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12/10/2016 | FRANCE | N°15-19670

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 octobre 2016, 15-19670


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles L. 312-3, 2°, et L. 137-2 du code de la consommation, devenus L. 313-2, 2°, et L. 218-2 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte notarié du 17 juillet 2006, la société Lyonnaise de banque (la banque) a consenti à M. et Mme X... un prêt immobilier destiné à acquérir un lot de copropriété en l'état futur d'achèvement ; qu'ayant prononcé

, le 21 septembre 2009, la déchéance du terme, la banque a, le 13 juin 2013, fait pr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles L. 312-3, 2°, et L. 137-2 du code de la consommation, devenus L. 313-2, 2°, et L. 218-2 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte notarié du 17 juillet 2006, la société Lyonnaise de banque (la banque) a consenti à M. et Mme X... un prêt immobilier destiné à acquérir un lot de copropriété en l'état futur d'achèvement ; qu'ayant prononcé, le 21 septembre 2009, la déchéance du terme, la banque a, le 13 juin 2013, fait pratiquer une saisie-attribution, contestée par les emprunteurs devant un juge de l'exécution ;
Attendu que, pour annuler cette mesure, après avoir considéré que le prêt litigieux n'était pas destiné à financer une activité professionnelle, l'arrêt retient que la prescription biennale de la créance est acquise ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que M. et Mme X... avaient souscrit le prêt litigieux à fin d'acquérir un lot de copropriété destiné à la location au sein d'une résidence hôtelière et que l'époux était inscrit au registre du commerce et des sociétés en tant que loueur en meublé professionnel, ce dont il résultait que le prêt litigieux était destiné à financer une activité professionnelle, fût-elle accessoire, exclusive de la prescription biennale applicable au seul consommateur, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts de M. et Mme X..., l'arrêt rendu le 9 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Lyonnaise de banque
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

LE MOYEN reproche à l'arrêt infirmatif attaqué, D'AVOIR annulé la saisie-attribution opérée le 13 juin 2013 par la Lyonnaise de banque auprès de la société Park and Suites et d'en avoir ordonné la mainlevée, aux frais s'il y a lieu de l'établissement bancaire,
AUX MOTIFS QUE « si la loi de procédure du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription des droits et actions en matière civile a aménagé à son article 4 une prescription abrégée pour les biens et prestations fournis par les professionnels, elle n'en a pas fait pour autant une prescription exceptionnelle soumise à un régime dérogatoire, la loi précisant seulement dans l'article L. 137-1 nouvellement créé que les parties au contrat ne pouvaient la modifier ni dans sa durée ni dans ses causes d'interruption ou de suspension ; que, pour faire échec aux dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation imposant à l'établissement bancaire d'agir dans un délai de deux ans à compter de la défaillance des emprunteurs, la SA Lyonnaise de banque leur conteste la qualité de consommateurs en invoquant d'une part leur inscription au régime des loueurs de meublés professionnels et d'autre part un investissement immobilier incompatible avec la notion de consommateur ; que cet argumentaire ne peut prospérer ; qu'en effet :- il ressort des pièces communiquées par la banque elle-même que seul M. Bernard X... est inscrit en cette qualité au registre du commerce et des sociétés et qu'ainsi l'argument n'est pas opposable à l'épouse qui a la qualité de co-emprunteur ;- il est admis que l'acquisition en l'état futur d'achèvement a été réalisée par les appelants dans le cadre d'une option fiscale, ouverte à tout contribuable, exigeant une telle immatriculation sans que pour autant l'activité professionnelle réelle des époux X.../ Y... en ait été modifiée, le mari exerçant la profession de kinésithérapeute, l'épouse étant sans profession et leur participation à l'exploitation de la résidence où est situé l'appartement étant ellemême limitée à la signature de baux soumis par le gestionnaire ;- ils ont acquis un immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, au sens de l'article L. 312-2 du code de la consommation, le prêt ayant financé un appartement situé dans une résidence hôtelière et la portée générale de ces dispositions, tant dans leur ancienne rédaction (loi du 13 juillet 1979) que postérieure à la modification législative du 1er juillet 2010 la rend applicable non pas au seul consommateur au sens strict du terme, mais à tout particulier souscrivant un emprunt pour acquérir un immeuble de cette nature, la loi ne distinguant pas entre des acquisitions destinées à une habitation effective et celles destinées à un investissement ; que c'est donc à tort que le premier juge a écarté l'application de ces dispositions ; […] ; qu'au visa de l'ensemble de ces éléments, la saisie-attribution pratiquée en 2013 soit plus de deux années après l'expiration du délai de l'article L. 137-2 est donc prescrite et son annulation doit être prononcée sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE suivant l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'il résulte de l'article L. 312-3, 2° du code de la consommation que sont exclus du champ d'application des dispositions de ce code relatives au crédit immobilier les prêts qui sont destinés à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ; que la cour d'appel a constaté que M. Bernard X... est inscrit en qualité de loueur meublé professionnel au registre du commerce et des sociétés, que les époux X... ont réalisé une acquisition en l'état futur d'achèvement dans le cadre d'une option fiscale, ouverte à tout contribuable, exigeant une telle immatriculation et que leur participation à l'exploitation de la résidence où est situé l'appartement est elle-même limitée à la signature de baux soumis par le gestionnaire et que le prêt a financé un appartement situé dans une résidence hôtelière ; qu'il se déduisait pourtant de ces constations que le prêt souscrit par les époux X... était destiné à financer une activité professionnelle, par laquelle était procuré en jouissance l'immeuble acquis par eux au sein d'une résidence hôtelière, et non pas l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation, suivant l'article L. 312-2, 1° du code la consommation ; que relativement au prêt ainsi souscrit et destiné à une activité professionnelle, les époux X... ne pouvaient donc revêtir la qualité de consommateur au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation ; qu'en décidant cependant de faire application de l'article L. 137-2 du code de la consommation, la cour d'appel a violé les articles L. 312-2 et L. 312-3, 2° du code de la consommation, ensemble l'article L. 137-2 du même code ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE suivant l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'il résulte de l'article L. 312-3, 2° du code de la consommation que sont exclus du champ d'application des dispositions de ce code relatives au crédit immobilier les prêts qui sont destinés à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ; que la cour d'appel a énoncé que l'acquisition en l'état futur d'achèvement a été réalisée par les appelants dans le cadre d'une option fiscale, ouverte à tout contribuable, exigeant une telle immatriculation sans que pour autant l'activité professionnelle réelle des époux X.../ Y... en ait été modifiée, le mari exerçant la profession de kinésithérapeute, l'épouse étant sans profession, leur participation à l'exploitation de la résidence où est situé l'appartement étant elle-même limitée à la signature de baux soumis par le gestionnaire ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il suffit que l'activité professionnelle que le prêt est destiné à financer présente un caractère accessoire à une autre activité, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
3°/ ALORS, enfin, QUE suivant l'article L. 137-2 du code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; qu'il résulte de l'article L. 312-3, 2° du code de la consommation que sont exclus du champ d'application des dispositions de ce code relatives au crédit immobilier les prêts qui sont destinés à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ; que, dans ses écritures d'appel, la Lyonnaise de banque a fait valoir (n° 1-2) que pour revêtir la qualité de consommateur, une personne doit agir dans le cadre normal de la consommation de biens et services, et que tel n'était pas le cas lors d'une multiplication d'investissements d'ampleur, révélant une activité qui dépasse le cadre normal de la consommation ; qu'elle exposait ainsi que les époux X... ont inscrit le prêt litigieux dans le cadre d'une opération d'investissement de 8 acquisitions et 8 prêts pour un total de 961 909 euros et les ont tous effectivement donnés à bail commercial ; qu'elle en concluait que ces acquisitions pour presque 1 000 000 euros constituent une opération incompatible avec la notion de consommation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions de nature à établir qu'au regard du prêt litigieux, les époux X... ne pouvaient revêtir la qualité de consommateur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
LE MOYEN reproche à l'arrêt infirmatif attaqué, D'AVOIR annulé la saisie-attribution opérée le 13 juin 2013 par la Lyonnaise de banque auprès de la société Park and Suites et d'en avoir ordonné la mainlevée, aux frais s'il y a lieu de l'établissement bancaire,
AUX MOTIFS QUE « demeure la question de savoir si la prescription biennale a été utilement interrompue puisque la banque ne conteste pas qu'elle bénéficie aux époux X.../ Y... sous les réserves qui précèdent liées à leur statut ; qu'en l'espèce, la déchéance du terme ayant été prononcée par courrier recommandé du 21 septembre 2009, la banque se devait d'agir au plus tard le 21 septembre 2011 ; qu'elle invoque ses conclusions reconventionnelles signifiées le 8 juillet 2010 dans le cadre de l'action en responsabilité et paiement de dommages-intérêts initiée par les emprunteurs à son encontre devant le tribunal de grande instance de Marseille mais ces derniers en contestent utilement le caractère interruptif ; qu'en effet, il est constant que la SA Lyonnaise de banque a fait pratiquer la saisie attribution contestée en application des articles L. 111-3-4° et L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, en vertu du titre exécutoire constitué par l'acte authentique de prêt et dont elle n'a cessé d'affirmer la validité ; qu'elle devait en conséquence engager la mesure d'exécution forcée qui lui était ouverte dans le délai biennal précité et ne peut se prévaloir d'une demande en paiement dans le cadre d'une action distincte aux fins d'obtenir un autre titre exécutoire dont elle n'avait nul besoin ; que cela est si vrai qu'elle motive sa demande reconventionnelle en ces termes : « attendu que les consorts X... ont sollicité le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et que la Lyonnaise de banque n'a pas entendu s'y opposer ; mais attendu que la concluante, afin d'interrompre la prescription, entend formuler des demandes reconventionnelles en paiement ; qu'au visa de l'ensemble de ces éléments, la saisie-attribution pratiquée en 2013 soit plus de deux années après l'expiration du délai de l'article L. 137-2 est donc prescrite et son annulation doit être prononcée sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE suivant l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion ; que, suivant l'article 64 du code de procédure civile, constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ; que, pour refuser de retenir que la demande reconventionnelle, par voie de conclusions signifiées le 8 juillet 2010, de la Lyonnaise de banque a interrompu la prescription, la cour d'appel a énoncé qu'elle a fait pratiquer la saisie attribution contestée en application des articles L. 111-3-4° et L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, en vertu du titre exécutoire constitué par l'acte authentique de prêt et dont elle n'a cessé d'affirmer la validité et qu'elle devait en conséquence engager la mesure d'exécution forcée qui lui était ouverte dans le délai biennal précité et ne peut se prévaloir d'une demande en paiement dans le cadre d'une action distincte aux fins d'obtenir un autre titre exécutoire dont elle n'avait nul besoin, d'autant qu'elle avait motivé sa demande reconventionnelle en ces termes : « attendu que les consorts X... ont sollicité le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et que la Lyonnaise de banque n'a pas entendu s'y opposer ; mais attendu que la concluante, afin d'interrompre la prescription, entend formuler des demandes reconventionnelles en paiement » ; qu'en refusant de faire produire à la demande reconventionnelle de la Lyonnaise de banque, tendant au paiement de sa créance, son effet interruptif de prescription, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; que, pour refuser de retenir que la demande reconventionnelle, par voie de conclusions signifiées le 8 juillet 2010, de la Lyonnaise de banque a interrompu la prescription, la cour d'appel a énoncé qu'elle a fait pratiquer la saisie attribution contestée en application des articles L. 111-3-4° et L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, en vertu du titre exécutoire constitué par l'acte authentique de prêt et dont elle n'a cessé d'affirmer la validité et qu'elle devait en conséquence engager la mesure d'exécution forcée qui lui était ouverte dans le délai biennal précité et ne peut se prévaloir d'une demande en paiement dans le cadre d'une action distincte aux fins d'obtenir un autre titre exécutoire dont elle n'avait nul besoin, d'autant qu'elle avait motivé sa demande reconventionnelle en ces termes : « attendu que les consorts X... ont sollicité le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale et que la Lyonnaise de banque n'a pas entendu s'y opposer ; mais attendu que la concluante, afin d'interrompre la prescription, entend formuler des demandes reconventionnelles en paiement » ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir en quoi la demande dont elle était saisie par la Lyonnaise de banque n'aurait pas tendu au même but que la demande reconventionnelle du 8 juillet 2010 et n'y aurait pas été virtuellement comprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-19670
Date de la décision : 12/10/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Nîmes, 9 avril 2015, 14/03691

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 09 avril 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 oct. 2016, pourvoi n°15-19670


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.19670
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