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23/11/2016 | FRANCE | N°15-87814

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 novembre 2016, 15-87814


Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Luc X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 2015, qui, pour complicité de favoritisme, l'a condamné à 6 000 euros d'amende ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le cons

eiller PLANCHON, les observations de la société civile professionnelle MONOD, CO...

Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Jean-Luc X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 2015, qui, pour complicité de favoritisme, l'a condamné à 6 000 euros d'amende ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller PLANCHON, les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général WALLON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, des droits de la défense, des articles 121-6, 121-7, 122-2, 432-14, 432-17 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale et défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de complicité de favoritisme entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009 et l'a condamné à une amende de 6 000 euros ;
" aux motifs que l'OPHLM de l'agglomération narbonnaise gère 3 394 logements sociaux dont 90 % sur Narbonne, 80 % étant des logements collectifs et le reste des maisons individuelles ; que son statut a changé puisque d'établissement public administratif (EPA), il est devenu en août 2008 établissement public industriel et commercial (EPIC) sous le sigle Office Public de l'Habitat de la Communauté d'Agglomération de Narbonne avec pour conséquence un transfert de compétences entre le président et le directeur général lequel a obtenu les pleins pouvoirs sous contrôle du conseil d'administration qui détermine la politique générale mise en oeuvre par le directeur général ordonnateur des dépenses et recettes ; qu'avant cette date c'était le président du conseil d'administration qui pouvait engager l'OPHLM ; que l'année 2008 a également marqué un changement de municipalité à Narbonne ; que M. Serge Y..., nouveau directeur de l'OPHLM au 1er mars 2010 et ancien directeur général adjoint à la communauté d'agglomération du grand Narbonne, dénonçait dans le cadre de l'article 40 du code de procédure pénale les graves irrégularités ayant présidé à l'exécution des marchés de l'Office sans mise en concurrence et sans formalisme prévus par le code des marchés publics pour les marchés à procédure adaptée et pour les appels d'offres ; que le marché à procédure adaptée (MAPA) qui se situe entre un seuil qui exclut toute procédure et un seuil nécessitant un appel d'offre (210 000 euros HT), est fixé par l'article 28 du code des marchés publics et oscille entre 4 000 euros et 15 000 euros ; que c'est un marché à la demande avec une publicité préalable et avec obligation de faire appel à la concurrence par voie de presse ; qu'il doit être répondu aux offres des entreprises dans un délai supérieur à dix-huit jours, offres qui sont adressées sous plis cachetés, un bon de commande est ensuite passé avec la « mieux disante » choisie en fonction de trois critères essentiels : le prix, le délai et la valeur technique ; qu'à partir du 1er janvier 2009 le seuil du MAPA est passé à 20 000 euros ; qu'en deçà de ces seuils il n'y a aucune mise en concurrence obligatoire, mais que pour l'OPH ce type de marché était marginal car les montants des travaux engagés par l'Office étaient très importants ; que lorsque l'évaluation du montant exact des travaux ne peut être faite, une estimation doit cependant avoir lieu pour savoir si le marché doit être passé sous forme d'un MAPA ou avec un appel d'offre et l'entreprise choisie se voit délivrer un bon de travaux pour chacune de ses interventions ; que M. Y... dénonçait l'absence de référence à un quelconque marché tant sur les factures des entreprises que sur les bons de commande et constatait que les contrats avaient été reconduits de manière tacite comme dans le privé ; qu'au vu des factures remises par ce dernier dans le cadre de sa plainte, le SRPJ de Montpellier établissait deux tableaux récapitulatifs des dépenses engagées par l'OPHCAN pour les années 2007 et 2009, hors procédure de marchés publics, dont le montant était pour les factures 2007 de 1 114 293, 30 euros et pour les factures 2009 de 768 233, 06 euros total résultant de l'addition des différents postes de dépenses par corps d'état ; qu'il était notamment relevé que la société Z..., qui avait fait l'objet d'un article 40, en date du 20 octobre 2011, de la part de M. Y... avait réalisé en 2009 des travaux hors marché à hauteur de 80 000 euros avec cette précision que Mme Sophie Z..., la gérante, avait été de 2007 à 2010 l'assistante de M. Eric A..., responsable des services technique de l'Office et que la fille de cette dernière vivait chez elle en couple avec le fils de M. Y... ; que l'absence de marchés publics dénoncée par M. Serge Y...concernait aussi le secteur des assurances le parc de l'OPH étant assuré principalement par Swiss Life et Axa dans le cadre d'une relation commerciale reconduite tacitement depuis 1970, celui des ascenseurs, le parc des trente-neuf ascenseurs étant scindé en deux lots en fonction des marques (Otis et Schindler) indépendamment des critères de valeur technique ; que concernant le marché public de maîtrise d'oeuvre « Résidence le hameau des Roches grises », un MAPA avait été passé en octobre 2009, marché qui aurait dû faire l'objet d'un appel d'offre car le montant des honoraires de l'architecte choisi M. Thierry C...dépassait le seuil de 210 000 euros HT pour s'élever à 312 000 euros HT ; qu'il apparaissait de l'enquête que M. C...avait été choisi en amont du lancement du marché public et que c'était M. D...président de l'OPH qui l'avait expressément désigné pour réaliser l'étude de faisabilité que l'architecte avait effectuée à titre gratuit, des correspondances entre eux deux étaient saisis sur leurs boîtes mail personnelles ; que les quatre autres candidats à ce marché indiquaient ne pas avoir été sollicités par l'Office avant l'appel public à la concurrence pour effectuer cette étude de faisabilité qui préludait de façon quasi obligatoire à l'obtention du marché ; que lors de l'exploitation des factures, les enquêteurs constataient qu'un certain nombre d'entreprises intervenaient fréquemment pour des montants cumulés sur une année, dépassant le seuil bas des MAPA et sans que cette procédure ait été mise en oeuvre, ce que confirmait l'audition de MM. E...et H...du service technique ; que M. Serge Y...expliquait qu'il n'avait pas fait de recherches pour l'année 2008 car il était très difficile de déterminer les responsabilités de chacun du fait de l'alternance politique à la mairie de Narbonne et du fait que, de janvier à mars 2008, c'était le maire F...qui était président de l'Office détenant les pouvoirs exécutifs, alors que le directeur, en l'espèce M. X..., n'était garant que la bonne marche administrative ; qu'en revanche, à partir du 1er septembre 2008, M. X..., désigné directeur général par le conseil d'administration détenait le pouvoir exécutif de l'Office ; que, selon M. Y..., M. Eric A...responsable des services techniques et M. X... étaient seuls compétents en matière de marchés publics ; qu'il mettait en cause la gestion de M. X... qui n'avait pas perçu les 900 000 euros de subventions accordées à l'Office et faisait état du conflit entre MM. D...et X... qui avait amené ce dernier à démissionner en février 2010, date où M. Y... avait pris sa place ; que MM. A...et Michel E..., techniciens, passaient les marchés publics, ils étaient sous la hiérarchie de M. X... à qui ils soumettaient les travaux pour qu'il donne son aval ce que, selon eux, ce dernier faisait systématiquement ; que M. Jacques
H...
chef de travaux à l'OPH, travaillait comme M. E...sous la hiérarchie directe de M. A..., qu'il reconnaissait qu'il ignorait ce qu'étaient les MAPA et les marchés à bons de commande n'ayant jamais eu de formation dans ce domaine, sauf en 2009 où M. X... lui avait proposé de suivre une formation avec l'arrivée d'un nouveau logiciel ; qu'il ajoutait qu'à partir de 2007 chacun pouvait éditer les bons de commandes et que de nombreuses interventions ne faisaient l'objet d'aucun marché public ; que, placé en garde à vue, M. A..., technicien territorial principal entré à l'OPH en 2001, disait avoir agi avec l'aval de MM. X... et B..., il indiquait que la disponibilité des entreprises était le premier critère de leur choix, disant qu'il n'avait pas conscience de la nécessité de passer des marchés publics pour les interventions des entreprises sur le parc OPH mais admettant cependant connaître le code de marchés publics uniquement dans le cadre des appels d'offre ; que sur le marché public Résidence Hameau des Roches Grises estimé à 5 341 000 euros HT et dont les honoraires de l'architecte avaient été réglés à hauteur de 360 000 euros, il indiquait que les marchés de maîtrise d'oeuvre étaient toujours passés en MAPA sans vérification du seuil, que M. D...lui avait demandé de prendre attache avec M. C..., l'architecte, et qu'il avait lui-même contacté l'architecte avait été au delà de la simple étude de faisabilité avec l'avant projet sommaire (APS) et qu'il admettait avoir transmis à celui-ci le cahier général de l'Office le 22 avril 2009, alors que l'appel public à concurrence n'avait été publié qu'en août 2009, document selon lui qui n'avait rien de confidentiel ajoutant que finalement M. C...avait été choisi sur le seul critère du prix et reconnaissant que l'architecte qui faisait l'étude de faisabilité était en général retenu à 80 % ; que M Thierry C..., placé en garde à vue, expliquait qu'il connaissait M. D...par le biais de l'antenne PS de Marcorignan, que celui-ci lui avait demandé de faire une étude de faisabilité qu'il avait faite à titre gracieux pour se faire connaître car il n'avait jamais travaillé avec l'Office ; qu'il indiquait qu'il ne s'était pas préoccupé de la façon dont le maître d'ouvrage avait passé le marché qui, compte tenu de son seuil, n'aurait pas dû faire l'objet d'un MAPA ; qu'il admettait au vu du mail adressé par lui sur la messagerie personnelle de M. D...le 17 juin 2009 avoir fait un avant projet sommaire (APS) qui, par principe est réalisé par celui qui va obtenir le marché après appel d'offre ; qu'il indiquait également qu'il avait suggéré au président de l'Office, M. D..., de lancer un MAPA et qu'il lui avait demandé dans ce message de lui fournir ses objectifs (délais, coûts...) en ces termes : « Cher Jean, comme convenu, je te transmets l'APS du petit collectif, il faudrait établir un marché de maîtrise d'oeuvre afin que je puisse conclure mes contrats avec les BET, sans ces accords les BET ne pourront pas me fournir leurs études, indispensables pour le permis de construire et le dossier d'appel d'offre... Peux tu me fournir tes objectifs (délais, coûts...) Je ne manquerai pas de t'informer par email de l'état d'avancement de notre projet » ; qu'il ajoutait que M. A...lui avait remis un cahier des charges datés du 22 avril 2009 au moment où il faisait l'étude de faisabilité ; qu'était également saisi en perquisition le mail adressé par M. D...en provenance de sa boîte à lettre personnelle daté du 8 mars 2011 et libellé en ces termes : « Salut Thierry, je ne t'oublie pas et pour le projet de Marco lorsqu'il sera finalisé te sera confié, l'OPH est en voie de redressement et je compte bien en faire profiter les amis. Amitiés à toi et ton épouse, Jean » ; que ce mail faisait suite à celui daté du 7 mars 2011 émanant de M. C...: « J'ai appris que l'OPH a acquis un terrain dans mon village. Si tu as besoin de mes services n'hésite pas je t'en serai reconnaissant [Pour ce projet ou un autre ? » ; qu'il s'agissait ici d'un nouveau projet de construction de quinze logements neufs sur Marcorignan, le village où il habite, projet qui a finalement été dévolu à un autre architecte ; qu'il apparaissait que la réalisation de cette étude de faisabilité lui avait permis d'obtenir des renseignements non communiqués aux autres candidats, de même la réalisation de l'avant-projet sommaire toujours effectué par l'architecte désigné à l'issue de l'appel d'offre, et que les relations étroites entretenues avec M. D...tant sur le plan personnel que politique, avaient mis M. C...en position particulièrement favorable pour obtenir ce marché, et ce, en rupture complète d'égalité avec les autres candidats à qui aucune étude de faisabilité n'avait été réclamée, M. D...affichant clairement la haute idée qu'il se faisait de ses fonctions de service public que l'OPH est en voie de redressement et qu'il comptait bien en faire profiter les amis ; que M. C...a été relaxé du délit de recel de favoritisme et le parquet n'a pas cru nécessaire de faire appel de cette relaxe ; qu'entendu en garde à vue, M. Jean D..., président du conseil d'administration de l'OPHLM de Narbonne de mai 2008 à décembre 2011, reconnaissait que les marchés de fournitures et de services ne passaient jamais devant la commission des appels d'offres, que le personnel de l'OPH émettait un bon de travail qu'il envoyait à l'entreprise et qu'ensuite le comptable payait la facture, qu'il n'y avait pas davantage de MAPA et que M. X... n'avait fait que perpétuer la façon de faire qui existait avant son arrivée ; qu'il dénonçait cependant la perte de confiance à l'égard de M. X... du fait de ses insuffisances professionnelles indiquant que les problèmes en matière de marchés publics n'étaient apparus au grand jour qu'avec l'arrivée de M. Y... ; qu'il reconnaissait avoir initié le projet dit : « Résidence Hameau des Roches », et prétendait ignorer quel architecte avait été retenu pour le marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage, indiquant que M. C...était venu à l'OPH lui montrer une esquisse de son projet sans se souvenir si c'était au moment où l'appel d'offre avait été lancé ; qu'il indiquait que c'était la première fois qu'il le rencontrait et disait ignorer quelle avait été la suite donnée, considérant que c'était à M. X... de se charger des formalités reconnaissant qu'il n'avait pas cherché à connaître les projets des autres architectes, celui présenté par M. C...lui plaisant ; qu'il affirmait ne rien connaître au code des marchés publics concernant les mails échangés avec M. C...; qu'il reconnaissait qu'après leur premier entretien, des liens s'étaient tissés entre eux ; que M. D...a été déclaré coupable par le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Montpellier le 17 novembre 2014 de favoritisme au profit de l'architecte M. C..., et condamné à une amende de 3 000 euros, décision dont il n'a pas fait appel ; qu'entendu sur les faits, M. Georges B..., vice-président de l'Office jusqu'en mars 2008 (le maire étant président en titre), indiquait présider à ce titre la commission d'appel d'offre où siégeait également en tant qu'administrateur M. X... assisté de M. J...directeur général de services techniques de la ville et, pour la partie technique, MM. K...et A...lesquels faisaient les analyses des offres ; qu'il expliquait s'être contenté de signer de manière hebdomadaire de nombreuses factures liées à l'intervention d'artisans et d'entreprises sur le parc locatif de l'Office, en se bornant uniquement à vérifier la concordance entre les montants figurant sur les factures et ceux inscrits sur les bons de travaux, ignorant qu'il fallait passer des marchés pour les prestations et indiquant que la MIILOS qui contrôle systématiquement les OPHLM tous les quatre ans n'avait jamais émis de telles remarques ; qu'il cantonnait son rôle au fait de présider la CAO et de signer les factures mais que, pour lui seul, les grosses opérations pour le neuf et la réhabilitation passaient en commission d'appel d'offre ; que M. B..., appelant a été déclaré coupable par jugement correctionnel de Montpellier en date du 17 novembre 2014 d'avoir, à Narbonne du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2007 étant investi d'un mandat électif public en l'espèce conseiller municipal par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public, procuré ou tenté de procurer à autrui un avantage injustifié, en l'espèce pour avoir en qualité de vice-président de l'Office public de l'habitat (OPHCAN) passé des travaux et commandes hors marché public à hauteur de 1 114 000 euros et condamné à une amende de 3 000 euros ; que M. Jean Luc X... a intégré l'Office en 2002 en qualité de directeur adjoint ; qu'il est devenu directeur de l'Office le 1er janvier 2005 en remplacement de M. L..., date à laquelle l'office public est devenu Office public de la communauté d'agglomération ; qu'en 2008 il est devenu directeur général et du fait des transferts de compétence ordonnateur des dépenses ; qu'il considérait que c'était essentiellement le service technique qui avait vocation à passer les marchés publics notamment M. A..., mais admettait que l'instruction des dossiers lui était soumise pour validation, terme qui signifiait pour lui non pas un contrôle mais une simple information, ayant toute confiance dans ses services et « n'ayant aucune raison de regarder de plus prêt les documents qui lui étaient soumis » ; qu'il reconnaissait ne pas avoir eu conscience que les marchés de prestations devaient faire l'objet de marchés publics, mettant en exergue la fréquence des situations d'urgence ou imprévisibles ; qu'il restait très évasif sur le fait que c'était lui qui signait les bons de commande et qu'il pointait l'absence d'effectifs suffisants à l'époque ; que M. X..., appelant, a été déclaré coupable par jugement correctionnel de Montpellier en date du 17 novembre 2014 d'avoir, à Narbonne du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 étant représentant, administrateur ou agent d'un établissement public par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires procuré ou tenté de procurer à autrui un avantage injustifié, en l'espèce pour avoir en qualité de directeur général de l'Office de l'habitat passé des travaux et commandes hors marché public à hauteur 770 000 euros et d'avoir, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009, été complice du délit de favoritisme commis par M. D..., en l'espèce en passant de manière illégale un marché de maîtrise d'oeuvre dans le cadre de la construction de la résidence Hameau des Roches Grises par la procédure du MAPA alors que son montant excédait le seuil légal ; qu'il a été condamné à une amende de 3 000 euros ; qu'il ressort des éléments du dossier rappelés ci-dessus que c'est à la faveur de la nomination en mars 2010 d'un nouveau directeur général de l'OPH, M. Serge Y..., que les pratiques illégales de cet office en matière de marchés publics ont pu être dénoncées et mises à jour, attitude courageuse mais qui dérangeait les avantages acquis depuis de longues années tant du côté des élus que des fonctionnaires et des entreprises ; que ce dernier a été contraint de démissionner en 2012 dans un contexte politique et professionnel de règlements de compte très éloigné des impératifs du service public ; qu'à l'époque, chaque service était compétent en matière de marchés publics pour ce qui le concernait ; qu'il n'y avait pas de service unique dédié spécifiquement aux marchés publics et que rien n'avait été entrepris pour réformer ce système malgré les anomalies constatées ; qu'ainsi, M. Sébastien M..., responsable « communication et qualité » au sein de l'Office, s'était rendu compte à la suite d'une réclamation des grossières erreurs comptables qui affectaient les marchés, notamment sur les factures, erreurs qu'il avait demandé en vain de corriger à M. A..., qu'il confirmait que n'importe qui pouvait faire des bons de travaux, c'est-à-dire de solliciter une entreprise pour qu'elle effectue une prestation, ce que confirmait M. N...responsable du pôle comptable indiquant qu'avant l'arrivée de M. Y..., jamais un mandat signé de la direction n'avait été rejeté de la part du TPG ; que sur la culpabilité, M. X... plaide la relaxe du fait de l'absence d'élément matériel, aucun fait matériel daté ne pouvant lui être imputé précisément ; qu'il plaide également le défaut d'élément intentionnel n'ayant fait qu'appliquer et continuer une politique et une pratique antérieures ; qu'il sera observé que M. X... a intégré l'Office en mars 2002 comme directeur adjoint, qu'il a succédé à M. L...comme directeur le 1er janvier 2005 et qu'à la faveur du changement de statut de l'OPH, il est devenu directeur général le 1er septembre 2008 avec des prérogatives exécutives et notamment celles d'ordonnateur des dépenses « censé, comme il dit, signer toutes les dépenses » ; que si sa compétence professionnelle a été mise en cause par plusieurs de ses collaborateurs, il n'en reste pas moins que c'est à lui qu'incombait la validation des documents certifiant, ainsi que la procédure avait été respectée et qu'elle était conforme aux lois et règlements avec tous les effets de droit attachés à cette validation, notamment, au niveau de l'utilisation des fonds publics ; que M. X... ne peut en aucune façon se retrancher derrière la confiance qu'il avait envers ses services et qui étaient uniquement chargés d'exécuter ses décisions ; qu'il était de ses attributions de contrôler les procédures de passation des marchés publics, sinon on comprendrait mal pourquoi M. Y..., qui a eu les mêmes attributions que lui, a mis à plat l'ensemble des carences concernant ce secteur ; qu'il n'est pas nécessaire à ce titre de pointer une à une les opérations hors marché qu'il a avalisées puisque c'est l'ensemble de celles-ci qui ont fait l'objet d'une absence délibérée et totale de contrôle de sa part ; que la cour observe cependant que la prévention le concernant vise des faits du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 alors que les prestations sans marché sur cette année ont été expressément exclues de l'analyse des enquêtes, seules les factures de 2007 et 2009 faisant l'objet de l'enquête ; que la cour réformant l'appréciation des premiers juges, le relaxera de favoritisme de ce chef ; qu'en revanche, elle retiendra sa participation au délit de favoritisme commis entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009 par M. D...pour avoir passé de manière illégale un marché de maîtrise d'oeuvre dans le cadre de la construction de la résidence Hameau des Roches Grises par la procédure du MAPA alors que son montant excédait le seuil légal ; qu'il ressort en effet des déclarations de MM. A...et D...qu'il a personnellement avalisé la demande de ce dernier pour choisir hors de toute procédure adaptée la candidature de M. C..., alors que celleci aurait dû passer par la commission d'appel d'offre à laquelle il participait en tant qu'administrateur ;

" 1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait valoir qu'il n'était plus en fonction mais en arrêt maladie à compter de juillet 2009 jusqu'en janvier 2010 et qu'il n'avait donc pas pu accomplir d'acte caractérisant la complicité du délit de favoritisme en passant de manière illégale un marché de maîtrise d'oeuvre dans le cadre de la construction de la résidence Hameau des Roches Grises par la procédure du marché à procédure adapté alors que son montant excédait le seuil légal, dès lors que le marché avait été passé en octobre 2009 ; que la cour d'appel ne pouvait se borner à relever que, selon les déclarations de MM. A...et D..., M. X... aurait personnellement avalisé la demande de M. D...pour choisir hors de toute procédure de passation de marchés publics la candidature de M. C..., sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si au moment où la candidature de M. C...avait été avalisée, M. X... était à son poste où s'il pouvait avoir été complice de l'infraction reprochée à M. D...pendant qu'il était en arrêt maladie ;
" 2°) alors que la complicité par aide ou assistance doit préciser que l'aide ou l'assistance a été prêtée avec connaissance ; qu'en se bornant à retenir qu'il ressort des déclarations de MM. A...et D...que M. X... a personnellement avalisé la demande de ce dernier pour choisir hors de toute procédure adaptée la candidature de M. C...alors que celle-ci aurait dû passer par la commission d'appels d'offre à laquelle il participait en tant qu'administrateur, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs insuffisants à caractériser l'élément intentionnel de l'infraction ;
" 3°) alors que, en tout état de cause, n'est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l'empire d'une force ou d'une contrainte à laquelle elle n'a pu résister ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir qu'il avait été victime de harcèlement moral de la part de M. D..., auteur de l'infraction principale ; que la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de prononcer sur ces conclusions, qui étaient de nature à exclure la culpabilité de M. X... " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, et du jugement qu'il confirme, que M. X..., qui, entre 2008 et 2010, occupait les fonctions de directeur général de l'Office Public de l'Habitat de l'Agglomération de Narbonne (OPHCAN), dans le cadre desquelles il certifiait la régularité des procédures de marchés passés par l'Office, a été cité devant le tribunal correctionnel notamment du chef de complicité de favoritisme pour avoir, entre le 1er janvier et le 31 décembre 2009, irrégulièrement conclu un marché de maîtrise d'oeuvre sous la forme d'un marché à procédure adaptée, alors que le montant de cette opération, ayant pour objet la construction d'un ensemble immobilier, excédait les seuils autorisant cette procédure simplifiée, et après que l'attributaire eut été désigné en amont par le président de l'OPHCAN ;
Attendu que, par jugement du 16 juin 2014, le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces faits et condamné à 3 000 euros d'amende ; qu'il a, ainsi que le procureur de la République, interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour déclarer le demandeur coupable de complicité de favoritisme, l'arrêt retient qu'il ressort du témoignage d'un employé de l'OPHCAN et des déclarations de l'auteur du délit principal de favoritisme, qu'il a personnellement avalisé la demande de celui-ci de choisir, hors toute procédure régulière, la personne qui lui était désignée ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du demandeur qui faisait valoir que, se trouvant en arrêt maladie de juillet 2009 à janvier 2010, il n'avait pu viser les pièces du marché en octobre 2009, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, mais en ses seules dispositions relatives au délit de complicité de favoritisme commis par M. X..., l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Montpellier, en date du 7 décembre 2015, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-trois novembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-87814
Date de la décision : 23/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 07 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 nov. 2016, pourvoi n°15-87814


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.87814
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