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13/12/2016 | FRANCE | N°12-20328

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 décembre 2016, 12-20328


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 16 mars 2012) et les productions, que Mme X... a souscrit à une augmentation du capital de la société civile immobilière Actarus (la SCI), ayant pour objet la réalisation d'un programme de construction de logements ; que pour financer cette acquisition, elle a, par un acte du 28 décembre 2005, souscrit un prêt auprès de la société Banque de la Réunion (la banque) ; qu'estimant que celle-ci avait commis une faute en mettant, dès le lendemain, l

a totalité des sommes empruntées au crédit du compte de la SCI, en mé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 16 mars 2012) et les productions, que Mme X... a souscrit à une augmentation du capital de la société civile immobilière Actarus (la SCI), ayant pour objet la réalisation d'un programme de construction de logements ; que pour financer cette acquisition, elle a, par un acte du 28 décembre 2005, souscrit un prêt auprès de la société Banque de la Réunion (la banque) ; qu'estimant que celle-ci avait commis une faute en mettant, dès le lendemain, la totalité des sommes empruntées au crédit du compte de la SCI, en méconnaissance des stipulations du contrat de prêt, Mme X... a assigné en paiement de dommages-intérêts la banque qui lui a opposé une faute de négligence ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de juger qu'elle a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de Mme X... et de la condamner à payer à cette dernière la somme de 182 475,07 euros alors, selon le moyen :
1°/ que la clause de « Blocage des fonds » stipulée dans l'acte de prêt du 28 décembre 2005, bien que mentionnée à deux reprises, page 3 et page 10 de l'acte, était chaque fois clairement et précisément insérée au sein des « Garanties » accordées à la banque, parmi lesquelles figuraient également la « Promesse de cautionnement hypothécaire de la SCI » et l' « engagement de domicilier les loyers », ainsi qu'il est chaque fois rappelé à titre liminaire page 3 et page 9 du contrat ; qu'en jugeant que la clause de « Blocage du compte capital qui sera libéré au fur et à mesure de l'avancement des travaux » avait « été exigée de la banque comme en fait foi le courrier qu'elle avait adressé le 9 décembre 2008 au notaire chargé de rédiger l'acte » et qu'il n'est « pas douteux qu'une telle clause d'« emploi des fonds », non complétée par la clause d'affectation des fonds précitée, n'offre qu'une garantie à la banque et ne mettrait pas à sa charge une obligation », mais qu'il existerait en l'espèce une seconde clause « Blocage du compte capital », distincte, qui ne serait pas stipulée parmi les « Garanties » octroyées à la banque, la cour d'appel a dénaturé le contrat de prêt du 28 décembre 2005, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en donnant à la même garantie stipulée au bénéfice de la banque deux sens opposés, à savoir d'une part une clause « d'emploi des fonds » n'offrant par elle-même « qu'une garantie à la banque » et ne mettant « pas à sa charge une obligation », et d'autre part une clause d' « affectation des fonds » qui engagerait la même banque « formellement à garder les fonds sur un compte bloqué appartenant à la SCI et à les débloquer au fur et à mesure de la réalisation des travaux », la cour d'appel a affecté sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la clause de blocage des fonds stipulée au sein des « Garanties » accordées à la banque prévoyait que leur déblocage s'effectuerait « sur production de tous justificatifs demandés par le Prêteur », sans qu'aucune liste de ces justificatifs ne soit imposée audit prêteur par l'acte de prêt, et que ce dernier stipulait par ailleurs une exigibilité anticipée du remboursement « au cas où l'Emprunteur ne serait pas en mesure de justifier à la banque, à première demande de celle-ci, du bon emploi des fonds qui lui ont été remis » ; qu'en jugeant que la clause « d'affectation » des fonds, qui laissait la demande de justificatifs évoquée à la discrétion de la banque et dont la méconnaissance par l'emprunteur permettait à ladite banque de prononcer l'exigibilité anticipée du remboursement du prêt, pourrait avoir imposé une obligation à celle-ci, la cour d'appel a dénaturé le contrat de prêt du 28 décembre 2005, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
4°/ qu'en jugeant qu'il « importe peu que ne soient pas énumérés de manière précise les justificatifs que la banque doit exiger avant de débloquer les fonds », tout en considérant qu'il serait « acquis au débat que la banque n'a pas respecté cette obligation » de demander des justificatifs avant de débloquer les fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;
5°/ qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, que la banque ne peut prétendre que la clause de blocage des fonds était stipulée dans son seul intérêt « sauf à tomber sous le coup des dispositions de l'article 1174 du code civil du fait de son caractère potestatif », sans rechercher, comme il lui était demandé, si cette clause constituait une obligation ou un droit discrétionnaire pour la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1174 du code civil ;
6°/ qu'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, que « le fait que (la clause) figure dans l'article du contrat consacré aux « Garanties » ne permet pas d'occulter son utilité également pour l'emprunteuse, puisque tant cette dernière que le prêteur avaient intérêt à s'assurer de la libération des fonds au fur et à mesure de l'avancement des travaux, la réalisation de ces derniers étant la destination finale de l'emprunt », sans avoir égard à l'accord de volonté des parties lors de la conclusion du contrat, qui seule faisait la loi de celles-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que le contrat de prêt du 28 décembre 2005 contenait une clause intitulée « Blocage du compte capital », selon laquelle les sommes prêtées à Mme X... devaient être versées par la banque sur un compte de la SCI qui devait demeurer bloqué jusqu'aux appels de fond de cette dernière, au fur et à mesure de l'avancement des constructions, l'arrêt retient que la banque, qui s'était engagée formellement à l'égard de Mme X..., n'a pas respecté cette obligation en versant dès le lendemain la totalité des sommes prêtées sur le compte de la SCI dont le gérant avait la libre disposition ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, la cour d'appel a pu, sans dénaturer le contrat ni se contredire, retenir qu'en ne débloquant pas les fonds en fonction du seul avancement des travaux, la banque avait engagé sa responsabilité envers Mme X..., pour qui le blocage des fonds constituait une garantie, en cas de non-réalisation du projet de construction ; que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande reconventionnelle contre Mme X... en raison de la défaillance de cette dernière à assurer et maintenir l'efficacité du cautionnement hypothécaire promis alors, selon le moyen, qu'en jugeant que Mme X..., malgré son comportement négligeant consistant à ne s'être enquis du devenir de l'opération que deux après l'octroi du prêt, sans justifier avoir jamais usé des dispositions légales et contractuelles lui permettant de surveiller le fonctionnement de la SCI dont elle était pourtant associée, n'avait causé aucun préjudice à la banque, au motif que dès la signature de l'acte de prêt elle a été dessaisie des fonds empruntés sur lesquels elle n'a conservé aucune maîtrise, sans vérifier, comme il lui était demandé, si Mme X..., qui avait l'obligation contractuelle de veiller au bon emploi des fonds prêtés, n'avait pas laissé le gérant « agir à sa guise, en toute liberté et en violation des règles légales et statutaires primaires », permettant ainsi audit gérant de détourner les fonds litigieux sans que les travaux qu'ils étaient censés financer n'aient jamais été commencés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la banque avait commis une faute en versant les fonds empruntés sur un compte dont le gérant de la SCI avait l'entière disposition, en méconnaissance du contrat de prêt, la cour d'appel, qui n'avait pas à faire la recherche invoquée par le moyen que ses constatations rendaient inopérante, a pu retenir que le comportement de Mme X... n'avait concouru en aucune manière au préjudice subi par la banque ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Banque de la Réunion aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Banque de La Réunion.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que la BANQUE DE LA REUNION a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à l'égard de Madame Y... et de l'AVOIR en conséquence condamnée à lui payer, en réparation des divers chefs de préjudice causés par sa faute, la somme globale de 182.475,07 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'examen du contrat de prêt permet d'affirmer que la SA BANQUE DE LA REUNION était tenue par cette clause d'affectation ; qu'en effet celle-ci intitulée « BLOGAGE DU COMPTE CAPITAL » est rédigée ainsi : « L'EMPRUNTEUR autorise le PRETEUR à procéder au déblocage du présent prêt sur un compte ouvert au nom de la SCI ACTARUS à la BANQUE DE LA REUNION. Ce compte demeurera bloqué dans les livres du PRETEUR et fera l'objet du déblocage sur appel de fonds de la SCI ACTARUS au fur et à mesure de l'avancement des constructions projetées et sur production de tous justificatifs demandés par le PRETEUR » ; que les termes employés « demeurera bloqué » et « fera l'objet de déblocages » sont comminatoires et n'offrent pas une simple faculté à la banque qui s'engage formellement à garder les fonds sur un compte bloqué appartenant à la SCI ACTARUS et à les débloquer au fur et à mesure de la réalisation des travaux ; que la SA BANQUE DE LA REUNION tente de créer une confusion entre cette clause d'affectation des fonds sur un compte bloqué avec la clause dite d' « emploi des fonds » qui figure aussi au contrat ; que cette dernière est insérée au titre des « GARANTIES » imposées par la banque au même titre que la promesse de cautionnement hypothécaire et que l'engagement de domicilier les loyers ; qu'elle stipule ainsi « Blocage du compte capital qui sera libéré au fur et à mesure de l'avancement des travaux » ; que le non respect de cette clause pouvait entraîner, selon les termes du contrat, l'exigibilité anticipée du remboursement du prêt ; que cette clause avait été exigée de la banque comme en fait foi le courrier qu'elle avait adressé le 9 décembre 2008 au notaire chargé de rédiger l'acte ; qu'il n'est pas douteux qu'une telle clause d' « emploi des fonds », non complétée par la clause d'affectation des fonds précitée, n'offre qu'une garantie à la banque et ne mettrait pas à sa charge une obligation ; qu'il est traditionnellement jugé que cette clause, qui fait référence à la faculté du prêteur de contrôler l'emploi des fonds et qui est couramment utilisée dans le cadre des ventes en état futur d'achèvement, est stipulée dans le seul intérêt du prêteur qui ne souscrit aucun engagement vis-à-vis de l'emprunteur et dont la responsabilité ne peut être recherchée quant aux conditions dans lesquelles les fonds empruntés ont finalement été utilisés ; mais que dans la présente opération qui ne constitue pas une vente en état futur d'achèvement et compte tenu du versement immédiat des fonds empruntés à un autre que l'emprunteur qui n'en avait plus la libre disposition, en l'espèce à la société en charge de la réalisation de l'opération immobilière, cette simple clause d'« emploi des fonds » a été complétée par la clause précitée qui engageait la banque, vis-à-vis de l'emprunteur qui ne pouvait plus contrôler la destination des fonds, à laisser ceux-ci sur un compte bloqué et de ne les débloquer que sous certaines conditions ; qu'il est acquis au débat que la SA BANQUE DE LA REUNION n'a pas respecté cette obligation et qu'elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle ; que la SA BANQUE DE LA REUNION est mal fondée à soutenir que cette clause ne peut ainsi être qualifiée ainsi (sic) alors qu'elle engage la SCI ACTARUS tiers au contrat et permet à la banque de s'immiscer dans sa gestion d'un compte dont elle est seule titulaire ; qu'en effet l'acte authentique de prêt a répondu à cette difficulté puisque Monsieur Z... agissant pour le compte de la SCI ACTARUS est partie au contrat par lequel il accorde sa caution hypothécaire et autorise la destination des fonds ; qu'en outre il est précisé dans l'acte d'augmentation de capital que les fonds versés provenant du financement des parts ainsi créées sont versés sur un compte capital bloqué ouvert à la SA BANQUE DE LA REUNION ; que de même il importe peu que ne soient pas énumérés de manière précise les justificatifs que la SA BANQUE DE LA REUNION doit exiger avant de débloquer les fonds, celle-ci est un professionnel et il lui appartenait de s'entourer des précautions utiles pour s'assurer de leur destination ; qu'enfin la SA BANQUE DE LA REUNION ne peut soutenir que cette clause était soumise à la condition suspensive du commencement des travaux et qu'elle s'est trouvée éteinte du fait de l'abandon de l'opération ; qu'en effet l'examen attentif de la clause fait de l'avancement des constructions non pas une condition suspensive de son obligation mais la condition nécessaire au déblocage des fonds versés sur le compte capital de la SCI ACTARUS ; que la décision sera donc confirmée en ce qu'elle a retenu la responsabilité de la banque » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE, aux termes du jugement entrepris, « ces dispositions contractuelles créent donc des obligations à la charge du prêteur, mandaté par l'emprunteur pour se libérer du versement des fonds entre les mains d'un tiers (la SCI ACTARUS), sous les conditions qu'elles énoncent ; que dès lors, la BANQUE DE LA REUNION ne peut prétendre que cette clause, qu'elle qualifie « d'emploi des fonds », était stipulée dans son seul intérêt sauf à tomber sous le coup des dispositions de l'article 1174 du Code civil du fait de son caractère potestatif ; que de plus, le fait que celle-ci figure dans l'article du contrat consacré aux « Garanties » ne permet pas d'occulter son utilité également pour l'emprunteuse, puisque tant cette dernière que le prêteur avaient intérêt à s'assurer de la libération des fonds au fur et à mesure de l'avancement des travaux, la réalisation de ces derniers étant la destination finale de l'emprunt ; que cette analyse n'est pas contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation invoquée par la défenderesse ; qu'en effet, les cas d'espèce cités par cette dernière démontrent que la responsabilité de la banque ne peut pas être recherchée par les destinataires finals des fonds, au seul motif que celle-ci s'en est libérée entre les mains de l'emprunteur, alors qu'elle avait la possibilité de s'assurer d'un emploi des fonds conforme à leur destination ; qu'or au cas présent, la SCI ACTARUS ne reproche pas à la banque d'avoir versé les fonds directement entre les mains de Madame Y..., en alléguant le fait que celle-ci ne les lui aurait pas remis en exécution de son obligation de souscrire à son capital ; qu'au contraire, la Banque a remis les fonds directement entre les mains de leur utilisatrice finale (la SCI ACTARUS), sans respecter les obligations contractées à l'égard de sa cliente et cocontractante, seule bénéficiaire des fonds ; que par ailleurs, il n'est pas contesté que la SCI ACTARUS, à qui la totalité des fonds empruntée par Madame Y... a été remise dès le 29 décembre 2005, selon l'attestation de la BANQUE DE LA REUNION versée aux débats, n'a pas réalisé les travaux de construction prévus ; que par courrier adressé le 21 janvier 2008 à la requérante, cette société confirmant l'abandon du projet immobilier, s'est proposée de racheter l'intégralité de ses parts sociales, au montant du nominal souscrit, soit la somme de 144.500 euros ; que cependant, il résulte des pièces du dossier que la SCI ACTARUS ne s'est jamais acquittée de cet engagement, son gérant ayant été de surcroît, dans l'intervalle, mis en examen des chefs d'abus de confiance et d'escroquerie ; qu'il en résulte donc que la BANQUE DE LA REUNION, en méconnaissant les clauses susvisées du contrat de prêt consenti à la requérante, a engagé sa responsabilité contractuelle sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du Code civil, de sorte que, subséquemment, ses demandes reconventionnelles seront rejetées » ;
ALORS en premier lieu QUE la clause de « BLOCAGE DES FONDS » stipulée dans l'acte de prêt du 28 décembre 2005, bien que mentionnée à deux reprises, page 3 et page 10 de l'acte, était chaque fois clairement et précisément insérée au sein des « GARANTIES » accordées à la banque, parmi lesquelles figuraient également la « Promesse de cautionnement hypothécaire de la SCI ACTARUS » et l' « engagement de domicilier les loyers », ainsi qu'il est chaque fois rappelé à titre liminaire page 3 et page 9 du contrat ; qu'en jugeant que la clause de « Blocage du compte capital qui sera libéré au fur et à mesure de l'avancement des travaux » avait « été exigée de la banque comme en fait foi le courrier qu'elle avait adressé le 9 décembre 2008 au notaire chargé de rédiger l'acte » (arrêt, p.7§3) et qu'il n'est « pas douteux qu'une telle clause d'« emploi des fonds », non complétée par la clause d'affectation des fonds précitée, n'offre qu'une garantie à la banque et ne mettrait pas à sa charge une obligation » (ibid. §4), mais qu'il existerait en l'espèce une seconde clause « BLOCAGE DU COMPTE CAPITAL », distincte, qui ne serait pas stipulée parmi les « GARANTIES » octroyées à la banque, la cour d'appel a dénaturé le contrat de prêt du 28 décembre 2005, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
ALORS en deuxième lieu QU'en tout état de cause, en donnant à la même garantie stipulée au bénéfice de la banque deux sens opposés, à savoir d'une part une clause « d'emploi des fonds » n'offrant par elle-même « qu'une garantie à la banque » et ne mettant « pas à sa charge une obligation » (arrêt, p.7), et d'autre part une clause d' « affectation des fonds » qui engagerait la même banque « formellement à garder les fonds sur un compte bloqué appartenant à la SCI ACTARUS et à les débloquer au fur et à mesure de la réalisation des travaux » (arrêt, p.6), la Cour d'appel a affecté sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS en troisième lieu QUE la clause de blocage des fonds stipulée au sein des « GARANTIES » accordées à la banque prévoyait que leur déblocage s'effectuerait « sur production de tous justificatifs demandés par le PRETEUR » (acte de prêt, p.10), sans qu'aucune liste de ces justificatifs ne soit imposée audit prêteur par l'acte de prêt, et que ce dernier stipulait par ailleurs une exigibilité anticipée du remboursement « au cas où l'EMPRUNTEUR ne serait pas en mesure de justifier à la BANQUE, à première demande de celle-ci, du bon emploi des fonds qui lui ont été remis » (acte de prêt, p.7) ; qu'en jugeant que la clause « d'affectation » des fonds, qui laissait la demande de justificatifs évoquée à la discrétion de la banque et dont la méconnaissance par l'emprunteur permettait à ladite banque de prononcer l'exigibilité anticipée du remboursement du prêt, pourrait avoir imposé une obligation à celle-ci, la cour d'appel a dénaturé le contrat de prêt du 28 décembre 2005, violant ainsi l'article 1134 du Code civil ;
ALORS en quatrième lieu QU'en tout état de cause, en jugeant qu'il « importe peu que ne soient pas énumérés de manières précise les justificatifs que la SA BANQUE DE LA REUNION doit exiger avant de débloquer les fonds » (arrêt, p.8§1), tout en considérant qu'il serait « acquis au débat que la SA BANQUE DE LA REUNION n'a pas respecté cette obligation » de demander des justificatifs avant de débloquer les fonds (ibid. p.7, antépénultième §), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ;
ALORS en cinquième lieu QU'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, que la BANQUE DE LA REUNION ne peut prétendre que la clause de blocage des fonds était stipulée dans son seul intérêt « sauf à tomber sous le coup des dispositions de l'article 1174 du Code civil du fait de son caractère potestatif » (jugement, p.4§1), sans rechercher, comme il lui était demandé, si cette clause constituait une obligation ou un droit discrétionnaire pour la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1174 du Code civil ;
ALORS en sixième lieu QU'en jugeant, par motifs éventuellement adoptés, que « le fait que (la clause) figure dans l'article du contrat consacré aux « Garanties » ne permet pas d'occulter son utilité également pour l'emprunteuse, puisque tant cette dernière que le prêteur avaient intérêt à s'assurer de la libération des fonds au fur et à mesure de l'avancement des travaux, la réalisation de ces derniers étant la destination finale de l'emprunt » (jugement, p.4§1), sans avoir égard à l'accord de volonté des parties lors de la conclusion du contrat, qui seule faisait la loi de celles-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la BANQUE DE LA REUNION de sa demande reconventionnelle ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « la SA BANQUE DE LA REUNION soutient que Régine Y... épouse X... en sa double qualité d'emprunteuse et d'associée s'est abstenue d'exercer les contrôles de base qu'imposait cette double qualité et ne lui a pas permis de disposer de sa garantie hypothécaire pour réclamer la réparation de son préjudice qu'elle fixe à un montant de 25.000 € ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que ce n'est qu'à compter du 1er octobre 2007 que Régine Y... épouse X... par l'intermédiaire de son conseiller fiscal s'est enquis du devenir de l'opération ; qu'elle ne justifie pas, par ailleurs, avoir usé des dispositions légales et contractuelles lui permettant de surveiller le fonctionnement de la SCI ACTARUS dont elle était pourtant associée ; que ce comportement qui peut être qualifié de négligeant n'a toutefois concouru en aucune manière au préjudice que pourrait invoquer l'établissement financier quant à la perte de sa garantie hypothécaire alors qu'il est acquis au débat que dès la signature de l'acte de prêt, Régine Y... épouse X... a été dessaisie des fonds empruntés sur lesquels elle n'a conservé aucune maîtrise ; que la SA BANQUE DE LA REUNION sera déboutée de sa demande reconventionnelle » ;
ALORS QU'en jugeant que Madame Y..., malgré son comportement négligeant consistant à ne s'être enquis du devenir de l'opération que deux après l'octroi du prêt, sans justifier avoir jamais usé des dispositions légales et contractuelles lui permettant de surveiller le fonctionnement de la SCI ACTARUS dont elle était pourtant associée, n'avait causé aucun préjudice à la BANQUE DE LA REUNION, au motif que dès la signature de l'acte de prêt elle a été dessaisie des fonds empruntés sur lesquels elle n'a conservé aucune maîtrise, sans vérifier, comme il lui était demandé, si Madame Y..., qui avait l'obligation contractuelle de veiller au bon emploi des fonds prêtés, n'avait pas laissé le gérant « agir à sa guise, en toute liberté et en violation des règles légales et statutaires primaires » (conclusions de la BANQUE DE LA REUNION, p.29), permettant ainsi audit gérant de détourner les fonds litigieux sans que les travaux qu'ils étaient censés financer n'aient jamais été commencés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-20328
Date de la décision : 13/12/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 16 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 déc. 2016, pourvoi n°12-20328


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:12.20328
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