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07/02/2017 | FRANCE | N°16-85187

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 février 2017, 16-85187


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Hardev X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 30 juin 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'étrangers en France en bande organisée et d'association de malfaiteurs, a prononcé sur sa requête en annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 janvier 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteu

r, MM. Straehli, Buisson, Mme Durin-Karsenty, MM. Larmanjat, Parlos, Bonnal, conseil...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Hardev X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 30 juin 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'étrangers en France en bande organisée et d'association de malfaiteurs, a prononcé sur sa requête en annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 janvier 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, MM. Straehli, Buisson, Mme Durin-Karsenty, MM. Larmanjat, Parlos, Bonnal, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, Ascensi, conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Cordier ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CORDIER ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 28 novembre 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 63-1 et 803-6 du code de procédure pénale, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête aux fins d'annulation d'actes de la procédure formulée par l'avocat de M. X... le 8 mars 2016, et constaté que la procédure est régulière ;
" aux motifs qu'il ressort des pièces de la procédure que M. X... a été placé en garde à vue le 27 septembre 2015 à 6 heures 15, heure de son interpellation ; qu'il est mentionné dans le procès-verbal de notification de placement et de début de garde à vue « constatons que l'intéressé s'exprime en langue punjabi, langue qu'il déclare écrire. Dès lors par le truchement l'interprète en langue punjabi assurant la traduction fidèle de nos propos notifions à l'intéressé qu'il est placé en garde à vue à compter de ce jour à 6 heures 15 » ; que le procès-verbal mentionne également que sont notifiés à M. X..., assisté de l'interprète, les motifs de son placement en garde à vue et l'ensemble des droits énumérés à l'article 63-1 du code de procédure pénale ; que M. X... a ainsi déclaré par le truchement de l'interprète « J'ai bien compris le motif de mon placement en garde à vue ainsi que les droits s'y rattachant. » que la lecture du procès-verbal permet en effet de constater que M. X... reconnaît que l'intégralité des droits prévus à l'article 63-1 du code de procédure pénale lui ont été notifiés et notamment il est indiqué « Je prends acte que j'ai le droit d'être assisté par un avocat de mon choix ou à défaut commis d'office, dès le début de cette mesure ainsi qu'au début de la première prolongation et à l'issue des quarante-huitièmes et soixante-douzièmes heures si les prolongations supplémentaires sont accordées ; ce droit comprenant la possibilité de m'entretenir avec un avocat et de bénéficier de sa présence lors de mes auditions et confrontations. En outre, je prends acte que le magistrat compétent pourra décider cependant de reporter cette assistance pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête. Je prends également acte qu'un avocat peut être désigné par la, les personnes prévenues le cas échéant de cette mesure, sous réserve de ma confirmation. Je ne souhaite pas être assisté d'un avocat » ; que le procès-verbal est parfaitement clair, a été signé par l'intéressé, l'interprète et l'OPJ ; qu'il apparaît en conséquence que M. X... a été informé de ses droits dès son placement en garde à vue ; qu'en l'espèce il ne ressort pas des pièces de la procédure que le document d'information des droits prévu à l'article 803-6 du code de procédure pénale a été effectivement remis à M. X... et le requérant argue de cette absence de remise pour solliciter la nullité du procès-verbal de son placement en garde à vue et des actes subséquents ; qu'or, il doit être rappelé que la remise du document prévu à l'article 803-6 du code de procédure pénale a pour objet d'aider les suspects et les personnes poursuivies privées de liberté à saisir ce que recouvrent leurs droits ; qu'en l'espèce, M. X... s'est vu notifier dès son placement en garde à vue, par le truchement de l'interprète, l'intégralité des droits prévus à l'article 63-1 du code de procédure pénale qui sont ceux énoncés à l'article 803-6 du même code ; qu'il a déclaré expressément qu'il ne souhaitait pas être assisté par un avocat ; que, par ailleurs, l'interprète a été présent, lors de ses auditions par les enquêteurs ; que, dans ces conditions, il apparaît que M. X... ne justifie pas que la non remise du document d'information dans la langue punjabi a pu lui causer un grief ; que la chambre criminelle de la Cour de cassation a d'ailleurs indiqué dans un arrêt du 14 octobre 2014 « qu'en tout état de cause, le défaut de remise, à la personne mise en examen, de ce document, après prononcé de son placement en détention provisoire, est sans incidence sur la régularité de cette décision ;
" 1°) alors que l'article 63-1 du code de procédure pénale n'a pas vocation à s'appliquer par préférence à l'article 803-6 du même code ; qu'en effet, l'article 803-6 précité dispose à l'égard de toutes les mesures privatives de liberté ; qu'en conséquence, en privant M. X... d'un droit qu'il tient de l'article 803-6 sur le fondement de l'article 63-1 du code de procédure pénale, l'arrêt critiqué a violé les textes susvisés ;
2°) alors que les articles 63-1 et 803-6 du code de procédure pénale imposent l'information de la personne concernée dans une langue qu'elle comprend, par la remise d'un document écrit ; que l'intervention d'un interprète a pour unique fin d'éclairer l'intéressé sur la nature des droits qui lui sont garantis, pour le cas où la lecture du document d'information ne lui paraîtrait pas suffisamment claire ; que le recours à l'interprète ne saurait donc suppléer l'obligation faite aux policiers de remettre ce document écrit à l'intéressé ; que l'arrêt attaqué constate que M. X... ne s'est vu remettre aucun document d'information, l'intervention de l'interprète ayant eu pour seul objet d'assurer la traduction droits énoncés par l'officier de police judiciaire ; qu'en conséquence, la non remise du document d'information dans la langue comprise de la personne gardée à vue lui a nécessairement causé un grief ; qu'en refusant de constater la nullité du procès-verbal du placement en garde à vue de M. X... et les actes subséquents, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
3°) alors que le formulaire visé aux articles 63-1 et 803-6 du code de procédure pénale doit, si la personne placée en garde à vue ne renonce pas à ce droit, être laissé à sa disposition durant toute la durée d'exécution de cette mesure ; que la possibilité ouverte à la personne gardée à vue de conserver ce document impose de le lui mettre à disposition ; qu'en l'espèce, M. X... n'a pas été en mesure de conserver un document qui ne lui a jamais été remis, carence qui l'a maintenu dans l'ignorance qu'il disposait, lors des auditions ultérieures, de la possibilité de revendiquer les droits qu'il tient de l'article 803-6 du code de procédure pénale ; qu'en se réfugiant derrière l'absence de grief pour refuser d'annuler la garde à vue, après avoir constaté que M. X... n'avait pas bénéficié de la remise du document d'information, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés, et privé le demandeur d'une protection effective des droits qui y sont visés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a été placé en garde à vue le 27 septembre 2015 à 6 heures 15, heure de son interpellation ; que le procès-verbal de notification de placement et de début de garde à vue mentionne que l'intéressé s'exprime en langue punjabi, langue qu'il a déclaré écrire ; que ce procès-verbal ajoute que la notification de ce placement en garde à vue a été effectuée par le truchement d'un interprète en langue punjabi, de même que celle des motifs de ce placement en garde à vue et de l'ensemble des droits énumérés à l'article 63-1 du code de procédure pénale ; qu'à l'issue de cette notification des droits, M. X... a indiqué avoir compris le motif de son placement en garde à vue ainsi que les droits s'y rattachant, notamment la totalité de ceux relatifs à l'assistance par un avocat ; qu'il a été mis en examen des chefs précités le 1er octobre 2015 ; qu'il a présenté une requête en annulation le 8 mars 2016 ;
Attendu que, pour rejeter le moyen de nullité du procès-verbal de placement en garde à vue de M. X... et des actes subséquents tiré de ce que le document prévu à l'article 803-6 du code de procédure pénale comportant l'énoncé de ses droits, établi dans une langue comprise du gardé à vue, ne lui a pas été remis, ce qui l'aurait privé de l'exacte compréhension de son droit à l'assistance d'un avocat et du bénéfice des explications de ce dernier, l'arrêt retient que, si la remise de ce formulaire a pour objet d'aider les personnes suspectées ou poursuivies soumises à une mesure privative de liberté à saisir ce que recouvrent leurs droits, l'intéressé s'est vu notifier dès son placement en garde à vue, par le truchement d'un interprète, l'intégralité des droits prévus à l'article 63-1 du code de procédure pénale ; que les juges ajoutent que M. X... a expressément déclaré ne pas souhaiter être assisté par un avocat ; que la chambre de l'instruction en déduit que le mis en examen ne justifie pas que l'absence de remise du document d'information prévu à l'article 803-6 du code de procédure pénale dans la langue punjabi lui a causé un grief ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision dès lors que l'intéressé, qui a bénéficié, par le truchement d'un interprète, de l'information de l'intégralité de ses droits mentionnés à l'article 63-1 du code de procédure pénale aux différentes étapes de sa garde à vue et renoncé de manière non équivoque à l'assistance d'un avocat, ne démontre aucun grief résultant du défaut de remise du document prévu par l'article 803-6 de ce code dans le temps de la mesure ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept février deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et Mme Guichard greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-85187
Date de la décision : 07/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Nullités de l'instruction - Examen de la régularité de la procédure - Annulation d'actes - Garde à vue - Placement - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Notification des droits attachés au placement - Remise du document mentionnant les droits du gardé à vue - Défaut - Portée

GARDE A VUE - Placement - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Notification des droits attachés au placement - Nécessité - Modalités - Remise du document mentionnant les droits du gardé à vue - Exclusion DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Placement - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Notification des droits attachés au placement - Nécessité - Modalités - Remise du document mentionnant les droits du gardé à vue - Exclusion OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE - Garde à vue - Placement - Notification - Notification des droits attachés à la prolongation - Nécessité - Modalités - Remise du document mentionnant les droits du gardé à vue - Exclusion

Il résulte de l'article 803-6 du code de procédure pénale, tel qu'issu de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, que toute personne suspectée ou poursuivie soumise à une mesure privative de liberté se voit remettre, lors de la notification de cette mesure, un document énonçant les droits dont elle bénéficie au cours de la procédure en application dudit code. Justifie sa décision la chambre de l'instruction qui, pour rejeter la requête en nullité du placement d'une personne en garde à vue et des actes subséquents, relève que l'intéressé ayant, d'une part, bénéficié, par le truchement d'un interprète, de l'information de l'intégralité de ses droits mentionnés à l'article 63-1 du code de procédure pénale aux différentes étapes de sa garde à vue, d'autre part, renoncé, de manière non équivoque, à l'assistance d'un avocat, ne démontre, dès lors, aucun grief résultant du défaut de remise du document prévu par l'article 803-6 de ce code dans le temps de la mesure


Références :

articles 63-1 et 803-6 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, 30 juin 2016

Sur le défaut de remise du document prévu à l'article 803-6 du code de procédure pénale, à rapprocher :Crim., 1er décembre 2015, pourvoi n° 15-84874, Bull. crim. 2015, n° 270 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 fév. 2017, pourvoi n°16-85187, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Cordier (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Ricard
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.85187
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