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13/10/2016 | FRANCE | N°15-20349

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 octobre 2016, 15-20349


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal civil de première instance de Papeete, 20 mai 2015) et les productions, que la banque de Tahiti (la banque) a accordé à M. X... un prêt conclu par acte notarié dont le remboursement a été garanti par une hypothèque inscrite sur un bien immobilier appartenant à l'emprunteur ; que M. X... n'ayant pas honoré les échéances de remboursement du prêt, la banque lui a fait signifier par acte d'huissier de justice un commandement à

fin de saisie immobilière ; qu'après sommation par la banque à M. X... de pr...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal civil de première instance de Papeete, 20 mai 2015) et les productions, que la banque de Tahiti (la banque) a accordé à M. X... un prêt conclu par acte notarié dont le remboursement a été garanti par une hypothèque inscrite sur un bien immobilier appartenant à l'emprunteur ; que M. X... n'ayant pas honoré les échéances de remboursement du prêt, la banque lui a fait signifier par acte d'huissier de justice un commandement à fin de saisie immobilière ; qu'après sommation par la banque à M. X... de prendre connaissance du cahier des charges en vue de la vente de l'immeuble dans le cadre d'une saisie immobilière, une audience éventuelle a été fixée au 3 décembre 2014 devant le tribunal civil de première instance en vue de laquelle M. X... a personnellement déposé un dire le 24 novembre 2014 ; qu'un avocat s'est constitué le 27 novembre 2014 dans l'intérêt de M. X..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ; que M. X... a déposé personnellement de nouveaux dires les 6 janvier 2015, 12 janvier 2015, 10 février 2015 et 24 mars 2015 ; que le 30 mars 2015, l'avocat de M. X... s'est « dé-constitué » de l'affaire devant venir à l'audience du 1er avril 2015 et M. X... a comparu en personne à l'audience du 20 mai 2015 à laquelle elle a été retenue ;
Attendu que M. X... fait grief au jugement de rejeter son dire tendant à constater l'absence de titre exécutoire, la nullité du commandement et le caractère abusif de la procédure de saisie et à surseoir à la vente, de déclarer irrecevables ses autres demandes reconventionnelles et de fixer au 8 juillet 2015 l'audience de vente du bien saisi, alors, selon le moyen :
1°/ que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance effective et concrète d'un avocat ; qu'en statuant sur les demandes de la banque, créancier poursuivant, et de M. X..., débiteur saisi, après avoir pourtant relevé que celui-ci avait « eu pour avocat M. Miguel Z..., avocat au barreau de Papeete en vertu d'une décision du bureau d'aide juridictionnelle n° 2014/ 2920 du 8 décembre 2014 accordant l'aide juridictionnelle totale, qui s'est ensuite déconstitué au cours de la procédure » et quand l'avocat initialement désigné n'avait déposé aucune écriture pour son compte, ce dont il résultait que M. X..., qui conservait le bénéfice de l'aide juridictionnelle, n'avait pas bénéficié de l'assistance effective et concrète d'un avocat, le tribunal civil de première instance de Polynésie française a violé les articles 25 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et 84 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, ensemble l'article 6, § 1er, de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ M. X... soutenait, dans ses conclusions (dires et observations du 10 février 2015, p. 2, § 5 à 11), que le commandement de payer valant saisie immobilière était nul pour avoir été délivré par un clerc assermenté et non par l'huissier de justice personnellement, en méconnaissance des dispositions des articles 2 et 18 de la délibération n° 92-122 AT du 20 août 1992 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le tribunal civil de première instance a méconnu les exigences de l'article 268 du code de procédure civile de Polynésie française ;
3°/ que l'huissier de justice doit à peine de nullité, postérieurement à la délivrance, par un clerc assermenté, d'un acte dont il a préalablement signé l'original et la copie, viser sur l'original les mentions manuscrites relatives aux modalités de signification que le clerc y a apposées ; qu'en se bornant à relever que « la signature de l'huissier A... [était] apposée » sur le commandement de payer, sans rechercher, comme il le lui était demandé (dires et observations du 24 novembre 2014, p. 5, trois derniers paragraphes ; dires et observations du 6 janvier 2015, p. 9, dernier paragraphe ; dires et observations du 10 février 2015, p. 1, dernier paragraphe, à p. 2, § 4), si, outre la signature de l'huissier de justice apposée préalablement à la délivrance de l'acte par le clerc, l'original avait été revêtu, postérieurement à la remise de l'expédition au destinataire, du visa par l'huissier de justice des mentions manuscrites que le clerc y avait portées, le tribunal civil de première instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 20 de la délibération n° 92-122 AT du 20 août 1992 ;
4°/ que le droit d'agir est ouvert à tous ceux qui ont intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de M. X... portant sur l'irrégularité de l'offre de crédit et sur la responsabilité de la banque, que ces demandes « ne p [ouvaient] être examinées dans le cadre de la présente procédure de saisie en ce qu'elles f [aisaient] l'objet d'une autre procédure devant le tribunal de première instance », quand l'élévation antérieure d'une prétention identique devant une autre formation de la même juridiction, qui n'en est pas dessaisie, est sans incidence sur l'existence du droit d'agir, le tribunal de première instance a violé les articles 1er et 45 du code de procédure civile de Polynésie française ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte des énonciations du jugement et des pièces de la procédure que M. X..., qui s'est vu désigner un conseil au titre de l'aide juridictionnelle, a été en mesure de bénéficier de l'assistance effective et concrète d'un avocat ;
Attendu, d'autre part, que le tribunal civil de première instance, qui n'était pas saisi du moyen de nullité proposé dans un dire tardif au regard du délai prévu par l'article 903 du code de procédure civile de Polynésie française, n'avait pas à y répondre ;
Attendu, encore, que le dire du 24 novembre 2014 n'invoquant que la nullité du commandement en l'absence d'identification possible de l'huissier de justice comme conséquence de l'absence de visa des mentions apposées dans l'acte par le clerc assermenté, le tribunal civil de première instance, qui a constaté que le commandement était signé par l'huissier de justice nommément désigné, a procédé à la recherche prétendument omise ;
Attendu, enfin, que M. X..., qui avait indiqué avoir retiré sa demande de provision à valoir sur son indemnisation, est sans intérêt à reprocher au tribunal civil de première instance, qui n'en était pas saisi, d'avoir jugé cette demande irrecevable ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa deuxième branche et irrecevable en sa quatrième branche, est mal fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la banque de Tahiti la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR rejeté le dire de M. X... tendant au constat de l'absence de titre exécutoire au profit de la Banque de Tahiti, au constat de la nullité du commandement, au constat du caractère abusif de la procédure de saisie et au sursis à la vente, d'AVOIR déclaré irrecevables les autres demandes reconventionnelles de M. X... et d'AVOIR fixé au 8 juillet 2015 l'audience de vente du bien saisi ;
AUX MOTIFS QUE, 1°) Sur le moyen tiré de l'absence de titre exécutoire, le 2 août 2011, la Banque de Tahiti a donné mandat à Gérard Y..., fondé de pouvoir, de la représenter pour la signature devant notaire de l'acte de prêt accordé à Jean-François X... ; qu'avant la signature de l'acte authentique de prêt, soit le 19 septembre 2011, elle a, par courrier du 14 septembre 2014 à l'adresse du notaire, accepté la réduction de la pénalité due en cas de remboursement anticipé du prêt ; que Jean-François X... prétend qu'en raison de la discordance de taux de la pénalité entre la procuration et l'acte de prêt ledit acte a perdu son caractère authentique par application de l'article 1318 du Code civil ; qu'un tel raisonnement ne peut être accepté pour deux raisons : que tout d'abord, pour qu'il y ait discordance entre deux documents il faut que ceux-ci traitent du même sujet ; or, l'examen de la procuration du 2 août 2011 permet de constater qu'il n'est fait nulle mention du taux de pénalité en cas de remboursement anticipé du prêt ; la vérification de la discordance alléguée est donc factuellement impossible ; qu'ensuite et en toute hypothèse, il est de principe que les irrégularités affectant la représentation conventionnelle d'une partie à un acte notarié ne relèvent pas des défauts de forme que l'article 1318 sanctionne par la perte du caractère authentique et, partant, exécutoire de cet acte ; 2°) Sur le moyen tiré de la nullité du commandement, que le commandement délivré le 26 août 2014 mentionne qu'à défaut de paiement il sera procédé à la saisie de l'immeuble appartenant à Jean-François X..., constitué par une parcelle de terre formant le lot 2 de la parcelle B du lotissement Pamatai 1, cadastré section M n° 151 pour une contenance de 4 a 60 ca ; que l'examen du titre de propriété de Jean-François X... en date du 30 janvier 2006 montre que l'indication du bien saisi est en tous points conforme aux indications du commandement ; que c'est donc à tort que Jean-François X... soutient que les énonciations du commandement sont erronées, étant observé en toute hypothèse que l'indication du numéro du cadastre permet une identification certaine du bien ; que c'est également à tort que Jean-François X... prétend qu'à défaut de visa de l'huissier le commandement est nul par application de l'article 20 de la délibération n° 92-122 du 22 août 1992, un simple examen de cet acte permettant d'observer que la signature de l'huissier A... est apposée ; 3°) Sur la demande de sursis à la vente, que Jean-François X... a, en dehors de la procédure de saisie immobilière, introduit deux instances devant le Tribunal de première instance de Papeete : – une instance en opposition au commandement introduite avant la délivrance de la sommation de prendre connaissance du cahier des charges ; – une action en responsabilité contre la banque ; que la première instance ne peut constituer un motif de sursis à statuer puisqu'il est de principe que l'opposition à commandement, même si elle a été formée antérieurement à la publication au bureau des hypothèques, constitue un incident de saisie ; que pas davantage la seconde instance ne peut constituer un motif valable de sursis à statuer puisque le contentieux de la responsabilité éventuelle de la banque est sans lien avec la défaillance contractuelle de son cocontractant et avec une voie d'exécution basée sur un titre exécutoire ; 4°) Sur les demandes reconventionnelles, que les demandes reconventionnelles de Jean-François X... portant sur l'irrégularité de l'offre de crédit et sur la responsabilité de la banque ne peuvent être examinées dans le cadre de la présente procédure de saisie en ce qu'elles font l'objet d'une autre procédure devant le tribunal de première instance ; que les demandes reconventionnelles portant sur le caractère abusif de la saisie sont rejetées, aucun des moyens avancés par Jean-François X... pour tenter de faire échec à la saisie n'ayant été retenu ;
1°) ALORS QUE le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance effective et concrète d'un avocat ; qu'en statuant sur les demandes de la Banque de Tahiti, créancier poursuivant, et de M. X..., débiteur saisi, après avoir pourtant relevé que celui-ci avait « eu pour avocat Me Miguel Z..., avocat au barreau de Papeete en vertu d'une décision du Bureau d'aide juridictionnelle n° 2014/ 2920 du 8 décembre 2014 accordant l'aide juridictionnelle totale, qui s'est ensuite déconstitué au cours de la procédure » (jugement, p. 1) et quand l'avocat initialement désigné n'avait déposé aucune écriture pour son compte, ce dont il résultait que M. X..., qui conservait le bénéfice de l'aide juridictionnelle, n'avait pas bénéficié de l'assistance effective et concrète d'un avocat, le Tribunal civil de première instance de Polynésie française a violé les articles 25 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et 84 du décret no 91-1266 du 19 décembre 1991, ensemble l'article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°) ALORS QUE M. X... soutenait, dans ses conclusions (dires et observations du 10 février 2015, p. 2, § 5 à 11), que le commandement de payer valant saisie immobilière était nul pour avoir été délivré par un clerc assermenté et non par l'huissier de justice personnellement, en méconnaissance des dispositions des articles 2 et 18 de la délibération n° 92-122 AT du 20 août 1992 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le Tribunal civil de première instance a méconnu les exigences de l'article 268 du Code de procédure civile de Polynésie française ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'huissier de justice doit à peine de nullité, postérieurement à la délivrance, par un clerc assermenté, d'un acte dont il a préalablement signé l'original et la copie, viser sur l'original les mentions manuscrites relatives aux modalités de signification que le clerc y a apposées ; qu'en se bornant à relever que « la signature de l'huissier A... [était] apposée » sur le commandement de payer (jugement, p. 4, § 1er), sans rechercher, comme il le lui était demandé (dires et observations du novembre 2014, p. 5, trois derniers paragraphes ; dires et observations du 6 janvier 2015, p. 9, dernier paragraphe ; dires et observations du 10 février 2015, p. 1, dernier paragraphe, à p. 2, § 4), si, outre la signature de l'huissier de justice apposée préalablement à la délivrance de l'acte par le clerc, l'original avait été revêtu, postérieurement à la remise de l'expédition au destinataire, du visa par l'huissier de justice des mentions manuscrites que le clerc y avait portées, le Tribunal civil de première instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 20 de la délibération n° 92-122 AT du 20 août 1992 ;
4°) ALORS QUE le droit d'agir est ouvert à tous ceux qui ont intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles de M. X... portant sur l'irrégularité de l'offre de crédit et sur la responsabilité de la banque (jugement, p. 4, § 3 du dispositif), que ces demandes « ne p [ouvaient] être examinées dans le cadre de la présente procédure de saisie en ce qu'elles f [aisaient] l'objet d'une autre procédure devant le Tribunal de première instance » (jugement, p. 4, § 8), quand l'élévation antérieure d'une prétention identique devant une autre formation de la même juridiction, qui n'en est pas dessaisie, est sans incidence sur l'existence du droit d'agir, le Tribunal de première instance a violé les articles 1er et 45 du Code de procédure civile de Polynésie française.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-20349
Date de la décision : 13/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete, 20 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 oct. 2016, pourvoi n°15-20349


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.20349
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