LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 19 juin 2014), que, par un acte du 21 mars 1875, une servitude de passage a été instituée sur les parcelles cadastrées C 2366 et C 815 appartenant à M. et Mme Didier X... et à Mme Jacqueline X... (les consorts X...) qui en sont respectivement nus-propriétaires et usufruitière, au profit des parcelles C 2909 et C 814, propriété de la société civile immobilière Les Vieux Cèdres (la SCI) ; que les consorts X... ont assigné la SCI en extinction de la servitude et, subsidiairement, en déplacement de celle-ci ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'extinction de la servitude, alors, selon le moyen :
1°/ que la servitude qui est affectée, selon l'acte constitutif, à une destination déterminée, est éteinte dès lors que son objet disparaît et que les choses se trouvent en tel état qu'on ne peut plus en user conformément au titre ; qu'en l'espèce, dès lors que la servitude de passage avait pour objet de faciliter l'exploitation d'une parcelle en nature de vigne, la disparition de cette vigne a entraîné la disparition de l'objet de la servitude de passage et partant son extinction, même si ce passage pouvait toujours être utilisé à une autre destination que celle prévue par l'acte constitutif ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 703 du code civil ;
2°/ que les stipulations de l'acte du 21 mars 1875, selon lesquelles « pour le cas où les acquéreurs construiraient attenant le chemin, ils auraient également le droit sans payer aucune espèce d'indemnité, d'y pratiquer les jours et ouvertures qui leur conviendraient et d'y faire déverser les eaux pluviales et ménagères », n'ont pas pour objet de conférer un droit de passage sur le chemin litigieux mais de créer une servitude de vue et d'écoulement des eaux usées pour le cas où une maison serait construite le long du chemin litigieux ; qu'en déduisant de cette stipulation que l'exploitation des vignes n'était pas la seule utilité pour laquelle la servitude de passage avait été consentie, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que la servitude conventionnelle ne peut avoir pour objet un état d'enclave inexistant à la date de sa constitution ; qu'en justifiant le maintien de la servitude conventionnelle de passage accordée pour faciliter l'exploitation d'une parcelle en nature de vigne, par l'enclave de la parcelle 814 résultant de la construction de la maison de maître, sans qu'il résulte de ses constatations que cette construction et partant l'état d'enclave existaient déjà à la date de la constitution de la servitude litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
4°/ que l'enclave volontaire résultant de la construction d'une maison interdisant l'accès du jardin situé à l'arrière de cette maison vers la voie publique ne peut être invoquée pour justifier un droit de passage ; qu'en considérant que l'état d'enclave du jardin résultant de la construction de la maison de maître par les auteurs de la SCI serait de nature à justifier le maintien de la servitude de passage au profit de cette dernière, la cour d'appel a violé l'article 682 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation, que l'acte du 21 mars 1875 ne subordonnait pas la servitude à une condition d'exercice particulière et qu'il prévoyait l'usage et les conditions de la servitude en cas de construction d'un immeuble, et constaté que la servitude de passage était toujours utilisée pour la desserte, notamment en automobile, des parcelles où se trouvaient une maison et un jardin appartenant à la SCI et que rien n'empêchait cet usage, la cour d'appel a exactement retenu que la servitude conventionnelle n'était pas éteinte malgré son changement de destination consécutif à la cessation de l'exploitation de vignes en vue de laquelle elle avait été consentie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que les consorts X... font grief à la cour de rejeter leur demande en déplacement de la servitude, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'acte de donation-partage du 25 août 1995 qu'un partage a été effectué entre les donataires, aux termes duquel la nue-propriété des biens donnés a été entièrement attribuée à M. Didier X... à charge pour lui de payer une soulte à M. Bernard X..., Claire X... et Benoit X... dont les lots sont exclusivement composés du montant de cette soulte ; que l'acte rectificatif du 9 mars 2005, lui-même rectifié selon attestation rectificative jointe à cet acte, rappelle que, par acte du 25 août 1995, Mme Y... veuve X... a donné à ses quatre enfants la nue-propriété des parcelles 815 et 2366, et qu'« aux termes de ladite donation-partage, le corps d'immeuble objet dudit acte a été attribué à M. Didier X... » ; qu'il précise que la parcelle C 858 a été omise par erreur dans la désignation de l'immeuble objet de cet acte ; qu'il résulte ainsi de façon claire et précise de l'acte rectificatif du 9 mars 2005 complété par l'attestation rectificative jointe que la nue-propriété de la superficie de 2 a 10 ca à prendre sur la parcelle C 858 était comprise dans le partage de 1995 et a été elle aussi entièrement attribuée à M. Didier X... et que dès lors M. Bernard X..., Mme Claire X... et M. Benoit X... n'ont aucun droit indivis sur la propriété sur ce chemin ; qu'en énonçant que les consorts X... ne produiraient pas de titre de propriété dont il résulterait que M. Didier X... serait seul propriétaire indivis avec Mme Jacqueline Z... de cette parcelle, à l'exclusion de M. Bernard X..., Mme Claire X... et M. Benoit X..., également mentionnés en qualité de donataires par l'acte rectificatif du 9 mars 2005, la cour d'appel a dénaturé l'acte de donation-partage du 25 août 1995, l'acte rectificatif du 9 mars 2005 et l'attestation rectificative annexée à cet acte en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en énonçant que les consorts X... n'auraient pas soutenu dans leurs conclusions que le partage concernait aussi les droits indivis sur la parcelle C 858 omise par erreur dans l'acte de 1995, quand ces derniers se prévalaient expressément de l'acte du 9 mars 2005 rectifiant la donation-partage du 25 août 2005 duquel il résultait que la parcelle C 858 fait partie des biens attribués à M. Didier X... par la donation-partage, la cour d'appel a dénaturé le cadre du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en ne s'expliquant pas, comme elle y était invitée, sur l'acte du 23 octobre 1989 selon lequel Mme Z... a reçu en donation une contenance de 2 a 5 ca seulement dans la parcelle cadastrée C 858 d'une contenance totale de 4 a 10 ca, et que ce bien est un « bien non délimité », duquel il résulte que Mme Z... était bien propriétaire de l'autre moitié indivise de ce chemin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 455 du code civil ;
4°/ qu'il résulte de façon claire et précise de la matrice cadastrale de 2005 au nom de Mme Z... que cette dernière est propriétaire du seul lot n° A0002 de la parcelle cadastrée C 858, et ce pour une contenance de 2 a 5 ca ; qu'en énonçant que, selon cette matrice cadastrale, Mme Z... serait propriétaire « de la parcelle C 858 et du lot A 0002 de celle-ci », la cour d'appel a dénaturé ce document en violation de l'article 1134 du code civil ;
5°/ que M. A..., qui, aux termes de l'acte du 27 juillet 2011, a acquis les seuls droits de Mme Z... et non ceux de M. Didier X..., propriétaire de l'autre moitié de ce chemin, ne pouvait être devenu propriétaire de la totalité du chemin litigieux en pleine propriété ainsi qu'il l'admettait expressément dans son attestation dans laquelle il précisait qu'il était propriétaire indivis à hauteur de 50 % avec M. Didier X... ; qu'en mettant en doute l'exactitude de cette attestation conforme à son origine de propriété, la cour d'appel a violé l'article 544 du code civil ;
6°/ que si les dispositions de l'article 701 du code civil ne permettent pas au propriétaire du fonds débiteur de demander que la charge de celle-ci soit imposée à un autre fonds, le déplacement de la servitude sur un autre fonds peut être autorisé dès lors que son propriétaire y consent ; qu'en se fondant, pour exclure le déplacement sollicité sur le chemin cadastré C 858, sur la circonstance que selon son titre M. A... est soit seul propriétaire de la parcelle C 858 soit propriétaire d'une partie divise de celle-ci, tout en constatant que M. A... avait donné son accord exprès pour consentir une servitude de passage sur ce chemin, au profit des parcelles appartenant à la SCI, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 701 et 1134 du code civil qu'elle a violés ;
7°/ que le déplacement de la servitude peut être imposé au propriétaire du fonds dominant dès lors que l'assignation primitive devient plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti ou qu'elle l'empêche de faire des réparations avantageuses et que le nouveau passage offert est aussi commode pour l'exercice de ses droits par le propriétaire du fonds dominant ; que la justification d'un « intérêt grave » n'est nullement exigée ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, en raison de l'absence de justification d'un intérêt grave, la cour d'appel a violé l'article 701 du code civil ;
8°/ que pour démontrer que l'assignation primitive de la servitude était devenue plus onéreuse, les consorts X... se prévalaient non seulement de l'atteinte à leur intimité et à la sécurité de leurs enfants découlant de l'usage actuel de ce passage mais également de leur projet de construire un garage sur l'assiette de la servitude et de déplacer la zone de parking actuelle, trop proche de la piscine ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces circonstances de nature à démontrer que l'assignation primitive de la servitude était devenue trop onéreuse au propriétaire assujetti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 701 du code de procédure civile ;
9°/ qu'un mur mitoyen appartient aux propriétaires des fonds situés de part et d'autre de ce mur ; qu'en relevant l'existence d'un doute sur un droit de propriété de M. B... sur le mur prétendument mitoyen à démolir pour déplacer la servitude, sans rechercher, comme elle y était invitée et comme cela résulte du plan cadastral versé aux débats, si, dans sa portion à démolir, ce mur ne sépare pas exclusivement les parcelles n° 814 appartenant à la SCI et le chemin litigieux cadastré n° 858 appartenant aux consorts X..., circonstance exclusive d'un droit de propriété de M. B..., propriétaire de la parcelle 864, l'arrêt attaqué a privé sa décision de base légale au regard de l'article 653 du code civil ;
10°/ que le propriétaire d'un fonds est en droit d'accorder un droit de passage à un tiers sur son fonds, sans avoir à solliciter l'accord d'un autre titulaire de ce droit de passage ; qu'en décidant que le déplacement de la servitude sur le chemin n° 858 supposerait l'accord préalable de M. B... qui bénéficie d'un droit de passage sur ce chemin, la cour d'appel a violé l'article 455 du code civil ;
11°/ que l'importance des travaux à réaliser pour le déplacement de la servitude ne constitue pas un obstacle au droit, pour le propriétaire du fonds servant qui démontre que l'assiette de la servitude est devenue plus onéreuse et offre un passage tout aussi commode, d'obtenir le déplacement de la servitude ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 701 du code civil ;
12°/ que, sauf stipulation contraire, le propriétaire du fonds servant qui sollicite le déplacement de la servitude en supporte les frais ; qu'en se fondant sur un inconvénient découlant de la nécessité, pour permettre un accès à la propriété de la SCI, de travaux de démolition et reconstruction importants, sans qu'il résulte de ses constatations que les travaux seraient à la charge du propriétaire du fonds dominant, l'arrêt attaqué a violé l'article 701 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant à bon droit retenu que les dispositions de l'article 701 du code civil ne permettent pas le déplacement de la servitude sur un fonds n'appartenant pas au propriétaire du fonds servant et constaté que M. X... n'était pas seul propriétaire de la parcelle C 858, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Didier X... et Mme Jacqueline X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Didier X... et de Mme Jacqueline X... et les condamne à payer à la SCI Les Vieux Cèdres la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour les consorts X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X... de leurs demandes (extinction, déplacement) relatives à la servitude de passage dont bénéficie la SCI Les Vieux Cèdres, ordonné à M. et Mme X... de démolir dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, la murette représentée à la page 6 du rapport d'expertise ainsi que tout aménagement y afférent de même que le portail construit en limite de la voie publique pour rétablir à 4 mètres la largeur effective du droit de passage sur toute la longueur et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
AUX MOTIFS QUE les parcelles cadastrées C 2909 et 814 commune d'Ouveillan (11) dont la SCI Les Vieux Cèdres est propriétaire bénéficie d'une servitude de passage conventionnelle permettant de rejoindre la rue Saint-Fargeau, d'une largeur de 4 mètres, sur les parcelles cadastrées section C 2366 et 815, appartenant aux consorts Didier, Agnès et Jacqueline X... en vertu d'un acte notarié en date du 21 mars 1875 ; que sur le fondement de l'article 703 du Code civil les consorts X... sollicitent la suppression de la servitude de passage, arguant qu'elle n'a plus l'utilité pour laquelle elle avait été consentie à savoir faciliter l'exploitation de vignes plantées en 1875 sur le fonds dominant lequel n'a plus d'exploitation agricole aujourd'hui ; mais que l'article 703 du Code civil ne prévoit la cessation d'une servitude que dans le cas où les choses sont en état tel qu'on ne peut plus en user ; qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise judiciaire de M. Richard C... déposé le 15 février 2007, que la servitude de passage est toujours utilisée pour la desserte, notamment en automobile, des parcelles où se trouve désormais une maison de maître et d'un jardin appartenant à la SCI Les Vieux Cèdres ; qu'un portail d'accès a été aménagé au bout de la servitude pour desservir la parcelle n° 814 se trouvant à l'arrière de la maison de maître qui, sinon n'aurait pas d'accès à la voie publique ; que rien n'empêche cet usage peu important le changement de destination de la servitude conventionnelle originelle laquelle ne subordonnait pas en effet, la servitude à une condition d'exercice particulière ; que contrairement à ce que soutiennent à cet égard les consorts X..., l'exploitation des vignes n'était pas la seule utilité pour laquelle la servitude de passage avait été consentie ; qu'en effet l'acte notarié de 1875 prévoyait aussi l'usage de son assiette et les conditions de celui-ci en cas de construction d'un immeuble, ce qui a d'ailleurs été le cas, selon l'expert C... dans les années 1870, au plus tard en 1884, date des factures d'aménagement versées aux débats : « Il a été convenu en outre que pour faciliter l'exploitation de ladite parcelle il sera établi un chemin au levant et tout le long de ladite ligne divisoire toujours du midi au nord … les acquéreurs auront seulement le droit de l'utiliser à titre de servitude de passage laquelle s'exercera sur une longueur de quatre mètres à pied avec bestiaux et charrette.
Et pour le cas où les acquéreurs construiraient attenant le chemin, ils auraient également le droit sans payer aucune espèce d'indemnité, d'y pratiquer les jours et ouvertures qui leur conviendraient et d'y faire déverser les eaux pluviales et ménagères » ;
Qu'il convient donc de rejeter la demande des époux X... ;
1°- ALORS QUE la servitude qui est affectée selon l'acte constitutif, à une destination déterminée, est éteinte dès lors que son objet disparaît et que les choses se trouvent en tel état qu'on ne peut plus en user conformément au titre ; qu'en l'espèce, dès lors que la servitude de passage avait pour objet de faciliter l'exploitation d'une parcelle en nature de vigne, la disparition de cette vigne a entraîné la disparition de l'objet de la servitude de passage et partant son extinction, même si ce passage pouvait toujours être utilisé à une autre destination que celle prévue par l'acte constitutif ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 703 du Code civil ;
2°- ALORS QUE les stipulations de l'acte du 21 mars 1875 selon lesquelles « pour le cas où les acquéreurs construiraient attenant le chemin, ils auraient également le droit sans payer aucune espèce d'indemnité, d'y pratiquer les jours et ouvertures qui leur conviendraient et d'y faire déverser les eaux pluviales et ménagères », n'ont pas pour objet de conférer un droit de passage sur le chemin litigieux mais de créer une servitude de vue et d'écoulement des eaux usées pour le cas où une maison serait construite le long du chemin litigieux ; qu'en déduisant de cette stipulation que l'exploitation des vignes n'était pas la seule utilité pour laquelle la servitude de passage avait été consentie, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cet acte en violation de l'article 1134 du Code civil ;
3°- ALORS QU'une servitude conventionnelle ne peut avoir pour objet un état d'enclave inexistant à la date de sa constitution ; qu'en justifiant le maintien de la servitude conventionnelle de passage accordée pour faciliter l'exploitation d'une parcelle en nature de vigne, par l'enclave de la parcelle 814 résultant de la construction de la maison de maître, sans qu'il résulte de ses constatations que cette construction et partant l'état d'enclave existaient déjà à la date de la constitution de la servitude litigieuse, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
4°- ALORS QUE l'enclave volontaire résultant de la construction d'une maison interdisant l'accès du jardin situé à l'arrière de cette maison vers la voie publique ne peut être invoquée pour justifier un droit de passage ; qu'en considérant que l'état d'enclave du jardin résultant de la construction de la maison de maître par les auteurs de la SCI Les Vieux Cèdres serait de nature à justifier le maintien de la servitude de passage au profit de cette dernière, la Cour d'appel a violé l'article 682 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X... de leurs demandes (extinction, déplacement) relatives à la servitude de passage dont bénéficie la SCI Les Vieux Cèdres, ordonné à M. et Mme X... de démolir dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision, la murette représentée à la page 6 du rapport d'expertise ainsi que tout aménagement y afférent de même que le portail construit en limite de la voie publique pour rétablir à 4 mètres la largeur effective du droit de passage sur toute la longueur et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
AUX MOTIFS QU'à titre subsidiaire, les consorts X... sollicitent sur le fondement de l'article 701 alinéa 3 du Code civil que soit ordonné le déplacement de la servitude, ce à quoi s'oppose la SCI Les Vieux Cèdres ; qu'ils proposent de déplacer l'assiette de la servitude de passage pour qu'elle traverse la parcelle cadastrée section C 858 permettant de relier la parcelle n° 814 à une voie publique ; que M. Didier X... soutient qu'il est propriétaire indivis de la parcelle C 858 à hauteur de 50 % l'autre moitié appartenant à Mme Nicole Y... épouse D... laquelle a attesté le 4 juin 2005 et le (mois illisible) 2008 qu'elle était d'accord pour consentir une servitude de passage sur cette parcelle en faveur des parcelles C 814 et 2909 ; mais que comme l'a relevé le Tribunal de grande instance de Narbonne dans son jugement déféré, M. Didier X... ne produit pas de titre de propriété dont il résulterait qu'il serait seul propriétaire indivis avec Mme Jacqueline Z... de cette parcelle ce que conteste la SCI Les Vieux Cèdres ; que celle-ci relève que dans un acte authentique rectificatif d'un acte de donation-partage en date du 25 août 1995, établi le 10 février 2005 par Me Robert E..., notaire, la nue-propriété d'une partie (2 ares et 10 centiares sur 4 ares et 10 centiares) de la parcelle n° 858 avait été donnée outre M. Didier X... à M. Bernard X..., Mme Claire X... et M. Benoit X..., qui n'ont pas été appelés en cause et n'ont pas non plus consenti à la servitude de passage offerte ; que Mme Jacqueline Y... veuve X... avait conservé l'usufruit de cette parcelle donnée ; qu'en ce qui concerne la part indivise dont Mme Z... atteste qu'elle est propriétaire, il est produit un acte authentique de vente du 27 juillet 2011 par lequel celle-ci a cédé la propriété de la parcelle C 858 pour une superficie de 4 ares et 10 centiares à M. Frédéric A... (pièce n° 53) ; mais qu'il en ressort qu'il s'agit d'une cession de cette parcelle en nature de chemin d'accès en pleine propriété et non d'une part indivise de celui-ci ; que M. Frédéric A... a attesté le 3 octobre 2011 lui aussi qu'il était propriétaire indivis de cette parcelle à hauteur de 50 % avec Didier X... et consentir à la servitude de passage offerte ; mais que cette attestation est ainsi en contradiction avec son acte de propriété susvisé dont il ressort qu'il serait seul propriétaire de la parcelle C 858 ou d'une partie divise de celle-ci éventuellement ; que la matrice cadastrale de l'année 2005 établie au nom de Mme Nicole Y... épouse D... (pièce n° 16) qui est produite mentionne celle-ci comme propriétaire de la parcelle C 858 et du lot A 0002 de celle-ci ; qu'il n'en résulte pas que M. Didier X... était alors propriétaire indivis à 50 % de cette parcelle, lui-même ne produisant pas de matrice cadastrale établie à son nom pour cette parcelle ; que d'autre part, selon acte authentique en date du 22 février 1996, M. Didier X... avait cédé la moitié indivise en nue-propriété dont il avait été donataire en 1995, des parcelles n° 815 et 2366 grevée de la servitude de passage à son épouse, séparée de biens, Mme Agnès F... ; que dans cet acte il est fait état d'un partage intervenu entre les quatre enfants Fraïssé quant à ces deux parcelles, mais qu'il n'est pas soutenu dans les conclusions des consorts X... que ce partage concernait aussi les droits indivis sur la parcelle C 858 omise dans l'acte de 1995, l'acte du 22 février 1996 n'ayant pas fait l'objet d'un acte rectificatif à cet égard ; qu'il est de principe ainsi que l'a rappelé la 3ème chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt du 26 octobre 1983 que les dispositions de l'article 701 du Code civil ne permettent pas au propriétaire du fonds débiteur d'une servitude de demander que la charge de celle-ci soit imposée à un autre fonds dont il n'est pas propriétaire lui-même ; que par ailleurs s'agissant d'une parcelle indivise seul l'accord de tous les indivisaires est de nature à caractériser une offre régulière de déplacement sur cette parcelle d'une servitude de passage, conformément aux dispositions de l'article 815-3 du Code civil ; que si Mme Y... veuve X... qui avait conservé l'usufruit de la parcelle donnée est partie à cette instance et consent à la servitude de passage, l'accord des autres indivisaires de la partie de la parcelle C 858 donnée notamment à M. Didier X... (M. Bernard X..., Mme Claire X... et M. Benoit X...) n'est pas justifié par les pièces produites et ceux-ci n'ont pas été appelés en cause pour y consentir formellement ; qu'en sa qualité de simple coïndivisaire propriétaire de la nue-propriété d'une partie seulement de la parcelle n° C 858, M. Didier X..., même avec le concours de l'usufruitier d'une partie de cette parcelle, ne peut donc valablement offrir un déplacement de l'assiette de la servitude de passage grevant le fonds servant sur cette parcelle à la SCI Les Vieux Cèdres ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés du jugement qu'aux termes de l'article 701 du Code civil, le déplacement de l'assiette d'une servitude de passage lorsqu'il est matériellement possible suppose néanmoins que le propriétaire du fonds servant justifie d'un intérêt grave et que ce déplacement ne rende pas l'usage de la servitude plus incommode pour le fonds dominant ; qu'en l'espèce, il convient de souligner que les consorts X... invoquent au titre de l'intérêt grave fondant le déplacement, l'atteinte à leur intimité et à la sécurité de leurs enfants qui découlerait de l'usage actuel de ce passage ; que toutefois il convient de rappeler que ce passage n'est utilisé que par les propriétaires de la SCI et de manière très ponctuelle dans des conditions telles qu'il est peu probable qu'il puisse être une source de danger quelconque pour les personnes ; que par ailleurs il est loisible aux consorts X... après la construction récente d'une piscine à proximité de réaliser les aménagements (mur, palissade de bois, haie) qui permettraient aisément de pallier l'inconvénient ici encore très ponctuel qu'ils invoquent ; que par ailleurs se pose la question de l'existence ou non sur le mur qui devrait être percé pour permettre à la SCI d'accéder à sa propriété à partir du nouveau tracé d'un droit de copropriété de M. G... (en réalité B...), propriétaire de la parcelle 664 (en réalité 864) lequel s'oppose formellement à cet aménagement ; que sur ce point les conclusions de l'expert sont ambiguës puisque après avoir évoqué le caractère mitoyen du mur, semblent l'écarter pour conclure plus loin qu'en toute hypothèse M. G... bénéficierait d'un droit de passage sur ce chemin ce qui nécessiterait ici encore son accord préalable ; qu'en toute hypothèse ici encore il est impossible de trancher sans appel en cause de l'intéressé ; qu'outre les incertitudes juridiques continuant à occulter la demande de déplacement, il convient d'ajouter des inconvénients découlant de la nécessité pour permettre un accès à la propriété de la SCI, de travaux de démolition et reconstruction importants que souligne l'expert ; que les conditions préalables au déplacement de l'assiette ne sont pas réunies ;
1°- ALORS QU'il résulte de l'acte de donation partage du 25 août 1995 (produit en pièce n° 1, p. 6) qu'un partage a été effectué entre les donataires, aux termes duquel la nue-propriété des biens donnés a été entièrement attribuée à M. Didier X... à charge pour lui de payer une soulte à M. Bernard X..., Claire X... et Benoit X... dont les lots sont exclusivement composés du montant de cette soulte ; que l'acte rectificatif du 9 mars 2005 lui-même rectifié selon attestation rectificative jointe à cet acte, rappelle que par acte du 25 août 1995, Mme Y... veuve X... a donné à ses quatre enfants la nue-propriété des parcelles 815 et 2366, et qu'« aux termes de ladite donation-partage le corps d'immeuble objet dudit acte a été attribué à M. Didier X... » ; qu'il précise que la parcelle C 858 a été omise par erreur dans la désignation de l'immeuble objet de cet acte ; qu'il résulte ainsi de façon claire et précise de l'acte rectificatif du 9 mars 2005 complété par l'attestation rectificative jointe que la nue-propriété de la superficie de 2 ares 10 ca à prendre sur la parcelle C 858 était comprise dans le partage de 1995 et a été elle aussi entièrement attribuée à M. Didier X... et que dès lors Bernard X..., Claire X... et Benoit X..., n'ont aucun droit indivis sur la propriété sur ce chemin ; qu'en énonçant que les consorts X... ne produiraient pas de titre de propriété dont il résulterait que M. Didier X... serait seul propriétaire indivis avec Mme Jacqueline Z... de cette parcelle, à l'exclusion de M. Bernard X..., Mme Claire X... et M. Benoit X... également mentionnés en qualité de donataires par l'acte rectificatif du 9 mars 2005, la Cour d'appel a dénaturé l'acte de donation-partage du 25 août 1995, l'acte rectificatif du 9 mars 2005 et l'attestation rectificative annexée à cet acte en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°- ALORS QU'en énonçant que les consorts X... n'auraient pas soutenu dans leurs conclusions que le partage concernait aussi les droits indivis sur la parcelle C 858 omise par erreur dans l'acte de 1995, quand ces derniers se prévalaient expressément de l'acte du 9 mars 2005 rectifiant la donation-partage du 25 août 2005 duquel il résultait que la parcelle C 858 fait partie des biens attribués à M. Didier X... par la donation-partage, la Cour d'appel a dénaturé le cadre du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°- ALORS QU'en ne s'expliquant pas comme elle y était invitée, sur l'acte du 23 octobre 1989 selon lequel Mme Z... a reçu en donation une contenance de 2 ares 5 ca seulement dans la parcelle cadastrée C 858 d'une contenance totale de 4 a 10 ca, et que ce bien est un « bien non délimité », duquel il résulte que Mme Z... était bien propriétaire de l'autre moitié indivise de ce chemin, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 455 du Code civil ;
4°- ALORS QU'il résulte de façon claire et précise de la matrice cadastrale de 2005 au nom de Mme Z... que cette dernière est propriétaire du seul lot n° A0002 de la parcelle cadastrée C 858 et ce pour une contenance de 2 a 5 ca ; qu'en énonçant que selon cette matrice cadastrale, Mme Z... serait propriétaire « de la parcelle C 858 et du lot A 0002 de celle-ci », la Cour d'appel a dénaturé ce document en violation de l'article 1134 du Code civil ;
5°- ALORS QUE M. A... qui aux termes de l'acte du 27 juillet 2011 a acquis les seuls droits de Mme Z... et non ceux de M. Didier X... propriétaire de l'autre moitié de ce chemin, ne pouvait être devenu propriétaire de la totalité du chemin litigieux en pleine propriété ainsi qu'il l'admettait expressément dans son attestation dans laquelle il précisait qu'il était propriétaire indivis à hauteur de 50 % avec M. Didier X... ; qu'en mettant en doute l'exactitude de cette attestation conforme à son origine de propriété, la Cour d'appel a violé l'article 544 du Code civil ;
6°- ALORS en toute hypothèse, que si les dispositions de l'article 701 du Code civil ne permettent pas au propriétaire du fonds débiteur de demander que la charge de celle-ci soit imposée à un autre fonds, le déplacement de la servitude sur un autre fonds peut être autorisé dès lors que son propriétaire y consent ; qu'en se fondant pour exclure le déplacement sollicité sur le chemin cadastré C 858, sur la circonstance que selon son titre M. A...est soit seul propriétaire de la parcelle C 858 soit propriétaire d'une partie divise de celle-ci, tout en constatant que M. A...avait donné son accord exprès pour consentir une servitude de passage sur ce chemin, au profit des parcelles appartenant à la SCI Les Vieux Cèdres, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard des articles 701 et 1134 du Code civil qu'elle a violé ;
7°- ALORS QUE le déplacement de la servitude peut être imposée au propriétaire du fonds dominant, dès lors que l'assignation primitive devient plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou qu'elle l'empêche de faire des réparations avantageuses et que le nouveau passage offert est aussi commode pour l'exercice de ses droits par le propriétaire du fonds dominant ; que la justification d'un « intérêt grave » n'est nullement exigée ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, en raison de l'absence de justification d'un intérêt grave, la Cour a violé l'article 701 du Code civil ;
8°- ALORS QUE pour démontrer que l'assignation primitive de la servitude était devenue plus onéreuse, les consorts X... se prévalaient non seulement de l'atteinte à leur intimité et à la sécurité de leurs enfants découlant de l'usage actuel de ce passage mais également de leur projet de construire un garage sur l'assiette de la servitude et de déplacer la zone de parking actuelle trop proche de la piscine ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces circonstances de nature à démontrer que l'assignation primitive de la servitude était devenue trop onéreuse au propriétaire assujetti, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 701 du Code de procédure civile ;
9°- ALORS QU'un mur mitoyen appartient aux propriétaires des fonds situés de part et d'autre de ce mur ; qu'en relevant l'existence d'un doute sur un droit de propriété de M. B... sur le mur prétendument mitoyen à démolir pour déplacer la servitude, sans rechercher comme elle y était invitée et comme cela résulte du plan cadastral versé aux débats, si dans sa portion à démolir, ce mur ne sépare pas exclusivement les parcelles n° 814 appartenant à la SCI Les Vieux Cèdres et le chemin litigieux cadastré n° 858 appartenant aux consorts X..., circonstance exclusive d'un droit de propriété de M. B..., propriétaire de la parcelle 864, l'arrêt attaqué a privé sa décision de base légale au regard de l'article 653 du Code civil ;
10°- ALORS QUE le propriétaire d'un fonds est en droit d'accorder un droit de passage à un tiers sur son fonds, sans avoir à solliciter l'accord d'un autre titulaire de ce droit de passage ; qu'en décidant que le déplacement de la servitude sur le chemin n° 858 supposerait l'accord préalable de M. B... qui bénéficie d'un droit de passage sur ce chemin, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code civil ;
11°- ALORS QUE l'importance des travaux à réaliser pour le déplacement de la servitude ne constitue pas un obstacle au droit pour le propriétaire du fonds servant qui démontre que l'assiette de la servitude est devenue plus onéreuse et offre un passage tout aussi commode, d'obtenir le déplacement de la servitude ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 701 du Code civil ;
12°- ALORS QUE sauf stipulation contraire, le propriétaire du fonds servant qui sollicite le déplacement de la servitude en supporte les frais ; qu'en se fondant sur un inconvénient découlant de la nécessité pour permettre un accès à la propriété de la SCI, de travaux de démolition et reconstruction importants, sans qu'il résulte de ses constatations que les travaux seraient à la charge du propriétaire du fonds dominant, l'arrêt attaqué a violé l'article 701 du Code civil.