LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 27 octobre 2014), que par acte authentique des 6 et 19 décembre 1991, la Société de développement régional Antilles-Guyane (la Soderag) a consenti un prêt à la société Antilles Color (le débiteur) garanti par le cautionnement solidaire et indivisible de M. et Mme X... ; que le débiteur ayant été mis en redressement judiciaire par jugement du 25 juin 1993, la Soderag a déclaré sa créance le 19 août 1993 ; que par acte des 1er et 2 décembre 1998, signifié le 10 février 2000 à Mme X..., la Soderag a cédé cette créance à la société Sodega, laquelle a, le 30 septembre 2004, fait l'objet d'une fusion-absorption par la Société financière Antilles-Guyane (la Sofiag) ; que sur le fondement de l'acte authentique de prêt, celle-ci a, selon procès-verbal du 26 novembre 2012, procédé, à la saisie-attribution des fonds détenus sur le compte de Mme X..., qui en a demandé la mainlevée en soutenant que le cautionnement ne peut profiter aux cessionnaires de la créance initiale, même si la cession intervient par voie de fusion-absorption ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire que la Sofiag est son créancier et de valider la saisie-attribution alors, selon le moyen :
1°/ que le cautionnement est un acte intuitu personae liant un créancier et une caution ; que, dès lors, le cautionnement disparaît avec le bénéficiaire de celui-ci, notamment dans le cadre d'une fusion-absorption ; qu'ainsi, en jugeant que la caution de Mme X..., accordée spécifiquement à la Soderag, avait été transmise à la Sodega puis à la société Sofiag par l'effet d'une fusion-absorption, la cour d'appel a transformé la caution initialement consentie par la Sofiag, violant ainsi les articles 2288, 2289, 2290 et 2292 du code civil ;
2°/ que la caution accordée à une société ne peut être tenue de garantir les dettes de la société qui l'a absorbée ; qu'il appartient dès lors aux juges du fond de limiter la caution aux dettes dues par la société antérieurement à son absorption et d'en préciser le montant ; qu'en considérant que Mme X... était tenue de garantir les dettes antérieures à la fusion-absorption mais sans en préciser le montant et établir, partant, le lien avec les activités de la Soderag initialement garantie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2288, 2289, 2290 et 2292 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que si, en application de l'article 2292 du code civil, l'absorption du créancier met en principe fin à l'obligation de couverture de la caution, celle-ci demeure cependant tenue à raison des dettes nées antérieurement à la fusion, ce qui est le cas du prêt souscrit avant celle-ci, la dette naissant de la remise des fonds, la cour d'appel, sans avoir à effectuer la recherche inopérante invoquée par le dernier grief, en a déduit à bon droit que Mme X..., qui s'était engagée à garantir le remboursement du prêt consenti en décembre 1991 à la société Antilles Color par la Soderag, aux droits de laquelle est venue la société Sodega avant la fusion-absorption intervenue en 2004, restait tenue du paiement des sommes dues en vertu de ce prêt en raison de la défaillance de l'emprunteur ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa première branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société financière Antilles-Guyane la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Delamarre, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la SAS Société Financière Antilles-Guyane avait la qualité de créancier de Madame Monique Y... épouse X... et d'avoir validé la saisie-attribution pratiquée le 26 novembre 2012 et dénoncée à l'exposante le 6 décembre 2012 ;
AUX MOTIFS QUE « Madame X..., fait valoir en premier lieu que la fusion absorption ne peut découler d'un simple procès-verbal même déposé au rang des minutes d'un notaire ou au greffe du tribunal de commerce" ce dont il se déduit qu'elle conteste la validité ou la réalité d'une fusion-absorption qui ne serait pas constatée dans un acte authentique ; qu'elle se prévaut expressément d'un arrêt de la cour de cassation du 15 décembre 2011 qui a, au visa des articles 1315 et 1317 du code civil cassé l'arrêt qui lui était soumis au motif que "la seule remise à un notaire d'un procès-verbal pour qu'il soit déposé au rang des minutes de son étude ne lui confère pas valeur authentique" ; que toutefois si les juges du second degré ont ainsi été censurés par la cour de cassation c'est parce qu'ils avaient considéré, dans une espèce similaire que la société SOFIAG avait qualité à agir aux lieu et place de la société SODEGA car le procès-verbal de son conseil d'administration du 23 décembre 2004 faisant état de la fusion-absorption par la première de la seconde avait été mis au rang des minutes d'un office notarial le 18 janvier 2005 et que cette pièce constituait une preuve de la réalité de la fusion, nonobstant le fait qu'elle émanait de la société SOFIAG, dès lors que le procès-verbal du conseil d'administration était authentifié par un notaire dont le devoir est de vérifier la réalité des faits authentifiés afin d'assurer l'efficacité de l'acte notarié ; que la Cour de cassation a entendu les censurer quant à la qualification d'acte authentique donnée à l'acte remis à un notaire pour qu'il soit déposé au rang de ses minutes, cette qualification ayant permis à la cour d'appel d'en déduire la réalité de la fusion-absorption constatée dans l'acte ; qu'il ne saurait être déduit de cette décision qu'une fusion-absorption ne peut être prouvée ou n'est valide que si cette opération a été réalisée par acte authentique, une telle exigence ne résultant d'aucun texte ; qu'il n'est pas établi ni même allégué par ailleurs que les actes, délibérations, formalités de publicité ou de dépôt exigés par les articles L. 236-1 et suivants et R. 236-1 et suivants du code de commerce relatifs aux opérations de fusion n'aient pas été respectés ; que Madame X... soutient en deuxième lieu que le contrat de cautionnement est un contrat intuitu personae qui ne peut profiter aux cessionnaires de la créance principale même si la cession intervient par voie de fusion absorption ; que si en application de l'article 2292 du code civil, l'absorption du créancier met en principe fin à 1'obligation de couverture de la caution, la caution demeure cependant tenue à raison des dettes nées antérieurement à la fusion ; qu'est antérieure à la fusion la dette de la caution qui s'est engagée à garantir le remboursement d'un prêt souscrit avant la fusion, la dette naissant de la remise des fonds ; que dès lors Madame X... qui s'est engagée à garantir le remboursement du prêt consenti à la société ANTILLES COLOR par la société SODERAG aux droits de laquelle est venue la société SODEGA en décembre 1991 avant la fusion absorption intervenue en 2004 reste tenue du paiement des sommes dues en vertu de ce prêt en raison de la défaillance de l'emprunteur ; que Madame X... argue en troisième lieu du non respect de l'article 1690 du code civil ; qu'en ce qui concerne la cession par la SODERAG à la SODEGA de l'ensemble des encours bruts au 1er juillet 1998 des créances résultant des prêts consentis par le cédant ayant servi à financer des opérations réalisées dans le département de la Guadeloupe telle qu'elle résulte de l'acte reçu par Maître Z..., notaire, les 1er et 2 décembre 1998, elle a été signifiée, s'agissant en particulier du prêt des 6 et 19 décembre 1991 consenti par la SODERAG à la société ANTILLES COLOR, le 13 février 2000 à Maître A... liquidateur judiciaire de la société ANTILLES COLOR et le 10 février 2000 à Monsieur et à Madame X..., cautions ; que Madame X... ne peut donc soutenir que la cession de la créance par la SODERAG à la SODEGA ne lui a pas été signifiée ; qu'en outre, la transmission universelle du patrimoine permet de rendre opposable au débiteur et aux tiers le transfert des créances de la société absorbée au profit de la société absorbante sans que soit nécessaire l'accomplissement des formalités de signification auxquelles l'article 1690 du Code civil subordonne l'opposabilité d'une cession de créance ; que c'est donc à tort que le premier juge a retenu que le changement de créancier résultant de la fusion absorption aurait dû conformément à l'article 1690 du code civil être régulièrement notifiée à Madame X... débitrice cédée ; que Madame X... soutient enfin que la créance dont se prévaut la SOFIAG n'ayant pas été déclarée en son temps à la procédure collective de la société ANTILLES COLOR, elle est éteinte ; que ce moyen ne saurait être retenu puisque la société SOFIAG produit la déclaration de créance régularisée le 19 août 1993 entre les mains de Maître A..., représentant des créanciers dans le cadre du redressement judiciaire de la société ANTILLES COLOR ; qu'en définitive la qualité de créancier de la SOFIAG ne peut être contestée ; qu'aucun autre moyen n'est soulevé ni susceptible d'être soulevé d'office ; que le jugement sera donc infirmé et la saisie-attribution litigieuse validée ; qu'il convient de condamner Madame X... à payer à la société SOFIAG au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés l'occasion de la présente instance la somme de 750 euros » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE Dans ses conclusions, Madame X... faisait valoir que l'opposabilité de la fusion absorption ne pouvait découler du simple caractère authentique du traité de fusion et que les actes relatifs à la fusion devaient aussi permettre d'identifier les créanciers et le montant des créances cédées (conclusions d'appel, pages 3 et 4) ; qu'en estimant que rien ne permet de juger qu'une fusion-absorption ne peut être prouvée ou n'est valide que si cette opération a été réalisée par acte authentique, une telle exigence ne résultant d'aucun texte, la Cour d'appel a manifestement dénaturé les conclusions de Madame X..., violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE Le cautionnement est un acte intuitu personae liant un créancier et une caution ; que, dès lors, le cautionnement disparaît avec le bénéficiaire de celui-ci, notamment dans le cadre d'une fusion-absorption; qu'ainsi, en jugeant que la caution de Madame X..., accordée spécifiquement à la société SODERAG, avait été transmise à la société SODEGA puis à la société SOFIAG par l'effet d'une fusion-absorption, la Cour d'appel a transformé la caution initialement consentie par l'exposante, violant ainsi les articles 2288, 2289, 2290 et 2292 du Code civil ;
ALORS, A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE La caution accordée à une société ne peut être tenue de garantir les dettes de la société qui l'a absorbée ; qu'il appartient dès lors aux juges du fond de limiter la caution aux dettes dues par la société antérieurement à son absorption et d'en préciser le montant ; qu'en considérant que Madame X... était tenue de garantir les dettes antérieures à la fusion-absorption mais sans en préciser le montant et établir, partant, le lien avec les activités de la société SODERAG initialement garantie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2288, 2289, 2290 et 2292 du Code civil.