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09/11/2016 | FRANCE | N°15-27968

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 novembre 2016, 15-27968


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X... et Mme Y... ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 242 du code civil ;

Attendu que l'introduction de la demande en divorce ne confère pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité faisant perdre leurs effets normaux aux torts invoqués ;

Attendu que, pour prononcer le divorce aux torts exclusifs de Mme Y..., et rejeter sa demande reconventionnelle, l'arrêt retient qu'un manqueme

nt postérieur à la séparation ne peut pas constituer une violation des devoirs du maria...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X... et Mme Y... ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 242 du code civil ;

Attendu que l'introduction de la demande en divorce ne confère pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité faisant perdre leurs effets normaux aux torts invoqués ;

Attendu que, pour prononcer le divorce aux torts exclusifs de Mme Y..., et rejeter sa demande reconventionnelle, l'arrêt retient qu'un manquement postérieur à la séparation ne peut pas constituer une violation des devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il est possible d'invoquer, à l'appui d'une demande en divorce, des griefs postérieurs à l'ordonnance de non-conciliation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles 270 et 271 du code civil ;

Attendu que, pour limiter le montant de la prestation compensatoire due par M. X... à la somme de 80 000 euros, l'arrêt retient que ce dernier a développé son activité au travers d'une vingtaine de sociétés dans lesquelles ses participations sont diverses et que, si le patrimoine immobilier de six d'entre elles est important, elles remboursent également des emprunts ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans procéder à une évaluation au moins sommaire, de la valeur des participations détenues par M. X... dans ces sociétés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt, confirmatif de ce chef, d'avoir prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de Mme Y... et de l'avoir ainsi déboutée de sa demande tendant à voir prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. X... ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le divorce que Mme Y... reproche à son époux de ne lui avoir apporté aucun soutien affectif et moral ni aide dans la prise en charge des enfants et de la maison lorsqu'en octobre 2009, elle a été frappée d'un cancer "foudroyant", ne se préoccupant que de sa réussite professionnelle et créant sur cette période 7 nouvelles sociétés, que la plupart des témoins de l'époux partagent avec lui des intérêts professionnels et commerciaux et sont dévoués à sa cause ; que celui-ci conteste déclarant s'être organisé professionnellement, avoir toujours été très présent, l'accompagnant à ses séances de soins, prenant en charge la cuisine le week-end ; qu'elle lui reproche d'avoir manqué à son devoir de secours en lui annonçant par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 février 2011, après la reprise de son travail à mi-temps thérapeutique en janvier 2011, sa volonté de mettre un terme à leur vie de couple et en la laissant face à un déficit important entre ses revenus et charges jusqu' 'à l'ordonnance sur tentative de conciliation, qu'elle a dû contre l'avis de son médecin reprendre son travail à 90 % ; que M. X... conteste ce grief faisant valoir que les époux s'étaient organisés pour occuper le domicile conjugal alternativement une semaine chacun dans l'intérêt des enfants et qu'il a assumé seul les dépenses afférentes au domicile et contribué aux besoins des enfants la moitié du temps, celle-ci n'ayant d'ailleurs pas intenté d'action en contribution aux charges du mariage ; que Mme Y... reproche à son époux de ne pas avoir respecté l'obligation de fidélité qui perdure au-delà de l'assignation en prenant une compagne, qu'il a présentée aux enfants en avril 2012, qui s'est installée chez lui en août 2012, relation amoureuse installée au moins depuis 2011 voire 2010 ; que l'époux ne conteste pas avoir noué une relation avec une compagne mais, bien après la séparation du couple ; que M. X... reproche à son épouse sa relation adultère pendant la durée du mariage avec l'entraîneur de basket de son fils M. Z... comme établi par le rapport de mission Investipole, agence privée de recherches, comme reconnu par elle dans un texto ; que Mme Y... la conteste ; que les attestations produites par Mme Y... concernant les manquements au devoir d'assistance et de secours pendant sa maladie cancéreuse sont combattues par les très nombreuses attestations très précises de l'époux émanant de l'entourage amical et professionnel du couple, selon lesquelles il s'était organisé professionnellement et a soutenu du mieux possible son épouse durant cette épreuve ; qu'en ce qui concerne le manquement reproché par Mme Y... au devoir de secours entre la séparation et l'ordonnance sur tentative de conciliation, il y a lieu d'observer que les époux, qui travaillaient tous deux, résidaient alors de façon alternée au domicile conjugal pour s'occuper des enfants ce qui implique une contribution de chacun aux besoins des enfants et aux charges de la maison ; que ce n'est que le 22 décembre 2011, alors que la séparation était intervenue en mars 2011, que Mme Y... effectue une première demande financière à son époux par l'intermédiaire de son conseil ; qu'elle n'a initié aucune procédure en contribution du mariage, la requête en divorce ayant été déposée par l'époux en août 2011 ; qu'un manquement postérieur à la séparation ne peut, en tout état de cause, pas constituer une violation des devoirs du mariage rendant intolérable la maintien de la vie commune au sens de l'article 242 du code civil ; que Mme Y... ne rapporte pas la preuve que son époux avait noué une relation avec une compagne avant la séparation du couple, qu'en effet si le devoir de fidélité perdure jusqu'au divorce, le non-respect de l'obligation de fidélité postérieur à la séparation ne peut constituer une violation grave des obligations du mariage rendant intolérable la vie commune au sens de l'article 242 du code civil ; que comme l'a à juste titre relevé le premier juge, le rapprochement entre la fréquence et les horaires tardifs des textos que Mme Y... ne conteste pas avoir adressé à M. Z... à l'automne 2010 pendant la vie commune, les sms adressés à son époux en novembre 2010 et janvier 2011 dans lesquels elle évoque une faute "impardonnable "de sa part et les constats de l'agence de détective privée postérieurs à la séparation montrant la réalité de leur relation, permettent de conclure que Mme Y... entretenait une relation adultère avec celui-ci pendant la durée de la vie commune ; qu'en raison de ce fait constitutif d'une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage imputable à l'épouse et rendant intolérable le maintien de la vie commune au sens de l'article 242 du code civil, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu'elle a prononcé le divorce aux torts de l'épouse » ;

ALORS QUE la séparation de fait des époux ne confère pas à ces derniers, encore dans les liens du mariage, une immunité faisant perdre leurs effets normaux aux torts invoqués ; qu'il est possible d'invoquer, à l'appui d'une demande en divorce, des griefs postérieurs à la séparation de fait des époux ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme Y... de sa demande reconventionnelle et prononcer le divorce à ses torts exclusifs, la cour d'appel a retenu que l'exposante « ne rapport[ait] pas la preuve que son époux ait noué une relation avec une compagne avant la séparation du couple » (arrêt attaqué p.8 §5) ; qu'en posant ainsi en principe qu'« un manquement postérieur à la séparation ne peut, en tout état de cause, pas constituer une violation des obligations du mariage rendant intolérable la vie commune au sens de l'article 242 du code civil » (arrêt attaqué p.8, §4), la cour d'appel a violé l'article 242 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'avoir condamné M. X... à verser à Mme Y... une prestation compensatoire de 80 000 euros et de l'avoir ainsi déboutée de sa demande tendant à obtenir une prestation compensatoire d'un montant de 750 000 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la prestation compensatoire : qu'aux termes de l'article 270 du code civil, si le divorce met fin au devoir de secours entre époux, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives, que cette prestation a un caractère forfaitaire, qu'elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge ; qu'aux termes de l'article 271 du code civil, "la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
A cet effet, le juge prend en considération notamment :
-la durée du mariage,
-l'âge et l'état de santé des époux,
-leur qualification et leur situation professionnelles,
-les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,
-le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial,
-leurs droits existants et prévisibles,
-leur situation respective en matière de pension de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à la retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au 6ème alinéa" ; qu'au soutien de sa demande de prestation compensatoire, Mme Y... fait valoir :
- que M. X... est personnellement propriétaire de plusieurs biens :
-qu'en 2006, les époux, séparés de bien, ont acquis en indivision une maison d'habitation, sise à Saint-Just-Rambert (42), composée de 7 pièces, cave, cuisine et garage double, élevée sur deux niveaux, avec terrain d'une superficie de 9.868 m², que M. X... est propriétaire de cette maison pour 4/5,et elle-même pour 1/5, ce bien immobilier étant estimé entre 690.000 euros et 720.000 euros,
-que les évaluations du domicile conjugal faites à la demande de M. X... par des sociétés partenaires devront être rejetées,
-qu'ils sont associés (4/5 des parts à M. X..., 1/5 ème à elle-même) dans une Société Civile Immobilière dénommée «79 Fauriel» qui est propriétaire au [...], d'un appartement vendu au prix de 157.000 euros, prix qui n'a pas été partagé entre les époux,
-que M. X... est à la tête d'un groupe de 25 entreprises et sociétés (dénommé "Xxl Group" couvrant l'ensemble des activités impliquées dans la construction et la promotion immobilière (cabinets d'architecture, bureau d'études, maîtrise d'oeuvre, construction, coordination de chantiers, marchand de biens, propriété et location d'ensembles immobiliers,...).
-que ce groupe poursuit son développement avec de nouvelles créations de sociétés et 25 nouvelles acquisitions immobilières, comme M. X... l'expose lui-même dans ses dernières conclusions,
-qu'il occulte les sociétés dans lesquelles il n'a que des participations,
- que dans un portrait lui étant consacré en décembre 2011 dans les «Petites Affiches de la Loire», il déclarait que son groupe dégageait un chiffre d'affaires annuel compris entre 8 et 9 millions d'euros, ce qui est confirmé par les informations disponibles auprès du registre du commerce pour les 9 sociétés du groupe soumises à l'obligation de publier leurs comptes,
-que le déficit ponctuel pour 2014 de 137.853 euros est à mettre en perspective avec des réserves de 1.8 millions d'euros et ce chiffre d'affaires, -qu'elle-même travaille à 90 % à la caisse d'épargne percevant un salaire de 1932 euros, est propriétaire avec sa soeur d'un studio situé à Agde dans un zone inondable d'une valeur de 30.000 euros ; que M. X... fait valoir que la crise commencée en 2009 n'est pas terminée et que ses différentes sociétés supportent des dettes importantes, que pendant la vie commune le train de vie du couple reposait sur une somme mensuelle de 3.300 euros, qu'elle minore la valeur de son appartement situé à Agde qui oscille entre 141.000 et 140.000 euros, que des appartements voisins situés en zone inondable ont été vendus sans décote particulière, qu'elle majore le prix du domicile conjugal d'une valeur maximum de 470.000 euros, que la valeur de son patrimoine propre est moindre car il faut déduire les crédits en cours ; que le couple est marié depuis 14 ans dont 10 ans et demi de vie commune, qu'ils sont âgés de 41 ans pour madame et de 46 ans pour monsieur ;que le couple est propriétaire en indivision, Mme Y... à hauteur d'un 5ème et M. X... de 4/ 5èmes,:
-de la maison sise à Saint-Just Saint Rambert, acquise en 2006, 425.000 euros, d'une valeur actuelle de 450.000 euros selon les deux évaluations d'agence immobilière produites par M. X..., (les évaluations très supérieures de Mme Y... appuyées par aucune pièce ne peuvent emporter la conviction de la cour) ;
- d'un appartement situé à Saint-Etienne qui a été vendu pour le prix de 157.000 euros ; que M. X... est architecte, et a développé son activité à travers plusieurs sociétés (une vingtaine employant en 2011 25 salariés) dans lesquelles ses participations sont diverses, que si le patrimoine des 6 sociétés propriétaires du parc immobilier est élevé, elles remboursent également des crédits d'un montant conséquent ;
que selon sa déclaration d'impôts sur le revenu, le revenu fiscal de référence était :
-pour le couple en 2009 de 78.445 euros,(les revenus de l'épouse étant de 20.253 euros),en 2010 de 150.466 euros (les revenus de l'épouse étant de 5250 euros),
-pour M. J. en 2011 de 62.132 euros, en 2012 de 71.341 euros ;
que selon la pièce 30 (attestation de M.T. expert-comptable) les revenus commerciaux ont été de 61.109 euros en 2010 et 72.119 euros en 2011, que selon ses écritures et la pièce 9, ses "salaires " au titre de ses différentes sociétés se sont élevés en 2009 à 64.884 euros, en 2010 à 99.604 euros, en 2011 à 78.500 euros, en 2012 à 62.000 euros, et selon la pièce 28-1 (déclaration sur l'honneur en date du 18 février 2014) à 85.599 euros, pour 2013, que ses charges s'élevaient cette année-là à 39.483 euros selon le même document hors reconnaissance de dettes, Attendu que selon les dernières pièces produites (projets de déclaration non signés par l'intéressé mais contresignés par l'expert-comptable M.T.), il a déclaré en 2014 un revenu au titre des salaires de 12.000 euros, 6073 euros de revenus industriels et commerciaux non professionnels (revenus exonérés 128.854 euros), 18.937 euros de revenus industriels et commerciaux professionnels et un déficit foncier sur les 3 structures S.C.I. 79, SCI Techno et W.C.C.B de 13.054 euros ; que M. X... est propriétaire en propre :
-d'un chalet à Fontcouverte La Toussuire (Savoie) acquis en 2008 au prix de 565.000 euros selon madame et d'une valeur de 500.000 euros selon monsieur,
- de deux résidences de vacance situées au [...] : la nue-propriété d'une habitation légère de loisir acquise en 2003 au prix de 76.000 euros et la pleine propriété d' un mobile-home installé à demeure et acquis en 2004 au prix de 54.000 euros,
-d'un chalet sis à Fontcouverte La Toussure (Savoie) et acquis en 2004 230.000 euros selon monsieur et 217.000 euros selon madame, Que ces biens seraient cependant grevés de différents prêts, à hauteur de 339.751 euros, selon monsieur qui n'en justifie cependant pas, Qu'il y a lieu d'observer qu'en tout état de cause, il se constitue ainsi un patrimoine ; que Mme Y... est responsable service clientèle à la caisse d'épargne et dispense des cours à la faculté de Saint-Etienne, Qu'elle perçoit un revenu de 2194 euros par mois, que son loyer s'élève à 590 euros ; qu'alors que M. X... expose dans ses conclusions que le couple disposait, après paiement des crédits, d'une somme pour vivre avec leurs enfants de 3.300 euros, Mme Y... n'établit pas que la famille avait un train de vie dispendieux ; qu'il y a lieu d'observer que Mme Y..., en dehors de la période de son arrêt maladie lié à son cancer et de ses congés maternité, a toujours travaillé, qu'elle ne fait pas valoir et ne justifie pas avoir sacrifié sa carrière au profit de son époux ou de ses enfants ; qu'âgée de 46 ans, il lui reste de nombreuses années pour progresser professionnellement et améliorer ses droits à la retraite ; que M. X..., en proposant la somme de 45.000 euros de prestation compensatoire, ne conteste pas la disparité existante au sens de l'article précité, que la divergence entre les parties ne porte pas conséquent que sur le quantum de la prestation compensatoire ; qu'au vu des éléments précités, il y a lieu de confirmer la décision déférée » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « selon l'article 270 du code civil, si le divorce met fin au devoir de secours entre époux, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives » ; selon l'article 271 du code civil, La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

A cet effet, le juge prend en considération notamment :
- la durée du mariage ;
- l'âge et l'état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa ;

Qu'il est constant que les époux ont été mariés 13 ans, dont 10 ans de vie commune, que deux enfants sont issus de leur union, que l'époux est âgé de 45 ans et l'épouse de 40 ans ; que Mme Y... perçoit 2606,17 euros de salaire (selon sa déclaration sur l'honneur) outre 90 euros par mois pour des cours à l'université ; qu'elle travaille actuellement à 90 % ; le montant ainsi retenu intègre les différents avantages dont elle bénéficie ; qu'elle bénéficie également des prestations familiales pour 125,78 euros mais cette allocation sera désormais versée au père ; qu'elle supporte un loyer à hauteur de 550 euros par mois, les charges de copropriété de l'appartement d'Adge à hauteur de 20 euros par mois (la moitié d'une somme de 40 euros par mois) outre les charges courantes ;
qu'elle ne partage pas ses charges ce qui est confirmé par l'attestation de son compagnon et les éléments recueillis dans la mesure d'investigation en assistance éducative et dans l'audition de Geoffroy ; que la situation professionnelle et patrimoniale de M. X... est assez complexe puisque M. X... a développé son activité professionnelle à travers plusieurs sociétés principalement dans le domaine du bâtiment ; qu'il y a 22 sociétés au total selon les éléments constants (20 sociétés) et les pièces apportées par Mme Y... pour 2 sociétés ; que selon les cas, il est soit associé unique soit il possède une partie des parts (lui-même ou ses sociétés) ; 7 sociétés sont propriétaires de biens immobiliers dont la SCI Fauriel qui comporte l'appartement évoqué ciaprès et dans laquelle Mme Y... détient 1/5e des parts ; que ces sociétés ont des activités diverses ; que certaines sont actuellement déficitaires d'autres pas ;
que certaines sociétés ont vocation à être génératrices de revenus à terme mais sans certitude dans une économie de marché imprévisible et dans un contexte économique peu favorable dans le domaine du bâtiment ; que pour les sociétés qui sont propriétaires de biens immeubles, il peut être noté qu'il existe aussi un important passif correspondant ; que M. X... perçoit, selon sa déclaration sur l'honneur du 18 février 2014, sur une base annuelle, 10 800 euros de salaire, 62 876 euros de BIC, 10 840 euros de revenus fonciers et 3 984 euros d'autres revenus à compter avec un déficit au titre des BNC de 2 901 euros soit un total de 85 599 euros par an et par conséquent des revenus mensuels de 7 133 euros ; qu'il indique supporter des échéances de crédits pour 3 290 euros par mois hors reconnaissances de dettes et hors impôts et charges courantes ; qu'il n'est pas imposable sur le revenu 2012 ;
que ces éléments apparaissent compatibles avec les nombreuses pièces versées aux débats et notamment les documents comptables ; que ce montant de revenus sera retenu ;
qu'il bénéficiera désormais également des prestations familiales pour 128 euros mais cet élément qui se rapporte strictement aux besoins des enfants n'a pas à être pris en compte pour la prestation compensatoire ;
qu'il est propriétaire du logement qu'il occupe et supporte les charges courantes ;
qu'il partage ses charges avec sa compagne qui travaille et a quatre enfants à charge ; qu'il assumera désormais la charge intégrale des besoins de Geoffroy et Aymeric puisque la résidence habituelle des enfants est fixée chez lui et qu'il ne demande pas de contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants à la charge de la mère ; que pour les enfants, il existe des frais de scolarité, de loisirs et de soins ; que les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens et il y a lieu de rappeler que les prestation compensatoire n'a pas vocation à pallier les inconvénients du régime matrimonial choisi ;
que pour autant, il y a lieu de prendre en compte l'intégralité de la situation patrimoniale des époux et d'indiquer quels sont leurs biens propres selon les critères de l'article 271 du code civil ;
que le patrimoine propre de M. X... est composé des éléments suivants :
- un chalet à Fontcouvert la Toussuire pour une valeur comprise entre 500 000 euros (selon M. X...) et 565 000 euros selon Mme Y...) ;
que le prix d'achat était de 565 000 euros ; qu'un chalet à Fontcouvert la Toussuire pour une valeur comprise entre 230 000 euros (selon M. X...)
et 217 000 euros selon Mme Y...) ; que le prix d'achat était de 217 000 euros ;
- un chalet à Fontcouvert la Toussuire pour une valeur comprise entre 230 000 euros (selon M. X...) et 217 000 euros (selon Mme Y...) ;
que le prix d'achat était de 271 000 euros ;
- qu'un mobil-home pour environ 50 000 euros (pas de justificatifs) ;
- 4/5ème de la maison de Saint-Just-Saint-Rambert qui est estimée au plus bas par M. X... à 430 000 euros et au plus haut par Mme Y... à 720 000 euros ; qu'il y a deux estimations de professionnels pour 450 000 euros ; que ce bien a été acheté 4250 000 euros en 2006 et il est probable que sa valeur se situe effectivement autour de 450 000 euros ;
qu'il n'est pas démontré que M. X... possède en propriété d'autres biens immobiliers ; qu'il possède aussi ses parts sociales dans les différentes sociétés ; que le patrimoine propre de Mme Y... est composé des éléments suivants :
- La moitié d'un appartement de 45 m2 à Adge en indivision ; que Mme Y... évalue sa part à 15 000 euros et M. X... estime que sa part est plus proche de 75 000 euros pour le marché local ; qu'il n'est pas démontré que cet appartement puisse avoir une valeur aussi faible que Mme Y... le prétend ;
- 1/5ème de la maison de Saint-Just-Saint-Rambert ;
qu'il doit aussi être indiqué que la S.C.I. Fauriel des époux a vendu un appartement situé ... pour 157 000 euros ; que M. X... a 4/5ème des parts et Mme Y... 1/5ème ;
que s'agissant de la carrière des époux, il peut être noté que M. X... a toujours travaillé et Mme Y... a quasiment toujours travaillé en dehors des périodes de congés maladie et grossesse ; que rien n'indique que Mme Y... ait sacrifié sa carrière pour les besoins de M. X... ou de la famille ; que M. X... ne présente pas de problèmes de santé particulier et rien n'indique que Mme Y... ne puisse pas travailler à l'avenir en dépit de la grave maladie qu'elle a eue ;
qu'au regard de la situation respective des parties et notamment de la différence importante entre les revenus de Mme Y... et M. X... et de leur situation patrimoniale, il y a lieu de retenir que la rupture du mariage va entraîner une disparité dans les conditions de vie respectives des époux ce qui n'est d'ailleurs pas contesté ;
qu'il doit être tenu compte de l'intégralité de ces éléments et du fait que M. X... prendra en charge la totalité des besoins des enfants ;
qu'il y a lieu de fixer la prestation compensatoire au profit de Mme Y... et à la charge de M. X... la somme de 80 000 euros en capital à verser sous la forme 8 annuités de 10 000 euros chacune ;

ALORS QUE pour fixer une prestation compensatoire, le juge doit procéder à une évaluation au moins sommaire du patrimoine des époux ; qu'en l'espèce, pour fixer le montant de la prestation compensatoire due par M. X... à la somme de 80 000 euros et débouter ainsi l'épouse de sa demande tendant à obtenir 750 000 euros, la cour d'appel s'est bornée à retenir que « M. X... est architecte, et a développé son activité à travers plusieurs sociétés (une vingtaine employant en 2011 25 salariés) dans lesquelles ses participations sont diverses, que si le patrimoine des 6 sociétés propriétaires du parc immobilier est élevé, elles remboursent également des crédits d'un montant conséquent » (arrêt attaqué p.10 dernier §) ; qu'en statuant ainsi, sans procéder à une évaluation, même sommaire des parts détenues par M. X... dans ses différentes sociétés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des 270 et 271 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-27968
Date de la décision : 09/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 29 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 nov. 2016, pourvoi n°15-27968


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.27968
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