LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 27 octobre 1956 sans contrat préalable ; qu'un arrêt du 30 juin 2005 a prononcé leur divorce ; que des difficultés se sont élevées à l'occasion de la liquidation de leur communauté ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à l'octroi d'une indemnité ;
Attendu que les charges de copropriété relatives à l'occupation privative et personnelle par l'un des indivisaires de l'immeuble indivis et concernant notamment l'entretien courant, l'eau et le chauffage collectif, incombent à l'occupant, seules les autres charges de copropriété devant figurer au passif du compte de l'indivision ; qu'il ne résulte pas de ses conclusions que, devant la cour d'appel, Mme Y... ait détaillé ni même précisé la nature des charges de copropriété qu'elle soutenait devoir être supportées par l'indivision ; que dès lors, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a rejeté sa demande ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour fixer l'indemnité d'occupation due par Mme Y... à l'indivision post-communautaire à la somme de 1 000 euros, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que M. X... évalue la valeur locative du bien à 1 250 euros, soit 15 000 euros par an, et que Mme Y... ne réplique pas, de sorte qu'elle ne conteste pas le montant ainsi évalué, auquel un abattement de 20 % sera appliqué ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, Mme Y... contestait le montant de l'indemnité d'occupation retenu par M. X..., qu'elle évaluait à 750 euros, soit 600 euros après application de l'abattement de 20 %, la cour d'appel a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe l'indemnité d'occupation due par Mme Y... à l'indivision post-communautaire à la somme de 1 000 euros par mois, l'arrêt rendu le 9 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que celui qui occupe un bien immobilier doit prendre à sa charge exclusive la taxe d'habitation ainsi que toutes les charges dites « locatives » et en conséquence écarté la demande par laquelle Mme Y... sollicitait une indemnité de 9.592,17 euros au titre des charges de copropriété dont elle avait fait l'avance ;
AUX MOTIFS QUE sur la somme de 9.592,17 euros, dont Mme Y... dit avoir fait l'avance, au titre de charges de copropriété, Mme Y... ne justifie pas, ni des charges, ni de leur paiement par ses soins ; que la demande sera rejetée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Mme Y... réclame 9.592,17 euros de récompense due par la communauté, au titre des charges de copropriété qu'elle a acquittées pour le logement familial qu'elle occupe depuis la séparation (2002), et qui représentent la somme de 18.556,53 euros au total ; que des charges de copropriété peuvent donner lieu à créance contre l'indivision post-communautaire si l'un des époux a effectué des avances pour le compte de l'indivision, afin de financer des mesures conservatoires telles que des réparations urgentes ou s'il a acquitté une dette exécutoire sur le bien indivis comme les impôts fonciers, à l'aide de deniers personnel, ou encore a amélioré à ses frais un bien indivis (article 815-13 du Code civil) ; que cependant, outre que ces sommes ne sont nullement justifiées par la production de décomptes de charges, et a fortiori leur paiement, Mme Y... n'apporte pas le moindre élément de nature à justifier qu'il s'agissait de charges de copropriété en vue d'améliorer le bien ; que les charges de copropriété dites locatives, c'est-à-dire liées à l'occupation du bien, ne sauraient constituer des dépenses de conservation et/ou d'amélioration ; que ce chef de demande sera donc rejeté ;
1°) ALORS QUE le juge doit respecter le principe de la contradiction ; qu'en retenant que Mme Y... ne justifiait « ni des charges, ni de leur paiement par ses soins » (arrêt, p. 5, al. 11), sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier des copies des appels de charges de copropriété et des relevés de compte de charges, qui figuraient sur le bordereau annexé aux conclusions (pièces n° 9 et 19) et dont la communication n'avait donné lieu à aucune contestation, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à relever, pour écarter la demande d'indemnité formulée par Mme Y..., qu'elle ne justifiait « ni des charges, ni de leur paiement par ses soins » (arrêt, p. 5, al. 11), sans analyser les copies des appels de charges de copropriété et des relevés de compte de charges versées aux débats, qui établissaient que Mme Y... avait procédé au règlement des charges de copropriété, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'indivisaire qui règle seul les charges de copropriété afférentes à l'immeuble indivis assume des dépenses nécessaires à la conservation du bien et a le droit au paiement d'une indemnité, quand bien même il occuperait le bien de manière privative ; qu'en jugeant néanmoins, pour écarter la demande d'indemnité formulée par Mme Y..., que les charges de copropriété dites locatives étaient liées à l'occupation du bien et ne sauraient constituer des dépenses de conservation et/ou d'amélioration, la Cour d'appel a violé l'article 815-13 du Code civil.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR écarté la demande par laquelle Mme Y... sollicitait la condamnation de M. X... à lui verser une somme de 26.449,90 euros au titre du boni de communauté ;
AUX MOTIFS QUE sur la somme de 26.449,90 euros, au titre de la moitié du boni de communauté ; que la demande de Mme Y... n'est pas justifiée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Mme Y... réclame le remboursement par M. X... de la somme de 123.000 francs (8.751 euros), somme qui ne devait pas figurer au passif de la communauté car correspondant au montant versé par des fonds propres de Mme et dès lors le prix de vente de deux immeubles soit 470.000 francs – 123.000 francs = 347.000 francs / 2 = 173.500 soit 26.449,90 euros ; que cependant le bien immobilier sis à Saint Laurent du Var était vendu le 19/08/2011 pour la somme nette vendeur de 275.000 euros ; qu'aucun élément relatif à un bien immobilier sis à Cagnes sur Mer n'est produit ; que la demande de Mme Y... serait en l'espèce qu'elle détiendrait une créance contre son ex-époux à hauteur de 123.000 francs (18.751,23 euros) et qu'il ne s'agirait donc pas d'une récompense due à la communauté ; que cependant il n'est aucunement justifié d'une part, que cette somme a été prêtée par l'épouse et/ou sa mère (donc fonds propres) et que d'autre part, elle aurait été prêtée au mari seul et dans son intérêt personnel ; qu'en effet, aux termes de l'article 1498 du Code civil, les biens reçus par succession ou libéralité font partie de l'actif commun dans le régime de la communauté de meubles et acquêts, sauf si le donateur ou testateur en a stipulé le contraire, ce qui n'est pas établi en l'espèce ; que cette demande sera également rejetée ;
ALORS QUE le solde du prix de vente d'un bien indivis doit être inscrit à l'actif de l'indivision afin d'être partagé entre les époux ; qu'en se bornant à retenir, par motifs propres et adoptés, que Mme Y... n'établissait que l'acquisition du bien immobilier aurait été financée par un prêt consenti par sa mère, de sorte qu'elle ne rapportait pas la preuve qu'elle détiendrait une créance envers son ex-époux, sans répondre aux conclusions par lesquelles l'exposante soutenait en outre que son époux avait perçu un boni en encaissant seul le prix de vente du bien, qui avait vocation à lui revenir pour moitié, dès lors qu'il était acquis aux débats que l'immeuble était indivis, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé l'indemnité d'occupation due par Mme Y... à l'indivision post-communautaire à la somme de 1.250 euros par mois ;
AUX MOTIFS QU'il s'agit de l'occupation par Mme Y... du bien immobilier commun entre le 20 février 2002 au 19 août 2011, date de sa vente ; que le jugement sera confirmé sur ce point avec adoption de motifs ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'il n'est pas contesté que Mme Y... a occupé le bien immobilier commun aux époux de la date l'assignation (20/02/2002) jusqu'à la vente de l'immeuble le 19/08/2011 ; que M. X... évalue la valeur locative de ce bien à 1.250 euros soit 15.000 euros par an ; que Mme Y... ne répliquait pas aux demandes de M. X..., de sorte qu'il convient d'en conclure qu'elle ne conteste pas le montant ainsi évalué par M. X... ; qu'il est de jurisprudence constante que l'indemnité d'occupation est soumise aux dispositions de l'article 815-10 du Code civil et donc à la prescription quinquennale ; qu'en l'espèce, l'indemnité d'occupation est due depuis l'assignation en divorce (dispositions antérieures à la loi du 26/05/2004), soit depuis le 20/02/2002 ; que cependant, dans cadre d'un partage judiciaire, l'indemnité est calculée sur les 5 années antérieures à une citation en justice invoquant le bénéfice de cette indemnité, soit en l'espèce les conclusions déposées pour le compte de M. X... en date du 04/02/2013 ; que ce délai peut cependant être interrompu notamment par l'établissement d'un procès-verbal de difficulté dressé par le notaire chargé de la liquidation et du partage, soit en l'espèce le procès-verbal de Me Z... du 10/11/2009 ; que le bien immobilier dont Mme Y... a eu la jouissance de façon privative a été vendu le 19/08/2011 ; qu'elle doit donc à l'indivision post-communautaire une indemnité d'occupation du 10/11/2004 au 19/08/2010 ; que dans la mesure où elle ne conteste pas la valeur locative mise en compte par M. X..., soit 1.250 euros par mois, il convient de retenir au titre de l'indemnité locative 1.250 moins 20 %, soit 1.000 euros par mois du 10/11/2004 au 19/08/2011 ;
1°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Mme Y... contestait le montant de l'indemnité d'occupation retenu par M. X..., qu'elle évaluait à la somme de 600 euros (conclusions du 3 mars 2015, p. 10 et 11) ; qu'en se bornant, pour toute motivation, à adopter les motifs par lesquels le Tribunal avait retenu que Mme Y... ne contestait pas le montant de 1.250 euros proposé par M. A..., la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, en se bornant, pour toute motivation, à adopter les motifs par lesquels le Tribunal avait jugé que l'indemnité mensuelle serait de 1.250 euros, comme le proposait M. X..., sans répondre aux conclusions par lesquelles Mme Y... soutenait que le montant de l'indemnité d'occupation devait être calculé en fonction de l'indice de rentabilité de l'immeuble et qu'en tout état de cause, des biens similaires étaient loués dans le même immeuble pour un loyer de 900 euros charges comprises, soit 750 euros hors charges ce qui devait conduire à fixer l'indemnité d'occupation à la somme de 600 euros (conclusions du 3 mars 2015, p. 10 et 11), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Mme Y... soutenait que, dans l'hypothèse où elle serait redevable d'une indemnité d'occupation du bien indivis, la Cour d'appel devrait tenir compte des travaux de rénovation qu'elle avait dû réaliser (conclusions du 3 mars 2015, p. 12, al. 2) ; qu'en se bornant, pour toute motivation, à adopter les motifs par lesquels le Tribunal avait jugé que l'indemnité mensuelle serait de 1.250 euros, comme le proposait M. X..., sans répondre à ces conclusions, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.