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07/12/2016 | FRANCE | N°15-22395

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2016, 15-22395


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2015), que M. X... a été engagé le 1er mai 2006 par la société Raymond James international, en qualité de « Sales Trader », que licencié pour faute grave le 29 décembre 2008, il a, le 20 décembre 2011, saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir un rappel de prime, des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et le paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; que par jugement du 4 octobre 2012

, le conseil des prud'hommes a requalifié le licenciement pour faute grave...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 mai 2015), que M. X... a été engagé le 1er mai 2006 par la société Raymond James international, en qualité de « Sales Trader », que licencié pour faute grave le 29 décembre 2008, il a, le 20 décembre 2011, saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir un rappel de prime, des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et le paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; que par jugement du 4 octobre 2012, le conseil des prud'hommes a requalifié le licenciement pour faute grave de M. X... en licenciement pour cause réelle et sérieuse, condamné la société Raymond James international à lui verser des sommes au titre de la rupture et l'a débouté de ses autres demandes ; que par arrêt du 27 mai 2015, la cour d'appel de Paris a réduit la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement ;

Sur les premier et troisième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il convient de donner acte à la société Raymond James euro equities de son acquiescement au jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 6 581, 04 euros au titre de l'indemnité de licenciement due au salarié, et à celui-ci de ce qu'il accepte cet acquiescement, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer expressément sur ce moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi sur le premier et le troisième moyens ;
Donne acte à la société Raymond James equities de son acquiescement au chef du dispositif du jugement critiqué par le deuxième moyen, la condamnant au paiement de la somme de 6 581, 04 euros au titre de l'indemnité de licenciement due au salarié, et à celui-ci de ce qu'il accepte cet acquiescement, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de rappel de primes de M. X... et sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le rappel de primes ; qu'il résulte du principe " à travail égal, salaire égal ", dont s'inspirent les articles L. 1242-14, L. 1242-15, L. 2261-22. 9, L. 2271-1. 8° et L. 3221-2 du code du travail, que tout employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale ; que sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L. 3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ; qu'en application de l'article 1315 du code civil, s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe " à travail égal, salaire égal " de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence ; que M. X... soutient avoir reçu des primes nettement inférieures à celles de M. Y... en 2006, 2007 et 2008, alors qu'ils exerçaient exactement les mêmes fonctions, et qu'il bénéficiait d'un niveau d'études supérieur à celui de M. Y... ; qu'il convient de relever que la société Raymond James International ne conteste pas avoir versé des primes plus importantes à M. Y... qu'à M. X... ; qu'elle fait toutefois valoir que la différence de rémunération entre les deux salariés repose sur des critères objectifs, dès lors que M. Y... avait six ans d'ancienneté de plus que M. X..., et avait la responsabilité effective du Sales Trading, exerçant en outre des fonctions de courtier, ce qui n'était pas le cas de M. X... ; qu'il ressort des contrats de travail des deux salariés que M. Y... a été engagé en 2000 alors que M. X... ne l'a été qu'en 2006, à des fonctions différentes ; qu'aucune des pièces versées aux débats ne permet d'établir qu'ils exerçaient le même travail ou un travail de valeur égale ; qu'il n'est donc pas établi que la société Raymond James International a violé le principe " à travail égal, salaire égal " ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de rappel de primes ; que sur les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, M. X... soutient que la société Raymond James International a manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail en le rémunérant moins que M. Y... ; qu'il ajoute qu'il appartenait à son employeur, conformément à l'usage en vigueur, de se charger du maintien de ses examens, et notamment de son enregistrement au sein du FSA ; qu'il convient de relever que M. X... ne justifie pas de l'usage qu'il invoque ; que dans ces conditions, et compte tenu des développements qui précèdent quant à la différence de rémunération avec M. Y..., M. X... sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE pour faire état d'une discrimination salariale pratiquée à son encontre, M. X... fait référence au cas de M. Y... ; qu'il indique que celui-ci était son binôme, qu'il accomplissait le même travail que lui mais n'a perçu qu'une rémunération fixe annuelle inférieure (36. 000 au lieu de 50. 000 €) et n'a bénéficié en janvier 2008 que d'une prime moindre (15. 000 au lieu de 50. 000 €) ; que si la règle invoquée assure l'égalité des rémunérations aux salariés, encore faut-il que ceux-ci se trouvent placés dans une situation identique ; qu'il ressort des documents produits, que M. Y... fût recruté le 1er Avril 2000 et M. X... le 1er mai 2006, et donc accusait une ancienneté et une expérience supérieure de 6 années ; que M. Y... avait la responsabilité du Sales Trading, exerçant en outre les fonctions de broker c'est à dire de courtier, en contact direct avec les clients qui lui confient les ordres. Ce que ne faisait pas M. X... ; qu'il est titulaire du diplôme de courtier américain (pièce 20). Ce que n'avait pas M. X... ; que M. Y... exerce ses fonctions avec une autonomie que ne possède pas M. X... et s'est vu confier la mise en place du système informatique de passation des ordres (pièce 20) ; qu'il résulte de ces différents éléments que les situations de Messieurs Y... et X... étaient loin d'être identiques ; qu'il ne sera pas fait droit à ce premier chef de demande ;
1°) ALORS QUE s'il appartient au salarié qui invoque une violation du principe d'égalité de traitement de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de traitement en matière de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; qu'au cas d'espèce, M. X... faisait valoir qu'il avait été victime, entre 2006 et 2008, d'une inégalité de traitement par rapport à M. Y..., également sales trader au sein de la société Raymond James International, qui s'était traduite par l'octroi de primes annuelles au bénéfice de ce dernier d'un montant nettement supérieur aux siennes ; que les juges du fond ont constaté cette différence du niveau de prime ; qu'en déboutant pourtant le salarié de sa demande de rappel de primes, au motif que l'intéressé n'établissait pas que l'employeur avait violé le principe « à travail égal, salaire égal », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le principe sus-évoqué, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre salariés pour un même travail ou un travail de valeur égale ; que l'expérience professionnelle et la qualification d'un salarié ne peuvent justifier une différence de salaire que pour autant qu'elles sont en relation avec les exigences du poste dévolu et les responsabilités effectivement exercées ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de sa demande de rappel de primes, la cour d'appel a estimé qu'il ressortait « des contrats de travail des deux salariés que M. Y... a été engagé en 2000 alors que M. X... ne l'a été qu'en 2006, à des fonctions différentes » (arrêt, p. 3) ; qu'en statuant ainsi, sans expliquer en quoi l'ancienneté constatée et la qualification mentionnée dans les deux contrats de travail étaient susceptibles de justifier une différence de rémunération entre les deux sales trader, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
3°) ALORS QUE l'inégalité de traitement peut se manifester par une différence de traitement par rapport à d'autres salariés placés dans une situation identique ou comparable au regard du travail effectué ; qu'en l'espèce, M. X... soutenait que les fonctions de « Broker », c'est-à-dire de courtier, de M. Y... étaient également les siennes puisqu'en sa qualité de « Sales Trader », il avait pour mission de renseigner les clients et de passer et transmettre les ordres (conclusions d'appel du salarié, p. 12 et 13) ; qu'il précisait, à cet égard, que le vocable « Broker » désigne un corps de métier, celui d'intermédiaire financier, lequel inclut à la fois les fonctions de « Sales », de « Sales Trader » et d'« Analyste financier », ainsi que l'atteste au demeurant la description faite de ces fonctions par le site de l'AGEFI, référence française en matière de finance, de sorte que les fonctions de " Sales Trader " et de " Broker " ne sont aucunement opposables ; qu'en déboutant néanmoins M. X... de sa demande de rappel de primes au motif que M. Y... exerçait « en outre des fonctions de courtier » (arrêt, p. 3 et jugement, p. 5) et ce, sans s'expliquer comme elle y était invitée sur ce point déterminant du litige mis en avant par l'exposant et touchant à la teneur de ses fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
4°) ALORS QUE l'inégalité de traitement peut se manifester par une différence de traitement par rapport à d'autres salariés placés dans une situation identique ou comparable au regard du travail effectué ; qu'en rejetant, en l'espèce, la demande de rappel de primes de M. X... au motif adopté des premiers juges que M. Y... était titulaire du diplôme de courtier américain que n'avait pas M. X..., sans prendre en considération que ce diplôme n'avait de valeur que pour les Etats-Unis, et que l'exposant était lui-même titulaire du diplôme équivalent FSA lequel lui permettait d'exercer en Europe continentale, quel que soit le marché, de sorte que l'absence de possession du diplôme de courtier américain importait peu, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a, ce faisant, privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » ;
5°) ALORS QUE l'inégalité de traitement peut se manifester par une différence de traitement par rapport à d'autres salariés placés dans une situation identique ou comparable au regard du travail effectué ; qu'en rejetant, en l'espèce, la demande de rappel de primes de M. X..., au motif que M. Y... exerçait ses fonctions avec autonomie et avait la responsabilité effective du sales trading (arrêt, p. 3 et jugement, p. 5) sans prendre en compte, ainsi que le faisait expressément valoir l'exposant, le fait que M. Y... n'avait pas, contrairement à lui, le statut de cadre et qu'il ne l'avait finalement obtenu qu'après son départ de la société (cf. conclusions d'appel oralement soutenues de M. X..., p. 15), de sorte que l'autonomie ou les responsabilités de M. Y... ne pouvaient, en soi, suffire à exclure l'existence d'une inégalité de traitement entre les deux salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard du principe « à travail égal, salaire égal ».
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité le montant de l'indemnité de licenciement de M. X... à la somme de 2. 444, 80 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en ce qui concerne l'indemnité de licenciement, il ressort du contrat de travail de M. X... que celui-ci est soumis aux dispositions du code du travail, en l'absence de convention collective régissant l'activité de la société ; que cette indemnité doit donc être fixée, en application de l'article R. 1234-2 du code du travail, à la somme de 2. 444, 80 € ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE sur la convention collective applicable ; que la question de la détermination de la Convention Collective applicable devient ainsi sans objet ; que M. X... sera débouté de ce chef ;
1°) ALORS QU'il incombe au juge de rechercher si au regard de l'activité principale de l'entreprise, celle-ci entre dans le champ d'application de la convention collective étendue dont se prévaut le salarié ; qu'en déboutant pourtant, en l'espèce, M. X... de sa demande d'indemnité de licenciement telle que fixée par la convention collective étendue « Bourse » dont il se prévalait à raison de l'activité principale exercée par la société Raymond James International, au prétexte que le contrat de travail du salarié mentionnait l'absence de convention collective régissant l'activité de la société et la soumission de l'intéressé aux dispositions du code du travail (arrêt, p. 5), la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 2261-2 du code du travail, ensemble le principe de faveur ;
2°) ALORS QU'il incombe aux juges du fond de rechercher, au regard de l'activité principale exercée, la convention collective applicable, au besoin en invitant les parties à fournir à ce sujet les explications qu'ils estiment nécessaires ; qu'au cas d'espèce, M. X... faisait valoir que l'activité principale de la société Raymond James International étant directement liée aux marchés boursiers, la convention collective « Bourse » du 26 octobre 1990, étendue par un arrêté du 21 février 1991, devait lui être appliquée, cependant que la société soutenait, pour sa part, que si une convention collective devait recevoir application, ce serait celle des sociétés financières et non pas celle de la bourse (conclusions d'appel oralement soutenues de l'exposant, p. 18 et de la société, p. 21), M. X... rétorquant que cela ne modifiait pas ses droits dès lors que cette convention collective était au moins aussi favorable ; qu'en se fondant uniquement sur le contrat de travail du salarié qui stipulait que « le présent contrat est soumis aux dispositions du code du travail en l'absence de convention collective régissant notre activité » pour écarter l'applicabilité de toute convention collective, sans procéder aux recherches qu'appelaient les prétentions des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, au regard des dispositions de l'article L. 2261-2 du code du travail, ensemble au regard du principe de faveur.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de M. X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour exécution déloyale du contrat de travail ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur le licenciement ; que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis ; que l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve ; qu'aux termes de la lettre de licenciement, il est reproché à M. X..., malgré la notification les 15 décembre 2006 et ter octobre 2008 de deux avertissements antérieurs pour des incidents survenus en 2006 et le 29 septembre 2008 (en procédant à la vente de titres de la Time Warner sans respecter les consignes données par l'un des plus importants clients de la société, ce qui a entraîné une perte financière importante), d'avoir commis les faits suivants : " Le 29 octobre 2008, vous avez commis une nouvelle erreur totalement inacceptable de la part d'un opérateur financier ayant plus de deux ans d'expérience. En effet, l'un de nos principaux clients nous a communiqué un ordre écrit consistant en la vente de 44. 400 titres d'une société cotée sur le marché américain. Loin de vendre les 44. 400 titres qui vous étaient confiés, vous en avez acheté 22. 700 ! Sans l'intervention de l'un de nos collaborateurs qui vous a alerté sur votre erreur, vous auriez exécuté la totalité de l'ordre aggravant encore les pertes. Afin de pallier à votre nouvelle erreur, la société Raymond James International s'est donc retrouvée dans l'obligation de vendre 67. 100 titres. Les 22. 700 premiers ont été vendus à 16, 11 $ et les 44. 400 suivants à 15, 6690 $. Le montant total de la perte occasionnée par votre erreur est de 19. 769, 71 $. Ces faits sont totalement inadmissibles. Vous ne pouvez en aucun cas soutenir que les consignes n'étaient pas claires puisqu'elles vous ont été communiquées par écrit. Les conséquences financières de vos erreurs commises au cours des mois de septembre et d'octobre sont particulièrement lourdes puisqu'elles aboutissent à des pertes sèches qui dépassent les 40. 000 $ et ce, en moins de 30 jours. Elles portent gravement atteinte à l'image de marque de la société Raymond James International. Nous ne pouvons admettre, à moins d'un mois d'intervalle, deux erreurs de ce type ayant occasionné des pertes financières importantes. Le fait que vous n'ayez pas été en mesure de tenir compte des avertissements préalables qui vous ont été notifiés, l'augmentation de l'importance et de la fréquence de vos erreurs, les pertes occasionnées par votre attitude négligente rendent impossible le maintien du contrat de travail y compris en cours de préavis. " ; que M. X... soulève la prescription des faits du 29 septembre 2008, et souligne en outre qu'ils ont déjà été sanctionnés par un avertissement ; qu'il convient toutefois de relever que les faits du 29 septembre 2008 ne sont visés dans la lettre de licenciement que comme un élément de contexte, afin de souligner que les faits du 29 octobre 2008 ont été commis alors que M. X... avait déjà été rappelé à l'ordre et sanctionné pour des erreurs de même nature, répétant ainsi le comportement fautif allégué ; que les faits du 29 septembre 2008 ne constituent donc pas le motif du licenciement ; qu'en ce qui concerne les faits du 29 octobre 2008, la société Raymond James International verse aux débats un document non daté, dont elle indique qu'il s'agit de l'ordre du client du 29 octobre 2008. Elle communique en outre la fiche d'erreur rédigée par M. X... le 29 octobre 2008, qu'il a signée ainsi que Mme Z..., dont il ressort qu'il reconnaît ne pas avoir vu que l'ordre du client était de vendre 44. 400 titres, jusqu'à ce que celui-ci l'avertisse de son erreur alors qu'il avait déjà acheté 22. 700 titres, de sorte que 67. 100 titres ont dû être vendus, à un prix qui a été accepté par le client, entraînant une perte de 19. 769, 71 $ ; qu'il convient de relever que M. X... ne conteste pas l'erreur alléguée, mais soutient que les erreurs de bourse sont fréquentes, que les autres Sales Traders en commettent également, et affirme avoir respecté la procédure en place au sein de la société concernant ces erreurs ; qu'il ressort de la liste des erreurs commises en 2008, produite par la société Raymond James International et non remise en cause par M. X... quant à son contenu, que s'il n'est pas le seul auteur des erreurs de bourse cette année-là, les siennes sont les plus importantes en terme de pertes occasionnées, et en particulier celle du 29 octobre 2008 ; qu'il est par ailleurs établi que M. X... avait été rappelé à l'ordre à deux reprises sur ses erreurs de bourse, se voyant notifier un avertissement le 15 décembre 2006 pour des faits des 8 et 13 novembre 2006 ayant entraîné des pertes de 2. 282 $ et 4. 444 $, et un autre le 14 octobre 2008 pour des faits du 29 septembre 2008 ayant entraîné une perte de 15. 000 $ ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. X... a commis le 29 octobre 2008 une faute qui a eu des conséquences financières importantes pour la société ainsi qu'une perte de crédibilité auprès du client concerné, susceptible de justifier la mesure de licenciement ; que la faute grave étant toutefois celle qui rend nécessaire le départ immédiat du salarié, la mise en oeuvre de la procédure doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs allégués et dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire ; qu'en l'espèce, il est établi et non contesté que les faits fautifs ont été portés à la connaissance de l'employeur dès le 29 octobre 2008, que celui-ci n'a déclenché la procédure de licenciement que le 4 décembre 2008, et ne démontre pas que ce délai de plus d'un mois était nécessaire pour effectuer quelque vérification que ce soit ; qu'en effet, le montant des pertes notamment était connu dès le 29 octobre 2008 dès lors qu'il figurait sur la fiche d'erreur précitée ; qu'il en résulte que la faute visée dans la lettre de licenciement n'était pas de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la période de préavis ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE sur la rupture du contrat de travail ; que la lettre de licenciement du 29 décembre 2008, qui fixe les limites du débat fait état d'incidents qui se sont déroulés aux mois de février, avril, mai, juillet 2008 et de la délivrance d'un avertissement le 14 octobre 2008 ; qu'il est reproché au salarié d'avoir le 29 septembre 2008, enfreint d'exécuter de façon convenable, l'ordre donné par un client, de vendre 155. 000 titres de la Société TIME WARNER à 20 % du volume. Que ce manquement a contraint la société Raymond James International, le titre ayant baissé, à assumer le remboursement de la perte financière subie par le client (15. 744, 55 $) et la perte de courtage (4. 299 $) ; qu'il lui est aussi fait reproche d'avoir, le 29 octobre 2008, (moins d'un mois après), commis une nouvelle faute en procédant à l'achat de 22 700 titres alors que le client avait donné l'ordre de vendre 44. 000 de ces titres ce qui a contraint la Société de vendre 67. 100 titres subissant une perte financière de 19. 769, 71 $ ; que M. X..., sans contester la réalité de ces faits, plaide que les pertes alléguées sont infimes au regard des sommes qu'il manipulait chaque jour dans le cadre de ses fonctions et que ces erreurs sont courantes dans l'activité de sales trader ; que de tels faits, à les considérer comme de simples erreurs, ont indiscutablement causé à la Société un préjudice financier et de prestige certain ; qu'en vain M. X... arguerait-il avoir dans le passé eu ses compétences reconnues par la profession, alors que c'est justement en raison de ce savoir-faire que la Société lui a confié les opérations dont s'agit, en espérant qu'elles ne se terminent pas par un résultat calamiteux ; que la société était tout naturellement en droit d'attendre d'un tel collaborateur cadre et émargeant à un niveau élevé, une attention et un professionnalisme plus avérés ; qu'il appert des éléments versés aux débats et notamment d'un tableau des erreurs année 2008, (pièce 15 en défense), que sur 36 erreurs produites les 10 premiers mois de l'année, M. X... est à l'origine de 11 d'entre elles, soit 30 % à lui seul ; que l'avertissement délivré le 14 octobre 2008 peu de temps au paravent ne semble pas avoir été suivi d'effet ; que la société n'avait donc aucune autre alternative que de se séparer de son collaborateur ; attendu cependant que si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, il n'en demeure pas moins que la faute grave ne saurait être retenue en raison de la reconnaissance par l'employeur lui-même de l'éventualité d'erreurs dans la transmission des ordres, surtout dans une période de fortes tensions monétaires ;
1°) ALORS QU'il appartient au juge de rechercher au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement du salarié ; qu'en l'espèce, M. X... faisait observer que l'erreur commise dans le passage d'un ordre, à l'origine de son licenciement, s'était produite dans un contexte de crise des marchés financiers sans précédent, se traduisant par un regain de stress, la nécessité de réaction immédiate et une fébrilité sur toutes les places boursières ; qu'il ajoutait que ce genre d'erreurs de bourse commises par les sales traders était extrêmement fréquent, y compris sein de la société et n'avait pas empêché son classement parmi les meilleurs Sales Traders en Europe, selon le classement EXTEL 2010 établi par les clients eux-mêmes ; qu'il soutenait, enfin, que les prétendues pertes qui lui étaient reprochées étaient infimes au regard des sommes qu'il manipulait chaque jour dans le cadre de ses fonctions ; qu'il en déduisait ainsi que le véritable motif de son licenciement était en réalité directement causé par ses revendications salariales courant 2008, la société s'étant « en réalité servie de ces erreurs, qu'elles savaient minimes et inévitables, pour licencier un salarié dont elle voulait se séparer à moindre frais. En témoigne la présence de Mme Julie A..., toujours en poste au sein de la société, qui a commis en 2006 une erreur de bourse ayant fait perdre plus de 100. 000 € à la société » (conclusions d'appel du salarié, p. 10 à 12) ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si la véritable cause de licenciement du salarié n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail.
2°) ALORS QUE l'employeur épuise son pouvoir disciplinaire en sanctionnant des faits considérés comme fautifs ; que s'il peut prendre en considération une sanction précédente à l'appui d'une nouvelle sanction en cas de poursuite ou de réitération du comportement précédemment sanctionné, il ne peut en revanche sanctionner ce comportement même une seconde fois ; qu'en l'espèce, il ressortait des termes de la lettre de licenciement, rappelés par la cour d'appel, que le licenciement était fondé sur « les conséquences financières des erreurs commises au cours des mois de septembre et octobre », et sur le fait que l'employeur ne pouvait admettre des erreurs ayant occasionné « des pertes financières importantes » portant gravement atteinte à l'image de marque de la société ; qu'en affirmant que l'employeur n'avait fait là que prendre en compte les faits du 29 septembre 2008 comme un « élément de contexte » et que ces faits ne constituaient pas un motif du licenciement, quand il ressortait de ses propres constatations que la lettre de licenciement fondait la rupture sur les conséquences financières tant des faits du 29 octobre 2008 que de ceux du 29 septembre 2008, de sorte que l'employeur avait sanctionné une seconde fois ces faits ayant déjà donné lieu à un avertissement et pour lesquels il avait donc épuisé son pouvoir disciplinaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1331-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement énonçait que le licenciement était fondé sur « les conséquences financières des erreurs commises au cours des mois de septembre et octobre » ; qu'en affirmant que les faits du 29 septembre 2008 ne constituaient pas un motif du licenciement, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée de la lettre de licenciement, violant le principe susvisé, ensemble l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-22395
Date de la décision : 07/12/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2016, pourvoi n°15-22395


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.22395
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