LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 443-7, alinéa 3, du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-152 du19 février 2001, devenu l'article L. 3332-12 du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 2 mars 2000, la société Laboratoires 3M santé, devenue la société 3M France, a conclu un accord de plan d'épargne d'entreprise avec la délégation du personnel au comité central d'entreprise prévoyant un abondement de 100 % des versements volontaires effectués par les salariés cadres, et de 4 % des versements des salariés non-cadres ; que M. Y... et seize autres salariés non-cadres ont saisi le 5 septembre 2008 la juridiction prud'homale d'une demande d'indemnisation de leur préjudice résultant du refus par l'employeur de renégocier l'accord au regard de l'article L. 443-7 dans sa rédaction issue de la loi du 19 février 2001 relative à l'épargne salariale, les alinéas 3 et 4 insérés dans cet article étant devenus respectivement les articles L. 3332-12 et L. 3332-13 du même code, ainsi que de la violation du principe d'égalité de traitement ; que le syndicat Force ouvrière (FO) 3M santé est intervenu volontairement à l'instance ;
Attendu que pour dire que les dispositions de l'article L. 443-7 du code du travail telles que résultant de la loi du 19 février 2001 étaient d'application immédiate et que l'accord du 2 mars 2000 sur l'épargne salariale au sein de la société Laboratoires 3M santé, devenue 3M France, était contraire aux dispositions de l'article précité, déclarer les demandes d'indemnisation recevables et condamner la société à verser à chaque salarié et au syndicat FO 3M santé des dommages-intérêts, l'arrêt retient que ces dispositions présentent un caractère d'ordre public social en sorte qu'elles ne pouvaient que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur alors qu'aucune disposition transitoire n'était prévue et que le législateur n'avait pas entendu expressément réserver l'application de cet article aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale en application d'accords conclus postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi ;
Attendu, cependant, qu'aux termes de l'article 2 du code civil, la loi ne dispose que pour l'avenir ; qu'il en résulte qu'en l'absence de modification, autre que de forme, de l'accord au sens de l'article L. 3322-6 du code du travail instaurant un plan d'épargne d'entreprise, et de nouveau dépôt de cet accord auprès de l'administration du travail, les dispositions de cet accord ne peuvent être contestées qu'au regard des dispositions légales en vigueur au moment de sa conclusion ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'elle avait constaté que le plan d'épargne d'entreprise résultait d'un accord signé le 2 mars 2000 au sein du comité central d'entreprise conformément aux articles L. 443-1 et R. 443-1 du code du travail alors applicables, lequel n'a pas été dénoncé, ce dont il résultait que celui-ci, conforme aux dispositions législatives en vigueur lors de sa conclusion, ne pouvait être contesté au regard des dispositions postérieures de l'article L. 3332-12 du code du travail issues de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001, lesquelles ne sont pas d'ordre public absolu, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société à payer, d'une part, à chacun des salariés une somme à titre de dommages-intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement et une autre sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, d'autre part, au syndicat FO 3M santé des sommes sur le fondement de l'article L. 2132-3 du code du travail et de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 juillet 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Frouin, président et par Mme Piquot, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société 3M France.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR que les dispositions de l'article L. 443-7 du Code du travail telles que résultant de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001 étaient d'application immédiate, dit que l'accord du 2 mars 2000 sur l'épargne salariale au sein de la société LABORATOIRES 3M SANTE devenue la société 3M FRANCE, était contraire aux dispositions de ce texte, déclaré les demandes d'indemnisation des demandeurs recevables, condamné la société 3M FRANCE à verser à chaque salarié des dommages et intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement et en application de l'article 1147 du Code civil, condamné la société 3M FRANCE à verser des dommages et intérêts au syndicat FO 3M SANTE sur le fondement de l'article L. 2132-3 du Code du travail, et condamné ladite société à verser une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à chaque salarié et au syndicat FO 3M SANTE,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'accord d'épargne d'entreprise du 2 mars 200 [0] a prévu, en son article 6-1, que les versements de l'entreprise sont fixés à 100 % des versements volontaires effectués par les salariés cadres, à l'exclusion des primes d'intéressement et à l'exception des premiers 500 fr. pour lesquels l'abondement est fixé à 200 %, tandis que l'article 6-2 précise que les salariés non-cadres bénéficieront d'un abondement de 4 % des versements volontaires. L'article 14 de la loi numéro 2001-152 du 19 février 2001 a introduit à l'article L. 443-7 du code du travail l'alinéa suivant : « la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier ». Il convient de tenir ici pour reproduites, comme particulièrement pertinentes, les considérations des premiers juges qui ont démontré que les dispositions de cet article présentent un caractère d'ordre public social en sorte qu'elles ne peuvent que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur, alors qu'aucune disposition transitoire n'est prévue et que le législateur n'a pas entendu expressément réserver l'application de cet article aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale. Les débats parlementaires qui ont précédé le vote de cette loi visaient à favoriser que la modulation mise en oeuvre permette de prévoir un taux d'abondement plus favorable pour les catégories professionnelles les moins bien rémunérés, permettant effectivement de traiter plus favorablement les ouvriers ou les employés que les cadres, dans le but d'améliorer la condition des salariés les moins favorisés. De même, les motifs visant à démontrer que l'article L 443-7 devenu l'article L 3332-12 du code du travail, en prévoyant la prohibition de tous les cas où il serait constaté l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération du salarié, ont manifesté la volonté du législateur d'interdire toute possibilité pour un salarié percevant un salaire plus élevé qu'un autre de bénéficier d'un taux d'abondement supérieur, puisqu'il ne peut en aucun cas être croissant. Là encore, la cour doit reprendre à son compte les motifs des premiers juges qui ont constaté qu'il existait au sein de la société un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés en conséquence de quoi cette société avait commis une faute par la violation des dispositions impératives d'ordre public de l'article L3 1332-12 du code du travail dont les effets concernaient l'intégralité des salariés et non une partie d'entre eux en instaurant une modulation de l'abondement prohibée par ces dispositions. 2. sur le préjudice des salariés. Par des motifs tirés des dispositions de l'article 2224 du Code civil et de la loi du 17 juin 2008 le conseil des prud'hommes a estimé qu'il convenait de rejeter l'exception de prescription, en sorte que le délai de cinq ans n'est susceptible de s'appliquer qu'à compter du 19 juin 2008 et que les salariés pouvaient agir en responsabilité à l'encontre de la société jusqu'au 19 juin 2013 dès lors qu'à cette date le délai de 30 ans ne serait pas expiré. Sa démonstration sera reprise au compte de la cour. Les dispositions critiquées, doivent faire l'objet d'un examen pour vérifier concrètement la réalité et la pertinence des disparités existantes entre les cadres et les non-cadres en vérifiant, en particulier, que la différence de traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d'exercer ses fonctions, à l'évolution des carrières ou aux modalités de rémunération. Seul le niveau moyen des rémunérations permet de constater s'il existe un rapport croissant entre les indices hiérarchiques et la rémunération et l'appréciation de la légalité de l'accord au regard de l'article L3332-12 ne peut avoir lieu qu'au niveau de l'entreprise. La grille de salaires de la convention collective de l'industrie pharmaceutique et les niveaux moyens de rémunération versée dans l'entreprise, qui sont communiquées actuellement lors des négociations annuelles obligatoires permettent de constater l'existence d'un rapport croissant et de manière particulièrement nette. En effet, pour les cadres, l'abondement augmente encore selon le niveau hiérarchique et donc avec le niveau de salaire. Par ses effets, l'accord entraîne une modulation croissante selon la rémunération des salariés. Jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, mais celle-ci a été versée de manière indifférenciée à tous les salariés à compter de cette année-là si bien qu'elle ne pouvait plus fonder les disparités anormales en assurant le maintien d'avantages dérogatoires pour les cadres au niveau du plan d'épargne entreprise. En outre, l'article précité prohibe strictement toute contrepartie de la durée de présence dans l'entreprise sous forme d'épargne salariale puisque l'interdiction de substituer l'abondement aux éléments de rémunération prohibe de rétribuer le temps de travail par le niveau de l'abondement. La réparation de la méconnaissance de l'égalité de traitement doit constituer dans le rétablissement de l'égalité l'allocation salariée défavorisée de dommages-intérêts correspondant à leur préjudice qui est équivalent à la perte d'une chance de n'avoir pas pu bénéficier d'un système de plans d'épargne entreprise aussi avantageux que celui mis en oeuvre pour les cadres. Par ailleurs, les salariés ont attendu huit ans pour agir • en justice et réparer la violation de l'égalité. Ce retard à agir les concerne seulement et la cour ne peut suivre dans ces évaluations les salariés qui aboutissent à un préjudice virtuel de 12333 €, alors que cette somme s'avère excessive pour compenser l'aléa subi. De manière subsidiaire, et avec un raisonnement parfaitement loyal, la société propose de retenir une somme de dommages-intérêts de 8. 688 € que la cour adoptera pour chaque salarié. En outre chacun d'entre eux devra recevoir une somme de 200 € pour les frais de l'article 700 du code de procédure civile et le syndicat Force Ouvrière de la société, également intervenu à la procédure devant cette cour aux côtés des salariés, devra se voir allouer une somme de 500 € sur le même fondement, outre celle de 1000 € de dommages-intérêts, son intervention au débat s'avérant utile alors que le préjudice à l'intérêt collectif de la profession a existé et que de manière supplémentaire, ce syndicat avait intérêt à défendre devant la juridiction prud'homale, les motifs à cet égard des premiers juges étant tenus pour reproduits également » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « A-Sur l'application de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001, l'article 14 de la Loi n'2001-152 du 19/ 02/ 2001 a introduit à l'article L. 443-7 du Code du travail, l'alinéa suivant : " La modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L. 443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier. " ; que les contrats demeurent régis par la loi en vigueur au jour de leur conclusion ; que la société 3M FRANCE invoque l'antériorité de l'accord relatif à l'épargne salariale au regard de la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 afin de dénier son application au sein de l'entreprise ; qu'aux termes de l'article 6 du Code civil, on ne peut déroger aux lois qui intéressent l'ordre public ; que le contrat reste ainsi régi par la loi en vigueur au jour de sa conclusion sous réserve des lois d'ordre public ; que conformément aux principes généraux du droit du travail, l'ensemble des dispositions législatives ou réglementaires édictées dans le domaine du droit du travail présentent un caractère d'ordre public, ainsi que l'a considéré le Conseil d'Etat (Avis, Assemblée Générale, 22 mars 1973) ; que cette notion d'ordre public social commande tant le principe de faveur que le principe de l'application immédiate des dispositions de droit du travail sans qu'il soit nécessaire qu'elles prévoient cette application immédiate, et sauf report de la date d'entrée en vigueur expressément prévue par l'autorité normative ; que cette règle permet seule d'assurer le principe de sécurité juridique et d'égalité des employeurs et salariés afin d'éviter que lors de l'entrée en vigueur d'une loi comprenant des dispositions en matière du Code du travail, chaque entreprise dispose de sa propre appréciation du caractère d'ordre public ou non de chaque disposition de la loi nouvelle ; que les effets d'une loi comportant des dispositions d'ordre public social ne peuvent que recevoir une application immédiate dès son entrée en vigueur ; que le caractère d'ordre public d'une disposition ne dépend nullement de son application obligatoire ou facultative ; qu'en effet, le cadre juridique d'ordre public s'applique dès lors qu'un salarié entre dans son champ d'application ; que le moyen soulevé par la société 3M FRANCE sur ce point tend à confondre le caractère obligatoire d'une règle et son caractère d'ordre public qui prohibe toute dérogation ; que la Loi n° 2001-152 du 19/ 02/ 2001 ne comprend aucune disposition transitoire et le législateur n'a pas entendu expressément réservé l'application de l'article L. 443-7 du Code du travail aux salariés pouvant bénéficier du dispositif de l'épargne salariale en application d'accords conclus postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi, ce qui se conçoit aisément au regard du principe d'égalité ; que le caractère d'ordre public de l'article L. 443-7 du Code du travail ne peut être valablement contesté au motif qu'il aurait pour effet de rendre contraire à l'ordre public social les règles relatives à l'intéressement et à la participation ; qu'une nouvelle fois, la société 3M FRANCE confond le caractère d'ordre public d'une disposition législative et les effets produits par celle-ci ; que le fait que l'article L. 443-7 du Code du travail prohibe la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise au titre de l'épargne salariale qui aurait pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié croissant avec la rémunération de ce dernier, ne vaut que pour le dispositif d'épargne salariale ; que la qualification d'ordre public ne saurait conférer à cette règle le statut d'un principe général du droit applicable en toute matière ; que l'article 14 de la Loi n'2001-152 du 19/ 02/ 2001 entre bien dans le domaine du droit du travail et revêt donc un caractère d'ordre public par son essence même ; qu'en outre, au regard des débats parlementaires, il est établi que le nouvel alinéa de l'article L. 443-7 du Code du travail visait à favoriser que la modulation mise en oeuvre permette de prévoir un taux d'abonde ment plus favorable pour les catégories professionnelles les moins bien rémunérées, permettant de traiter plus favorablement les ouvriers ou employés que les cadres ; que l'esprit de la disposition législative litigieuse est donc d'améliorer la condition des salariés les moins favorisés en leur permettant de bénéficier d'un taux d'abondement de l'employeur plus intéressant ; qu'au regard de ces éléments, il convient de constater que l'article 14 de la Loi n'2001-152 du 19/ 02/ 2001 ayant introduit un alinéa 3 à l'article L. 443-7 du Code du travail, présente un caractère d'ordre public de sorte que ses effets étaient immédiatement applicables au sein des entreprises dès l'entrée en vigueur de la loi sans que l'existence d'accords antérieurs relatifs à l'épargne salariale ne puisse y faire obstacle ; B-Sur la violation de l'article L. 443-7 devenu L. 3332-12 du Code du travail, l'avis de l'URSSAF sur la validité de l'accord sur l'épargne salariale au sein de la société 3M FRANCE est indifférent à l'appréciation que la juridiction peut en faire ; qu'il y a lieu de rappeler que le Conseil de prud'hommes n'est liée par l'avis d'aucune administration ; que l'article L. 443-7 du Code du travail indique que la modulation éventuelle de l'abondement ne peut " en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié croissant avec la rémunération de ce dernier ; qu'en prévoyant la prohibition de tout cas où il serait constaté l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération du salarié, le législateur a sans ambiguïté souhaité interdire toute possibilité pour un salarié percevant un salaire plus élevé qu'un autre de bénéficier d'un taux d'abondement supérieur ; qu'ainsi, le taux d'abondement peut être décroissant ou égal en cas d'élévation dans la grille des rémunérations, il ne peut en aucun cas être croissant ; que l'article L. 443-7 du Code du travail n'interdit pas seulement l'existence de règles systématiques prévoyant un taux d'abondement plus élevé à proportion de la rémunération mais également tout cas où un salarié pourrait se trouver dans cette situation ; que le fait que le taux d'abondement des salariés non-cadres soit identique quelque soit le niveau de leur rémunération et que le taux d'abondement des salariés cadres soit également identique quelque soit le niveau de leur rémunération, est hors débat ; qu'en effet, la formulation générale de l'article L. 443-7 du Code du travail vise à prohiber tout rapport croissant entre l'abondement et la rémunération des salariés à l'intérieur d'une même entreprise et non seulement à l'intérieur d'une même catégorie professionnelle ; qu'il résulte des pièces produites aux débats qu'il existe au sein de la société 3M FRANCE des salariés cadres ayant une rémunération supérieure à des salariés non cadres tout en bénéficiant d'un taux d'abondement de l'entreprise de 100 % au lieu de 4 % pour ces derniers ; qu'il est donc établi qu'au sein de la société 3M FRANCE, il existe des cas où l'accord relatif à l'épargne salariale en vigueur aboutit à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés ; qu'en conséquence, la société 3M FRANCE n'a pas appliqué une disposition de manière différenciée entre les salariés qui aurait pu conduire à considérer qu'il avait été mis en oeuvre une inégalité de traitement dès lors que la modulation de l'abondement de l'entreprise est autorisée sous la seule réserve qu'elle ne doit pas aboutir à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement de l'entreprise et la rémunération des salariés ; qu'en revanche, la société 3M FRANCE a commis une faute par la violation des dispositions impératives de l'article L. 443-7 devenu L. 3332-12 du Code du travail, dont les effets concernaient l'intégralité des salariés et non seulement une partie d'entre eux, en instaurant une modulation de l'abondement prohibée par ces dispositions ; C-Sur le préjudice, l'article 2224 du Code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que l'action des salariés ne visent nullement à obtenir un rappel des sommes dues au titre de l'abondement mais constitue une action en responsabilité contractuelle ; qu'antérieurement à la Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'action en responsabilité contractuelle se prescrivait par trente ans et la loi nouvelle a abrégé ce délai à 5 ans ; qu'aux termes de l'article 26 de la Loi du 17/ 06/ 2008, les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu'en conséquence, le délai de cinq ans était susceptible de s'appliquer à compter du 19/ 06/ 2008 sans que l'application des nouvelles dispositions ne puisse avoir pour effet de dépasser le délai de 30 ans ; qu'en l'espèce, le préjudice allégué le plus ancien remonte au 21/ 02/ 2001 ; qu'en application de la Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, les salariés pouvait agir en responsabilité à l'encontre de la société 3M FRANCE jusqu'au 19/ 06/ 2013 dès lors qu'à cette date, le délai de 30 ans ne serait pas expiré ; que les demandes formulées par les salariés ne sont donc pas atteintes par la forclusion et seront déclarées recevables ; (…) D-Sur l'intervention du syndicat Force Ouvrière de la société LABORATOIRES 3M SANTÉ, l'article L. 411-11 devenu L. 2132-3 du Code du travail dispose que les syndicats peuvent devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; qu'en l'espèce, il est établi que la société 3M FRANCE n'a pas appliqué immédiatement les dispositions de l'article L. 443-7 du code du travail résultant de la Loi n'2001-152 du 19/ 02/ 2001 ; qu'il s'ensuit que l'entreprise a maintenu un accord relatif à l'épargne d'entreprise contraire à ces dispositions qui avaient pour but de favoriser les salariés les moins bien rémunérés ; que si les salariés n'ont pas subi de préjudice personnel direct du fait de la non application immédiate de l'article L. 443-7 du Code du travail, celle-ci a causé un préjudice à l'intérêt collectif de la profession que le syndicat Force Ouvrière représente résultant de la distorsion existante entre les salariés de l'entreprise quant à l'abondement de l'employeur, contraire à l'article L. 443-7 du Code du travail depuis 2001 ; qu'en conséquence, il y a lieu de condamner la société 3M FRANCE à verser au syndicat Force Ouvrière la, somme de 1 000 Euros en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif »
1. ALORS QUE l'article L. 3332-12 du Code du travail, ancien article L. 443-7 alinéa 3, issu de l'article 14- III, 2° de la loi n° 2001-152 du 19 février 2001, selon lequel « la modulation éventuelle des sommes versées par l'entreprise ne saurait résulter que de l'application de règles à caractère général, qui ne peuvent, en outre, en aucun cas avoir pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier », n'est pas applicable aux accords instituant un plan d'épargne entreprise conclus avant l'entrée en vigueur de la loi précitée du 19 février 2001 faute de prévision en ce sens du législateur et ne peut en tout cas rendre illicite une clause d'un tel accord licite au regard de la loi en vigueur au moment de sa conclusion ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 2 du Code civil ;
2. ALORS en tout état de cause QUE l'article L. 3332-12 du Code du travail, ancien article L. 443-7 alinéa 3, issu de la loi du 19 février 2001, prohibe seulement les formules de calcul de l'abondement de l'entreprise ayant pour effet de rendre le rapport entre le versement de l'entreprise et celui du salarié ou de la personne visée au troisième alinéa de l'article L443-1 croissant avec la rémunération de ce dernier ; qu'en l'espèce, l'accord de PEE du 2 mars 2000 prévoit un abondement égal à 4 % des versements pour les non-cadres et à 100 % des versements pour les cadres et ne prévoit donc pas un rapport croissant avec la rémunération du salarié, un salarié cadre bénéficiant d'un abondement de 100 % de son versement et un non-cadre d'un abondement de 4 % de son versement quelque soit le montant de leurs salaires respectifs et en particulier même si le cadre perçoit une rémunération inférieure au non-cadre ; qu'en jugeant que cet accord était contraire à l'article L. 3332-12 du Code du travail, au prétexte qu'il existait dans l'entreprise des cadres ayant une rémunération supérieure à des non cadres et qu'il existait ainsi des cas où l'accord aboutissait à permettre l'existence d'un rapport croissant entre l'abondement et la rémunération des salariés, la cour d'appel a violé ce texte ;
3. ALORS QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, ne peuvent statuer par voie de motif dubitatif ; qu'en affirmant que jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, la cour d'appel a statué par un motif dubitatif, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE les juges du fond doivent préciser l'origine des renseignements qui ont servi à motiver leur décision ; qu'en affirmant que jusqu'à l'année 2003, l'abondement semblait justifié principalement par l'exclusion de la prime de vacances pour les cadres, sans préciser l'origine de cette supputation, quand l'exposante contestait expressément les allégations des salariés sur ce point, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
5. ALORS QUE l'employeur faisait valoir que l'abondement supérieur accordé aux cadres dans le cadre de l'accord PEE du 2 mars 2000 constituait la contrepartie de la mise en place pour cette seule catégorie de personnel d'un forfait jours et d'un nombre de jours de RTT inférieur à ceux accordés aux salariés non cadres, le tout en vertu d'un accord du décembre 1999 de réduction et d'aménagement du temps de travail ; qu'en se fondant, pour écarter cette justification, sur l'interdiction légale de substituer l'abondement de l'entreprise sur le PEE aux éléments de rémunération quand cette règle posée à l'article L. 443-7 alinéa 4 devenu L. 3332-13 du Code du travail, issue de la loi du 19 février 2001, n'était pas applicable à l'accord PEE du 2 mars 2000, la cour d'appel a violé le texte susvisé, l'article 2 du Code civil et le principe d'égalité traitement ;
6. ALORS en toute hypothèse QUE l'article L. 443-7 alinéa 4 devenu L. 3332-13 du Code du travail dispose que « les sommes versées par l'entreprise ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, en vigueur dans l'entreprise au moment de la mise en place d'un plan mentionné au présent article ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles » ; que n'est pas contraire à ce texte l'institution d'un abondement supérieur pour les cadres en contrepartie de la mise en place pour cette seule catégorie de personnel d'un forfait jours et d'un nombre de jours de RTT inférieur à ceux accordés aux salariés non cadres ; qu'en affirmant, pour écarter la raison avancée par l'employeur pour justifier la différence de traitement entre cadres et non-cadres quant au montant de l'abondement de l'entreprise au PEE, que le texte susvisé prohibe strictement toute contrepartie de la durée de présence dans l'entreprise sous forme d'épargne salariale puisque l'interdiction de substituer l'abondement aux éléments de rémunération prohibe de rétribuer le temps de travail par le niveau de l'abondement, quand aucune substitution de l'abondement à un élément de rémunération en vigueur ou devenu obligatoire n'était intervenue, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble le principe d'égalité de traitement.