il convenait de prendre en compte, pour apprécier l'insolvabilité notoire de M. [K], le passif dans son ensemble, la cour d'appel a violé l'article L. 670-1 du code de commerce ;

2°) ALORS QUE M. [K] reconnaissait, non pas une dette de 250 000 euros, mais seulement une dette de 200 000 euros à l'égard de M. [L] (conclusions récapitulatives, p. 7), somme qui correspondait au montant relevé par le tribunal en première instance (jugement p. 2) ; qu'en considérant que le débiteur reconnaissait devoir 250 000 euros à M. [L], la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE M. [K] soutenait explicitement dans ses écritures que son « seul passif réel [était] celui relevant de Maître [L] » (conclusions récapitulatives, p. 7) ; qu'en estimant que M. [K] ne contestait pas les autres créances déclarées au liquidateur, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; que l'évaluation de la capacité de remboursement du débiteur implique une évaluation précise de son actif ; qu'en se fondant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, sur le fait que son patrimoine « serait » de 600 000 euros, sans rechercher qu'elle était valeur réelle de l'actif de l'intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

5°) ALORS QUE la charge de la preuve de l'insolvabilité notoire d'une personne physique incombe à celui qui entend obtenir sa liquidation judiciaire ; qu'en relevant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que celui-ci ne fournissait aucune description ni estimation fiable de son patrimoine et qu'il ne donnait aucune indication sur l'évaluation de ses biens situés à [Localité 1] et [Localité 2], la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

6°) ALORS QUE l'insolvabilité notoire n'est caractérisée que si les remboursements que le débiteur a la capacité de faire ne sont pas de nature à lui permettre de faire face au passif dont il est débiteur ; qu'en relevant, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que celui-ci n'avait rien réglé de sa dette et n'avait pas consenti à faire l'avance des frais de l'audit, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce ;

7°) ALORS QUE la cour d'appel a relevé que M. [L] n'avait pas entendu avancer les frais nécessaires pour procéder à l'évaluation du coût de la dépollution du terrain de M. [K] ; qu'il résultait de ces constatations que le créancier était lui-même à l'origine du blocage de la procédure permettant le recouvrement de sa créance ; qu'en se bornant à relever, pour juger que l'insolvabilité notoire de M. [K] était établie, que la procédure d'exécution forcée immobilière était bloquée en raison de l'état de pollution des biens immobiliers dont M. [K] était propriétaire et que le créancier n'avait aucune raison, au vu de sa profession, de devenir adjudicataire de sites industriels à dépolluer, la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'impossibilité, pour M. [L], de recouvrer sa créance, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 670-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-13699
Date de la décision : 08/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 17 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 mar. 2017, pourvoi n°15-13699


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.13699
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