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26/01/2017 | FRANCE | N°15-15900

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2017, 15-15900


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er mars 1989 par la société Pollution services ; que son contrat de travail a été transféré au sein de la société Colas environnement ; qu'il a été en arrêt pour maladie du 22 juillet 2010 au 28 février 2011 ; que le 18 mars 2011, à l'issue d'un second examen, le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste de travail et apte à un poste similaire sur un autre site que celui de Dardilly ; qu'il a été licencié le 10 mai 2011 pour inapti

tude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen du pourvoi prin...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er mars 1989 par la société Pollution services ; que son contrat de travail a été transféré au sein de la société Colas environnement ; qu'il a été en arrêt pour maladie du 22 juillet 2010 au 28 février 2011 ; que le 18 mars 2011, à l'issue d'un second examen, le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste de travail et apte à un poste similaire sur un autre site que celui de Dardilly ; qu'il a été licencié le 10 mai 2011 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié, ci-après annexé :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale, d'inversion de la charge de la preuve et de dénaturation, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve dont elle a, sans méconnaître les règles spécifiques de preuve et exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1154-1 du code du travail, déduit que la matérialité de certains faits dénoncés par le salarié n'était pas établie et fait ressortir, pour les faits dont elle a retenu la matérialité, l'existence de justification par l'employeur d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Et attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié qui invoque une cassation par voie de conséquence ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal du salarié :
Vu l'article L. 1226-2 du code du travail en sa rédaction alors applicable ;
Attendu que, pour dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt, après avoir relevé que le groupe Colas emploie environ 46 000 salariés et dispose de 700 établissements en France et dans 50 pays, retient que l'employeur justifie par la production de courriers qu'il a effectué des recherches de reclassement au sein de huit sociétés en France, que le 4 avril 2011, il a soumis au salarié un poste de chef de projet technique à Bordeaux, un poste de chef de projet à Chambéry, un poste de chef de projet technique à Montigny le Bretonneux, un poste de chef de projet habitat à Rouen, un poste de chef de projet transport à Chambéry et un poste d'ingénieur principal commercial à Guyancourt, que le 6 avril 2011, il a reçu le salarié en entretien, qu'il a fixé un nouvel entretien le 19 avril 2011 pour un poste de chef de projet à Chambéry, que la responsable des ressources humaines a écrit que le salarié avait refusé le poste qui impliquait un déplacement, que la lettre de licenciement rappelle que le salarié a opposé aux propositions de poste qu'il ne voulait pas quitter la région Rhône-Alpes et plus précisément la région lyonnaise, qu'il ne voulait pas déménager et ne souhaitait pas occuper un poste de nature et de qualification différentes de celui occupé, que le salarié n'a jamais répondu par écrit aux propositions de l'employeur, qu'aucun élément ne permet de mettre en doute le fait que, lors des deux entretiens tenus en vue de son reclassement, le salarié a indiqué qu'il ne voulait pas déménager de la région lyonnaise où il habite et ne voulait pas changer de poste, que, dans ces conditions, l'employeur qui n'avait pas à étendre ses recherches de reclassement a satisfait à son obligation de reclassement ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le périmètre plus important des recherches de reclassement invoqué devant elle, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'impossibilité effective pour l'employeur de reclasser le salarié en tenant compte de la position exprimée par celui-ci quant à sa mobilité géographique et fonctionnelle, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Vu l'article 1147 du code civil en sa rédaction alors applicable, ensemble l'article L. 1121-1 du code du travail en sa rédaction alors applicable ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à verser une indemnité de non-concurrence outre congés payés afférents, l'arrêt, après avoir relevé que le contrat travail contenait une clause de non-concurrence qui, bien que limitée à un périmètre et dans le temps, ne comportait aucune contrepartie financière, retient que le salarié percevait un salaire mensuel de 3 230 euros, qu'au regard de la limitation géographique de la clause, il doit lui être alloué une somme correspondant à un tiers de sa rémunération mensuelle, que la société doit être condamnée à lui verser une somme de 12 920 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence outre 1 292 euros au titre des congés payés afférents ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité destinée à réparer le préjudice né d'une clause de non-concurrence nulle n'a pas la nature d'une indemnité compensatrice de salaire ouvrant droit à congés payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, déboute M. X... des demandes formées à ce titre et condamne l'employeur à payer à M. X... la somme de 12 920 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence, outre 1 292 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 19 février 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société Colas environnement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Colas environnement à verser à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en reconnaissance du harcèlement moral qu'il avait subi de la part de la société Colas Environnement ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 1152-1 du code du travail prohibe les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits ou à la dignité du salarié ou d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en application de l'article L. 1154-1 du code du travail et de la réserve émise par le Conseil Constitutionnel, il appartient au salarié qui allègue d'un harcèlement d'établir la matérialité des éléments de faits précis et concordants laissant supposer l'existence du harcèlement et il appartient à l'employeur de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs ; que le 26 février 2010, le directeur a annoncé à Gilles X... qu'il avait rendez-vous avec le directeur ressources humaines le 5 mars et que : « il serait intéressant que tu es avec toi tes trimestres » (sic) ; que Gilles X... est né le 15 janvier 1950 ; qu'un accord a été conclu au sein du groupe Colas sur l'emploi des seniors et la gestion des âges, lequel prévoit un aménagement des fins de carrière et de la transition entre activité et retraite et des entretiens avec le salarié ; que Gilles X... a posé ses congés d'été le 5 mai 2010 ; que le 12 mai 2010, le responsable technique et environnement lui a expliqué que son collègue avait déjà fait sa demande de congés et lui a demandé de décaler ses congés et de les prendre du 16 août au 3 septembre ; que Gilles X... a déposé une nouvelle demande pour la période du 26 juillet au 13 août ; que par lettre du 21 juillet 2010, l'employeur a écrit qu'il y a un mois, lors d'un entretien, il l'a informé que sa demande de congé du 26 juillet au 13 août ne pourra pas être validée car la période se chevauchait avec celle de son collègue ; qu'il a détaillé le travail à effectuer et le planning ; qu'il a précisé « J'ai bien pris compte de vos réservations d'août et je vous autorise à les prendre même s'il chevauche les congés de Jérémi
Y...
. Dans ces conditions, je vous saurai gré de prendre en considération ce planning et de mettre tout en oeuvre pour respecter les dates impératives de départ des containers. Toutefois, si vous jugez que d4autres alternatives sont possibles, je suis à votre entière disposition pour en discuter » ; que le directeur a été en arrêt de travail pour cause de maladie du 21 juin 2010 au 23 juillet 2010 ; que Gilles X... a été convoqué aux réunions mensuelles de décembre 2009, de février, mars, avril et août 2010 et ne s'y est pas rendu ; qu'il ne justifie pas d'autres réunions ; que dans un courrier du 4 septembre 2010, Jean-Luc Z... écrit, à propos d'une altercation verbale du 22 juillet 2010, qu'il était présent dans la société, qu'il a été témoin des trois agressions verbales que Gilles X... a eu avec Jérôme A..., directeur de la société, et que ce dernier a fait montre d'agressivité verbale ; que ce courrier est imprécis sur le plan factuel et relate l'impression de son auteur sur un comportement agressif ; que Gilles X... a été en arrêt de travail pour cause de maladie à compter du 22 juillet 2010 pour syndrome anxio-dépressif lié à un harcèlement moral au travail ; que le médecin traitant ignore tout des conditions de travail et a retranscrit les doléances de son patient ; que de la confrontation de ces éléments pris tant dans leur ensemble que séparément et sans qu'il soit nécessaire d'organiser une mesure d'instruction, la Cour tire la conviction que Gilles X... n'a pas été victime de harcèlement moral ; qu'en conséquence, Gilles X... doit être débouté de sa demande en reconnaissance du harcèlement moral ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de l'article L. 1154-1 du code du travail que dès lors que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ; que M. X... avait évoqué, au soutien de sa demande, le fait qu'il avait été l'un des rares salariés de l'entreprise à ne pas bénéficier d'augmentation de salaire fin 2009, qu'il avait été contraint de former son successeur qui avait progressivement récupéré ses fonctions et ses dossiers et que son poste avait ainsi été vidé de toute substance, qu'il n'avait pas été convoqué aux réunions mensuelles, par ailleurs systématiquement fixées à des dates où il se trouvait en déplacement, et qu'il avait subi de manière réitérée le comportement verbal violent et injustifié de son supérieur, M. A..., ce qui avait fortement affecté son état de santé et avait conduit le médecin du travail à constater son inaptitude physique à occuper son emploi dans l'établissement dans lequel ce dernier travaillait ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande à ce titre, qu'elle avait « la conviction qu'il n'avait pas été victime de harcèlement moral », alors que M. X..., à qui il n'incombait pas de caractériser un harcèlement moral mais seulement d'établir la matérialité de faits précis et concordants, avait satisfait à la charge de l'allégation qui pesait sur lui et qu'il incombait dès lors à son employeur de justifier objectivement de ces agissements, la cour d'appel a fait peser sur le salarié seul la charge de la preuve et a violé en conséquence l'article L. 1154-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART (et subsidiairement), QU'en retenant, pour débouter le salarié de sa demande à ce titre, que ni le fait que M. A... ait suggéré son départ en retraite, ni le fait qu'il ait refusé de valider ses périodes de congés d'été ne pouvaient être retenus, que M. X... aurait par ailleurs été convoqué aux réunions mensuelles et qu'enfin le témoignage du représentant du personnel quant à l'altercation du 22 juillet aurait été imprécis, sans même s'expliquer sur le fait que le salarié avait été l'un des seuls à ne pas bénéficier d'une augmentation de salaire du fait de son prétendu départ imminent, qu'il avait été contraint de former son successeur, alors même que la rupture de son contrat n'était pas officiellement envisagée et qu'il en était résulté, en pratique, une mise au placard, et enfin sur le fait qu'il avait subi le comportement agressif répété de son supérieur à son égard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, QUE M. X... avait notamment évoqué pour établir l'existence de faits laissant présumer un harcèlement moral dont il avait été victime, la violente altercation qu'il avait eue avec son supérieur, M. A..., le 22 juillet 2010 et qui l'avait conduit à être placé immédiatement en arrêt maladie ; qu'il avait produit, pour en établir l'existence, l'attestation de M. Z..., délégué du personnel, qui avait témoigné de « l'altercation verbale du jeudi 22 juillet 2010 » en indiquant que, présent dans les locaux de la société Colas Environnement, il avait été témoin des trois altercations verbales que le salarié avait eues avec son supérieur, qu'il « confirmait l'agressivité verbale extrême de ce monsieur [A...] à [l'] égard [de Monsieur X...] », « les mises en garde que vous lui avez exprimées plusieurs fois avec ces propos : " Jérôme, arrête de m'agresser, je ne suis plus un enfant " » et avait attesté enfin de ce que l'état moral et psychologique du salarié était très affecté au moment de son départ de l'entreprise ; qu'en affirmant néanmoins, pour l'écarter, que ce document aurait été imprécis sur le plan factuel et aurait relaté l'impression de son auteur sur un comportement agressif, la cour d'appel en a dénaturé les termes en violation de l'interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale de son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 1222-1 du code du travail pose le principe selon lequel le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que les énonciations précédentes démontrent que l'employeur n'a pas exécuté de manière déloyale le contrat de travail ; qu'en conséquence, Gilles X... doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
ALORS QUE ces motifs seront censurés par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen, par application de l'article 625 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... n'était ni nul, ni dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir débouté de ses demandes indemnitaires à ces titres ;
AUX MOTIFS QUE le harcèlement moral a été écarté ; qu'en conséquence, Gilles X... doit être débouté de sa demande en nullité du licenciement qu'il fonde sur le harcèlement ; que les énonciations précédentes ne permettent pas d'imputer l'inaptitude au comportement de l'employeur ;
ET QUE l'article L. 1226-2 du code du travail oblige l'employeur à proposer au salarié déclaré inapte un emploi aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé ; que les recherches de reclassement doivent être sérieuses, loyales et personnalisées et s'étendre au groupe auquel appartient l'entreprise dès lors que la permutation de tout ou partie du personnel est possible ; que le groupe Colas emploie environ 46 000 salariés et dispose de 700 établissements en France et dans 50 pays ; que l'employeur justifie par la production de courriers qu'il a effectué des recherches de reclassement au sein de huit sociétés en FRANCE ; que le 4 avril 2011, l'employeur a soumis à Gilles X... un poste de chef de projet technique à Bordeaux, un poste de chef de projet à Chambéry, un poste de chef de projet technique à Montigny le Bretonneux, un poste de chef de projet habitat à Rouen, un poste de chef de projet transport à Chambéry et un poste d'ingénieur principal commercial à Guyancourt ; que le 6 avril 2011, l'employeur a reçu Gilles X... en entretien ; que le 19 avril 2011, l'employeur a fixé un nouvel entretien avec Gilles X... pour un poste de chef de projet à Chambéry ; que la responsable des ressources humaines a écrit que Gilles X... a refusé le poste qui impliquait un déplacement ; que la lettre de licenciement rappelle que Gilles X... a opposé aux propositions de poste qu'il ne voulait pas quitter la région Rhône-Alpes et plus précisément la région lyonnaise, qu'il ne voulait pas déménager et qu'il ne souhaitait pas un poste de nature et de qualification différentes de celui occupé ; que Gilles X... n'a jamais répondu par écrit aux propositions de l'employeur ; qu'aucun élément ne permet de mettre en doute le fait que, lors des deux entretiens en vue de son reclassement, Gilles X... a indiqué qu'il ne voulait pas déménager de la région lyonnaise où il habite et ne voulait pas changer de poste ; que dans ces conditions, l'employeur n'avait pas à étendre ses recherches de reclassement ; qu'ainsi, l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en conséquence, le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et Gilles X... doit être débouté de ses demandes indemnitaires ;
ALORS, D'UNE PART, QUE ces motifs seront censurés par voie de conséquence de la cassation à intervenir sur le premier moyen, par application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART (et subsidiairement), QUE les règles régissant l'inaptitude du salarié étant d'ordre public et de protection, le salarié ne peut renoncer à s'en prévaloir ; qu'ainsi l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à son emploi dans l'entreprise ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise par le salarié, de rechercher les possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel elle appartient ; qu'en retenant néanmoins, pour conclure que la société Colas Environnement aurait satisfait à son obligation de reclassement et que le licenciement aurait été fondé sur une cause réelle et sérieuse, que M. X... aurait indiqué qu'il ne voulait pas déménager de la région lyonnaise où il habitait et qu'il ne voulait pas changer de poste, de sorte que son employeur n'aurait pas été tenu d'étendre ses recherches de reclassement au-delà de ce secteur géographique, la cour d'appel a d'ores et déjà violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en se fondant sur les termes de la lettre de licenciement et sur la déclaration de la responsable des ressources humaines de l'entreprise pour retenir que M. X... aurait refusé de quitter la région lyonnaise, quand aucune pièce autre que ces deux documents qui émanaient uniquement de l'employeur, ne confirmaient une telle décision de l'intéressé, décision dont il contestait formellement la réalité, la cour d'appel a une nouvelle fois violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ALORS, ENSUITE, QUE la recherche de reclassement doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que M. X... avait souligné (conclusions en appel, p. 25) que la société Colas Environnement, qui employait environ 46. 000 salariés et disposait de 700 établissements en France et dans 50 pays, faisait partie du groupe Bouygues, qui comprenait dans le seul secteur de la construction les sociétés Colas, Bouygues Construction, Bouygues immobilier et ETDE ; que les six propositions de postes incomplètes présentées au salarié par courrier du 4 avril 2011 concernaient précisément des emplois au sein de la société Bouygues Construction et de la société ETDE (pièce n° 25) attestant ainsi de l'étendue du périmètre de reclassement ; qu'en se bornant néanmoins à apprécier les efforts de reclassement de l'employeur au sein du groupe Colas, quand il lui incombait de rechercher s'il justifiait bien de ses efforts de reclassement au sein des entreprises du groupe Bouygues auquel il appartenait et dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et de l'impossibilité d'y trouver un poste disponible susceptible d'être proposé au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ALORS, EGALEMENT (et subsidiairement), QUE la cour d'appel a constaté que la société Colas Environnement, employait environ 46. 000 salariés et disposait de 700 établissements en France et dans 50 pays (arrêt p. 5, § 4) et qu'elle justifiait avoir procédé à des recherches de reclassement « au sein de 8 sociétés en France » (p. 5, § 5) ; qu'en concluant néanmoins qu'elle avait ainsi satisfait à son obligation de reclassement, quand il ressortait de ses propres constatations qu'elle ne justifiait pas de recherches de reclassement dans tout le groupe et que ses recherches n'avaient été que partielles, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ALORS, ENCORE (et subsidiairement), QU'en vertu de son obligation de reclassement du salarié inapte, obligation de « moyens renforcée », l'employeur doit effectuer une recherche préalable, sérieuse et active des possibilités de reclassement ; qu'il ne peut se borner à l'envoi d'une lettre circulaire impersonnelle et générale qui ne comporte aucune précision quant à l'ancienneté du salarié, son niveau, ses compétences ou encore les caractéristiques de l'emploi qu'il occupe ; qu'en affirmant dès lors qu'en interrogeant huit sociétés en France, la société Colas Environnement aurait satisfait à son obligation de reclassement quand il ressortait des courriers qu'elle produisait (pièces n° 12 à 12-9) qu'elle s'était bornée à indiquer, outre la constatation de l'inaptitude du salarié, le poste qu'il occupait en dernier lieu, sans joindre de curriculum vitae ou quelque document que ce soit établissant la nature et l'étendue de ses compétences, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ALORS, DE SURCROIT, QUE l'employeur est tenu de soumettre au salarié des offres précises, concrètes et personnalisées, détaillant pour chaque poste à la fois la durée du travail, la qualification, le niveau de classification et de rémunération, soit l'ensemble des éléments devant lui permettre de donner sa réponse en toute connaissance de cause ; que les six propositions de postes présentées à M. X... par courrier du 4 avril 2011 (pièce n° 25) ne précisaient ni la durée du travail, ni le contenu des fonctions, ni la rémunération correspondant au poste ; qu'en affirmant néanmoins, pour conclure au bien-fondé du licenciement, que la société Colas Environnement aurait ainsi satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
ET ALORS, ENFIN, QU'en affirmant que la société Colas Environnement aurait satisfait à son obligation de reclassement alors que, ainsi que le soulignait M. X... (conclusions p. 29), elle n'avait produit ni son propre registre du personnel, ni celui des sociétés composant le groupe auquel elle appartenait, de sorte qu'il n'était pas permis de s'assurer de l'absence de postes disponibles susceptibles de lui être proposés, la cour d'appel a une dernière fois violé l'article L. 1226-2 du code du travail.
Moyen produit, au pourvoi incident, par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Colas environnement
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 12 920 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non concurrence, outre 1 291 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à dater du 20 juin 2011 ;
AUX MOTIFS QUE « le contrat de travail contenait une clause de non concurrence limitée à un an, à la région Rhône Alpes et au secteur d'activité de l'entreprise ; il n'était pas stipulé de contrepartie financière ; les parties s'accordent sur le caractère illicite de la clause et divergent sur le montant et la nature de l'indemnité. Gilles X... percevait un salaire mensuel de 3 230 euros ; au regard de la limitation géographique de la clause, il doit lui être allouée une somme mensuelle correspondant à un tiers de la rémunération mensuelle, soit une somme globale de 12 920 euros. En conséquence, la société Colas Environnement doit être condamné à verser à Gilles X... la somme de 12 920 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non concurrence, outre 1 292 euros de congés payés afférents avec intérêts au taux légal à dater du 20 juin 2011, date de réception par l'employeur de la convocation à l'audience de conciliation valant mise en demeure de payer. Le jugement entrepris doit être infirmé ».
ALORS QUE l'indemnité destinée à réparer le préjudice né d'une clause de non concurrence illicite, n'a pas la nature d'une indemnité compensatrice de salaire ouvrant droit à congés payés ; que la cour d'appel qui a relevé que la clause de non concurrence était nulle en l'absence de contrepartie financière, a condamné l'employeur à verser au salarié la somme de 12 920 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non concurrence, outre 1 291 euros au titre des congés payés afférents avec intérêts au taux légal à dater du 20 juin 2011, date de réception par l'employeur de sa convocation à l'audience de conciliation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil et l'article L. 1121-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-15900
Date de la décision : 26/01/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 19 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2017, pourvoi n°15-15900


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.15900
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