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21/09/2016 | FRANCE | N°15-22338

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 septembre 2016, 15-22338


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 mai 2015), que la société Spie Sud-Ouest s'est vue confier, suivant marché signé par la société BJCM, maître d'ouvrage délégué, et par la société Finamur, crédit-bailleur, l'exécution de divers travaux de construction pour un prix forfaitaire et global ; qu'un différend ayant opposé les parties lors de la présentation du décompte définitif, la société Spie Sud-Ouest a, en application de l'artic

le 10.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), saisi, par requête...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 mai 2015), que la société Spie Sud-Ouest s'est vue confier, suivant marché signé par la société BJCM, maître d'ouvrage délégué, et par la société Finamur, crédit-bailleur, l'exécution de divers travaux de construction pour un prix forfaitaire et global ; qu'un différend ayant opposé les parties lors de la présentation du décompte définitif, la société Spie Sud-Ouest a, en application de l'article 10.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), saisi, par requête, le président d'un tribunal de grande instance en désignation d'un "expert arbitre" ; que ce dernier a rendu le 19 juin 2012 une sentence arbitrale, condamnant la société Finamur à verser à la société Spie Sud-Ouest une certaine somme ; que, par acte du 17 juillet 2012, la société Finamur a assigné celle-ci en annulation de cette sentence ;

Attendu que la société Finamur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable le recours ;

Attendu que l'arrêt relève que la société Spie Sud-Ouest a demandé à l'arbitre de se prononcer sur la nature et l'étendue de son investiture, que celui-ci a fait connaître aux parties qu'il interviendrait en qualité d'arbitre et non d'expert et qu'à ce titre, il rendrait une sentence arbitrale, que l'attention des parties a été attirée à différentes reprises sur cette difficulté, que le conseil de la société Finamur n'a pas élevé de contestation et laissé la procédure arbitrale suivre son cours ;

Attendu que c'est par une interprétation de la clause contractuelle litigieuse, que ses termes ambigus rendaient nécessaire, que la cour d'appel a estimé que les parties avaient entendu soumettre la résolution de leur différend à l'arbitrage ; que le moyen, qui, en ses deux dernières branches, critique des motifs surabondants de l'arrêt, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Finamur aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Spie Sud-Ouest la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société Finamur

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR « déclar(é) irrecevable le recours en annulation formé par la société FINAMUR à l'encontre de la sentence arbitrale rendue par M. X... le 19 juin 2012 »,

AUX MOTIFS QUE « selon l'article 1466 du code de procédure civile, la partie qui, en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir ; que l'article 10.3 du CCAP dispose que toutes les contestations se rapportant au marché concerné qui ne pourraient être réglées amiablement seront soumises dans un premier temps à l'arbitrage d'un expert désigné par requête sur ordonnance du président du tribunal de grande instance, et dans un deuxième temps, à la compétence du tribunal de grande instance du lieu du siège social ou du domicile du maître de l'ouvrage, et ce, nonobstant toute clause attributive de compétence qui pourrait figurer dans les lettres ou autres pièces émanant de l'entreprise ; que cette clause, en dépit de l'ambiguïté et de l'imprécision de sa rédaction, laisse apparaître que les parties ont entendu instituer un dispositif permettant de soumettre, dans un premier temps, la résolution des différends nés à l'occasion de l'exécution du contrat, à l'arbitrage d'un expert désigné par le président du tribunal de grande instance de MONTPELLIER ; que s'agissant de la mission effectivement confiée à Monsieur X... dans l'ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de MONTPELLIER le 28 mai 2010, force est de constater qu'elle était elle-même équivoque, en ce que, d'un côté, elle invitait notamment l'expert-arbitre à statuer sur les prétentions formées par la société SPIE SUD OUEST concernant les retours qu'elle a subis pour l'exécution de ses lots au regard des dispositions conventionnelles initialement établies et, de l'autre, à proposer en conséquence un compte final permettant la liquidation des sommes éventuellement dues entre les seules parties à la mission d'arbitrage ; que toutefois, et même si elle n'a pas modifié le libellé de la mission confiée à l'arbitre expert, l'ordonnance de référé du 9 septembre 2010, rendue sur un recours en rétractation présenté par la société FINAMUR, précise qu'au vu de la rédaction de l'article 10.3 du cahier des CCAP, l'expression utilisée "arbitrage d'un expert" confère à celui-ci le rôle d'un arbitre, lequel rendra par conséquent une sentence arbitrale ; que selon les énonciations de la sentence arbitrale, il apparaît que lors de la réunion d'arbitrage du 2 mars 2012, a été évoquée la question de l'étendue de la mission de l'expert en réponse à un dire de la société SPIE SUD OUEST ; qu'à cette occasion, il a été acté que "M. X... intervient dans cette affaire en qualité d'arbitre et non d'expert ; qu'à ce titre, il ne sera pas déposé un rapport mais une sentence arbitrale, l'arbitre intervenant tel un juge privé" ; que la société FINAMUR, qui disposait de la faculté de saisir l'arbitre d'une contestation relative à l'étendue de son pouvoir juridictionnel, en application de l'article 1465 du code de procédure civile, s'en est abstenue ; que la sentence relève expressément que l'avocat de la société FINAMUR n'a pas contesté que la mission de Monsieur X... soit une mission d'arbitrage ; qu'il résulte des éléments qui précèdent qu'en s'abstenant d'invoquer en temps utile l'absence de pouvoir juridictionnel de l'arbitre désigné et en laissant la procédure arbitrale suivre son cours, alors que l'attention des parties avait été attirée à différentes reprises sur cette difficulté, la société FINAMUR a enfreint, sans motif légitime, les exigences de l'article 1466 susvisé ; qu'il s'ensuit qu'elle doit être considérée comme ayant renoncé au droit de se prévaloir de toute contestation quant à l'étendue du pouvoir juridictionnel de l'arbitre et sera, en conséquence, déclarée irrecevable dans son recours » (arrêt pp. 7 et 8) ;

ALORS QUE 1°), il est interdit au juge de dénaturer les éléments versés aux débats ; que l'article 10.3 intitulé « Contentieux » du CCAP liant la société SPIE SUD OUEST aux sociétés FINAMUR et IMMOBILIERE BJCM, prévoyait que « toutes les contestations se rapportant au présent marché et qui ne pourraient être réglées amiablement seraient soumises : - dans un premier temps : à l'arbitrage d'un expert désigné sur requête sur ordonnance du Président du tribunal de grande instance de MONTPELLIER sur la liste des experts du bâtiment inscrits auprès de la cour d'appel de MONTPELLIER, ses honoraires seront partagés à 50/50 par les deux parties, - dans un deuxième temps : à la compétence du tribunal de grande instance du lieu du siège du domicile du maître de l'ouvrage et ce nonobstant toutes clauses attributives de compétence qui pourraient figurer dans les lettres ou autres pièces émanant de l'entreprise » ; qu'il en résultait clairement, et sans équivoque, que les contestations non résolues amiablement entre les parties devaient être, dans un premier temps, soumises à l'arbitrage d'un expert et, dans un second temps, soumises au tribunal de grande instance ; qu'il n'était pas indiqué que cette juridiction interviendrait exclusivement dans le cadre d'un recours contre la décision de l'expert, de sorte que le tribunal de grande instance conserve sa pleine compétence pour statuer sur le bien-fondé de ces contestations lorsqu'il est saisi ; qu'en jugeant cependant que la rédaction de l'article 10.3 du CCAP aurait été ambiguë et imprécise, pour affirmer, sous couvert d'interprétation, que les parties auraient entendu instituer un dispositif permettant de soumettre, dans un premier temps, la résolution des différends nés à l'occasion de l'exécution du contrat, à l'arbitrage d'un expert ayant le rôle d'un arbitre, et rendant par conséquent une sentence arbitrale, la cour d'appel a dénaturé l'article 10.3 du CCAP et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS QUE 2°), il est interdit au juge de dénaturer les éléments versés aux débats ; que la cour d'appel constate que, s'agissant de la mission confiée à Monsieur X... dans l'ordonnance du 28 mai 2010, celle-ci aurait été équivoque, en ce que, d'un côté, elle invitait notamment l'expert-arbitre « à statuer sur les prétentions formées par la société SPIE SUD OUEST concernant les retours qu'elle a subis pour l'exécution de ses lots au regard des dispositions conventionnelles initialement établies » et, de l'autre, « à proposer en conséquence un compte final permettant la liquidation des sommes éventuellement dues entre les seules parties à la mission d'arbitrage » (arrêt p. 7) ; qu'en statuant ainsi, quand il résulte de l'ordonnance concernée que la cour d'appel n'y a pas confié à Monsieur X... la mission de « statuer » sur les prétentions de la société SPIE SUD OUEST, ce qui justifiait, selon la cour d'appel, le caractère juridictionnel de la mission, mais seulement d'« indiquer si les prétentions formées par la société SPIE SUD OUEST concernant les retards qu'elle a subis pour l'exécution de ses lots au regard des dispositions conventionnelles initialement établies sont réelles » (ord. p. 1), la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance rendue le 28 mai 2010 par le président du tribunal de grande instance de MONTPELLIER et violé l'article 1134 du code civil ;

ALORS QUE 3°), l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; qu'en se fondant sur l'ordonnance de référé rendue le 9 septembre 2010 sur un recours en rétractation présenté par la société FINAMUR, affirmant qu'au vu de la rédaction de l'article 10.3 du CCAP, l'expression « arbitrage d'un expert » conférait à Monsieur X... le rôle d'un arbitre, pour en déduire que ce dernier avait rendu une sentence arbitrale, quand cette ordonnance de référé n'avait pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, la cour d'appel a violé l'article 488 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-22338
Date de la décision : 21/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 sep. 2016, pourvoi n°15-22338


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.22338
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