La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/10/2016 | FRANCE | N°15-21673

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2016, 15-21673


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor An III, ensemble le principe de l'autorité de la chose jugée en matière administrative ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Les Sources d'azur, qui exploite une maison de retraite pour personnes âgées dépendantes, a engagé Mme X... le 26 novembre 2003 en qualité d'employée de collectivité au service restauration ; que la salariée a été élue déléguée du personnel le 2 décembre 2005 ; qu'elle a sai

si le 21 octobre 2010 la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment à...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor An III, ensemble le principe de l'autorité de la chose jugée en matière administrative ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Les Sources d'azur, qui exploite une maison de retraite pour personnes âgées dépendantes, a engagé Mme X... le 26 novembre 2003 en qualité d'employée de collectivité au service restauration ; que la salariée a été élue déléguée du personnel le 2 décembre 2005 ; qu'elle a saisi le 21 octobre 2010 la juridiction prud'homale d'une demande tendant notamment à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ; que pendant le cours de cette instance, d'abord absente pour cause de maladie, la salariée a ensuite été déclarée inapte à son emploi par le médecin du travail selon avis définitif du 19 janvier 2011 ; qu'elle a été licenciée le 15 mars 2011 pour inaptitude ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre d'une discrimination syndicale et d'un harcèlement moral, l'arrêt retient qu'elle ne justifie d'aucun fait ou agissement de son employeur permettant de présumer l'existence à son encontre d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'inspecteur du travail avait rejeté une première fois la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur en raison notamment de la convergence d'éléments conduisant à retenir le caractère discriminatoire de la mesure sollicitée et qu'une nouvelle demande d'autorisation de licenciement avait été rejetée par décision de l'inspection du travail dès lors que l'enquête n'avait pas permis d'exclure le lien entre les procédures engagées et les mandats de Mme X..., ces motifs, soutien nécessaire des décisions de refus, s'imposant au juge judiciaire, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne l'association Les Sources d'azur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Les Sources d'azur à payer 3 000 euros à la SCP Boutet-Hourdeaux ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE sur les demandes d'annulation de sanctions disciplinaires et de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme X... soutient avoir fait l'objet de harcèlement moral et de discrimination syndicale à la suite de son élection aux fonctions de déléguée du personnel en décembre 2005 ; qu'elle fait ainsi d'abord grief à l'employeur, en réponse à une réclamation par elle émise en qualité de déléguée du personnel, de l'avoir informée, par lettre du 12 décembre 2005, de l'instauration d'une réunion de l'ensemble du personnel pour consultation relativement à l'organisation du temps de repos quotidien des salariés ; qu'une telle initiative de l'employeur, loin d'apparaître comme une discrimination syndicale, traduit au contraire l'intérêt normalement porté par l'employeur à la revendication émise par la représentante du personnel de l'entreprise ; que l'avertissement par ailleurs notifié à Mme X... par lettre du 13 janvier 2006 pour avoir refusé délibérément et sans motif légitime d'effectuer une tâche banale et conforme à ses fonctions d'employée de collectivité au service restauration, en l'espèce l'instruction reçue de servir des cafés, est établi et correspond bien à une insubordination fautive ; qu'il en est de même des avertissements notifiés à l'intéressée les 19 janvier 2006, 16 mai et 13 octobre 2006, concernant de semblables faits réitérés d'insubordination caractérisée et aussi de maltraitance envers des personnes âgées pensionnaires de la maison de retraite, ainsi qu'il ressort des très nombreuses lettres et attestations détaillées émanant d'autres préposés de l'entreprise ou parents de résidents ; que l'attestation en sens contraire du 28 septembre 2007 de l'ancienne directrice de la maison de retraite Mme Y..., qui déclare avoir subi « des pressions et harcèlement de ses supérieurs hiérarchiques pour licencier Mme Patricia X... » doit être considérée comme partiale et non probante car établie deux jours après le propre licenciement de Mme Y... pour faute grave, et sachant que le conseil de prud'hommes de Draguignan ensuite saisi par l'intéressée a jugé son congédiement fondé par décision du 30 novembre 2010 ; que les mises à pied disciplinaires de 6 jours assortissant les avertissements des 16 mai et 13 octobre 2006 apparaissent en outre proportionnées aux manquements avérés et répétés de la salariée ; que le fait par l'employeur d'avoir signifié à la salariée ces sanctions par huissier plutôt que par lettre recommandée est un mode de notification légal auquel il était loisible à l'association Les Sources d'Azur de recourir, eu égard à l'état conflictuel de la relation de travail entre les parties, sans que puisse en être déduit ni harcèlement moral ni intention discriminatoire ; que l'allégation de Mme X... selon laquelle les plannings de travail du personnel auraient été modifiés en 2008 de manière discriminatoire à son égard n'est pas démontrée par les pièces produites ; qu'il est constaté que le refus de l'inspecteur du travail par décision du 16 novembre 2007 d'autoriser son licenciement est explicitement intervenu au bénéfice d'un doute en faveur de salariée ; qu'il s'en déduit que l'autorisation sollicitée n'était empreinte de légèreté blâmable mais au contraire sérieusement motivée ; qu'il en est de même, à propos de nouveaux manquements commis par l'intéressée (fouille non autorisée le 6/7/2008 des bureaux et armoires du service administratif de l'entreprise ; insultes proférées envers d'autres salariés), de la seconde décision de refus d'autorisation de la licencier prise par l'inspecteur du travail le 28 novembre 2008 au motif que « les fautes reprochées à Mme X... ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier d'un licenciement » ; qu'il est enfin constaté que l'avis d'inaptitude de Mme X... émis par le médecin du travail le 19 janvier 2011 est motivé pour des raisons purement physiologiques, sans nulle cause psychique en rapport avec un possible harcèlement ; qu'il apparaît en conséquence que les manquements de la salariée à ses obligations professionnelles expliquent seuls les sanctions appropriées qui lui ont été infligées ; que Mme X... ne justifiant d'aucun fait ou agissement de son employeur permettant de présumer l'existence à son encontre d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale, la demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'association Les Sources d'Azur doit par suite être rejetée comme infondée ; que le jugement déféré sera dès lors infirmé de ce chef et Mme X... déboutée tant de sa demande d'annulation des sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées que de ses diverses demandes indemnitaires ;
ALORS D'UNE PART, QUE viole le principe de séparation des pouvoirs, en méconnaissant l'autorité de la chose décidée par l'autorité administrative, la cour d'appel qui, saisie d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail par un salarié protégé, énonce qu'il n'établit aucun fait ou agissement de son employeur permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale, alors que par décisions, devenues définitives, l'inspecteur du travail avait rejeté la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur notamment en raison du caractère discriminatoire dans la mesure sollicitée et de l'impossibilité d'exclure un lien entre les procédures engagées et les mandats du salarié ; qu'en l'espèce, l'arrêt infirmatif a retenu que Mme X... ne justifiait d'aucun fait ou agissement de son employeur permettant de présumer l'existence à son encontre d'un harcèlement moral ou d'une discrimination syndicale ; qu'en statuant ainsi, cependant que, par décision définitive du 3 août 2007, l'inspecteur du travail avait constaté la convergence d'éléments conduisant « à retenir un caractère discriminatoire » pour refuser d'autoriser son licenciement, et qu'une nouvelle demande d'autorisation de licenciement avait été rejetée par décision définitive de l'inspection du travail du 28 novembre 2008, dès lors que « l'enquête n'a pas permis d'exclure le lien entre les procédures engagées et les mandats de Mme X... », ces motifs, soutien nécessaire des décisions de refus, s'imposant au juge judiciaire, la cour d'appel a violé, ensemble, la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor An III et les articles L. 1232-6 et L. 2411-1 du code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en ne répondant pas aux conclusions de Mme X... faisant valoir que, lorsqu'une procédure de licenciement avait été envisagée par l'employeur en 2007, l'inspection du travail avait refusé, par décision du 3 août 2007, l'autorisation demandée par l'employeur, dès lors que « le caractère discriminatoire du comportement adopté vis-à-vis de Mme X... est avéré » (conclusions d'appel p. 6), et que lorsque l'employeur avait initié une deuxième procédure de licenciement, l'inspection du travail avait le 28 novembre 2008, à nouveau, refusé d'autoriser le licenciement, dès lors que ne pouvait être exclu un lien entre les procédures engagées et les mandats de Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS ENFIN, QUE le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui, dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, sans avoir à prouver de lien causal entre son état de santé et la dégradation de ses conditions de travail, et qu'il appartient, alors, à l'employeur, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, Mme X... a dénoncé l'accumulation de sanctions, demandes de justifications de l'employeur, mises à pied, convocations à entretiens par voie d'huissier de justice, procédures de licenciement jugées injustifiées par l'inspecteur du travail qui avait refusé à plusieurs reprises d'autoriser son licenciement, et invoqué la dégradation de son état de santé et les certificats médicaux établis lors de ses arrêts de travail qui n'excluaient aucun lien entre son état et ses conditions de travail ; qu'en ne recherchant pas si, dans leur ensemble, ces éléments n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail et 1184 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-21673
Date de la décision : 26/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 22 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2016, pourvoi n°15-21673


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boutet et Hourdeaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21673
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award