LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 512-2 et D. 512-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse bénéficient des prestations familiales pour les enfants dont ils ont la charge, dès lors qu'ils sont titulaires de l'un des titres ou documents dont la liste est fixée par le second ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., de nationalité marocaine, a demandé à bénéficier des prestations familiales au titre de l'enfant Y..., né le 27 décembre 2008, dont elle a la charge effective depuis sa séparation d'avec le père de l'enfant au mois de décembre 2009 ; qu'elle a obtenu une carte de séjour temporaire le 15 février 2012 ; que la caisse d'allocations familiales de la Drôme (la caisse) lui ayant refusé le versement des prestations pour la période antérieure au mois de mars 2012, elle a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour faire droit à sa demande pour la période de juillet 2011 à février 2012, l'arrêt retient qu'en sa qualité de parent d'un enfant français mineur résidant en France, elle bénéficiait des dispositions de l'article L. 313-11, 6° du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article L. 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; que Mme X...ne saurait être victime du retard pris par les services préfectoraux à lui délivrer un titre qu'elle avait vainement sollicité depuis le 5 novembre 2009, selon les écritures mêmes de la caisse et dont elle aurait dû bénéficier de plein droit ; que Mme X...remplissant les conditions de régularité de séjour au moins depuis le mois de juillet 2011, les prestations familiales lui sont dues pour la période de juillet 2011 à février 2012 ;
Qu'en statuant ainsi alors, d'une part, que Mme X...ne justifiait pas pour la période litigieuse de l'un des titres ou documents exigés par les textes susvisés pour justifier de la régularité de son séjour, d'autre part, que la délivrance d'un titre de séjour par le représentant de l'Etat ne revêt pas un caractère recognitif, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que les droits aux prestations familiales pour Y... étaient ouverts pour la période de juillet 2011 à février 2012, et renvoyé Mme X...devant la caisse d'allocations familiales de la Drôme pour la liquidation de ses droits,
l'arrêt rendu le 8 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la caisse d'allocations familiales de la Drôme.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR " dit que les droits aux prestations familiales pour Y... étaient ouverts pour la période de juillet 2011 à février 2012 ", renvoyé Madame X...devant la Caisse d'allocations familiales de la Drôme pour la liquidation de ces droits et condamné la Caisse d'allocations familiales de la Drôme à verser une somme de 800 € au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
AUX MOTIFS QU'" il sera rappelé que le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence a été saisi d'un recours dirigé contre une décision rendue le 6 mars 2012 par la commission de recours amiable ; que selon les termes de cette décision, la commission de recours amiable avait été saisie d'une contestation portant sur " le refus d'ouverture de ses droits à l'allocation de base à compter de juillet 2011 et à la prime à la naissance en novembre 2011 " ; que lors de sa séance du 1er mars 2011, la commission de recours amiable avait rejeté un recours de Madame X...contre le refus de la Caisse de lui ouvrir " des droits à prestations à compter de décembre 2009 et notamment une aide au logement à compter de février 2010 " ; qu'il est constant que cette décision, qui n'a jamais été déférée au Tribunal des affaires de sécurité sociale, est définitive, que l'autorité attachée à ce refus interdit à Madame X...de réclamer le bénéfice de prestations familiales à compter de sa séparation d'avec le père de l'enfant Rayan, survenue en décembre 2009 ; qu'il résulte de ce qui précède que les premiers juges ne pouvaient pas accorder à Madame X...le bénéfice des prestations familiales pour l'enfant Y... " à compter du 28 décembre 2008 " ; que le jugement entrepris doit donc être infirmé ;
QUE Madame X...ne formulant aucune demande au titre d'une quelconque prime à la naissance, et la C. A. F indiquant sans être démentie par l'intimée avoir accordé le bénéfice des prestations familiales à Madame X...à compter du mois de mars 2012, il convient de retenir que le litige est circonscrit au versement de prestations familiales pour le compte de l'enfant Y... né le 27 décembre 2008, sur la période de juillet 2011 à février 2012 ;
QUE l'article L. 512-1 du Code de la sécurité sociale dispose que : " Toute personne française ou étrangère résidant en France, ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France, bénéficie pour ces enfants des prestations familiales dans les conditions prévues par le présent livre sous réserve que ce ou ces derniers ne soient pas bénéficiaires, à titre personnel, d'une ou plusieurs prestations familiales, de l'allocation de logement sociale ou de l'aide personnalisée au logement " ; que l'article L. 512-2 du Code de la sécurité sociale précise que bénéficient " de plein droit des prestations familiales dans les conditions fixées par le [livre cinquième du Code de la sécurité sociale] les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, titulaires d'un titre exigé d'eux en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux pour résider régulièrement en France " ;
QUE la liste des titres et justifications attestant de la régularité de l'entrée et du séjour des bénéficiaires étrangers annoncée par le dernier alinéa de l'article L. 512-2 est fournie par l'article D. 512-1 du Code de la sécurité sociale ; que cette liste vise notamment la " carte de séjour temporaire " ;
QU'une carte de séjour temporaire a été délivrée à Madame X...le 15 février 2012 ; que ce titre a été obtenu à la suite de la saisine par Madame X...du Tribunal administratif de Grenoble d'une demande dirigée contre le Préfet de la Drôme tendant à la délivrance des " différents titres de séjour mentions vie privée et familiale dont elle aurait dû être munie depuis sa demande " ;
QU'en sa qualité de parent d'un enfant français mineur résidant en France, Madame X...bénéficiait des dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que " la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article L. 371-2 du Code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; que Madame X...ne saurait être victime du retard pris par les services préfectoraux à lui délivrer un titre qu'elle avait vainement sollicité depuis le 5 novembre 2009, selon les écritures mêmes de la Caisse et dont elle aurait dû bénéficier " de plein droit " ;
QUE Madame X...remplissant les conditions de régularité de séjour au moins depuis le mois de juillet 2011, les prestations familiales lui sont dues pour la période de juillet 2011 à février 2012 " ;
1°) ALORS QUE bénéficient de plein droit des prestations familiales les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, " titulaires d'un titre exigé d'eux en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux pour résider régulièrement en France " ; qu'un décret fixe la liste " des titres et justifications attestant de la régularité de l'entrée et du séjour des bénéficiaires étrangers " ; que si la carte de séjour temporaire figure parmi ces titres limitativement énumérés par décret, tel n'est pas le cas des récépissés de demande de titre de séjour valant autorisation provisoire de séjour d'une durée de validité inférieure à trois mois ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision, que " Madame X...remplissant les conditions de régularité de séjour au moins depuis le mois de juillet 2011, les prestations familiales lui sont dues pour la période de juillet 2011 à février 2012 " quand il ressortait de ses propres constatations qu'une carte de séjour temporaire ne lui avait été délivrée que " le 15 février 2012 " de sorte qu'elle n'était pas titulaire, pour la période considérée, d'un des titres de séjour réguliers auxquels la loi applicable subordonne le bénéfice des prestations familiales, la Cour d'appel a violé les articles L. 512-1, L. 512-12 et D. 512-1 du Code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS QUE les titres de séjour délivrés par le représentant de l'Etat ne revêtent pas un caractère recognitif ; qu'en condamnant la Caisse d'allocations familiales de la Drôme à faire bénéficier Madame X...du paiement des prestations familiales à compter de juillet 2011, au motif inopérant que ce titre avait été obtenu le 15 février 2012 " après saisine du Tribunal administratif " et que " … Madame X...ne saurait être victime du retard pris par les services préfectoraux à lui délivrer un titre qu'elle avait vainement sollicité depuis le 5 novembre 2009, selon les écritures mêmes de la Caisse et dont elle aurait dû bénéficier " de plein droit ", la Cour d'appel a violé derechef les articles L. 512-2 et D. 512-2 du Code de la sécurité sociale.