LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 novembre 2014), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 17 avril 2013, pourvoi n° 12. 14-589), que, par acte du 18 septembre 2002, M. et Mme X... ont vendu un immeuble à la société civile immobilière Les Orchidées (la SCI) ; que, faisant valoir que le bâtiment avait été en partie réalisé sans permis de construire, que Guy X... avait été condamné pénalement pour ces faits et qu'aucune régularisation n'était possible, la SCI a assigné les vendeurs en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1641 du code civil ;
Attendu que, pour dire que la SCI ne rapportait pas la preuve d'un vice rendant le bien, de façon certaine et définitive, impropre à sa destination de restaurant, l'arrêt retient que les constructions réalisées par Guy X... sont irrégulières mais ont été judiciairement régularisées, sont insusceptibles de démolition, peuvent être vendues et que rien ne démontre qu'elles ne peuvent être assurées, que, si la situation n'est pas régularisable, car la construction existante a déjà absorbé la totalité du coefficient d'occupation des sols autorisé, le certificat d'urbanisme négatif produit, pas plus que l'attestation de l'architecte, ne répondent à la question de savoir si les travaux susceptibles de permettre de recevoir du public et donc d'exercer la restauration sont possibles, que, s'agissant d'une construction ancienne à l'égard de laquelle aucune action pénale ou civile n'est plus possible, il n'est pas démontré qu'une demande de travaux en vue de respecter les normes des établissements recevant du public et n'aggravant pas les irrégularités initiales ferait de façon certaine l'objet d'un refus de la part du maire de la commune ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la SCI soutenant qu'en raison du dépassement du coefficient d'occupation des sols par les constructions illicites, une destruction fortuite du bâtiment ne permettrait pas la reconstruction à l'identique, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il rejette les demandes formées par la SCI contre Mme Elodie Y..., l'arrêt rendu le 18 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et les condamne à payer la somme de 3 000 euros à la SCI Les Orchidées ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Les Orchidées.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la SCI LES ORCHIDEES ne rapporte pas la preuve de l'existence de vices cachés rendant le bien acheté impropre à sa destination, au sens de l'article 1641 du Code civil, et d'avoir en conséquence débouté la SCI LES ORCHIDEES de ses demandes de dommages et intérêts formées à l'encontre des consorts X... ;
Aux motifs que « Attendu qu'il est essentiel de noter en droit que l'action est fondée sur les vices cachés affectant l'immeuble vendu, et non pas sur le dol ou sur l'erreur affectant le consentement ;
Attendu que la seule question juridique est donc de savoir si les vices cachés allégués rendent impropre la chose vendue à l'usage de restauration auquel elle est destinée selon l'acte de vente, aucun élément du dossier ne remettant en cause la possibilité d'habitation ;
Attendu que le premier vice serait constitué par les termites, alors qu'il n'est pas contesté que les rapports obligatoires des techniciens concernant l'amiante et les termites aient été produits lors de la vente, leurs conclusions ne permettant pas de retenir l'existence d'un vice caché de ce chef, pas plus que le rapport veritas établi en février 2005, alors que l'existence d'un vice s'évalue au jour de la vente ;
Attendu que le deuxième vice allégué serait constitué par les constructions entreprises irrégulièrement par le vendeur, qui ont agrandi d'une surface évaluée à 107, 90 ml le bien, référence faite aux certificats de conformités initiaux ;
Que ces constructions irrégulières empêcheraient toute régularisation, référence faite à la réglementation des établissements recevant du public, le certificat d'urbanisme produit qui est négatif en faisant foi ainsi que les études de l'architecte et de l'expert privé A... ;
Attendu qu'il est constant et non sérieusement contesté que le vendeur a fait l'objet de poursuites pour édification d'une construction sans permis de construire valable (arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d'appel en date du 22 février 80), et pour défaut de permis de construire (tribunat correctionnel de grasse 23 mats 1981), qui se sont soldées par des condamnations pénales, mais sans que les juridictions saisies ordonnent la démolition, ainsi que cela résulte expressément de leur dispositif ;
Attendu qu'il s'agit donc là de constructions existantes et judiciairement régularisées, insusceptibles de démolition, et qui pouvaient parfaitement être vendues, de même que rien ne démontre qu'elles ne puissent être assurées, aucun document n'étant fourni en ce sens par les acheteurs ;
Attendu que le dol n'étant pas invoqué, pas plus que l'erreur ayant pu affecter le consentement, la cour n'estime pas que les vendeurs se devaient de signaler au moment de la vente le processus au terme duquel le bien vendu ne souffre plus d'aucune illégalité susceptible d'être sanctionnée par la démolition ou de lui ôter sa valeur marchande ;
Attendu que pour autant, la situation n'est pas à ce jour régularisable par l'administration au visa de la législation sur l'urbanisme, car la construction existante a déjà absorbé la totalité du coefficient d'occupation des sols disponible et même au-delà :
Que le certificat d'urbanisme négatif produit, pas plus que l'attestation de l'architecte Z... ne répondent nonobstant à la stricte question juridique qui est posée à savoir celle de la possibilité non pas d'une « régularisation de la construction du restaurant » refusée en application des articles R 111 — 21 et R111 — deux du code de l'urbanisme (décision du maire en date du 18 octobre 2010), mais bien celle de travaux susceptibles de permettre de recevoir du public et donc d'exercer la restauration ;
Attendu qu'à cet égard, et s'agissant d'une construction ancienne à l'égard de laquelle aucune action pénale ou civile n'est plus possible, il n'est pas démontré qu'une demande de travaux en vue de respecter des normes des établissements recevant du public et n'aggravant pas les irrégularités initiales ferait de façon certaine l'objet d'un refus de la part du maire de la commune ; que cela vaut pour les travaux de ravalement invoqués par les acheteurs, que la mairie réclame (pièce 11 de l'intimée) et qui n'ont rien à voir avec la question soumise à la cour ;
Attendu que bien mieux, par courtier en date du 5 septembre 2005 de la mairie non autrement commenté par l'intimée, le directeur général adjoint indique que la société les orchidées n'a pas, à ce jour, déposé de demande en vue de procéder à un aménagement de son établissement et que si la commune était saisie d'une demande de travaux, il serait fait application de la jurisprudence Seller ;
Attendu qu'à la démonstration n'est donc pas rapportée d'un vice qui résulterait des constructions irrégulièrement édifiées et qui, de façon certaine et définitive, rende le bien vendu impropre à sa destination de restaurant ;
Attendu que c'est donc une confirmation du jugement de premier ressort qui s'impose, les appelantes ne justifiant pas en revanche d'un préjudice spécifique et quantifiable qui ouvre droit â des dommages-intérêts à hauteur de 15 000 €, la mise en perspective de l'arrêt de la Cour de Cassation et du présent arrêt suffisant à constituer le titre permettant la restitution de somme versée en exécution de l'arrêt cassé ; qu'aucune sommation n'est d'ailleurs versée dans leurs pièces régulièrement communiquées ;
Attendu qu'une somme de 3000 € est justifiée au titre des frais inéquitablement exposés en cause d'appel » ;
Alors, d'une part, que s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; qu'en se prononçant néanmoins au regard des conclusions déposées par la SCI LES ORCHIDEES le 26 mars 2014, quand cette dernière avait pourtant déposé le 18 septembre 2014 de nouvelles conclusions, la Cour d'appel, qui n'a pas exposé par ailleurs succinctement les moyens de parties, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 3, du Code de procédure civile ;
Alors, d'autre part et subsidiairement, que l'exposante faisait valoir dans ses conclusions d'appel (page 6, alinéas 1 à 3) qu'en cas de démolition fortuite des constructions illicites, elle ne pourrait reconstruire à l'identique son bien, ce qui établit l'existence d'un vice caché dont il est affecté ; qu'en ne répondant pas, même sommairement, à ce moyen péremptoire, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.