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26/10/2016 | FRANCE | N°15-16485

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2016, 15-16485


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2015) que M. X... a été engagé à compter du 1er octobre 2007 en qualité de « senior private banker » par la société La compagnie, aux droits de laquelle se trouve la société Banque privée 1818 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 2 février 2010 ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 11 octobre 2012, a dit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamn

é l'employeur au paiement de diverses sommes au titre de la rupture, avec exécution...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 février 2015) que M. X... a été engagé à compter du 1er octobre 2007 en qualité de « senior private banker » par la société La compagnie, aux droits de laquelle se trouve la société Banque privée 1818 ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 2 février 2010 ; qu'il a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 11 octobre 2012, a dit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement de diverses sommes au titre de la rupture, avec exécution provisoire ;
Attendu que la société Banque privée 1818 fait grief à l'arrêt de déclarer nulle et de nul effet sa déclaration d'appel formée le 25 octobre 2012 alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur des pièces dont les parties n'ont pas été mises en mesure de débattre contradictoirement ; qu'en relevant que le greffier de la cour d'appel avait convoqué à trois reprises M. X... et que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la société Banque privée dans sa déclaration d'appel étaient revenues au greffe sans avoir pu être distribuées, sans qu'il ressorte de sa décision que lesdites lettres recommandées aient été communiquées à la société Banque privée 1818, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en cas de retour au secrétariat de la juridiction d'une lettre de notification qui n'a pas pu être remise à son destinataire, le secrétaire invite la partie à procéder par voie de signification ; qu'en relevant que le greffier de la cour d'appel avait convoqué à trois reprises M. X... et que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la société Banque privée 1818 dans sa déclaration d'appel étaient revenues au greffe sans avoir pu être distribuées, sans qu'il ressorte de sa décision qu'après retour des lettres recommandées, le greffe aurait invité la société Banque privée 1818 à procéder par voie de signification, la cour d'appel a violé les articles 670-1, 937 et 938 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Banque privée 1818 faisait valoir que la déclaration d'appel remplissait les conditions de forme légales et était donc valable dès lors que, si une erreur s'était glissée dans le libellé de l'adresse de M. X... sur le courrier établi pour formaliser l'appel, en revanche ce courrier était accompagné du jugement attaqué, sur lequel figurait l'adresse exacte de l'intimé ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; qu'en l'espèce, il était constant que le greffe de la cour d'appel avait transmis un avis d'audience aux conseils des parties, par la voie du RPVA, le 7 décembre 2012 ; qu'en omettant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'intimé n'avait pas eu connaissance de l'appel par l'intermédiaire de son conseil dès après le 7 décembre 2012 et ne justifiait donc d'aucun grief, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail ;
5°/ que la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; que l'ignorance de l'exercice d'un appel ne constitue pas en soi un grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile, lequel n'est caractérisé que par un préjudice réel et effectif ; qu'en l'espèce, M. X... alléguait qu'il n'aurait pas été avisé de l'appel pendant deux ans, jusqu'à ce que son conseil l'en informe trois semaines avant l'audience ; qu'en se bornant à relever que l'erreur commise par la société Banque privée 1818, qui ne pouvait ignorer l'adresse du salarié figurant sur le jugement, ainsi que l'absence de toutes réponses à ses courriers, caractérisant la déloyauté de l'employeur, avaient eu pour effet de causer un grief consistant en une violation des droits de la défense en ce qu'elles avaient empêché M. X... d'avoir connaissance de l'exercice de l'appel, sans préciser concrètement en quoi ses droits auraient été atteints, alors que M. X... reconnaissait avoir été avisé des conclusions d'appel de la société Banque privée 1818 plus de trois semaines avant l'audience et qu'il avait pu y être représenté par le conseil qui l'assistait déjà en première instance, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser un grief et privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail ;
6°/ que la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; qu'un grief n'est caractérisé que par un préjudice réel et effectif ; qu'en retenant de façon abstraite et générale que le salarié avait été « privé de la possibilité de mettre en oeuvre les moyens propres à assurer sa défense et d'appréhender les risques encourus du fait d'une éventuelle réformation » du jugement, sans aucunement expliquer en quoi les droits de la défense avaient été concrètement affectés, alors que M. X... reconnaissait avoir été avisé des conclusions de la société Banque privée 1818 plus de trois semaines avant l'audience et qu'il avait pu y être représenté par le conseil qui l'assistait déjà en première instance, ni expliquer en quoi consistaient les risque particuliers au cas d'espèce liés à une réformation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que l'adresse indiquée dans l'acte d'appel était erronée et souverainement retenu que cette inexactitude avait fait grief à l'intimé dès lors qu'elle avait eu pour effet de le priver de la possibilité de mettre en oeuvre les moyens propres à assurer sa défense alors qu'un délai de plus de deux ans s'était écoulé depuis sa notification du jugement qui avait été intégralement exécuté, a décidé à bon droit que cette déclaration devait être déclarée nulle et de nul effet ; que le moyen, inopérant en ses deux premières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Banque privée 1818 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Banque privée 1818 et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Banque privée 1818.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR déclaré nulle et de nul effet la déclaration d'appel formée par la société Banque privée le 25 octobre 2012 et d'AVOIR condamnée la société Banque privée à payer à Patrick X... la somme de 1 200 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
AUX MOTIFS QUE « Sur la déclaration d'appel. L'adresse du domicile de Patrick X... mentionné par la SA Banque privée dans sa déclaration d'appel est erronée en ce qu'il est indiqué à la rubrique adresse : " ... 75008 Paris " alors qu'il demeure : " ... 92130 Issy les Moulineaux ". Il fait valoir que l'employeur était parfaitement informé de cette adresse, laquelle au demeurant est celle qui est mentionnée dans le jugement dont il a relevé appel, que la déclaration d'appel est donc entachée de nullité, qu'il ne s'agit pas d'une erreur mais de fond comme l'empêchant d'avoir connaissance de la procédure d'appel, qu'il en est résulté une désorganisation manifeste de sa défense, qu'en effet au vu des délais écoulés il n'est plus en possession des éléments ayant trait à ce contentieux, qu'il n'a pas été régulièrement convoqué devant la cour, que le jugement ayant été exécuté, le risque de réformation revient à troubler de manière disproportionnée et intolérable son équilibre économique. Il sera relevé que conformément aux dispositions de l'article 937 du code de procédure civile, le greffier de la cour a convoqué à trois reprises Patrick X..., que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la SA Banque privée dans sa déclaration d'appel sont revenues au greffe sans avoir pu être distribuées. Il est établi que le conseil de Patrick X... a réclamé le 5 puis le 16 novembre 2012 au conseil de la banque le règlement des sommes qui lui ont été allouées par le conseil de prud'hommes, qu'il a ensuite saisi un huissier aux fins de leur recouvrement, que la SA Banque privée s'est acquittée intégralement du montant des condamnations au moyen de deux chèques datés du 14 décembre 2012. Force est de constater que toutes ses démarches sont postérieures à la déclaration d'appel en date du 25 octobre 2012 mais qu'à aucun moment tant le conseil que la SA Banque privée ne justifient avoir fait part de cet appel à Patrick X... ou son avocat en dépit des multiples démarches effectuées par ceux-ci. L'erreur commise par la SA Banque privée qui ne pouvait ignorer l'adresse du salarié figurant sur le jugement ainsi que l'absence de toutes réponses à ses nombreux courriers, caractérisant la déloyauté de l'employeur, lesquelles ont eu pour effet de causer à un grief consistant en une violation des droits de la défense en ce qu'elle a empêché Patrick X... d'avoir connaissance de l'exercice par la SA Banque privée de son droit d'appel. Elle l'a de plus privé de la possibilité de mettre en oeuvre les moyens propres à assurer cette défense et d'appréhender les risques encourus du fait d'une éventuelle réformation, ce alors même, ainsi que ce dernier le souligne, que le jugement avait été intégralement exécuté et qu'un délai de plus de deux ans s'était écoulé depuis la notification du jugement. Il convient de déclarer nulle et de nul effet la déclaration d'appel formée par la SA Banque privée le 25 octobre 2012. Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile. L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à Patrick X... la somme de 1200 €. »
1) ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur des pièces dont les parties n'ont pas été mises en mesure de débattre contradictoirement ; qu'en relevant que le greffier de la cour avait convoqué à trois reprises Patrick X... et que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la SA Banque Privée dans sa déclaration d'appel étaient revenues au greffe sans avoir pu être distribuées, sans qu'il ressorte de sa décision que lesdites lettres recommandées aient été communiquées à la SA Banque Privée 1818, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
2) ALORS QU'en cas de retour au secrétariat de la juridiction d'une lettre de notification qui n'a pas pu être remise à son destinataire, le secrétaire invite la partie à procéder par voie de signification ; qu'en relevant que le greffier de la cour avait convoqué à trois reprises Patrick X... et que toutes les lettres recommandées libellées à l'adresse indiquée par la SA Banque Privée 1818 dans sa déclaration d'appel étaient revenues au greffe sans avoir pu être distribuées, sans qu'il ressorte de sa décision qu'après retour des lettres recommandées, le greffe aurait invité la SA Banque Privée 1818 à procéder par voie de signification, la cour d'appel a violé les articles 670-1, 937 et 938 du code de procédure civile.
3) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que la déclaration d'appel remplissait les conditions de forme légales et était donc valable dès lors que, si une erreur s'était glissée dans le libellé de l'adresse de M. X... sur le courrier établi pour formaliser l'appel, en revanche ce courrier était accompagné du jugement attaqué, sur lequel figurait l'adresse exacte de l'intimé (conclusions, page 4) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
4) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; qu'en l'espèce, il était constant que le greffe de la cour avait transmis un avis d'audience aux conseils des parties, par la voie du RPVA, le 7 décembre 2012 ; qu'en omettant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'intimé n'avait pas eu connaissance de l'appel par l'intermédiaire de son conseil dès après le 7 décembre 2012 et ne justifiait donc d'aucun grief, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail.
5) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; que l'ignorance de l'exercice d'un appel ne constitue pas en soi un grief au sens de l'article 114 du code de procédure civile, lequel n'est caractérisé que par un préjudice réel et effectif ; qu'en l'espèce, M. X... alléguait qu'il n'aurait pas été avisé de l'appel pendant deux ans, jusqu'à ce que son conseil l'en informe trois semaines avant l'audience ; qu'en se bornant à relever que l'erreur commise par la SA Banque privée 1818, qui ne pouvait ignorer l'adresse du salarié figurant sur le jugement, ainsi que l'absence de toutes réponses à ses courriers, caractérisant la déloyauté de l'employeur, avaient eu pour effet de causer un grief consistant en une violation des droits de la défense en ce qu'elles avaient empêché Patrick X... d'avoir connaissance de l'exercice de l'appel, sans préciser concrètement en quoi ses droits auraient été atteints, alors que M. X... reconnaissait avoir été avisé des conclusions d'appel de la société Banque Privée 1818 plus de trois semaines avant l'audience et qu'il avait pu y être représenté par le conseil qui l'assistait déjà en première instance, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser un grief et privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail.
6) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la nullité d'un acte de procédure ne peut être prononcée pour vice de forme qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité commise ; qu'un grief n'est caractérisé que par un préjudice réel et effectif ; qu'en retenant de façon abstraite et générale que le salarié avait été « privé de la possibilité de mettre en oeuvre les moyens propres à assurer sa défense et d'appréhender les risques encourus du fait d'une éventuelle réformation » du jugement, sans aucunement expliquer en quoi les droits de la défense avaient été concrètement affectés, alors que M. X... reconnaissait avoir été avisé des conclusions de la société Banque Privée 1818 plus de trois semaines avant l'audience et qu'il avait pu y être représenté par le conseil qui l'assistait déjà en première instance, ni expliquer en quoi consistaient les risque particuliers au cas d'espèce liés à une réformation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1461-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-16485
Date de la décision : 26/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2016, pourvoi n°15-16485


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.16485
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