LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 13-13, devenu L. 321-1, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Attendu que les indemnités doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ;
Attendu que l'arrêt attaqué (Besançon, 16 septembre 2015) fixe les indemnités revenant à M. X..., par suite de l'expropriation, au profit de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Franche-Comté (DREAL), de plusieurs parcelles lui ayant appartenu ; que l'une de ces parcelles servait d'assise à un chemin desservant le surplus, situé hors emprise, de sa propriété, sur lequel est érigée une maison d'habitation et qui constitue le seul accès aisé et praticable à la route nationale en cas d'enneigement ; que M. X... a réclamé l'indemnisation du préjudice résultant de la perte de valeur de son bien immobilier entraînée par la disparition de ce chemin ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que, dans ses conclusions, la DREAL admet que, si, dans son projet d'aménagement de la route nationale, elle avait envisagé de condamner l'accès privé de la propriété de M. X..., elle s'engage désormais à maintenir cet accès, si bien que la fermeture de ce chemin est hypothétique, ce qui rend incertain le préjudice ;
Qu'en statuant ainsi, en se fondant sur le seul engagement de l'expropriant de maintenir cet accès lors de travaux futurs d'aménagement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la somme de 14 367, 75 euros l'indemnité d'expropriation due à M. X... et rejette la demande de réparation de la perte de valeur du bien immobilier, l'arrêt rendu le 16 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Franche-Comté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Franche-Comté et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la somme de 14 367, 75 € l'indemnité principale de dépréciation due à M. X... et rejeté sa demande d'indemnisation de perte de valeur du bien immobilier ;
AUX MOTIFS QUE dans ses conclusions, la DREAL admet que dans son projet d'aménagement de la route nationale 5, elle envisageait de condamner l'accès privé de la propriété de M. X..., mais s'engage désormais à maintenir cet accès ; QUE la fermeture de ce chemin, devenant hypothétique, rend dès lors incertain le préjudice qu'elle causerait, en sorte que la demande de réparation de la perte de valeur de la maison d'habitation doit être rejetée ;
ALORS QUE les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que le droit de propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue ; que si ce droit peut être affecté d'une servitude, imposant une charge sur un héritage pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire, celle-ci doit être imposée par la situation des lieux, par la loi ou par la convention ; que dès lors que la DREAL était bénéficiaire de l'expropriation de la parcelle cadastrée F 699, sur laquelle était assis le chemin litigieux, et qu'aucune servitude de passage n'avait été constituée sur cette parcelle au profit de la propriété de M. X..., le chemin en cause avait été supprimé sans que la propriété de M. X... ne bénéficie d'aucun droit réel à son maintien ; que cette suppression causait dès lors un préjudice direct et certain ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 544, 637 et 639 du code civil, ensemble les articles L. 321-1 et L. 321-3 du code de l'expropriation.