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14/12/2016 | FRANCE | N°15-22829

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 décembre 2016, 15-22829


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et deuxième moyens, réunis :

Vu l'article 31 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'alléguant la défaillance de M. et Mme X... dans le remboursement du prêt immobilier qu'elle leur avait consenti suivant acte notarié du 14 décembre 2007, la Banque privée européenne (la banque) les a assignés en paiement ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de la banque, après avoir relevé que ce

lle-ci disposait contre M. et Mme X... d'un titre exécutoire constatant une créance liqui...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les premier et deuxième moyens, réunis :

Vu l'article 31 du code de procédure civile, ensemble l'article 4 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'alléguant la défaillance de M. et Mme X... dans le remboursement du prêt immobilier qu'elle leur avait consenti suivant acte notarié du 14 décembre 2007, la Banque privée européenne (la banque) les a assignés en paiement ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes de la banque, après avoir relevé que celle-ci disposait contre M. et Mme X... d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible lui permettant d'en poursuivre l'exécution forcée sur les biens des débiteurs, l'arrêt retient qu'elle ne dispose pas d'un intérêt à agir pour l'obtention d'un second titre exécutoire relatif à la même créance ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'acte notarié, bien que constituant un titre exécutoire, ne revêt pas les attributs d'un jugement et qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires pour la même créance, de sorte que la titularité d'un acte notarié n'était pas en soi de nature à priver la banque de son intérêt à agir aux fins de condamnation de son débiteur en paiement de la créance constatée dans cet acte, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable la demande de sursis à statuer et en ce qu'il rejette les demandes reconventionnelles de M. et Mme X..., l'arrêt rendu le 16 juin 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Banque privée européenne

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré irrecevables les demandes de la société BPE visant à voir liquider sa créance de remboursement du prêt notarié souscrit par M. et Mme Y...et à obtenir leur condamnation à paiement ;

AUX MOTIFS QUE « le prêt consenti par la Banque Privée Européenne au profit des époux X... a fait l'objet d'un acte notarié, reçu par Maître Y...le 14 décembre 2007 ; qu'une copie exécutoire nominative a été délivrée par le notaire au prêteur ; que la SA Banque Privée Européenne a néanmoins engagé contre les emprunteurs une action en paiement du solde du prêt, suite à leur défaillance dans le remboursement des échéances ; qu'elle considère être fondée à obtenir un jugement liquidant sa créance, après débat contradictoire, dans la mesure où la validité de son titre est contestée ; qu'aux termes des articles L. 111-1 et suivants des code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires, permettant au créancier d'en poursuivre l'exécution forcée ; que la copie exécutoire nominative détenue par la Banque Privée Européenne est revêtue de la formule exécutoire, et contient l'identification précise du créancier ainsi que des personnes débitrices ; que s'agissant de la liquidation de la créance, en vertu de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, le titre est suffisant lorsqu'il contient tous les éléments permettant l'évaluation de la créance ; que le caractère liquide de la créance n'implique pas que le montant exact des sommes pour lesquelles est poursuivie une mesure d'exécution fasse l'objet d'une liquidation préalable ; que les débiteurs n'ont engagé aucune action visant à faire prononcer la nullité de l'acte de prêt, en raison des irrégularités alléguées par eux ; que l'éventuelle contestation de mesures d'exécution engagées par la Banque Privée Européenne relèvera de la compétence du juge de l'exécution ; que la Banque Privée Européenne dispose donc contre les époux X... d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, lui permettant d'en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de ses débiteurs ; que dès lors, elle ne dispose pas d'un intérêt à agir pour l'obtention d'un second titre exécutoire relatif à la même créance ; que son action doit en conséquence être déclarée irrecevable ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point » (arrêt, p. 5) ;

ALORS QUE les juges du fond ne peuvent apprécier l'intérêt à agir du demandeur en se référant à une règle de fond ; que par suite, ils ne peuvent déclarer une demande irrecevable faute d'intérêt à raison du fait que, en l'espèce, le titre invoqué par le créancier présentait une forme notariée ; qu'en décidant que la société BPE était sans intérêt à agir en recouvrement de la créance née d'un prêt notarié pour cette raison qu'elle disposait déjà d'un acte authentique revêtu de la force exécutoire, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 31 du code de procédure civile.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré irrecevables les demandes de la société BPE visant à voir liquider sa créance de remboursement du prêt notarié souscrit par M. et Mme Y...et à obtenir leur condamnation à paiement ;

AUX MOTIFS QUE « le prêt consenti par la Banque Privée Européenne au profit des époux X... a fait l'objet d'un acte notarié, reçu par Maître Y...le 14 décembre 2007 ; qu'une copie exécutoire nominative a été délivrée par le notaire au prêteur ; que la SA Banque Privée Européenne a néanmoins engagé contre les emprunteurs une action en paiement du solde du prêt, suite à leur défaillance dans le remboursement des échéances ; qu'elle considère être fondée à obtenir un jugement liquidant sa créance, après débat contradictoire, dans la mesure où la validité de son titre est contestée ; qu'aux termes des articles L. 111-1 et suivants des code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires, permettant au créancier d'en poursuivre l'exécution forcée ; que la copie exécutoire nominative détenue par la Banque Privée Européenne est revêtue de la formule exécutoire, et contient l'identification précise du créancier ainsi que des personnes débitrices ; que s'agissant de la liquidation de la créance, en vertu de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, le titre est suffisant lorsqu'il contient tous les éléments permettant l'évaluation de la créance ; que le caractère liquide de la créance n'implique pas que le montant exact des sommes pour lesquelles est poursuivie une mesure d'exécution fasse l'objet d'une liquidation préalable ; que les débiteurs n'ont engagé aucune action visant à faire prononcer la nullité de l'acte de prêt, en raison des irrégularités alléguées par eux ; que l'éventuelle contestation de mesures d'exécution engagées par la Banque Privée Européenne relèvera de la compétence du juge de l'exécution ; que la Banque Privée Européenne dispose donc contre les époux X... d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, lui permettant d'en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de ses débiteurs ; que dès lors, elle ne dispose pas d'un intérêt à agir pour l'obtention d'un second titre exécutoire relatif à la même créance ; que son action doit en conséquence être déclarée irrecevable ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point » (arrêt, p. 5) ;

ALORS QU'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires ; que par suite, rien n'interdit à ce qu'un créancier disposant d'un acte notarié revêtu de la force exécutoire sollicite la condamnation du débiteur à paiement sur la base de ce titre ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 4 du code civil et l'article 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré irrecevables les demandes de la société BPE visant à voir liquider sa créance de remboursement du prêt notarié souscrit par M. et Mme Y...et à obtenir leur condamnation à paiement ;

AUX MOTIFS QUE « le prêt consenti par la Banque Privée Européenne au profit des époux X... a fait l'objet d'un acte notarié, reçu par Maître Y...le 14 décembre 2007 ; qu'une copie exécutoire nominative a été délivrée par le notaire au prêteur ; que la SA Banque Privée Européenne a néanmoins engagé contre les emprunteurs une action en paiement du solde du prêt, suite à leur défaillance dans le remboursement des échéances ; qu'elle considère être fondée à obtenir un jugement liquidant sa créance, après débat contradictoire, dans la mesure où la validité de son titre est contestée ; qu'aux termes des articles L. 111-1 et suivants des code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires, permettant au créancier d'en poursuivre l'exécution forcée ; que la copie exécutoire nominative détenue par la Banque Privée Européenne est revêtue de la formule exécutoire, et contient l'identification précise du créancier ainsi que des personnes débitrices ; que s'agissant de la liquidation de la créance, en vertu de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, le titre est suffisant lorsqu'il contient tous les éléments permettant l'évaluation de la créance ; que le caractère liquide de la créance n'implique pas que le montant exact des sommes pour lesquelles est poursuivie une mesure d'exécution fasse l'objet d'une liquidation préalable ; que les débiteurs n'ont engagé aucune action visant à faire prononcer la nullité de l'acte de prêt, en raison des irrégularités alléguées par eux ; que l'éventuelle contestation de mesures d'exécution engagées par la Banque Privée Européenne relèvera de la compétence du juge de l'exécution ; que la Banque Privée Européenne dispose donc contre les époux X... d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, lui permettant d'en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de ses débiteurs ; que dès lors, elle ne dispose pas d'un intérêt à agir pour l'obtention d'un second titre exécutoire relatif à la même créance ; que son action doit en conséquence être déclarée irrecevable ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point » (arrêt, p. 5) ;

ALORS QUE, premièrement, un jugement est pourvu d'effets qui ne sont pas ceux d'un acte notarié ; qu'en particulier, un jugement de condamnation est revêtu de l'autorité de la chose jugée, permet d'inscrire une hypothèque judiciaire, fait courir une prescription de dix ans et donne lieu à un intérêt de retard majoré ; qu'en affirmant que le fait de disposer d'un titre notarié rendait irrecevable, faute d'intérêt, la demande en paiement formée devant le juge du fond, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, les juges sont tenus d'apprécier l'existence de l'intérêt à agir au regard de l'objet de la demande au jour où celle-ci est formée ; qu'en s'abstenant de vérifier en l'espèce si, au regard de l'objet de la demande, qui visait notamment à voir fixer le quantum de la créance de remboursement d'un prêt notarié conclu en 2007, la société BPE ne disposait pas d'un intérêt à saisir le juge judiciaire à l'effet de faire liquider sa créance actualisée, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard de l'article 31 du code de procédure civile.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a déclaré irrecevables les demandes de la société BPE visant à voir liquider sa créance de remboursement du prêt notarié souscrit par M. et Mme Y...et à obtenir leur condamnation à paiement ;

AUX MOTIFS QUE « le prêt consenti par la Banque Privée Européenne au profit des époux X... a fait l'objet d'un acte notarié, reçu par Maître Y...le 14 décembre 2007 ; qu'une copie exécutoire nominative a été délivrée par le notaire au prêteur ; que la SA Banque Privée Européenne a néanmoins engagé contre les emprunteurs une action en paiement du solde du prêt, suite à leur défaillance dans le remboursement des échéances ; qu'elle considère être fondée à obtenir un jugement liquidant sa créance, après débat contradictoire, dans la mesure où la validité de son titre est contestée ; qu'aux termes des articles L. 111-1 et suivants des code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires, permettant au créancier d'en poursuivre l'exécution forcée ; que la copie exécutoire nominative détenue par la Banque Privée Européenne est revêtue de la formule exécutoire, et contient l'identification précise du créancier ainsi que des personnes débitrices ; que s'agissant de la liquidation de la créance, en vertu de l'article L. 111-6 du code des procédures civiles d'exécution, le titre est suffisant lorsqu'il contient tous les éléments permettant l'évaluation de la créance ; que le caractère liquide de la créance n'implique pas que le montant exact des sommes pour lesquelles est poursuivie une mesure d'exécution fasse l'objet d'une liquidation préalable ; que les débiteurs n'ont engagé aucune action visant à faire prononcer la nullité de l'acte de prêt, en raison des irrégularités alléguées par eux ; que l'éventuelle contestation de mesures d'exécution engagées par la Banque Privée Européenne relèvera de la compétence du juge de l'exécution ; que la Banque Privée Européenne dispose donc contre les époux X... d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, lui permettant d'en poursuivre l'exécution forcée sur les biens de ses débiteurs ; que dès lors, elle ne dispose pas d'un intérêt à agir pour l'obtention d'un second titre exécutoire relatif à la même créance ; que son action doit en conséquence être déclarée irrecevable ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point » (arrêt, p. 5) ;

ALORS QUE, premièrement, le créancier titulaire d'un titre constaté par un acte notarié a un intérêt à saisir le juge du fond pour obtenir la condamnation du débiteur à paiement de sorte à mettre ce dernier en situation d'élever toutes les contestations utiles devant le juge du fond, et purger ainsi définitivement le litige ; qu'en l'espèce, les époux X... avaient précisément opposé à la demande de la société BPE la nullité du titre constaté par l'acte notarié, ainsi que la prescription de l'action outre une contestation sur la quantum de la somme réclamée, et avaient également formé une demande de dommages-intérêts destinée à venir compenser les sommes réclamées ; qu'en décidant néanmoins que la société BPE était sans intérêt à saisir le juge du fond de sa demande en paiement, ou encore de sa demande en fixation de sa créance, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, en ne recherchant pas si les époux X... n'avaient pas déjà, au jour de l'introduction de l'instance, contesté devoir les sommes réclamées, la cour d'appel a à tout le moins privé sa décision de base légale au regard de l'article 31 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-22829
Date de la décision : 14/12/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 16 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 déc. 2016, pourvoi n°15-22829


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte et Briard, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.22829
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