LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 30 septembre 2014), que reprochant à son ancien salarié, M. X..., dont le contrat de travail avait été rompu le 24 juin 2011 et qui avait été relevé de son obligation de non-concurrence le 30 juin de la même année, ainsi qu'à la Société nouvelle hydraulique savoyarde (la société SNHS), créée par ce dernier le 1er août 2011 pour exercer dans le même domaine d'activité, d'avoir démarché sa clientèle par l'envoi de SMS, la société Mecanhydro les a assignés en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale ;
Attendu que la société Mecanhydro fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un acte de concurrence déloyale le fait, pour un ancien d'une entreprise, d'utiliser le fichier clientèle de son employeur, fût-ce en le reconstituant au moyen d'éléments épars et en faisant appel à des réminiscences, afin de démarcher systématiquement la clientèle de son ancien employeur, en prévalant en outre sa qualité d'ancien salarié ; qu'en décidant néanmoins que M. X... ne pouvait avoir commis l'acte de concurrence déloyale consistant à exploiter le fichier clientèle de la société Mecanhydro, dont il avait eu connaissance lorsqu'il avait la qualité de salarié de celle-ci, dès lors que ce fichier ne se trouvait pas sur son ordinateur, mais qu'il s'était servi de son téléphone ou de sa mémoire pour adresser aux clients de la société Mecanhydro des messages téléphoniques écrits (SMS) indiquant : « Bonjour, je suis Patrice l'ancien chef d'atelier de Mecanhydro. J'ai ouvert ma société d'hydraulique dans la ZA du plan Cumin aux Marches. Si un jour vous avez besoin de mes services, passez me voir. Mes coordonnées X... Patrice Ste Pat'hydro Tel 06... mail X... @ gmail. com. Merci et bonne journée Patrice », ce dont il résultait que M. X... s'était servi du fichier clients de la société Mecanhydro, qu'il avait reconstitué, afin d'adresser à ces clients, sur leurs téléphones mobiles, des messages ayant pour objet de les démarcher, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'en se bornant, pour décider que la société Mecanhydro ne démontrait pas que M. X... avait préparé son activité concurrentielle alors qu'il se trouvait encore à son service, à énoncer qu'elle échouait à démontrer que la société SNHS n'avait pas eu le temps ni les moyens, depuis sa création début août 2011, de réaliser les prestations facturées en août et septembre 2011, dès lors que ces factures n'étaient pas produites, sans rechercher si les prestations en cause et leur facturation résultaient du listing des factures de la société SNHS d'août 2011 à février 2012, régulièrement produites aux débats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, le démarchage de la clientèle d'autrui est libre dès lors qu'il ne s'accompagne pas d'un acte déloyal ; qu'ayant relevé qu'il était établi que M. X... n'avait pas utilisé le fichier client de la société Mecanhydro, la cour d'appel a pu retenir qu'il n'avait pas commis d'actes de concurrence déloyale ;
Et attendu, d'autre part, que sous le couvert d'un grief infondé de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des éléments de preuve qui leur étaient soumis, desquels ils ont déduit que la preuve d'une activité concurrente pendant la période où M. X... était encore lié à la société Mecanhydro n'était pas rapportée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Mecanhydro aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... et à la Société nouvelle hydraulique savoyarde la somme globale de 3 000 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Mecanhydro
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Société MECANHYDRO de ses demandes tendant à voir juger que Monsieur X... et la SOCIÉTÉ NOUVELLE HYDRAULIQUE SAVOYARDE (SNHS) s'étaient rendus coupables d'actes de concurrence déloyale à son égard, à les voir condamnés à lui payer la somme de 100. 000 euros à titre de provision, à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, et à voir ordonner une mesure d'expertise ayant pour objet d'établir celui-ci ;
AUX MOTIFS QUE l'exercice d'une activité concurrente par un ancien salarié non tenu par une clause de non-concurrence ne dégénère en concurrence déloyale que s'il est établi que ce dernier a utilisé des moyens déloyaux pour capter la clientèle de son ancien employeur ; qu'ainsi, ni la création le 3 août 2011 par Monsieur X... de la Société SNHS, exerçant une activité concurrente de celle son ancien employeur, la Société MECANHYDRO, ni la circonstance que cette nouvelle société ait compté parmi ses clients des anciens clients de MECANHYDRO, ne sont, en elles-mêmes, révélatrices, compte-tenu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, d'une concurrence déloyale ; que les investigations réalisées par la Société INVESTIGA FRANCE à la demande de la Société MECANHYDRO ne révèlent l'existence d'aucun acte de concurrence déloyale ; qu'il n'est pas établi par les productions que les démissions de salariés enregistrées en 2010 et 2011 au sein de la Société MECANHYDRO résultent d'une action concertée initiée par Monsieur X... ; que Monsieur X... n'ayant été délié que le 30 juin 2011 de la clause de non-concurrence à laquelle il était tenu, il est difficile d'imaginer qu'il aurait pu, avant cette date, alors qu'il ignorait que cette clause serait levée, orchestrer les débuts de l'activité d'une entreprise concurrente ; que les factures d'août et septembre 2011, dont se prévaut MECANHYDRO pour tenter de démontrer que la Société SNHS n'avait pas le temps et les moyens, depuis sa création début août 2011, de réaliser les prestations afférentes, ne sont pas produites ; qu'il ne résulte pas du bon de livraison et des factures et autres pièces produites que ladite société aurait commandé des pièces lorsque Monsieur X... était encore au service de la Société MECANHYDRO et non délié de la clause de non-concurrence à laquelle il était tenu : il n'est pas établi que les pièces référencées DIV120811A visées sur le bon de livraison du 12 août 2011 nécessitaient un délai de livraison supérieur à la durée écoulée depuis le 30 juin 2011, date depuis laquelle Monsieur X... était libre de tous engagements envers son ancien employeur, le délai de livraison des pièces référencées DIV260511D, DIV191011E, DIV191011F, DIV191011G et DIV191011H sur la facture du 31 octobre 2011 n'est pas connu, quant au délai de livraison de la pièce référencée DIV260511E figurant sur cette même facture, il est de 9 semaines, donc compatible avec la date à laquelle Monsieur X... a été délié de ses engagements ; que le matériel nécessaire à l'exécution de la prestation réalisée le premier août 2011 par la société créée par Monsieur X... avait pu être acquis depuis le 30 juin ; que le procès-verbal de constat établi le 19 mars 2012 à la demande de la Société MECANHYDRO ne révèle pas l'existence d'actes de concurrence déloyale ; que l'expert Z...conclut son rapport de mission de la façon suivante : «... Les travaux tendent à conclure d'autre part que, pour décrocher les marchés d'anciens clients MECANHYDRO, M. X... ne s'est pas servi du fichier clients MECANHYDRO, qui ne pourrait avoir d'usage que sur son ordinateur, où il ne figure pas ; pas davantage de sa messagerie électronique. Plus probablement, de son téléphone ou de sa mémoire : rechercher dans l'annuaire 24 clients pour leur faire une offre de services ne pose aucune difficulté pratique... » ; qu'il ne met en évidence aucune manoeuvre déloyale ; que le sms adressé par Monsieur X... à certains clients de MECANHYDRO était libellé en ces termes : « Bonjour, je suis Patrice l'ancien chef d'atelier de Mecanhydro. J'ai ouvert ma société d'hydraulique dans la ZA du plan Cumin aux Marches. Si un jour vous avez besoin de mes services, passez me voir. Mes coordonnées X... Patrice Ste PAT'HYDRO Tel 06... mail X... @ gmail. com. Merci et bonne journée Patrice » ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, les termes de ce courrier informatif sont loyaux, non dénigrants, dénués de confusion avec la Société MECANHYDRO, aucun acte de concurrence déloyale ne pouvant y être décelé ; que c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que les premiers juges ont constaté que la Société SNHS n'avait pas tiré un avantage concurrentiel de la détention du classeur ALPES MÉTAUX, aucune faute ne pouvant être reprochée à Monsieur X... et à la Société SNHS de ce chef ; qu'il est sans intérêt d'ordonner la restitution de ce document, devenu parfaitement inutile ; qu'en définitive, qu'aucun acte de concurrence déloyale n'est établi à l'encontre de la Société SNHS et de Monsieur X..., sans qu'il y ait lieu d'ordonner les productions sollicitées par la société appelante, défaillante dans la fourniture de la preuve qui lui incombe ; qu'il convient donc de débouter la Société MECANHYDRO de toutes ses demandes ;
1°) ALORS QUE constitue un acte de concurrence déloyale le fait, pour un ancien d'une entreprise, d'utiliser le fichier clientèle de son employeur, fût-ce en le reconstituant au moyen d'éléments épars et en faisant appel à des réminiscences, afin de démarcher systématiquement la clientèle de son ancien employeur, en prévalant en outre sa qualité d'ancien salarié ; qu'en décidant néanmoins que Monsieur X... ne pouvait avoir commis l'acte de concurrence déloyale consistant à exploiter le fichier clientèle de la Société MECANHYDRO, dont il avait eu connaissance lorsqu'il avait la qualité de salarié de celle-ci, dès lors que ce fichier ne se trouvait pas sur son ordinateur, mais qu'il s'était servi de son téléphone ou de sa mémoire pour adresser aux clients de la Société MECANHYDRO des messages téléphoniques écrits (SMS) indiquant : « Bonjour, je suis Patrice l'ancien chef d'atelier de Mecanhydro. J'ai ouvert ma société d'hydraulique dans la ZA du plan Cumin aux Marches. Si un jour vous avez besoin de mes services, passez me voir. Mes coordonnées X... Patrice Ste PAT'HYDRO Tel 06... mail X... @ gmail. com. Merci et bonne journée Patrice », ce dont il résultait que Monsieur X... s'était servi du fichier clients de la Société MECANHYDRO, qu'il avait reconstitué, afin d'adresser à ces clients, sur leurs téléphones mobiles, des messages ayant pour objet de les démarcher, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 1382 du Code civil ;
2°) ALORS QU'en se bornant, pour décider que la Société MECANHYDRO ne démontrait pas que Monsieur X... avait préparé son activité concurrentielle alors qu'il se trouvait encore à son service, à énoncer qu'elle échouait à démontrer que la Société SNHS n'avait pas eu le temps ni les moyens, depuis sa création début août 2011, de réaliser les prestations facturées en août et septembre 2011, dès lors que ces factures n'étaient pas produites, sans rechercher si les prestations en cause et leur facturation résultaient du listing des factures de la Société SNHS d'août 2011 à février 2012, régulièrement produites aux débats (pièce n° 29), la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.