LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 4 et 562 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 24 mars 2015), que la société Côté Immo, qui a entrepris la construction de logements collectifs, a confié à la société Suisse (depuis lors en liquidation judiciaire) deux marchés portant sur le lot peinture ; que la société Suisse et son mandataire judiciaire, ès qualités, ont assigné la société Côté Immo en paiement du solde d'un marché ; que, reconventionnellement, la société Côté Immo a demandé la fixation de sa créance au passif de la société Suisse au titre des pénalités de retard ;
Attendu que, pour infirmer le jugement en ce qu'il a fixé à une certaine somme le montant des pénalités de retard, l'arrêt retient que, bien que la société Suisse sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a limité l'indemnité au titre des pénalités de retard à 2 500 euros, la décision critiquée ne pourra qu'être infirmée sur cette condamnation qui n'a aucun fondement, ainsi que sur la compensation ordonnée entre les créances réciproques des parties ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société Côté Immo demandait une somme supérieure à celle accordée par le jugement au titre des pénalités de retard et que la société Suisse, qui n'avait pas relevé appel du jugement, sollicitait sa confirmation de ce chef, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société Suisse à régler à la société Côté Immo la somme de 2 500 euros au titre des pénalités de retard et a ordonné la compensation entre les créances, l'arrêt rendu le 24 mars 2015, entre les parties, par le cour d'appel de Reims ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Confirme le jugement en ce qu'il a fixé à 2 500 euros la somme due à la société Côté Immo par la société Suisse au titre des pénalités de retard ;
Ordonne la compensation entre les créances ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens :
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Côté Immo
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Côté Immo à payer à la société Suisse la somme de 20.952,35 euros TTC augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2012 et débouté de sa demande de compensation ;
AUX MOTIFS QUE sur le solde dû au titre du marché La société Côté Immo ne conteste pas être redevable du paiement de la prestation de la société Suisse au titre du marché de la résidence des Sacres mais sollicite la compensation de cette somme avec une créance dont elle serait titulaire au titre des pénalités de retard dans l'exécution du marché à hauteur de la somme de 45 360 euros TTC, soit 37 926,42 euros HT et la fixation, compte tenu de cette compensation, de sa créance au passif de la société Suisse à hauteur de la somme de 25 623,61 euros. De manière contradictoire, elle demande à la cour de débouter la société Suisse de toutes ses demandes et invoque le fait que la société Suisse a confié la réalisation des travaux de peinture à un sous-traitant dont elle n'aurait pas sollicité l'agrément auprès du maître d'ouvrage et envers lequel elle serait redevable de la somme de 15 242 euros HT. Elle invoque également des réserves qui n'auraient pas été levées. Or, la société Côté Immo ne saurait invoquer, pour se soustraire à son obligation de paiement, l'absence d'agrément du sous-traitant (la société SRBG) qui entraînera l'impossibilité, pour ce dernier, d'exercer une action directe en paiement à l'encontre du maître d'ouvrage. De plus, la société Suisse justifie avoir réglé la société SRBG qui, au surplus, n'a déclaré aucune créance au passif de la société Suisse. Enfin, les quelques réserves telles que figurant dans le procès-verbal de réception des travaux du 13 avril 2012 ne concernent que quelques points sommaires et ne sauraient justifier le rejet de la demande en paiement de la société Suisse au titre des prestations effectuées. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Côté Immo à payer à la société Suisse la somme de 20 852,35 euros au titre du solde du marché selon décomptes validés par le maître d'oeuvre et non contestés par la société Côté Immo ;
1°) ALORS QUE l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 fait obligation à l'entrepreneur principal de soumettre à l'agrément du maître d'ouvrage à la fois la personne du sous-traitant et ses conditions de paiement ; qu'engage sa responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage l'entrepreneur principal qui ne respecte pas cette obligation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que le sous-traitant, la société SRBG, n'avait pas été agréé par le maître de l'ouvrage, ce dont elle devait nécessairement déduire la faute de l'entrepreneur principal, la société Suisse, et sans rechercher si la faute de cette dernière tenant dans l'absence de demande d'agrément, n'avait pas causé un préjudice à la société Côté Immo, qui devait se compenser avec les sommes dont celle-ci restait redevable à l'égard de la société Suisse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;
2°) ALORS QUE l'interdépendance des obligations réciproques résultant d'un contrat synallagmatique permet à l'une des parties de ne pas exécuter son obligation en cas d'inexécution de son obligation par l'autre ; que pour se soustraire à son obligation de paiement, la société Coté Immo invoquait les diverses réserves figurant dans les divers procès verbaux de réception faisant la preuve de la mauvaise exécution des travaux ; qu'en la déboutant de ses demandes, motifs pris que les quelques réserves qui figurent dans le procès verbal de réception du 13 avril 2012, qui ne concernaient que les parties communes, ne sauraient justifier le rejet de la demande en paiement de la société Suisse au titre des prestations effectuées, sans rechercher si les réserves qui résultaient des procès verbaux de réception des divers appartements ne justifiaient pas le refus de paiement de la part de la société Côté Immo, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Côté Immo de sa demande tendant au paiement de la somme de 45.360 euros au titre des pénalités de retard, à compenser avec les sommes dues par elle, et, en conséquence, de fixation de sa créance au passif de la société Suisse à la somme de 25.623,61 euros TTC ;
AUX MOTIFS QUE sur le solde dû au titre du marché La société Côté Immo ne conteste pas être redevable du paiement de la prestation de la société Suisse au titre du marché de la résidence des Sacres mais sollicite la compensation de cette somme avec une créance dont elle serait titulaire au titre des pénalités de retard dans l'exécution du marché à hauteur de la somme de 45 360 euros TTC, soit 37 926,42 euros HT et la fixation, compte tenu de cette compensation, de sa créance au passif de la société Suisse à hauteur de la somme de 25 623,61 euros. De manière contradictoire, elle demande à la cour de débouter la société Suisse de toutes ses demandes et invoque le fait que la société Suisse a confié la réalisation des travaux de peinture à un sous-traitant dont elle n'aurait pas sollicité l'agrément auprès du maître d'ouvrage et envers lequel elle serait redevable de la somme de 15 242 euros HT. Elle invoque également des réserves qui n'auraient pas été levées. Or, la société Côté Immo ne saurait invoquer, pour se soustraire à son obligation de paiement, l'absence d'agrément du sous-traitant (la société SRBG) qui entraînera l'impossibilité, pour ce dernier, d'exercer une action directe en paiement à l'encontre du maître d'ouvrage. De plus, la société Suisse justifie avoir réglé la société SRBG qui, au surplus, n'a déclaré aucune créance au passif de la société Suisse. Enfin, les quelques réserves telles que figurant dans le procès-verbal de réception des travaux du 13 avril 2012 ne concernent que quelques points sommaires et ne sauraient justifier le rejet de la demande en paiement de la société Suisse au titre des prestations effectuées. Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Côté Immo à payer à la société Suisse la somme de 20 852,35 euros au titre du solde du marché selon décomptes validés par le maître d'oeuvre et non contestés par la société Coté Immo. Sur les pénalités de retard. L'appelante sollicite la liquidation de sa créance au titre des pénalités de retard conformément à l'article 8.1.1 du cahier des clauses administratives à hauteur de 30 euros x 24 logements x 63 jours, soit 45 360 euros TTC, soit 37 926,42 euros HT. Elle soutient que le démarrage de l'intervention de la société Suisse qui devait avoir lieu le 12 juillet 2011 n'est intervenu que le 12 septembre 2011. Ce n'est que le 25 mai 2012, que la société Côté Immo a sollicité le paiement de pénalités de retard à hauteur de 70 jours. Par courrier en réponse du 20 mai 2012, la société Suisse s'est opposée à cette demande soulignant avoir respecté le planning dans sa version du 26 septembre 2011. Il résulte en effet du planning des travaux dans sa version du 26 septembre 2011 que les travaux de peinture devaient démarrer le 12 septembre 2011 pour se terminer le 2 décembre 2011. Ce planning a donc été respecté par la société Suisse de sorte qu'aucune pénalité de retard ne saurait être réclamée par la société Côté Immo. Bien que la société Suisse sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a limité l'indemnité "forfaitaire" au titre des pénalités de retard à 2 500 euros, la décision critiquée ne pourra qu'être infirmée sur cette condamnation qui n'a, en l'espèce, aucun fondement ainsi que sur la compensation ordonnée entre les créances réciproques des parties ;
1°) ALORS QUE l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugements qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent ; que les juges du fond ne peuvent aggraver le sort de l'appelant sur son appel en l'absence d'appel incident ; qu'au cas d'espèce, le Tribunal de commerce de Reims avait condamné la société Suisse à régler à la société Côté Immo la somme de 2.500 euros au titre des pénalités de retard et en avait ordonné compensation avec les sommes auxquelles a été condamnée la société Côté Immo ; qu'en infirmant le jugement entrepris sur cette condamnation, ainsi que sur la compensation ordonnée entre les créances réciproques des parties, la société Suisse sollicitant pourtant la confirmation du jugement en ce qu'il avait limité l'indemnité au titre des pénalités de retard à 2 500 euros, la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le planning du 26 septembre 2011, non signé par les parties, avait pour objet de coordonner l'ensemble des intervenants compte tenu du retard d'ores et déjà pris par la société Suisse, qui devait originairement démarrer ses travaux le 11 juillet 2011, sans qu'il en résulte une renonciation de la société Côté Immo à percevoir les indemnités de retard conventionnellement prévues ; qu'en considérant que ce planning du 26 septembre 2011, non signé, et postérieur au démarrage des travaux de la société Suisse en date du 12 septembre 2011, a été respecté, de sorte qu'aucune pénalité de retard ne pouvait être réclamé par la société Côté Immo, celui-ci ne contenant aucune stipulation emportant renonciation de la société Côté Immo à se prévaloir du non respect des délais de livraison contractuellement prévus, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et prévis, en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer et ne peut notamment pas se présumer ou se déduire de la seule inaction ou du silence de son titulaire ; qu'en considérant que le planning du 26 septembre 2011, non signé, et postérieur au démarrage des travaux de la société Suisse en date du 12 septembre 2011, a été respecté, de sorte qu'aucune pénalité de retard ne pouvait être réclamé par la société Côté Immo, sans caractériser une renonciation claire et non équivoque de celle-ci à se prévaloir de son droit contractuel aux pénalités de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1234 du Code civil.
4°) ALORS QU' à supposer même que le planning du 26 septembre 2011, non signé par les parties, emporte renonciation à demander des pénalités de retard à la société Suisse, il n'est pas contesté que la société Suisse n'a toujours pas levé les réserves portées dans les procès verbaux de réception, ce qui justifiait aussi des pénalités de retard aux termes de l'article 5.1 du cahier des clauses administratives particulières intitulé « Délais d'exécution » et de l'article 5.1.3 et 8.1.1 du cahier des clauses administratives particulières ; qu'en écartant toute pénalité de retard au motif qu'il résultait du planning des travaux, dans sa version du 26 septembre 2011, que les travaux de peinture devaient démarrer le 12 septembre 2011 pour se terminer le 2 décembre 2011 et que ce planning avait été respecté par la société Suisse, sans rechercher si le retard pris dans la levée des réserves faites à la réception ne justifiait pas des pénalités de retard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.