La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2017 | FRANCE | N°15-15174

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 janvier 2017, 15-15174


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1351 du code civil, devenu l'article 1355 ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que si les décisions de la justice pénale ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification, la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé, il en est autrement lorsque les décisions statuent sur les intérêts civils ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu

e Mme X... a été engagée à compter du 27 août 1990 en qualité de secrétaire commercia...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1351 du code civil, devenu l'article 1355 ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que si les décisions de la justice pénale ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification, la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé, il en est autrement lorsque les décisions statuent sur les intérêts civils ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 27 août 1990 en qualité de secrétaire commerciale par la société Librairie Cazal (la société), dont le gérant était M. Y... ; que licenciée le 11 août 2006, elle a saisi la juridiction prud'homale invoquant notamment l'existence d'un harcèlement moral ; qu'antérieurement à cette action, elle a porté plainte pour harcèlement moral à l'encontre de M. Y... ; que le 12 mars 2013, la société a fait l'objet d'un jugement d'ouverture de liquidation judiciaire, M. Z... ayant été désigné en qualité de liquidateur judiciaire, lui-même sous administration provisoire de la SCP C...- A..., prise en la personne de Mme Anne A..., et de la selarl B...- D..., prise en la personne de M. Thierry B... ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande de réparation de son préjudice moral, la cour d'appel retient que M. Y... a été définitivement condamné à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral dont elle a été victime, pour la période de prévention, soit entre janvier 2003 et le 16 août 2006, que l'indemnisation du préjudice résultant du harcèlement moral par le juge pénal ne permet pas à la victime d'agir devant le juge du contrat de travail aux mêmes fins sauf à démontrer que l'indemnisation poursuivie à l'encontre de l'employeur est distincte de celle obtenue à l'encontre de l'auteur du harcèlement, or, Mme X... ne rapporte pas la preuve que les faits de harcèlement moral sur lesquels elle fonde sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la Librairie Cazal seraient distincts de ceux retenus par le juge pénal ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la juridiction pénale avait condamné M. Y... personnellement, tandis que les demandes présentées devant elle visaient la société Librairie Cazal, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de sa demande en réparation de son préjudice moral, l'arrêt rendu le 23 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Z..., ès qualités, à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de sa demande de réparation de son préjudice moral ;
Aux motifs que par suite du rejet par arrêt de la Cour de cassation du 22 mai 2012, du pourvoi formé par M. Y... contre l'arrêt du 10 novembre 2011 de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Saint-Denis, M. Y..., gérant de la Sarl Librairie Cazal, a été définitivement condamné à payer à Mme X... la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral dont elle a été victime, pour la période de prévention, entre janvier 2003 et le 16 août 2006 ; que dans le cadre de la décision de sursis à statuer du 29 mars 2011, Mme X... avait été invitée à actualiser ses demandes, notamment en cas de confirmation de la décision pénale sur le principe du harcèlement moral et de son indemnisation ; qu'en effet, comme la cour l'avait souligné dans cette décision, l'indemnisation du préjudice résultant du harcèlement moral par le juge pénal ne permet pas à la victime d'agir devant le juge du contrat de travail aux mêmes fins, sauf à démontrer que l'indemnisation poursuivie à l'encontre de l'employeur est distincte de celle obtenue à l'encontre de l'auteur du harcèlement ; que Mme X... ne rapporte pas la preuve que les faits de harcèlement moral sur lesquels elle fonde sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la Sarl Librairie Cazal seraient distincts de ceux retenus par le juge pénal ; qu'enfin, la cour d'appel, dans sa décision de sursis à statuer, avait indiqué que Mme X... devra, en cas de confirmation, préciser si elle demande la résiliation du contrat ; qu'elle ne conteste pas le motif de son licenciement, soit l'inaptitude médicale, et ne sollicite pas la résiliation du contrat de travail ; qu'il convient dès lors, infirmant la décision entreprise, de la débouter de l'ensemble de ses demandes ;
Alors 1°) que les juges du fond ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; que pour demander l'infirmation du jugement l'ayant condamnée à payer à Mme X... des dommages-intérêts pour préjudice moral, la Sarl Librairie Cazal a soutenu que le conseil de prud'hommes ne pouvait estimer que son attitude était vexatoire, a contesté avoir tenté de la déstabiliser, a soutenu qu'elle n'avait pas fait l'objet de brimades mais d'un avertissement et que la sarl n'avait fait que suivre les recommandations de la médecine du travail et de l'inspection du travail pour sauvegarder la santé de Mme X..., qui considérait à tort avoir fait l'objet de pressions, et qui en tout état de cause n'établissait pas de lien causal entre un fait de l'employeur et la dégradation de son état de santé ; qu'en retenant que les termes de la décision pénale ayant définitivement condamné M. Y..., gérant de la Sarl Librairie Cazal, à payer à Mme X... 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral dont elle avait été victime, pour la période de prévention, entre janvier 2003 et le 16 août 2006, s'opposaient à la demande de Mme X..., sauf à démontrer que l'indemnisation demandée à l'employeur était distincte de celle obtenue de l'auteur du harcèlement, la cour d'appel a méconnu les termes du litige dont elle était saisie et a ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens relevés d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs explications ; qu'en ayant soulevé d'office un moyen tiré de ce que les termes de la décision pénale ayant définitivement condamné M. Y..., gérant de la Sarl Librairie Cazal, à payer à Mme X... des dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral dont elle avait été victime, pour la période de prévention, entre janvier 2003 et le 16 août 2006, s'opposaient à la demande de dommages-intérêts Mme X..., sauf à démontrer que l'indemnisation demandée à l'employeur était distincte de celle obtenue de l'auteur du harcèlement, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Alors 3°) et en tout état de cause, que la demande d'indemnisation formée devant le juge prud'homal par le salarié à l'encontre d'employeur, personne morale l'ayant licencié, au titre du préjudice moral subi en raison de son attitude fautive, est distincte de celle précédemment formée devant le juge pénal contre le gérant, personne physique, à titre de harcèlement moral ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en retenant que la condamnation pénale définitive de M. Y..., gérant de la Sarl Librairie Cazal, à payer à Mme X... des dommages-intérêts en réparation du préjudice lié au harcèlement moral dont elle avait été victime, pour la période de prévention, entre janvier 2003 et le 16 août 2006, s'opposait à la demande de Mme X... d'indemnisation formée à l'encontre de la sarl Librairie Cazal en raison du préjudice moral causé par l'attitude fautive de l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-15174
Date de la décision : 26/01/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 23 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jan. 2017, pourvoi n°15-15174


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.15174
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award