LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 20 octobre 2015), que M. X..., engagé le 28 janvier 1999 par La Poste en qualité de facteur, a été licencié pour faute grave le 15 janvier 2013, après avis de la commission de discipline paritaire du 9 janvier 2013 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la procédure conventionnelle prévue par la Convention commune La Poste France Télécom n'a pas été respectée ; que ce non respect constitue une violation d'une garantie de fond ; que le licenciement pour faute grave du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner en conséquence à payer diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 68 de la convention commune La Poste France Télécom : « Lorsque le licenciement est envisagé … pour toute sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou le blâme, la commission consultative paritaire compétente est obligatoirement consultée » ; que selon l'article 74 de cette convention commune « pour des sanctions autres que l'avertissement ou le blâme, la procédure suivante doit être respectée : le délégataire de pouvoir doit adresser à l'agent contractuel une convocation écrite à un entretien préalable. Celle-ci doit :- préciser l'objet, la date, l'heure, le lieu de l'entretien. Par ailleurs, si un licenciement est envisagé, la lettre de convocation doit en faire état,- rappeler que l'intéressé peut se faire assister par une personne de son choix,- être soit adressée par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai maximal de 2 mois, soit remise en main propre contre décharge, dans le même délai (…). A l'issue de l'entretien, si le délégataire de pouvoir estime devoir maintenir sa proposition de sanction (…), il doit saisir la commission consultative paritaire compétente. Dans cette hypothèse, l'agent contractuel doit être convoqué dans les mêmes conditions que précédemment, au moins huit jours à l'avance. Ce dernier a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et peut se faire assister d'une personne de son choix. La commission consultative paritaire émet un avis motivé sur la sanction qu'elle propose, sanction qui peut être différente de celle envisagée par le délégataire de pouvoir » ; qu'il résulte de ces dispositions conventionnelles que l'employeur a pour seule obligation de convoquer régulièrement l'agent devant la commission consultative paritaire ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué « que M. X... a été convoqué régulièrement, à plusieurs reprises, et qu'il a été avisé de ses droits ainsi que le prévoient la convention commune sus citée et le règlement intérieur de La Poste » ; qu'en décidant cependant que la procédure disciplinaire n'avait pas été respectée au motif inopérant que la commission consultative paritaire était « passée outre l'absence de M. X... et de son conseil alors que M. X... était en arrêt de travail suite à un accident subi sur les lieux de travail », la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ qu'aux termes de l'article 68 de la convention commune La Poste France Télécom : « Lorsque le licenciement est envisagé … pour toute sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou le blâme, la commission consultative paritaire compétente est obligatoirement consultée » ; que selon l'article 74 de cette convention commune « (…) A l'issue de l'entretien [préalable], si le délégataire de pouvoir estime devoir maintenir sa proposition de sanction (…), il doit saisir la commission consultative paritaire compétente. […] l'agent contractuel doit être convoqué dans les mêmes conditions que précédemment, au moins huit jours à l'avance. Ce dernier a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et peut se faire assister d'une personne de son choix. La commission consultative paritaire émet un avis motivé sur la sanction qu'elle propose, sanction qui peut être différente de celle envisagée par le délégataire de pouvoir » ; que lorsque le salarié, régulièrement convoqué, n'a pu se présenter devant cette commission, la convention collective commune ne prévoit, ni à la charge de l'employeur, ni à la charge de la commission consultative paritaire, l'obligation de déférer à une demande de report, quel que soit le motif de l'absence ; qu'en décidant cependant « que ce n'est qu'en cas d'absence non justifiée ou de comportement abusif de l'intéressé non démontré en l'espèce que la commission paritaire de discipline peut être amenée à rendre son avis sans avoir entendu l'agent poursuivi », imposant ainsi sans texte la suspension sine die de la procédure disciplinaire, et en déclarant irrégulière la tenue de la commission consultative paritaire pour être « passée outre l'absence de M. X... et de son conseil alors que M. X... était en arrêt de travail suite à un accident subi sur les lieux de travail », la cour d'appel, qui a ajouté à la procédure conventionnelle une obligation qu'elle ne comporte pas, a violé les textes susvisés ;
3°/ qu'en retenant encore, à l'appui de sa décision, « que La Poste … avait lors de la demande de report formulée par le conseil de M. X..., connaissance que son agent a [vait] été placé en arrêt de travail du 24 décembre 2012 jusqu'au 15 janvier 2013 au vu de son état de santé [et …] ne pouvait ignorer que le refus du report de la date de comparution de M. X... devant la commission paritaire de discipline demandé par son conseil risquait d'entraîner la non comparution de ce dernier » sans répondre aux conclusions motivées et étayées de La Poste faisant valoir que l'arrêt de travail pour accident du travail qui lui avait alors été adressé mentionnait « … pour raison médicale dûment justifiée, sorties autorisées sans restriction d'horaire à partir du 24 décembre 2012 », ce dont il résultait que La Poste avait pu, sans faute de sa part, ne pas reporter la date de cette commission, fixée au 9 janvier 2013, laquelle s'était en conséquence régulièrement tenue la cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la saisine d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle, de donner son avis sur le licenciement envisagé par l'employeur constitue une garantie de fond ;
Et attendu qu'ayant constaté que le salarié était placé en arrêt maladie du 24 décembre 2012 au 15 janvier 2013 suite à un accident subi sur les lieux de son travail, que l'employeur en avait été avisé et qu'il ne pouvait ignorer que le refus du report de la date du 9 janvier pour la comparution devant la commission paritaire de discipline, demandé par le conseil du salarié, risquait d'entraîner l'absence de ce dernier, que la procédure conventionnelle prévoit une procédure contradictoire imposant la convocation de l'agent afin d'audition et la possibilité pour celui-ci de se faire assister par une personne de son choix, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre aux conclusions qui étaient inopérantes, a pu en déduire que le salarié n'avait pu bénéficier effectivement de la garantie conventionnelle et que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société La Poste aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Poste à payer à la SCP Zribi et Texier la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et Mme Schmeitzky-Lhuillery, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile en l'audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société La Poste et autres
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR " dit que la procédure conventionnelle prévue par la Convention commune La Poste France Télécom n'a pas été respectée ; que ce non respect constitue une violation d'une garantie de fond ; que le licenciement pour faute grave de Monsieur X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ", condamné en conséquence La Poste à verser à Monsieur X... les sommes de 9 932, 06 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 3 136, 44 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, 9 409, 32 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE " la procédure de licenciement disciplinaire d'un agent de la Poste est soumise à la procédure conventionnelle prévue par la convention commune La Poste France Télécom ; que l'article 68 de cette convention stipule que pour toute sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou le blâme, la commission consultative paritaire compétente est obligatoirement consultée ; que l'article 74 de cette même convention précise que pour des sanctions autres que l'avertissement ou le blâme, le délégataire de pouvoir doit convoquer l'agent à un entretien préalable à l'issue duquel s'il estime devoir maintenir la proposition de sanction à l'encontre de l'agent, il doit saisir la commission consultative paritaire compétente ; que l'agent doit être convoqué au moins huit jours à l'avance et qu'il a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et peut se faire assister de la personne de son choix ; que la commission émet un avis motivé sur la sanction qu'elle propose, sanction qui peut être différente de celle envisagée par le délégataire de pouvoir ;
QUE si les pièces de la procédure établissent que Monsieur X... a été convoqué régulièrement à plusieurs reprises et qu'il a été avisé de ses droits ainsi que le prévoient la convention commune suscitée et le règlement intérieur de la Poste du 31 août 2009, il reste que Monsieur X... était placé en arrêt maladie depuis le 24 décembre 2012 ; que l'employeur en a été avisé ; que Monsieur X... a déclaré qu'il s'agissait d'un accident de travail ; que la déclaration d'accident du travail mentionne : " lors d'un rangement de caisses sur le chariot j'ai ressenti une douleur au niveau du coeur. J'ai rendu mes comptes de facteur, j'ai demandé d'appeler les secours et les pompiers sont venus me chercher au bureau " ; que le responsable de la production de Briançon, Monsieur Lionel Z... dans une lettre adressée à la caisse primaire d'assurance maladie du 27 décembre 2012 contestant la qualification d'accident de travail relate que le salarié ne s'est pas senti bien à son retour de tournée ; que les pompiers ont été appelés et l'ont pris en charge et l'ont amené à l'hôpital d'Embrun ; que le 26 décembre 2012, Monsieur X... qui avait repris le service malgré l'accident du 24 décembre survenu sur le lieu et le temps du travail, s'est à nouveau senti mal, ce qui a amené le responsable à appeler à nouveau les secours, qui ont transporté Monsieur X... à l'hôpital ;
QUE bien que la Poste [ait] parfaitement le droit de contester le caractère professionnel de l'accident survenu le 24 décembre 2012, elle avait lors de la demande de report formulée par le conseil de Monsieur X..., connaissance que son agent a [vait] été placé en arrêt de travail du 24 décembre 2012 jusqu'au 15 janvier 2013 au vu de son état de santé ;
QU'au vu de ces éléments, la Poste ne pouvait ignorer que le refus du report de la date de comparution de Monsieur X... devant la commission paritaire de discipline demandé par son conseil risquait d'entraîner la non comparution de ce dernier ;
QUE la procédure conventionnelle a prévu une procédure contradictoire imposant la convocation de l'agent afin d'audition et la possibilité pour celui-ci de se faire assister par une personne de son choix ; qu'il en résulte que ce n'est qu'en cas d'absence non justifiée ou de comportement abusif de l'intéressé non démontré en l'espèce que la commission paritaire de discipline peut être amenée à rendre son avis sans avoir entendu l'agent poursuivi ;
QU'en passant outre l'absence de Monsieur X... et de son conseil à la séance du 9 janvier 2013, alors que Monsieur X... était en arrêt de travail suite à un accident subi sur les lieux de son travail, la commission paritaire de discipline n'a pas respecté la procédure conventionnelle ;
QUE les garanties de la procédure conventionnelle constituent des garanties de fond ;
QUE le licenciement ne pouvait être prononcé qu'après avis de la commission paritaire de discipline qui devait entendre l'agent menacé de sanction disciplinaire dans les conditions de l'article 74 de la convention suscitée ; que le licenciement décidé sans qu'aient été respectées les garanties de fond de la procédure disciplinaire conventionnelle est dépourvu de cause réelle et sérieuse (…) " ;
1°) ALORS QU'aux termes de l'article 68 de la Convention commune La Poste France Télécom : " Lorsque le licenciement est envisagé … pour toute sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou le blâme, la commission consultative paritaire compétente est obligatoirement consultée " ; que selon l'article 74 de cette convention commune " Pour des sanctions autres que l'avertissement ou le blâme, la procédure suivante doit être respectée : le délégataire de pouvoir doit adresser à l'agent contractuel une convocation écrite à un entretien préalable. Celle-ci doit :
- préciser l'objet, la date, l'heure, le lieu de l'entretien. Par ailleurs, si un licenciement est envisagé, la lettre de convocation doit en faire état,- rappeler que l'intéressé peut se faire assister par une personne de son choix,- être soit adressée par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai maximal de 2 mois, soit remise en main propre contre décharge, dans le même délai (…). A l'issue de l'entretien, si le délégataire de pouvoir estime devoir maintenir sa proposition de sanction (…), il doit saisir la commission consultative paritaire compétente. Dans cette hypothèse, l'agent contractuel doit être convoqué dans les mêmes conditions que précédemment, au moins huit jours à l'avance. Ce dernier a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et peut se faire assister d'une personne de son choix. La commission consultative paritaire émet un avis motivé sur la sanction qu'elle propose, sanction qui peut être différente de celle envisagée par le délégataire de pouvoir " ; qu'il résulte de ces dispositions conventionnelles que l'employeur a pour seule obligation de convoquer régulièrement l'agent devant la commission consultative paritaire ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué " que Monsieur X... a été convoqué régulièrement, à plusieurs reprises, et qu'il a été avisé de ses droits ainsi que le prévoient la convention commune sus citée et le règlement intérieur de La Poste " ; qu'en décidant cependant que la procédure disciplinaire n'avait pas été respectée au motif inopérant que la commission consultative paritaire était " passée outre l'absence de Monsieur X... et de son conseil alors que Monsieur X... était en arrêt de travail suite à un accident subi sur les lieux de travail ", la Cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°) ALORS QU'aux termes de l'article 68 de la Convention commune La Poste France Télécom : " Lorsque le licenciement est envisagé … pour toute sanction disciplinaire autre que l'avertissement ou le blâme, la commission consultative paritaire compétente est obligatoirement consultée " ; que selon l'article 74 de cette convention commune " (…) A l'issue de l'entretien [préalable], si le délégataire de pouvoir estime devoir maintenir sa proposition de sanction (…), il doit saisir la commission consultative paritaire compétente. […] l'agent contractuel doit être convoqué dans les mêmes conditions que précédemment, au moins huit jours à l'avance. Ce dernier a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et peut se faire assister d'une personne de son choix. La commission consultative paritaire émet un avis motivé sur la sanction qu'elle propose, sanction qui peut être différente de celle envisagée par le délégataire de pouvoir " ; que lorsque le salarié, régulièrement convoqué, n'a pu se présenter devant cette commission, la convention collective commune ne prévoit, ni à la charge de l'employeur, ni à la charge de la commission consultative paritaire, l'obligation de déférer à une demande de report, quel que soit le motif de l'absence ; qu'en décidant cependant " que ce n'est qu'en cas d'absence non justifiée ou de comportement abusif de l'intéressé non démontré en l'espèce que la commission paritaire de discipline peut être amenée à rendre son avis sans avoir entendu l'agent poursuivi ", imposant ainsi sans texte la suspension sine die de la procédure disciplinaire, et en déclarant irrégulière la tenue de la commission consultative paritaire pour être " passée outre l'absence de Monsieur X... et de son conseil alors que Monsieur X... était en arrêt de travail suite à un accident subi sur les lieux de travail ", la Cour d'appel, qui a ajouté à la procédure conventionnelle une obligation qu'elle ne comporte pas, a violé les textes susvisés ;
3°) ALORS subsidiairement QU'en retenant encore, à l'appui de sa décision, " que La Poste … avait lors de la demande de report formulée par le conseil de Monsieur X..., connaissance que son agent a [vait] été placé en arrêt de travail du 24 décembre 2012 jusqu'au 15 janvier 2013 au vu de son état de santé [et …] ne pouvait ignorer que le refus du report de la date de comparution de Monsieur X... devant la commission paritaire de discipline demandé par son conseil risquait d'entraîner la non comparution de ce dernier " sans répondre aux conclusions motivées et étayées de La Poste faisant valoir que l'arrêt de travail pour accident du travail qui lui avait alors été adressé mentionnait " … pour raison médicale dûment justifiée, sorties autorisées sans restriction d'horaire à partir du 24 décembre 2012 ", ce dont il résultait que La Poste avait pu, sans faute de sa part, ne pas reporter la date de cette commission, fixée au 9 janvier 2013, laquelle s'était en conséquence régulièrement tenue la Cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.