LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y...;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 27 février 2014), que M. X... a donné à bail à Mme Z...un local commercial vide de tout agencement ou matériel et destiné à l'exploitation d'un bar-restaurant, du 25 avril au 15 octobre 2009, moyennant une indemnité forfaitaire de 11 500 euros ; que, n'ayant pas obtenu l'autorisation administrative d'exploiter, Mme Z...a assigné M. X... en résiliation du bail, en restitution des sommes versées et en dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à Mme Z...une certaine somme correspondant aux chèques encaissés au titre des loyers ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat stipulait que le preneur prendrait les lieux dans leur état actuel sans pouvoir exiger aucune réparation ni adaptation et retenu à bon droit que cette clause ne libérait pas M. X... de son obligation de délivrer la chose définie au bail et ses accessoires indispensables à l'utilisation normale et sans danger des lieux, conformément à leur destination, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que le constat d'état des lieux, quoique non dressé préalablement à l'entrée en jouissance, était toutefois probant et qui a retenu que le bailleur avait manqué à son obligation de délivrer un local clos et conforme aux normes de sécurité puisqu'il n'avait pas fait réaliser la mise en conformité de l'installation de gaz et n'avait déposé aucun dossier auprès de la commune concernant la sécurité et la défense incendie alors qu'il s'agissait d'une réglementation applicable à tous les établissements recevant du public tel un bar-restaurant, a pu déduire de ces seuls motifs qu'il avait manqué à son obligation de délivrance et devait rembourser à Mme Z..., qui avait été privée de la possibilité d'exploiter les lieux, la somme de 11 500 euros qu'elle avait versée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à Mme Z...la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné un bailleur commercial, M. X..., à payer au preneur, Mme Z..., la somme de 11 500 euros correspondant aux différents chèques encaissés au titre des loyers ;
AUX MOTIFS QUE l'article 1719 du code civil prévoit l'obligation pour le bailleur de délivrer au preneur la chose louée, dont il ne peut se décharger par une clause contraire, que ce soit par le biais d'une clause d'acceptation des lieux en l'état ou par une clause relative à l'exécution de travaux ; qu'en conséquence, les stipulations du contrat de location du 9 avril 2009 selon lesquelles « le preneur prendra les lieux loués dans leur état actuel sans pouvoir exiger aucune réparation ni adaptation » ne libérait pas M. X... de cette obligation de délivrer la chose définie au bail et ses accessoires indispensables à l'utilisation normale et sans danger des lieux, conformément à leur destination, même si le contrat concernait un local dépourvu d'agencements intérieurs ; que le fait que Mme Z...ait séjourné dans les locaux à l'invitation du précédent locataire est sans incidence sur l'obligation de délivrance à la charge du bailleur ; que le contrat de location stipulait « les locaux faisant l'objet du présent bail devront exclusivement être consacrés par le preneur à l'exploitation d'un commerce de bar restaurant à l'exclusion de tout autre » ; que se fondant sur les stipulations de l'article 6 du paragraphe « charges et conditions », M. X... soutient que les locaux sont réputés avoir été pris en parfait état, en l'absence d'un état des lieux dressé préalablement à l'entrée en jouissance ; que cependant, le constat d'huissier dressé le 18 mai 2009 n'en demeure pas moins probant dès lors que la jouissance des lieux n'avait pas encore commencé, en l'absence de tout début d'exploitation ; qu'il en ressort un certain nombre de désordres ou non conformités ; que même si le bailleur n'était pas tenu de mettre en place une grille de sécurité, il devait délivrer un local clos, ce qui n'était pas le cas puisqu'une simple traction sur la porte permettait à un tiers d'entrer dans les lieux ; que par ailleurs, le bail stipule que certaines installations électriques nécessitaient la visite d'un électricien ainsi qu'une remise aux normes actuelles, de même que les installations de gaz ; que cette mention démontre bien que les locaux n'étaient pas en état d'être utilisés à compter du 25 avril 2009 conformément à leur destination contractuelle ; que M. X... a fait réaliser des travaux de mise en sécurité électrique des locaux le 13 mai 2009, de sorte qu'il s'est acquitté partiellement et tardivement de son obligation de délivrance ; qu'en revanche, il n'a pas fait réaliser la mise en conformité de l'installation de gaz ; qu'il ressort de la note du service de l'urbanisme de la ville qu'aucun dossier n'avait été déposé concernant la sécurité et la défense incendie ; que le bailleur a donc manqué à son obligation de délivrer, dès le 25 avril 2009, un local clos et conforme aux normes de sécurité en matière d'électricité et de gaz, privant ainsi la locataire de la possibilité d'exploiter les lieux ;
et AUX MOTIFS ADOPTES QUE la clause selon laquelle le preneur prenait à sa charge l'entretien complet de la devanture et de la fermeture ne peut faire échec à l'obligation générale d'entretien de la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle est louée ; que si la clause générale du bail selon laquelle les locaux étaient loués en l'état nus, le preneur s'engageant à tout remettre aux normes actuelles de sécurité, notamment les installations de gaz et d'électricité, n'est pas irrégulière, elle doit être assortie de contreparties pour le preneur explicitement visées au bail, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
1°) ALORS QUE le bail commercial conclu le 9 avril 2009 entre M. X..., bailleur, et Mme Z..., preneur, stipulait qu'« un état des lieux et caution sera dressé par ministère d'huissier préalablement à l'entrée en jouissance, aux frais du preneur. Le preneur reconnaît d'ailleurs avoir visité ceux-ci au préalable. Si le preneur ne satisfait pas à cette obligation d'état des lieux par ministère d'huissier, à la prise des locaux, ceux-ci seront réputés être loués dans un parfait état », ce qui avait conduit M. X... à soutenir que, faute d'avoir fait établir un état des lieux lors de l'entrée dans les lieux loués, le 25 avril 2009, Mme Z..., qui ne pouvait se prévaloir du constat d'huissier établi presque un mois plus tard, était irrecevable et non fondée à arguer de non-conformités ; qu'en décidant ainsi que le constat d'huissier dressé le 18 mai 2009 n'en demeurerait pas moins probant dès lors que la jouissance des lieux n'aurait pas encore commencé, en l'absence de tout début d'exploitation, la cour d'appel, qui a ainsi retenu que ledit constat pouvait être établi à la date du début d'exploitation du local loué nu, a dénaturé la clause du contrat qui imposait l'établissement dudit constat dès l'entrée du preneur dans les lieux, et non à une date ultérieure, laquelle aurait dépendu de surcroît de la seule volonté du preneur, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, la clause dérogatoire prévue dans le bail commercial, stipulant que « le preneur prendra les lieux loués dans leur état actuel sans pouvoir exiger aucune réparation ni adaptation », est opposable au preneur commercial par le bailleur, même tenu à une obligation de délivrance des lieux loués, dès lors que les réparations ne tendent pas à réparer un vice structurel de l'immeuble ou à remédier à la vétusté inhérente et que n'est pas en cause l'entretien de l'immeuble en cours de bail ; qu'en déclarant inopposable la clause stipulée en ces termes dans le bail commercial conclu entre M. X... et Mme Z..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, relatives aux simples insuffisances de fermeture du local, et des installations électriques et de gaz, rendues nécessaires par l'usage spécifique du local loué nu, insuffisances non susceptibles de justifier l'inapplicabilité de la clause dérogatoire à l'obligation de délivrance du bailleur, au regard de l'article 1719 du code civil ;
3°) ALORS QUE tout en constatant que M. X... avait dès le 13 mai 2009, soit moins de trois semaines après la conclusion du bail, fait effectuer des travaux d'électricité, la cour d'appel qui, tout en retenant que ces diligences caractérisaient la satisfaction partielle quoique tardive de son obligation de délivrance, l'a cependant condamné pour manquement à son obligation de délivrance du bien loué, à rembourser à Mme Z...l'intégralité des loyers versés, n'a ainsi pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1719 du code civil ;
4°) ALORS QUE le bailleur n'est pas tenu de supporter la charge de travaux prescrits par l'autorité administrative lorsqu'ils n'ont pas pour objet de rendre les lieux conformes à leur destination contractuelle et qui ne sont devenus nécessaires qu'en raison de l'utilisation spécifique des locaux décidée par le locataire ; que, pour condamner M. X... au remboursement des loyers commerciaux versés d'avance par Mme Z..., la cour d'appel a retenu qu'il avait manqué à son obligation de délivrance à défaut d'établissement des dossiers et de réalisation de travaux exigés pour assurer la sécurité du local destiné à usage de bar-restaurant devant recevoir le public ; qu'en mettant ainsi à la charge de M. X... l'établissement de dossiers et la réalisation de travaux exigés par la nature spécifique de l'usage de restauration, auquel le locataire destinait le local loué nu, la cour d'appel a méconnu la nature et l'étendue des obligations pesant sur celui-ci, violant l'article 1719 du code civil ;
5°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel M. X... avait fait valoir que la successeur de Mme Z..., Mme A..., dans les lieux loués n'avait connu aucune difficulté avec l'administration ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent de nature à établir que les difficultés d'exploitation du local loué nu étaient entièrement imputables à Mme Z...et aucunement à M. X..., la cour d'appel n'a pas satisfait l'obligation de motivation de son arrêt et a violé l'article 455 du code de procédure civile.