Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 132-8 du code de commerce et l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transfret a effectué des transports de marchandises à destination de la société transport X... ; que n'ayant pas été réglée du prix du transport par l'expéditeur, mis en liquidation judiciaire, la société Transfret en a demandé le paiement à M. Thierry X..., pris en sa qualité de destinataire, contre lequel elle a obtenu une ordonnance d'injonction de payer sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce ; qu'ayant formé opposition à cette ordonnance, M. Thierry X... a contesté sa qualité de destinataire ;
Attendu que pour condamner M. Thierry X... au paiement du prix du transport, l'arrêt retient, d'abord, que les lettres de voiture mentionnaient que le destinataire était « les transports X... » à Pissy Poville, qu'ensuite, si le numéro de téléphone était celui d'un téléphone fixe correspondant à l'entreprise X..., établie à Barentin et dirigée par M. Walter X..., le second numéro était celui d'un mobile correspondant à une société X... domiciliée à Grand Quevilly et dirigée par M. Thierry X..., qui exerçait l'activité de taxi et celle de transports, et qu'enfin le transporteur ayant livré la marchandise ailleurs qu'à Barentin ou au Grand Quevilly, il ne pouvait savoir si elle avait été réceptionnée par Thierry ou Walter X..., de sorte que les lettres de voiture permettaient au voiturier de considérer que M. Thierry X... était le destinataire effectif des marchandises ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la preuve de la qualité de destinataire incombe au voiturier agissant sur le fondement de l'article L. 132-8 du code de commerce, sans que cette preuve puisse résulter du fait qu'il ignorait à qui la marchandise avait été remise, la cour d'appel, dont les constatations établissent qu'il n'existait aucune certitude quant à l'identité du destinataire, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Transfret aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Me Haas la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré la demande en paiement formée par la société Transfret recevable et bien fondée et D'AVOIR condamné M. Thierry X... à payer à la société Transfret la somme de 7. 458, 09 euros ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 132-8 du code de commerce dispose que « La lettre de voiture forme un contrat entre l'expéditeur, le voiturier et le destinataire ou entre l'expéditeur, le destinataire, le commissionnaire et le voiturier. Le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport. Toute clause contraire est réputée non écrite. » ; que l'examen des six lettres de voiture signées par la société Transfret en le 19 septembre et le 2 novembre 2011 montre que le destinataire était les transports X... à Pissy Poville et que deux numéros de téléphone étaient mentionnés, le premier étant celui d'un fixe correspondant à une entreprise X... dirigée par M. Walter X..., et domiciliée à Barantin, et le second étant celui d'un portable d'une seconde société X... domiciliée à Grand-Quevilly, effectivement dirigée par M. Thierry X... ; qu'il résulte de l'extrait du site société. com versé aux débats que M. Thierry X... exerce non seulement l'activité de taxi mais également celle de transports ; que, par ailleurs, le transporteur a livré la marchandise à Pissy Poville en un autre lieu que le siège social de ces deux sociétés ; qu'il ne pouvait donc savoir si elle a été réceptionnée par Thierry ou son frère ; que, dès lors, les lettres de voiture litigieuses permettaient au transporteur de considérer que la société Transports X... de Thierry X... était bien le destinataire effectif des marchandises ;
ALORS, 1°), QUE le transporteur doit apporter la preuve de la qualité d'expéditeur ou de destinataire de celui qu'il a assigné en garantie de paiement du prix du transport ; qu'en se déterminant par des motifs dont il ne ressort pas que l'incertitude quant à l'identité du destinataire réel des marchandises livrées-M. Walter X... ou M. Thierry X... ait été levée, la cour d'appel a violé les articles L. 132-8 du code de commerce et 1315 du code civil ;
ALORS, 2°), QUE le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport ; qu'en se fondant, pour condamner M. Thierry X... au paiement du prix des transports litigieux, sur la considération inopérante tirée de ce que les lettres de voiture permettaient au transporteur de le considérer comme le destinataire effectif des marchandises, sans rechercher si M. Thierry X... avait reçu et accepté des marchandises livrées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 132-8 du code de commerce ;
ALORS, 3°), QUE le voiturier a une action directe en paiement de ses prestations à l'encontre de l'expéditeur et du destinataire, lesquels sont garants du paiement du prix du transport ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l'entrepôt de Pissy Poville où elle constatait que les marchandises avaient été livrées, n'avait pas été donné à bail à M. Walter X... et si, par ailleurs, il existait le moindre lien entre M. Thierry X... et ce lieu de livraison, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 132-8 du code de commerce ;
ALORS, 4°), QUE le juge doit viser et analyser, même succinctement, les éléments de preuve sur lequel il se fonde ; qu'en se bornant à affirmer que le numéro de téléphone portable figurant sur la lettre de voiture était celui d'une société X... domiciliée à Grand Quevilly effectivement dirigée par M. Thierry X..., sans viser ni analyser les éléments de preuve lui ayant permis de parvenir à cette conclusion, contraire à la thèse soutenue par M. Thierry X... qui, dans ses conclusions, faisait valoir que le numéro de téléphone portable était celui de son frère, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.