LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique pris en ses trois premières branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 7 juillet 2015), que M. et Mme X... ont confié la rénovation de leur hôtel à la société Arch'Industrie selon un contrat « d'architecte contractant général » comprenant une offre « clé en mains » forfaitaire, toutes prestations confondues, pour un certain prix ; que la société Arch'Industrie a confié deux lots à la société Menuiserie Pascal Y... (la société Y...) et a commandé des travaux supplémentaires ; qu'un différend étant survenu sur la qualité des travaux, le paiement de ceux-ci et la nature des relations contractuelles entre les parties, M. et Mme X... ont assigné la société Y... et la société Arch'Industrie, aujourd'hui en liquidation judiciaire ; que M. X... est décédé en cours d'instance ; qu'un arrêt irrévocable du 12 janvier 2010 a dit que la convention liant le maître d'ouvrage et la société Arch'Industrie était un contrat de louage d'ouvrage qui comporte un mandat donné à cette société de faire réaliser par les entreprises la totalité des travaux mentionnés au contrat ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement et de la condamner à payer une certaine somme à la société Y... au titre du solde des travaux ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la société Arch'Industrie avait contracté les marchés avec la société Y... en qualité de mandataire de M. et Mme X..., que ce mandat avait comme seule limite le coût total de l'opération dont les entreprises ignoraient le montant qu'elles ne pouvaient vérifier, la cour d'appel a pu, sans méconnaître l'objet du litige, retenir que la loi sur la sous-traitance ne pouvait s'appliquer et que, les circonstances autorisant la société Y... à ne pas vérifier les limites exactes du pouvoir du mandataire, Mme X... était tenue, sur le fondement du mandat apparent, de payer le solde des travaux à l'entreprise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa quatrième branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Menuiserie Pascal Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept octobre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour Mme Z..., épouse X...
Le pourvoir fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement rendu le 2 juillet 2013 par le tribunal de grande instance de Bonneville et d'avoir condamné Mme Angelita Z..., veuve X..., aussi bien personnellement qu'en sa double qualité d'héritière de son mari décédé et d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de son fils mineur Alexandre X..., à payer à la société menuiserie Pascal Y... la somme principale de 73 668,27 euros outre les intérêts légaux ;
AUX MOTIFS QUE dans le dispositif de son arrêt du 12 janvier 2010, la cour a indiqué que par application des dispositions des articles 2.1 et 6.2 du contrat conclu avec la société Arch'industrie, le maître de l'ouvrage donnait mandat au constructeur de faire réaliser par les entreprises de son choix la totalité des travaux mentionnés au contrat, et compris dans le prix global de 1 241 448,00 euros, sans avoir à solliciter d'autres accords du client, que celui implicitement contenu dans le présent contrat, et que ce contrat s'analysait également comme un louage d'ouvrage, puisqu'en effet, un maître d'oeuvre peut cumuler cette qualité avec celle de mandataire du maître d'ouvrage ; que les conditions générales du "contrat de travaux" du lot menuiseries bois [intérieures et extérieures]/vitrerie, de même que celles du lot "fermeture", conclus entre la société Arch'industrie et la société menuiserie Pascal Y... contiennent en préambule une clause selon laquelle l'entrepreneur « (...) s'engage à réaliser des travaux de bâtiment pour le compte de M. et Mme X... – hôtel "les mélèzes", maître d'ouvrage, lequel a pour se faire, confié mandat à la SARL Arch'industrie, architecte contractant général mandataire, (...) » ; que le cahier des clauses administratives particulières comporte en page 5 une clause de même nature ; qu'en conséquence la société Arch'industrie a bien contracté les marchés avec la société menuiserie Pascal Y... en la qualité de mandataire des époux X... ; que, plus loin, le même préambule des conditions générales mentionne que l'architecte contractant général mandataire a contracté avec les époux X..., « selon une formule dite "clés en main ", c'est-à-dire à prix, délais et consistance convenus » ; que selon l'article 1998 du code civil, le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné, il n'est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement ; que toutefois le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, même en l'absence de faute susceptible de lui être reprochée, si la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ; que le mandat donné à la société Arch'industrie ne comportait comme seule limite que le coût total de l'opération ; que chacun des entrepreneurs, avait connaissance de cette limite, dont ils ignoraient toutefois le montant qui ne figurait pas dans leur marché, qu'ils n'avaient aucune possibilité de vérifier que ce montant n'était pas dépassé, que seul l'architecte contractant général pouvait le faire ; qu'en conséquence les époux X... sont tenus de payer les sommes dues à la société menuiserie Pascal Y... en vertu du marché conclu avec celle-ci par la société Arch'Industrie, que l'expert propose le décompte suivant ; Lot menuiseries bois intérieures - vitrerie :
- Marché en date du 20 Novembre 2006 (menuiseries) 08 177
- Marché en date du 20 novembre 2006 (fermetures) 16 132,84
- Avenants (suivant documents communiqués) :
2 portes de secours 3 032,53 2 blocs-portes dont 1 coupe-feu 1 893,66
Couvre-joints pour faux-aplombs 1 058,08
6 dormants de fenêtres 1 254,31
Blocs-portes cage escalier + chaufferie 5 652,49
A déduire :
- Fourniture et pose de 6 paires de volets façade route 3 021,09
- Pose de 5 paires de volets 598
- solde 133 581,82
- Compte prorata 2 % 2 671,64 solde : 130 910.18 euros
- Acomptes :
- Situation n° 1 : - 30 438,35
- Situation n° 2 : - 4 759,40
22 044,16
Solde en faveur de la SARL Y... TTC 73 668,27 euros ;
Qu'il convient en conséquence de condamner les consorts X... à payer la somme de 73 668,27 euros ;
1° Alors qu'un tiers ne peut agir contre un mandant, sur le fondement de la théorie du mandat apparent, que s'il a pu croire, trompé de bonne foi sur l'étendue apparente des pouvoirs d'un mandataire, qu'en contractant avec ce dernier il contractait avec le mandant lui-même ; que ne peut se prévaloir ni d'une telle croyance légitime ni d'un mandat apparent le tiers sous-traitant qui, en vertu du contrat qu'il a conclu avec l'architecte contractant général, agit directement contre le maître d'ouvrage sur le fondement de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance afin d'obtenir paiement des prestations qu'il a effectuées au titre de cette convention, laquelle ne le liait qu'à l'architecte contractant général ; qu'en condamnant dès lors Mme X..., maître d'ouvrage, à payer différentes sommes à la société Y..., sous-traitante de la société Arch'Industrie, sur le fondement d'un mandat apparent, aux motifs inopérants que le maître de l'ouvrage avait confié à cette dernière un mandat limité au coût total de l'opération et que la société Y... n'avait pu vérifier si ce mandat était limité, la cour a violé l'article 1998 du code civil par fausse application ;
2° Alors que l'action directe du sous-traitant contre le maître de l'ouvrage est encadrée par les dispositions de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 ; qu'en l'espèce, la société Y..., sous-traitante de la société Arch'Industrie [architecte contractant général], a explicitement agi contre Mme X... [maître de l'ouvrage] au visa de ce texte [notamment de son article 14-1], en demandant à la cour de juger recevable et bien fondée son action directe contre elle pour obtenir paiement d'une somme de 88 043,29 € ; que cette demande ne pouvait dès lors être examinée qu'au regard des dispositions susvisées ; qu'en faisant droit à la demande de la société Y... sur le fondement d'un mandat apparent, au motif inopérant que la société Arch'Industrie était elle-même mandataire des maîtres de l'ouvrage, la cour a violé les articles 3, 12 et 14-1 de la loi susvisée par refus d'application ;
3° Alors que dans ses écritures, la société Y... a exclusivement dirigé son action directe contre Mme X... sur le fondement des dispositions de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975, en raison du contrat de sous-traitance qu'elle a conclu avec la société Arch'Industrie, architecte contractant général; que Mme X... a elle-même contesté la demande de la société Y... sur le fondement de la même loi ; qu'en décidant dès lors de faire droit à la demande de condamnation de Mme X..., maître de l'ouvrage, sur le fondement d'un mandat apparent dont l'existence n'était pas débattue, la cour a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
4° Alors, en toute hypothèse, que dans ses écritures, Mme X..., maître de l'ouvrage, avait explicitement soutenu que la société Y..., qui agissait directement contre elle en tant que sous-traitante de la société Arch'Industrie pour les lots de "menuiseries bois [intérieures et extérieures / vitrerie]" et de "fermetures", sur le fondement des dispositions de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975, ne remplissait pas les conditions d'exercice de cette action directe ; qu'en décidant de faire droit à la demande de la société Y..., sans répondre à ce chef des conclusions de Mme X..., dont l'examen l'eût contrainte à s'interroger pour le moins sur l'application du texte susvisé, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.