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08/02/2017 | FRANCE | N°15-27399

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 février 2017, 15-27399


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 septembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (Soc. 18 septembre 2013, pourvoi n° 12-17.200), que Mme X... a été engagée à compter du 4 octobre 2004 par la société Adrexo en qualité de distributeur de journaux et documents publicitaires ; qu'elle a été déclarée par le médecin du travail, à l'issue de deux examens médicaux des 8 février et 12 avril 2011, inapte à son poste ; qu'elle a été licenciée le 3 novembre 2011 pour inaptitude et impossibilité d

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Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grie...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 22 septembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (Soc. 18 septembre 2013, pourvoi n° 12-17.200), que Mme X... a été engagée à compter du 4 octobre 2004 par la société Adrexo en qualité de distributeur de journaux et documents publicitaires ; qu'elle a été déclarée par le médecin du travail, à l'issue de deux examens médicaux des 8 février et 12 avril 2011, inapte à son poste ; qu'elle a été licenciée le 3 novembre 2011 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge de vérifier concrètement si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de vérifier effectivement si, pris dans leur ensemble, ces éléments étaient de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ que si l'employeur s'abstient de saisir le médecin du travail dans le délai de quinze jours suivant le premier examen médical de reprise, il commet une faute qui cause nécessairement un préjudice au salarié qu'il convient de réparer ; que la cour d'appel a relevé que le premier examen médical au terme duquel le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de la salariée a eu lieu le 8 février 2011 ; que la cour d'appel a également constaté que le second examen médical concluant à l'inaptitude définitive de l'intéressée s'est déroulé le 12 avril 2011 ; qu'en affirmant, pour écarter la demande au titre du harcèlement moral subi, que l'employeur était allé au-delà de ses obligations légales en reprenant le paiement du salaire après le premier examen médical alors que l'inaptitude n'était pas encore définitive et n'avait pas une origine professionnelle, bien que l'employeur avait commis une faute et que cette faute était susceptible de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que sans méconnaître les règles d'administration de la preuve applicables en la matière, la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que la salariée n'établissait pas la matérialité de faits pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que le moyen, qui en sa seconde branche manque par le fait qui lui sert de base, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral subi ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. En l'espèce, la salariée invoque les faits suivants: refus de demandes de congés, engagement d'une procédure de licenciement pour inaptitude sans respect des dispositions prévues par le code du travail, lettre de convocation à un entretien préalable au prononcé d'une sanction. Pour étayer ses affirmations, elle produit : deux demandes de congés payés datées du 11 octobre 2010 et concernant d'une part la journée du 12 octobre 2010 et, d'autre part, la période du 20 au 21 octobre 2010, les fiches de visite délivrées par le médecin du travail, les courriers adressés par son employeur dans le cadre de la procédure de recherche de reclassement puis de licenciement et notamment la lettre de convocation à entretien préalable en date du 21 septembre 2011, ses bulletins de paie. Si la lettre de convocation à entretien préalable en date du 21 septembre 2011 mentionne que la société envisage de prendre "une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement', la salariée ne pouvait ignorer que cette mention résultait à l'évidence d'une simple erreur matérielle, alors même que, par lettre du 8 septembre 2011, la société l'avait informée de ce qu'elle se trouvait dans l'impossibilité de la reclasser et allait prochainement la convoquer à un entretien préalable à un éventuel licenciement. S'agissant du refus du congé, on observera que sur les deux imprimés de demande de congés produits, figurent en caractère gras la mention « à retourner 3 semaines minimum avant le début des congés. Il s'avère ainsi qu'ont été refusés des congés qui n'avaient pas été demandés dans les délais prescrits par l'employeur. La salariée dans le dernier état de ses conclusions devant la présente cour, n'invoque pas que l'employeur a été défaillant dans l'organisation des examens médicaux valant visite de reprise. L'inaptitude a été régulièrement constatée. On peut observer en outre qu'il résulte des bulletins de paie produits que la société a procédé au paiement intégral du salaire, sur la base d'un temps plein, à compter du mois de février 2011 et jusqu'au licenciement. L'employeur est allé ainsi au-delà de ses obligations légales en reprenant le paiement du salaire alors même qu'il s'agissait d'une inaptitude non constatée définitivement et dont l'origine professionnelle n'était pas alors invoquée ou établie. En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée. La demande relative au harcèlement doit par conséquent être rejetée ».
ALORS QU'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge de vérifier concrètement si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de vérifier effectivement si, pris dans leur ensemble, ces éléments étaient de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
ET ALORS, en toute hypothèse, QUE si l'employeur s'abstient de saisir le médecin du travail dans le délai de quinze jours suivant le premier examen médical de reprise, il commet une faute qui cause nécessairement un préjudice au salarié qu'il convient de réparer ; que la cour d'appel a relevé que le premier examen médical au terme duquel le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de la salariée a eu lieu le 8 février 2011 ; que la cour d'appel a également constaté que le second examen médical concluant à l'inaptitude définitive de l'intéressée s'est déroulé le 12 avril 2011 (page 2 de l'arrêt) ; qu'en affirmant, pour écarter la demande au titre du harcèlement moral subi, que l'employeur était allé au-delà de ses obligations légales en reprenant le paiement du salaire après le premier examen médical alors que l'inaptitude n'était pas encore définitive et n'avait pas une origine professionnelle, bien que l'employeur avait commis une faute et que cette faute était susceptible de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR jugé que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté la salariée de ses demandes afférentes à un licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE « n'est pas nul par application des dispositions des articles L.1152-2 et L.1152-3 du code du travail le licenciement intervenu du seul fait qu'une demande de harcèlement moral était pendante. En l'espèce, aucun harcèlement moral n'est caractérisé. La demande présentée au titre de la nullité du licenciement sera également rejetée. L'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur, quelque que soit la position prise par le salarié, de rechercher des possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations des postes de travail au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel elle appartient. Seules des recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite médicale de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l'employeur de son obligation de reclassement. En l'espèce, l'impossibilité de reclassement est établie dès lors que l'employeur justifie des démarches et des recherches entreprises pour tenter de procéder au reclassement de la salariée tant au niveau de l'entreprise que du groupe. En effet, l'employeur a interrogé diverses sociétés du groupe auquel il appartient (pièces n" 13 de la société) sur les postes disponibles ou susceptibles d'être aménagés. En outre, la liste des postes disponibles au sein de diverses sociétés du groupe (par exemple ingénieur projet, commercial, chef de, projet informatique, etc ... ) révèle que ceux-ci étaient incompatibles avec les compétences professionnelles de la salariée, telles que connues de l'employeur (étant observé que la salariée n'a pas répondu à la demande de la société de lui adresser un curriculum vitae), ou les conclusions du médecin du travail, et ce même après aménagement. Les demandes en paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents seront rejetées, par voie de dispositions nouvelles ».
ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi entraînera par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt qui a rejeté la demande de la salariée au titre d'un licenciement nul par application des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;
ET ALORS, à titre subsidiaire, QUE l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que les juges du fond doivent caractériser l'impossibilité de l'employeur de mettre en oeuvre de telles mesures ; qu'en s'abstenant de caractériser une telle impossibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1226-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-27399
Date de la décision : 08/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel d'Angers, 22 septembre 2015, 15/01967

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 22 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 fév. 2017, pourvoi n°15-27399


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.27399
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