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02/11/2016 | FRANCE | N°16-82376

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 novembre 2016, 16-82376


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jérôme X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 29 mars 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs en récidive et recel, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guéri

n, président, M. Buisson, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambr...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jérôme X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 29 mars 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs en récidive et recel, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Buisson, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller BUISSON, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CUNY ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 28 juillet 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 230-32, 230-33, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité des opérations de géolocalisation ;
" aux motifs qu'une mesure de « géo-localisation » consiste à surveiller les déplacements d'une personne par le suivi de son téléphone mobile et l'article 230-32 du code de procédure pénale autorise l'utilisation de tout moyen technique destiné à la localisation, en temps réel, d'une personne à l'insu de celle-ci, d'un véhicule ou de tout autre objet sans le consentement de son propriétaire, si cette opération est exigée par les nécessités de l'enquête ; qu'il ressort en l'espèce de l'examen de la procédure que le téléphone portable de Mme Nadia Y..., mère du mis en cause, n'a jamais été géolocalisé en temps réel, que sur ce point, les enquêteurs précisent d'ailleurs « portable crypté ne permettant ni son interception, ni sa géolocalisation en temps réel » (D62) ; que, dès lors, les enquêteurs ont demandé à l'opérateur, avec l'autorisation du procureur de la République (D 00010), les « fadettes » quotidiennes de cet appareil « avec un léger décalage dans le temps » ; qu'il apparaît ainsi que le 24 juin 2015 à 22 heures, l'enquêteur établissait un procès-verbal aux termes duquel « consultons le listing de la fadette de la puce anglaise du portable Blackberry de M. X.... Constatons qu'il se déplace comme suit : ce jour, à 8h32 il borne au Beausset, puis à Aix en Provence … le dernier point de la fadette est Ensesheim à 19 heures 54 … » ; qu'il s'ensuivait, le 25 juin 2015 à 4 heures, la mise en place d'un dispositif de surveillance sur l'autoroute A7 dont l'objet « sera de détecter le passage et engager la filature d'un véhicule susceptible de transporter des produits stupéfiants » ; qu'il ne s'agit donc que de l'étude d'un « listing » des bornes sollicitées par le téléphone portable sans qu'aucun procédé technique de nature à permettre le suivi en temps réel du véhicule ne soit mis en place ; que la délivrance de cette liste de données archivées ne saurait être assimilée à une géolocalisation ;
" alors que le procédé consistant à géolocaliser une personne grâce aux bornes activées par son téléphone portable constitue une ingérence dans son droit au respect de la vie privée, soumise à l'exigence de nécessité prévue par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en conséquence, cette mesure doit respecter les conditions posées par l'article 230-33 du code de procédure pénale, et notamment être ordonnée par un magistrat indépendant au-delà d'une durée de quinze jours ; qu'en validant le suivi d'un téléphone portable par récupération quotidienne de fadettes, contrôlé par le seul procureur de la République pour une période de près d'un mois et demi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes précités ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du dossier de la procédure que le procureur de la République a confié à l'antenne de police judiciaire de Toulon une enquête ouverte pour non-justification de ressources à l'encontre de M. X... soupçonné, notamment, d'avoir organisé un trafic de stupéfiants ; que des surveillances physiques et investigations téléphoniques aussitôt entreprises ont corroboré objectivement les indices antérieurement recueillis ; qu'une perquisition effectuée lors de l'interpellation de M. X... a abouti à la saisie de deux téléphones portables dont l'un, attribué à l'intéressé, a permis, par la réquisition de fadettes auprès d'opérateurs téléphoniques, d'établir ses déplacements pendant une durée de quatre mois ; que placé en garde à vue, M. X... a nié toute participation à la commission des faits reprochés ; qu'il a été mis en examen des chefs susvisés le 30 juin 2015 ;
Attendu que, par requête du 14 décembre 2015, M. X... a sollicité, notamment, l'annulation de la géolocalisation effectuée pendant l'enquête de police sur les instructions du procureur de la République, en faisant valoir qu'ont été méconnues les dispositions des articles 230-32 et suivants du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour rejeter ladite requête, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que les opérations critiquées ont consisté non pas en une géolocalisation en temps réel pour suivi dynamique d'un mis en cause, seule envisagée par les dispositions des articles 230-32 et suivants précités, mais en une géolocalisation en temps différé pour reconstitution ultérieure de son parcours, régulièrement exécutée sur le fondement de l'article 77-1-1 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux novembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-82376
Date de la décision : 02/11/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GEOLOCALISATION - Officier de police judiciaire - Pouvoirs - Réquisitions aux fins de géolocalisation - Géolocalisation en temps différé - Géolocalisation en temps réel - Distinction

Doivent être distinguées, parmi les géolocalisations mises en oeuvre par la police judiciaire, celles qui, accomplies en temps réel pour suivi dynamique d'un mis en cause, sont seules régies par les dispositions des articles 230-32 et suivants du code de procédure pénale et celles qui, réalisées en temps différé pour reconstitution ultérieure de son parcours, sont exécutées sur le fondement de l'article 77-1-1 dudit code


Références :

articles 77-1-1, 230-32 et suivants du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-En-Provence, 29 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 nov. 2016, pourvoi n°16-82376, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Cuny (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Buisson
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 09/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.82376
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