La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2016 | FRANCE | N°15-21500

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 22 septembre 2016, 15-21500


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2015), qu'en 1959, M. Guy X... a donné à bail d'habitation un appartement à M. Y...outre, à compter du 1er avril 1985, l'appartement mitoyen ; que M. et Mme William X... (M. et Mme X...), devenus le 22 juin 2011 propriétaires de ces deux logements, ont délivré à Mme Y..., venant aux droits de son époux décédé, un congé pour chacun des baux, fondé sur l'article 4 de la loi du 1er septembre 1948, avec droit au maintien dans les lieux ; qu'ils l'ont ensuite

assignée en déchéance du droit au maintien dans les lieux pour manq...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2015), qu'en 1959, M. Guy X... a donné à bail d'habitation un appartement à M. Y...outre, à compter du 1er avril 1985, l'appartement mitoyen ; que M. et Mme William X... (M. et Mme X...), devenus le 22 juin 2011 propriétaires de ces deux logements, ont délivré à Mme Y..., venant aux droits de son époux décédé, un congé pour chacun des baux, fondé sur l'article 4 de la loi du 1er septembre 1948, avec droit au maintien dans les lieux ; qu'ils l'ont ensuite assignée en déchéance du droit au maintien dans les lieux pour manquement à la clause du bail interdisant tout changement dans les lieux loués sans le consentement préalable par écrit du propriétaire, en se prévalant du fait que les deux appartements avaient été réunis en un seul ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les bailleurs rapportaient la preuve de ce qu'ils ne connaissaient pas la réunion des deux lots avant leur acquisition et de la poursuite de la violation du bail après leur acquisition et jusqu'au jour de leur demande, la cour d'appel en a exactement déduit que M. et Mme X... étaient recevables à solliciter la déchéance du droit au maintien dans les lieux de Mme Y... en raison des changements opérés ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen pris en ses troisième et quatrième branches, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le bail exigeait un accord écrit du bailleur pour la transformation des lieux loués et que la réunion des deux lots et l'absence d'accord écrit du bailleur étaient établis, la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises, a souverainement retenu que la violation manifeste et durable d'une obligation précisée dans le bail ne pouvait conduire qu'à reconnaître la mauvaise foi de Mme Y..., de sorte qu'elle a légalement justifié sa décision ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première et deuxième branches du second moyen qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré recevables les demandes de M. et Mme William X... tendant à constater que Mme Z..., veuve Y..., a perdu le bénéfice de son droit au maintien dans les lieux dans un immeuble sis à Paris (4ème), ...et qu'elle est occupante sans droit ni titre depuis le 30 juin 2012 et d'ordonner en conséquence son expulsion et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation jusqu'à la libération effective des lieux.
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Z..., veuve Y..., soulève l'irrecevabilité des demandes des appelants au motif que le transfert du bail à l'acquéreur ne produit effet que pour l'avenir selon l'article 1743 du code civil et qu'en conséquence, l'acquéreur ne peut agir contre le preneur pour des manquements au bail antérieurs à la vente ; qu'elle fait valoir que les faits sont anciens, préexistant à la cession du local, et que les appelants ont visité le bien et ont acquis en parfaite connaissance de cause ; que les appelants répondent qu'ils ont acquis les appartements sans pouvoir les visiter et produisent aux débats des attestations en ce sens d'autres membres de la SCI qui confirment le refus des locataires de faire visiter les lots 38 et 39 (pièces 17, 18, 19 et 20) ; que les appelants répliquent, en outre, que la violation du bail s'est poursuivie postérieurement à leur acquisition et qu'ils sont dès lors recevables à agir, ayant un intérêt à cela ; qu'en effet, les bailleurs rapportent la preuve de ce qu'ils ne connaissaient pas la réunion des deux lots avant leur acquisition et de la poursuite de la violation du bail après leur acquisition, au jour de leur demande ; qu'en conséquence, leur demande est recevable et le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE si en application de l'article 1165 du code civil lequel dispose que « les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes », les nouveaux acquéreurs ne peuvent fonder une demande de résiliation du bail sur des manquements antérieurs à l'acte qui les a rendu propriétaire, c'est à la condition que ces manquements ne sont pas poursuivis après la vente ; qu'or, en l'espèce, il n'est pas contesté que la transformation des lieux loués a perduré après la vente ; que dès lors M. et Mme X... ont bien intérêt à agir et leurs demandes sont recevables.
ALORS QUE l'acquéreur d'un immeuble ne peut agir contre le locataire en raison d'une modification des lieux loués dès lors que celle-ci a eu lieu antérieurement à la vente, sauf cession de créance ou subrogation expresse, et qu'il n'a pas mis le locataire en demeure d'avoir à remettre les lieux en l'état ; qu'en déclarant recevables les demandes des époux X... tendant, notamment, à constater que Mme veuve Y... a perdu le bénéfice de son droit au maintien dans les lieux et qu'elle est occupante sans droit ni titre depuis le 30 juin 2012 et ordonner son expulsion, quand la réunion des lots loués qui lui était reprochée, intervenue postérieurement au 1er avril 1985, était très antérieure à l'acquisition de ces locaux par les époux X... à la suite d'un partage, qu'aucune cession de créance ou subrogation expresse du bailleur précédent n'avait été constatée ni même alléguée en faveur de ces derniers et qu'aucune mise en demeure de remettre les lieux en l'état n'avait été délivrée à l'exposante par les nouveaux acquéreurs, la cour d'appel a violé les articles 1165 et 1743 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR prononcé la déchéance du bénéfice du droit au maintien dans les lieux, sis à Paris (4ème), ..., de Mme Z..., veuve Y..., du fait de la réunion non autorisée des lots 38 et 39 en violation de ses obligations et ordonné, en conséquence, l'expulsion de Mme Z..., veuve Y..., ainsi que celle de tout occupant de son chef, des lieux ainsi que D'AVOIR fixé l'indemnité d'occupation au montant du loyer contractuel majoré des charges et condamné Mme Z..., veuve Y..., à la payer à M. et Mme William X... à compter du jour de l'arrêt jusqu'à libération effective des lieux.
AUX MOTIFS QUE les appelants font valoir que la preuve de la violation du bail est apportée, que Mme Y... ne conteste d'ailleurs pas la réunion des deux appartements et que, dès lors, en application de l'article 4 de la loi du 1er septembre 1948 modifié par la loi du 31 décembre 1975, en n'ayant pas exécuté son obligation de locataire, elle n'est pas de bonne foi et ne peut bénéficier du statut de maintenue dans les lieux ; qu'ils exposent à cet effet que le tribunal d'instance a refusé de faire droit à leur requête de constat, au motif que l'attestation produite de l'architecte de l'immeuble, M. A..., suffisait à établir la réunion des deux appartements ; qu'ils ajoutent que les deux baux, dans leur clause numéro 11, prévoient que « le locataire est obligé de ne pas transformer les locaux et équipements loués sans l'accord écrit du propriétaire » ; que Mme Z..., veuve Y..., soutient qu'elle a obtenu l'autorisation verbale du bailleur et produit aux débats des attestations concordantes d'occupants de l'immeuble, Mme B...qui déclare « Dominique et Maurice Y... sont venus également solliciter son accord (de M. Jean Eudes X...) pour ouvrir le passage entre leur appartement et le local le jouxtant. Il leur a donné volontiers, toujours oralement. Je peux donc témoigner que ce passage entre leur appartement et la pièce dont ils voulaient faire la chambre de leurs filles a été créé en pleine connaissance et avec l'accord du propriétaire de l'époque » et M. C..., qui a participé la démolition de la cloison, qui témoigne aussi de l'autorisation verbale donnée par le gérant de l'époque ; que, cependant, l'architecte de l'immeuble témoigne, que ni lui ni son prédécesseur n'avaient le pouvoir ni n'ont donné l'autorisation de démolir cette cloison ; que M. Jean Eudes X..., gérant de la SCI de l'époque, atteste qu'il n'a jamais donné d'autorisation, contrairement à ce qu'affirme les autres témoins ; que Mme X...
D..., qui avait témoigné en faveur de l'intimée dans un premier temps, est revenue sur ce témoignage et indique désormais « pour faire suite à l'attestation qui m'a été demandée par Mme Dominique Y... en date du 30 janvier 2013, j'aimerais apporter quelques précisions. Elle m'a demandé de lui fournir un témoignage et j'ai voulu lui faire plaisir, mais je sais qu'en aucun cas il n'y a eu d'autorisation expresse et surtout écrite du gérant M. Jean Eudes X... afin de réunir les lots 38 et 39 » ; que Mme Z..., veuve Y..., ne peut valablement soutenir que la réunion de deux lots constitue une amélioration des lieux ou un élément de confort apprécié in abstracto, à laquelle le bailleur ne pouvait s'opposer ; que la réunion des deux lots et l'absence d'accord écrit du bailleur sont établis ; que le tribunal d'instance ne pouvait, d'une part, retenir que cette réunion des lots constitue bien un changement des lieux et qu'il n'est ni allégué ni démontré que les locataires ont obtenu l'accord écrit de leur propriétaire avant de procéder au changement des lieux et que le manquement à cette obligation d'obtenir un écrit avant de procéder au changement des lieux est établi, et d'autre part, cependant, en retenant l'ancienneté de la réunion des lots, l'absence de protestation du bailleur et en faisant prévaloir les deux attestations des autres locataires de l'existence d'un accord oral du bailleur sur les attestations contraires écartées en raison de leur caractère familial, conclure que la locataire n'est pas de mauvaise foi et ne peut être déchue de son droit au maintien dans les lieux ; qu'en effet, le bail exige un accord écrit du bailleur, qui n'a jamais été donné, et qu'en conséquence, cette violation manifeste et durable dans le temps d'une obligation précisée dans le bail ne peut conduire qu'à reconnaître la mauvaise foi de la locataire ; que les griefs tirés la domiciliation d'une activité commerciale de la petite-fille de la locataire ou de l'hébergement de M. E...sont surabondants ; qu'il y a lieu, dès lors, d'infirmer le jugement entrepris, qui a mal apprécié la gravité des faits, et de prononcer la déchéance du droit au maintien dans les lieux de Mme Z..., veuve Y... ; que celle-ci est donc occupante sans droit ni titre depuis ce jour et non depuis le 30juin 2012, date d'effet du congé comme les appelants le demandent ; que son expulsion avec le concours de la force publique sera ordonnée ; qu'il n'y a pas lieu de majorer l'indemnité d'occupation qui restera équivalente au montant du loyer contractuel majoré des charges ; que cette indemnité d'occupation sera due à compter de ce jour jusqu'à libération effective des lieux ; qu'il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'il n'y a pas lieu, en cause d'appel, d'examiner la demande d'exécution provisoire, qui n'a pas d'objet.
1) ALORS QUE l'exécution par le locataire de travaux sans autorisation du bailleur ne justifie pas que soit prononcée la déchéance du droit au maintien dans les lieux lorsque ces travaux constituent une amélioration des lieux loués ; qu'en se bornant à affirmer que Mme veuve Y... ne pouvait valablement soutenir que la réunion de deux lots constitue une amélioration des lieux à laquelle le bailleur ne pouvait s'opposer sans autrement justifier en fait cette appréciation, la cour d'appel a procédé par voie de simple affirmation et violé l'article 455 du code civil.
2) ALORS QUE les transformations des lieux loués effectuées par le locataire qui n'ont pas eu d'effets préjudiciables pour le bailleur mais lui ont, au contraire, été profitables comme aboutissant à un confort supérieur ou à une meilleure habitabilité et à leur conférer une plus-value, ne peuvent constituer le locataire comme étant de mauvaise foi et entraîner sa déchéance du maintien dans les lieux ; que, dans ses conclusions d'appel n° 2 (p. 5, avant dernier al.), Mme veuve Y... avait fait valoir que la transformation litigieuse ne causait pas de préjudice au bailleur et lui permettait même d'obtenir un bien ayant acquis une valeur vénale plus importante ; qu'en se bornant à retenir que Mme veuve Y... ne pouvait valablement soutenir que la réunion des deux lots qui lui étaient loués constitue un élément de confort apprécié in abstracto, à laquelle le bailleur ne pouvait s'opposer, sans justifier non plus en quoi l'exposante n'était pas fondée à se prévaloir de la réunion ancienne de ces deux lots, dont il n'était ni allégué ni constaté qu'elle ait été irréversible, quand celle-ci était manifestement profitable au bailleur comme ayant eu pour effet d'accroître concrètement le confort et l'habitabilité des lieux loués et de leur conférer une indéniable plus-value, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1743 du code civil.
3) ALORS QUE dans écritures d'appel n° 2 (p. 5, al. 1 et 2), Mme veuve Y... avait soutenu que le bailleur ne pouvait ignorer que la pièce supplémentaire qu'elle avait louée avait vocation à être adjointe au logement existant qu'elle occupait, comme étant destinée à y loger ses enfants et, en particulier, sa fille handicapée, et que celui-ci n'ayant élevé aucune protestation pendant toutes ces années devait être réputé avoir donné son consentement aux changements opérés ; qu'en retenant la mauvaise foi de Mme Y... du seul fait que, contrairement aux stipulations du bail, aucun accord écrit n'avait été donné par le bailleur pour la réunion des lots loués sans rechercher si, comme elle y avait été invitée, l'absence de protestation du bailleur pendant plus de 25 ans n'était pas de nature à caractériser l'absence d'opposition de ce dernier quant aux changements opérés dans les lieux, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1763 du code civil.
4) ALORS QU'en tout état de cause, en cas de travaux effectués par le locataire sans que le bailleur ait donné son autorisation par écrit contrairement aux stipulations du bail mais sans pour autant manifester son opposition à ces travaux, il doit être tenu compte, pour l'appréciation de la gravité de la faute imputée au locataire et de la bonne ou mauvaise foi de celui-ci, conditionnant son maintien dans les lieux, de l'ancienneté des travaux effectués, de la durée des relations contractuelles, de l'occupation paisible et du respect par le locataire de ses obligations ainsi que de l'existence ou non d'une demande, par le bailleur, de remettre les lieux en l'état et de l'attitude alors adoptée par le locataire ; que, dans ses écritures d'appel n° 2 (p. 6, al. 1 à 4), Mme veuve Y... avait expressément invité la cour d'appel à prendre en considération le fait que les lieux loués avaient été occupés paisiblement et de bonne foi pendant 54 ans ainsi que l'ancienneté de la transformation des lieux à laquelle le bailleur ne s'était jamais formellement opposé et avait fait valoir que l'éventualité d'une remise en état des lieux en l'état antérieur à la réunion des lots n'avait jamais été proposée ni même envisagée ; qu'en se contentant de déduire l'existence d'une violation manifeste et durable dans le temps, par Mme veuve Y..., d'une obligation précisée dans le bail, faisant obstacle à son maintien dans les lieux, de ce que l'exposante n'avait pas recueilli l'accord écrit du bailleur pour la réunion des lots litigieuse sans tenir aucun compte de ces différents éléments de nature à exclure toute mauvaise foi de l'exposante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1165 et 1743 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-21500
Date de la décision : 22/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 22 sep. 2016, pourvoi n°15-21500


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21500
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award