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28/09/2016 | FRANCE | N°15-15302

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2016, 15-15302


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation (Soc. 26 juin 2013, n° 11-28.946), que la société RTE, filiale du groupe EDF, est organisée en sept régions, chacune comptant plusieurs groupes d'exploitation transport, tous dotés d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; que, consultés en 2011 sur l'étape intermédiaire d'une réorganisation mise en place par la société en 2008, les cinq CHSCT de la région sud-ouest ont décidé de recourir à une mesu

re d'expertise ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation (Soc. 26 juin 2013, n° 11-28.946), que la société RTE, filiale du groupe EDF, est organisée en sept régions, chacune comptant plusieurs groupes d'exploitation transport, tous dotés d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ; que, consultés en 2011 sur l'étape intermédiaire d'une réorganisation mise en place par la société en 2008, les cinq CHSCT de la région sud-ouest ont décidé de recourir à une mesure d'expertise ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 4614-13 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'employeur doit supporter le coût de l'expertise qu'il prévoit et celui de sa contestation dès lors qu'aucun abus du comité n'est établi ;
Attendu que pour rejeter la demande en remboursement des frais de procédure engagés devant elle par les CHSCT et les condamner aux dépens, l'arrêt énonce que les CHSCT, qui succombent, conserveront la charge de leurs frais irrépétibles et seront condamnés aux dépens de la procédure ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser l'existence d'un abus des CHSCT, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamne les CHSCT des GET Gascogne, Languedoc-Roussillon, Pyrénées, Massif Central Ouest et Béarn aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 21 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef des dispositions cassées ;
Condamne la société RTE à payer aux CHSCT des GET Gascogne, Languedoc-Roussillon, Pyrénées, Massif Central Ouest et Béarn la somme globale de 4 852 euros au titre de leurs frais de procédure devant la cour d'appel ;
Condamne la société RTE aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamne la société RTE aux dépens devant la Cour de cassation ;
Vu l'article L. 4614-13 du code du travail, condamne la société RTE à payer aux CHSCT des GMR Massif Central Ouest, Languedoc-Roussillon et Pyrénées, Béarn et Gascogne la somme globale de 3 600 euros ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les CHSCT des GMR Massif Central Ouest, Languedoc-Roussillon et Pyrénées, Béarn et Gascogne.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance déférée en ce qu'elle avait limité le champ de chacune des expertises au seul périmètre géographique dont relève chacun des CHSCT défendeurs et au sein duquel chacun a été désigné et avait, en conséquence, fixé le champ de chacune des expertises en ces termes : d'une part éclairer les représentants du personnel au CHSCT sur les choix, les enjeux et les conséquences du projet intitulé « projet d'arrêt de l'étape intermédiaire dossier MSHT Postes TESO » en termes d'organisation, de conditions de travail, d'hygiène, de santé et de sécurité des salariés à travers notamment l'analyse des évolutions envisagées, d'autre part, les assister dans le cadre de la formulation de l'avis qu'ils devront élaborer sur le projet conformément à l'article L. 4612-8 du Code du travail ;
AUX MOTIFS QUE « Aux termes dispositions de l'article L.4611-1 du code du travail le comité d'hygiène de sécurité des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des salariés de l'établissement au sein duquel il a été désigné ainsi qu'à l'amélioration de leurs conditions de travail. Il s'en déduit nécessairement que dans le cadre de la mission que le CHSCT confie à un expert en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, en application de l'article L.4614-12 du code du travail, l'expert ne peut se voir conférer un pouvoir d'investigation qu'au sein de l'établissement dans le cadre duquel sa désignation a été effectuée. Les dispositions de l'article L.4614-13 du même code qui précisent que l'employeur ne peut s'opposer à l'entrée de l'expert dans l'établissement et qu'il lui fournit les informations nécessaires à l'exercice de sa mission ne pouvait permettre aux cinq CHSCT concernés de donner pouvoir au cabinet Degest de procéder à des analyses dans d'autres établissements de référence. En conséquence, c'est à bon droit que le président du tribunal de grande instance statuant en référé a limité le champ de chacune des expertises au seul périmètre géographique dont relevait chacun des CHSCT et a fixé en conséquence les missions de l'expert » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Selon l'article L4612-8 du Code du travail, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail. L'article L4614-12 du Code du Travail ajoute que ce comité peut donc faire appel à un expert agréé lorsque ce type de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité et les conditions de travail est mis en place. Ainsi, il résulte des dispositions légales qu'il n'est pas prévu expressément de limitation géographique aux prérogatives de consultation du CHSCT, et de cantonnement du champ d'intervention de l'expertise au périmètre de chaque CHSCT. Cependant, si la jurisprudence a pu juger qu'en l'absence d'un CHSCT unique compétent pour l'ensemble des sites concernés, le projet qui excède nécessairement les prérogatives de chacun des CHSCT impose la consultation de tous les CHSCT territorialement compétents pour ces sites, il ne peut être déduit de ce principe jurisprudentiel qu'un CHSCT serait en droit d'être obligatoirement consulté sur un projet dépassant son périmètre d'intervention et de se voir ainsi communiquer, dans le cas où le recours à une expertise a été décidé, des informations relatives à d'autres établissements. En effet, chaque CHSCT ne doit être consulté que s'agissant des conséquences propres d'un projet d'envergure dépassant son seul périmètre, c'est-à-dire dans le cadre limité des seules incidences particulières que peut avoir ledit projet, quelque soit sa dimension, au sein du périmètre de chaque CHSCT concerné, ce qui justifie que dans le cas où une expertise est décidée, celle-ci soit limitée à l'étude de l'impact de ce projet sur ce même périmètre. En l'espèce, la société RTE a régulièrement consulté l'ensemble des CHSCT, s'agissant d'un projet d'envergure nationale, en respectant le périmètre de chacun des CHSCT concernés au regard des conséquences en termes d'hygiène et de sécurité susceptibles d'en résulter dans ce même périmètre. De plus, si ce principe a pu concerner essentiellement des expertises diligentées pour risque grave, il ne se limite cependant pas à ces dernières dans la mesure où le Tribunal de grande instance d'EVRY a pu rappeler dans une ordonnance en date du 12 mai 2009 qu'il importait au CHSCT de déterminer la nécessité de recourir à une expertise dans le cadre des dispositions du code du travail, sur le projet intéressant son secteur géographique de compétence et sur les conséquences de ce projet sur les conditions de travail, d'hygiène et de sécurité des seuls agents de cet établissement, affaire qui concernait une expertise relative à un projet important. En conséquence, il convient dans le cas présent de limiter le champ de chacune des expertises au seul périmètre géographique dont relève chacun des CHSCT défendeurs et au sein duquel chacun a été désigné » ;
ALORS QUE le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) peut faire appel à un expert agréé en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L. 4612-8 du Code du travail ; que lorsque le projet en cause concerne l'entreprise dans son ensemble et excède, par conséquent, le champ de compétence du CHSCT ayant décidé de recourir à la mesure d'expertise, l'expert doit avoir accès à l'ensemble des informations utiles concernant ce projet et non aux seules informations concernant l'établissement dans le cadre duquel l'expertise a été décidée ; qu'en l'espèce, pour juger que le champ de chacune des expertises devait être limité au seul périmètre géographique dont relevait chacun des CHSCT et fixer en conséquences les missions de l'expert, la Cour d'appel a retenu que dans le cadre de la mission que le CHSCT confie à un expert en cas de projet important au sens des dispositions de l'article L. 4614-12, ce dernier ne peut se voir conférer un pouvoir d'investigation qu'au sein de l'établissement dans le cadre duquel sa désignation a été effectuée ; qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé, par motifs adoptés des premiers juges, que le projet en cause était d'envergure nationale, excédant donc le champ de chacun des établissements dans le cadre desquels les mesures d'expertise avaient été décidées et justifiant ainsi que l'expert désigné ait accès à l'ensemble des informations concernant ce projet, y compris celles excédant le périmètre géographique dont relevait chacun des CHSCT ayant décidé du recours à une expertise, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 4612-8, L. 4614-12 et L. 4614-13 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande des CHSCT tendant à ce que la société RTE soit condamnée à payer leurs frais et honoraires d'avocat et de les avoir condamné aux dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE « Les CHSCT des GMF qui succombent conserveront la charge de leurs frais irrépétibles et seront condamnés aux dépens de la procédure » ;
ALORS QUE lorsqu'un Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) fait appel à un expert agréé en application des dispositions de l'article L. 4614-12 du Code du travail, l'employeur supporte non seulement les frais d'expertise mais également les frais de la procédure de contestation éventuelle de cette expertise dès lors qu'aucun abus du Comité n'est établi ; qu'en l'espèce, en refusant de faire droit à la demande des CHSCT tendant à ce que la société RTE soit condamnée à régler leurs frais et honoraires d'avocat et en condamnant ces derniers aux dépens de la procédure, quand aucun abus de leur part n'était invoqué ni a fortiori établi par la société RTE, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 4612-13 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-15302
Date de la décision : 28/09/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 21 janvier 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2016, pourvoi n°15-15302


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.15302
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