La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/10/2016 | FRANCE | N°15-18039

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 05 octobre 2016, 15-18039


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 mars 2015), que Mme X... a créé un cabinet infirmier où elle a été rejointe par deux autres infirmières ; qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite, elle leur a proposé de racheter la valeur de sa clientèle paramédicale ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mmes Y... et Z... font grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de Mme X... en paiement de sommes correspondant à la valeur de sa part dans l'indivision de

clientèle commune ;

Attendu qu'ayant justement retenu que la demande en paiement d...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 12 mars 2015), que Mme X... a créé un cabinet infirmier où elle a été rejointe par deux autres infirmières ; qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite, elle leur a proposé de racheter la valeur de sa clientèle paramédicale ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mmes Y... et Z... font grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de Mme X... en paiement de sommes correspondant à la valeur de sa part dans l'indivision de clientèle commune ;

Attendu qu'ayant justement retenu que la demande en paiement de la valeur de la part de la clientèle, présentée par Mme X... devant la cour d'appel à la suite du partage, tendait aux mêmes fins que l'action qu'elle avait engagée devant le tribunal sur le fondement de l'enrichissement sans cause, de sorte que cette demande n'était pas nouvelle, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle était recevable ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que Mmes Y... et Z... font grief à l'arrêt de les condamner, chacune, à payer à Mme X... une certaine somme représentant la valeur de sa part dans la clientèle du cabinet infirmier ;

Attendu, d'abord, que les griefs des deux premières branches ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Attendu, ensuite, que nul ne pouvant être contraint à demeurer dans l'indivision, la cour d'appel, qui a justement rappelé que le droit de demander le partage était imprescriptible, en a déduit, à bon droit, que Mme X... pouvait prétendre à sa part dans l'indivision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mmes Y... et Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne in solidum à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mmes Z... et Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable la demande de Mme Annie X... fondée sur l'existence d'une indivision entre les parties et, en conséquence, d'AVOIR condamné Mme Jocelyne Z... et Mme Julie Y... épouse A... à payer chacune à Mme Annie X... la somme de 12 006, 07 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2011 et d'AVOIR condamné Mme Jocelyne Z... et Mme Julie Y... épouse A... in solidum à payer à Mme Annie X... une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU'« au soutien de son appel Mme Y... expose que Mme X... sollicite en cause d'appel un partage de l'indivision qui n'a pas été présenté en première instance, et que cette demande nouvelle doit être déclarée irrecevable, en application des dispositions de l'article 566 du code de procédure civile ; Que de plus elle n'exerce plus avec Mme Z... de sorte qu'il n'y a pas d'indivision à partager au moment où la Cour statue. Mme X... réplique que sa demande n'est pas nouvelle dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que celle présentée en première instance même si le fondement juridique en est différent ; qu'elle doit être déclarée recevable en vertu des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile. L'article 565 du code de procédure civile prévoit que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. L'appelante est donc en droit d'invoquer en cause d'appel et pour la première fois l'indivision au soutien de sa demande en paiement. La demande doit être déclarée recevable ; (…) Le droit de demander le partage est imprescriptible (Civ 1ère 12/ 12/ 2007) de sorte que la demande de Mme X... doit être déclarée fondée en son principe et le jugement entrepris réformé de ce chef » ;

ALORS QUE la prétention qui ne tend pas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge est irrecevable comme nouvelle en cause d'appel ; que la prétention qui tend à l'octroi d'une indemnité correspondant à la valeur de sa part dans une indivision ne tend pas aux mêmes fins que la demande d'indemnisation d'un préjudice fondée sur l'enrichissement sans cause ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que Mme X..., demanderesse à l'action, avait sollicité en première instance l'indemnisation du préjudice résultant d'une prétendue perte de sa clientèle paramédicale sur le fondement de l'enrichissement sans cause ; qu'en déclarant recevable sa prétention, présentée pour la première fois en cause d'appel, tendant à voir condamner les défenderesses à l'action à lui payer des sommes correspondant à la valeur alléguée de sa part dans l'indivision de la patientèle commune, quand cette prétention nouvelle ne tendait pas aux mêmes fins que sa demande initiale, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Mme Jocelyne Z... et Mme Julie Y... épouse A... à payer chacune à Mme Annie X... la somme de 12 006, 07 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2011 et d'AVOIR condamné Mme Jocelyne Z... et Mme Julie Y... épouse A... in solidum à payer à Mme Annie X... une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « Mme X... a exercé la profession d'infirmière libérale de 1982 à 2010. Mmes Z... et Y... également infirmières l'ont rejointe respectivement en 1999 et 2006 sans qu'aucun contrat d'association ne soit conclu ni droit de présentation de clientèle versé. Elles étaient convenues d'exploiter leur clientèle paramédicale commune en alternant les périodes d'activité et de repos sur des cycles de deux semaines. Le mode de fonctionnement consistait à prendre en charge les patients en fonction des jours de présence déterminés par des plannings, l'infirmière effectuant le soin facturant la prestation correspondante à son profit exclusif. Chacune des infirmières du cabinet gérait sa propre comptabilité. Le 31/ 08/ 2009 Mme X... notifiait au bailleur du local professionnel son intention de se désolidariser du bail à compter du 31/ 12/ 2009 puis elle informait les autres infirmières en octobre 2009 qu'elle devait subir une intervention chirurgicale entraînant un arrêt temporaire de six mois. Le 31/ 12/ 2009 le conseil de Mme X... adressait aux deux autres infirmières un courrier recommandé avec accusé de réception aux termes duquel celle-ci entendait faire valoir ses droits à la retraite et leur proposait de lui racheter sa clientèle paramédicale moyennant la somme de 35. 000 euro. Mmes Z... et Y... ne se sont pas opposées à cette cession de clientèle mais ont fait savoir à Mme X... qu'elles n'avaient nullement l'intention de la racheter. Elles ont embauché Mme B... selon contrat de remplacement temporaire à compter rétroactivement du 23/ 12/ 2009. Par courrier en réponse en date du 18/ 01/ 2010 Mmes Z... et Y... informaient notamment Mme X... qu'elles ne souhaitaient pas lui racheter sa clientèle paramédicale (…) ; qu'en l'espèce il est admis par les parties que le contrat verbal d'exercice d'une activité en commun sans partage d'honoraires qui les liait est régi par les règles de l'indivision. Aux termes de l'article 815 du code civil nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention. Le droit de demander le partage est imprescriptible (Civ 1ère 12/ 12/ 2007) de sorte que la demande de Mme X... doit être déclarée fondée en son principe et le jugement entrepris réformé de ce chef. *sur l'évaluation de l'indemnité : (…) Selon les usages de la profession la valeur de la clientèle correspond à une fourchette comprise entre 20 % et 30 % de la moyenne du chiffre d'affaires des trois dernières années. En l'espèce il résulte des pièces versées aux débats que Mme X... a réalisé un chiffre d'affaires de 105. 793 euro en 2007, de 83. 196 euro en 2008 et de 99172 euro en 2009 soit une moyenne de 96. 053, 66 euro. Elle peut prétendre à 25 % de cette somme soit une indemnité de 24013, 41 euro. A défaut de contrat écrit aucune solidarité ne peut être exigée des débitrices de sorte que chacune des deux infirmières intimées sera condamnée à verser à Mme X... la moitié de cette somme soit 12006, 70 euro, avec intérêts au taux légal à compter du 21/ 12/ 2011 date de l'assignation » ;

1. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions écrites des parties ; que dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 24 septembre 2014 (p. 5, al. 7 et 8 ; p. 6, al. 8 à 10), Mme Y... soutenait qu'il n'existait pas d'indivision entre les parties au litige, si bien que Mme X... aurait seulement pu prétendre valoriser un droit de présentation de sa patientèle dans le cadre de la négociation avec un tiers, ce qu'elle n'avait pas fait ; qu'en affirmant qu'il était admis par les parties que le contrat verbal d'exercice d'une activité en commun sans partage d'honoraires qui les liait était régi par les règles de l'indivision, pour en déduire que le droit de demander le partage était imprescriptible en sorte que la demande d'indemnité de Mme X... devait être déclarée fondée en son principe, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2. ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions écrites des parties ; que dans ses conclusions récapitulatives signifiées le 6 novembre 2014, Mme X... soutenait qu'un partage de l'indivision n'était plus concevable (p. 6, al. 3) et, dans le dispositif de ces écritures (p. 15), elle se bornait à demander la condamnation de Mmes Z... et Y... à lui payer une somme correspondant à la valeur de sa part dans l'indivision de leur patientèle, sans à aucun moment solliciter le partage de cette prétendue indivision ; que, dès lors, en se fondant sur le fait que le droit de demander le partage était imprescriptible, pour en déduire que la demande d'indemnité de Mme X... était fondée en son principe, la cour d'appel a derechef dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3. ALORS en toute hypothèse QUE seul un partage peut mettre fin à l'indivision, et non une situation de fait créée par l'un des indivisaires ; qu'il était acquis aux débats que Mme X... avait mis fin de son propre chef à sa collaboration avec Mmes Z... et Y... à la fin de l'année 2009, et qu'elle n'avait invoqué pour la première fois les règles de l'indivision à son profit que dans le cadre de la procédure d'appel qu'elle avait initiée le 7 mai 2014 ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande d'indemnisation de Mme X... correspondant à la valeur de sa part dans la clientèle commune des parties au titre des années 2007 à 2009, au prétexte que le droit de demander le partage était imprescriptible, quand la seule situation de fait créée par Mme X... en mettant unilatéralement fin à sa collaboration avec Mmes Z... et Y... ne pouvait avoir provoqué le partage de l'indivision alléguée fin 2009, la cour d'appel a violé les articles 815, 829 et 840 du code civil, ensemble l'article 1360 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-18039
Date de la décision : 05/10/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 12 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 05 oct. 2016, pourvoi n°15-18039


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.18039
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award