LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X..., venant aux droits d'Emile X..., son père décédé, a fait procéder, le 16 avril 2014, à l'inscription d'une hypothèque provisoire sur des biens immobiliers appartenant à Mme Y..., en vertu d'un acte notarié en date du 30 avril 1999 portant reconnaissance de dette à l'égard de ce dernier de la somme de 470 000 francs remboursable le 30 avril 2009 ; que Mme Y... a saisi un juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de cette mesure conservatoire ; que par un jugement du 28 août 2014, cette demande ainsi que la demande reconventionnelle de Mme X... ont été rejetées ;
Sur les deux premières branches du moyen unique, telles que reproduites en annexe :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de mainlevée de l'hypothèque provisoire inscrite sur le bien immobilier lui appartenant à la requête de Mme X..., et de la condamner à payer à celle-ci les sommes de 800 et de 1. 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu, d'une part, qu'en raison des contestations de Mme Y... et d'une dette dont le règlement était prévu en 2009, il était justifié de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement et, d'autre part, que l'acte notarié était antérieur de treize ans à la maladie de M. X... et que le remboursement devait intervenir en avril 2009 de sorte que la maladie survenue en 2012 ne pouvait raisonnablement être invoquée pour justifier l'impossibilité de prouver sa renonciation au recouvrement de la créance, c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les neuvième et dixième branches du moyen unique, telles que reproduites en annexe :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la créance dont Mme Y... se prévalait ne résultait que de ses seules affirmations, c'est par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a décidé d'écarter la compensation invoquée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les troisième à huitième branches du moyen unique, telles que reproduites en annexe :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu que l'illégalité de la clause d'indexation, à supposer qu'elle soit établie, ne pouvait affecter que le montant des causes de l'inscription d'hypothèque provisoire sans remettre en cause la validité de celle-ci ; que le moyen, pris en ses troisième à huitième branches, qui fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de mainlevée de l'hypothèque, est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Y... à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Y... de sa demande de mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite sur le bien immobilier lui appartenant à la requête de Madame Patricia X... et de l'avoir condamnée à payer à celle-ci les sommes de 800 et 1 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs propres que, en application de l'article L. 511-2 du code des procédures civiles d'exécution une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire ; que l'article L. 111-3 du même code inclut dans les titres exécutoires les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ; qu'enfin l'article L. 111-2 dispose que le titre exécutoire doit constater une créance liquide et exigible et l'article L. 111-6 précise que la créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation ; qu'en l'espèce l'acte authentique établi le 30 avril 1999 portant reconnaissance de dette par Mme Hélène Y... au profit de M. Émile X... est revêtu de la formule exécutoire ; qu'il y est constaté que Mme Y... reconnaît devoir la somme de 470. 000 Frs à Émile X... et qu'elle s'oblige à le rembourser de cette somme au plus tard le 30 avril 2009, sans intérêts jusqu'à cette date, mais avec indexation suivant une moyenne entre l'indice du coût de la construction et l'indice mensuel des prix à la consommation série France entière ensemble hors tabac, et avec intérêt au taux de 7 % à compter du 30 avril 2009 sur la somme indexée, avec capitalisation des intérêts ; qu'il s'en déduit que la créance avait un terme, les précisions étant suffisantes pour permettre son évaluation au moment où elle sera liquidée ; que s'agissant de l'indice d'indexation retenu si l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, prohibe dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties, force est de constater que dans le cas d'espèce l'indice retenu n'est pas comme le soutient l'appelante une indexation sur l'indice général des prix, mais une moyenne entre l'indice mensuel des prix à la consommation et l'indice du coût de la construction, lequel est en rapport direct avec l'objet de la convention portant sur une reconnaissance de dettes établie en vue de l'acquisition d'un bien immobilier ; que le point de départ de l'indexation, est parfaitement explicité puisque les indices de référence sont mentionnés dans l'acte ; que, enfin cet acte notarié constate une reconnaissance de dette entre particuliers ; que les dispositions du code monétaire et celles du code de la consommation portant sur taux effectif global qui ne serait pas mentionné ne peuvent trouver application ; qu'il convient en outre de préciser que le taux d'usure moyen tant pour l'année 1999 date de l'acte, que pour l'année 2009 date de l'échéance du remboursement sans intérêt du prêt, se situait au-delà des 7 % prévu au contrat ; que s'agissant des circonstances de fait qui auraient empêché M. X... de matérialiser une renonciation à toutes créances à l'encontre de l'appelante, il convient de rappeler que l'acte est antérieur de treize ans à la date à laquelle la maladie du créancier a été diagnostiquée et que l'acte prévoyait comme date de remboursement sans intérêt avril 2009 ; qu'ainsi il ne peut ainsi être raisonnablement invoqué la maladie de M. X... survenue en 2012 pour justifier l'impossibilité de ce dernier à renoncer au recouvrement de sa créance ; qu'enfin, l'acte prévoyait explicitement en garantie du remboursement du prêt « d'affecter et d'hypothéquer au profit de Monsieur X..., créancier qui accepte, à première demande, les biens immobiliers ci-après désignés qu'elle envisage d'acquérir » ; que, compte tenu de ces stipulations, Mme Patricia X... était en droit de publier et d'enregistrer une hypothèque judiciaire provisoire, étant de surcroît relevé que compte tenu des contestations mêmes de l'appelante, s'agissant d'une dette dont le règlement était prévu en 2009, il est justifié de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, ainsi que de régulariser une inscription définitive, nonobstant les contestations formées sur une hypothèque provisoire, étant cependant précisé que malgré le fait qu'une inscription définitive se substitue à l'inscription provisoire, le juge de l'exécution, et en conséquence la cour, reste saisi de la contestation initiale introduite avant l'inscription et la publication de l'hypothèque définitive ; que, s'agissant d'une compensation de créances, Mme Hélène Y... entend fixer forfaitairement une somme de 2300 € annuelle sur 13 ans, à savoir une créance globale de l'ordre de 100 000 € à son profit ; que, cependant, la créance dont l'appelante entend se prévaloir est contestée tant en son principe qu'en son montant et ne résulte que des seules affirmations de Mme Y... ;
Et aux motifs, le cas échant repris des premiers juges, sur le caractère liquide et exigible de la créance, que l'acte authentique établi le 30 avril 1999 par Maître Z..., notaire associé à Paris, portant reconnaissance de dette par Mademoiselle Hélène Y... au profit de Monsieur Émile X... est revêtu de la formule exécutoire ; qu'il constate que Mademoiselle Y... reconnaît devoir la somme de 470 000 francs à Monsieur Émile X..., s'oblige à le rembourser de cette somme au plus tard le 30 avril 2009, sans intérêt jusqu'à cette date, mais avec une indexation suivant une moyenne entre l'indice du coût de la construction et l'indice mensuel des prix à la consommation série France entière, ensemble, hors tabac, et avec intérêts au taux de 7 % à compter du 30 avril 2009 sur la somme indexée, avec capitalisation des intérêts ; qu'il résulte de ces dispositions que si cette créance avait un terme, ce terme est échu et que sont données toutes les précisions nécessaires pour permettre une évaluation au moment où elle sera liquidée ; que si Madame Y... soutient que l'indexation sur l'indice général des prix est prohibée par le code monétaire et financier, force est de constater que l'indice retenu est une moyenne entre deux indices, de sorte qu'il n'y a pas lieu de constater la nullité de cette indexation prévue par les parties ; quant au point de départ de l'indexation, il est parfaitement explicité puisque les indices de référence sont mentionnés dans l'acte ; qu'il n'y a donc pas de difficulté d'interprétation ; que s'agissant du taux effectif global qui ne serait pas mentionné ou du taux d'intérêt qui serait usuraire, il convient de rappeler que cet acte notarié constate une reconnaissance de dette entre particulier ; qu'il ne s'agit pas d'un acte de prêt devant à ce titre respecter les dispositions du code monétaire et financier ou celles du code de la consommation ; que par conséquent, la créance prévue à l'acte notarié est bien liquide et exigible ; que sur l'existence d'une créance apparaissant fondée en son principe, si l'article 511-1 du code des procédures civiles d'exécution exige une créance apparaissant fondée en son principe, force est de constater que l'inscription de l'hypothèque provisoire n'a pas été prise au vu de l'ordonnance délivrée par le juge de l'exécution le 13 décembre 2013 sur requête, mais au vu du seul acte notarié du 30 avril 1999, donc en application de l'article suivant, de sorte qu'il n'y a pas lieu de rechercher si la créance est fondée en son principe, seuls les caractères de liquidité et d'exigibilité de la créance figurant dans l'acte pouvant être appréciés à ce stade pour obtenir une éventuelle mainlevée, outre les circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance ; que sur les circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance, ces circonstances résultent de la contestation de Madame Y... quant aux sommes réclamées par Madame X..., ainsi que de son absence de réponse à la mise en demeure adressée le 6 mars 2013 par le conseil de Madame X... ; que par conséquent, au vu de l'ensemble de ces éléments, la demande de mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire sera rejetée ;
Alors, de première part, que, même lorsqu'une autorisation préalable n'est pas requise, le juge peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article L. 511-1 du code de procédure civile d'exécution ne sont pas réunies ; qu'il incombe au créancier de prouver que ces conditions sont réunies et notamment l'existence de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance ; que la cour d'appel, en se bornant à relever que la dette était exigible en 2009 et contestée par Madame Y..., n'a pas caractérisé l'existence de circonstances, non inhérentes à l'existence d'une créance liquide et exigible, susceptibles d'en menacer le recouvrement et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 511-1 et R. 512-1 du code de procédure civile d'exécution ;
Alors, de deuxième part, que Madame Y... soutenait que Monsieur X... avait renoncé à la créance, se prévalant des démarches accomplies à cette fin par celui-ci et de ce que la dégradation rapide de son état de santé avait mis celui-ci dans l'impossibilité de régulariser les actes nécessaires à cet effet, et elle-même dans l'impossibilité morale de requérir la preuve de cette renonciation ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors, pour écarter le moyen déduit de cette double impossibilité, se borner à se référer à la situation existant soit à la date de la reconnaissance de dette, soit à la date de l'exigibilité de la créance, sans s'expliquer sur les circonstances postérieures ainsi alléguées ayant précédé le décès de Monsieur X... ; qu'en l'état elle a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1348 du code civil ;
Alors que, de troisième part, l'article L. 112-2 du code monétaire et financier interdit les indexations fondées sur le niveau général des prix, fût-ce pour partie ; que la cour d'appel, qui constate que la dette était indexée sur un indice correspondant à la moyenne entre l'indice des prix à la consommation et un indice licite comme étant en rapport direct avec l'objet de la convention, ne pouvait estimer que cet indice ne tombait pas sous le coup de la prohibition de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier sans méconnaitre la portée de ses propres énonciations, en violation de ce texte ;
Alors, de quatrième part, que l'article L. 112-1 du code monétaire et financier répute non écrite toute clause prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; que Madame Y... soutenait que l'indexation de la créance méconnaissait ces dispositions puisque se référant à un indice antérieur à la date de remise des fonds ; que la cour d'appel qui se borne à constater que le point de départ de l'indexation et l'indice de références étaient explicité pour le premier et mentionnés pour les seconds, sans s'expliquer sur leur conformité à cette disposition n'a pas répondu à ce moyen et a privé son arrêt de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, de cinquième part, qu'il résulte des articles L. 313-2 du code de la consommation et L. 313-4 du code monétaire et financier que le taux effectif global doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt ; qu'il ne résulte pas de ce texte qui s'est borné à reprendre dans le cadre de la codification à droit constant réalisée par la loi du 26 juillet 1993, les règles générales applicables à tous les prêts figurant dans les articles 1 à 7 de la loi du 18 décembre 1966 qu'elle abrogeait, qu'il ne serait plus applicable à un prêt conclu entre particuliers ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a méconnu les dispositions précitées ;
Alors, de sixième part, que les articles L. 313-3 du code de la consommation et L. 313-5 du code monétaire et financier interdisent toute stipulation d'intérêt portant intérêt à un taux supérieur au taux de l'usure, défini par voie réglementaire chaque trimestre ; que Madame Y... soutenait dans ses écritures d'appel que le taux de 7 % retenu était, depuis le troisième trimestre 2009, toujours supérieur au taux de l'usure ; que la cour d'appel qui se borne à relever que le taux d'usure moyen, tant pour l'année 1999, date de l'acte, que pour l'année de 2009, date de l'échéance du remboursement sans intérêt du prêt, se situait au-delà des 7 % prévus au contrat sans préciser le trimestre de référence qu'elle retenait, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;
Alors, de septième part, qu'en statuant de la sorte, sans s'expliquer, comme elle y était invitée sur l'évolution ultérieure de ce taux, la Cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard des articles L. 313-3 du code de la consommation et L. 313-5 du code monétaire et financier ;
Alors, de huitième part, qu'en se déterminant de la sorte en fonction du seul montant du taux d'intérêt, sans procéder au calcul du taux effectif global, lors même que Madame Y... avait souligné en ses écritures d'appel, que cet intérêt s'ajoutait à l'indexation convenue, la Cour d'appel a encore une fois privé sa décision de base légale au regard des articles L. 313-3 du code de la consommation et L. 313-5 du code monétaire et financier
Alors, de neuvième part, que Madame Y... se prévalait de la compensation de la créance alléguée à son encontre avec la créance qu'elle détenait à l'encontre de la succession de Monsieur X... qu'elle avait hébergé gratuitement pendant treize ans ; qu'en se bornant à constater que cette créance était contestée tant en son principe qu'en son montant, quant il lui appartenait de trancher cette contestation, le juge de l'exécution étant compétent pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires et les contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, la Cour d'appel a méconnu les pouvoirs qu'elle tenait de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire ;
Alors, de dixième part, qu'en relevant en outre que cette créance ne résulterait que des seules affirmations de Madame Y..., sans s'expliquer sur les pièces produites par celle-ci à l'appui de ce moyen, tendant à établir que Monsieur X... habitait effectivement avec elle dans l'immeuble lui appartenant, alors qu'il ne disposait pas de revenus suffisants pour participer aux charges de la vie commune, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile.